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15/02/2017 | FRANCE | N°15/04470

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 15 février 2017, 15/04470


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5



ARRÊT DU 15 FÉVRIER 2017



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/04470



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Janvier 2015 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 14/01171







APPELANTES



Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits et obligations de la société COVEA

RISKS , agissant en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 775 652 126



Représentée par : Me Marie CORNELIE-WEIL de la SELARL CABINET CORNELIE...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRÊT DU 15 FÉVRIER 2017

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/04470

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Janvier 2015 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 14/01171

APPELANTES

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits et obligations de la société COVEA RISKS , agissant en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 775 652 126

Représentée par : Me Marie CORNELIE-WEIL de la SELARL CABINET CORNELIE-WEIL, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 201

Assistée par : Me Carole ROUSSEZ, avocat au barreau de CRETEIL

SARL CIBTP , agissant en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : 394 739 601

Représentée par Me Marie CORNELIE-WEIL de la SELARL CABINET CORNELIE-WEIL, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 201

Assistée par : Me Carole ROUSSEZ, avocat au barreau de CRETEIL

INTIMES

Madame [B] [B] épouse [H]

[Adresse 3]

[Localité 3]

née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 4]

Représentée par Me Véronique KIEFFER JOLY, avocat au barreau de PARIS, toque : L0028

Assistée par : Me Elisabeth LOPEZ, avocat au barreau de CRETEIL

Monsieur [W] [H]

[Adresse 3]

[Localité 3]

né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 5]

Représenté par : Me Véronique KIEFFER JOLY, avocat au barreau de PARIS, toque : L0028

Assisté par : Me Elisabeth LOPEZ, avocat au barreau de CRETEIL

Monsieur [E] [M]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représenté par : Me Christofer CLAUDE de la SELAS CLAUDE & SARKOZY, avocat au barreau de PARIS, toque : R175

Assistée par : Me Guy-Michel BUREAU, avocat au barreau de PARIS, toque : R 175

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, Présidente de chambre et Madame Maryse LESAULT, Conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, présidente de chambre

Madame Maryse LESAULT, conseillère

Madame Valérie GERARD, conseillère

Qui en ont délibéré

Rapport ayant été fait par Madame Maryse LESAULT, conseillère, conformément à l'article 785 du Code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Vidjaya DIVITY

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, présidente de chambre

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, présidente de chambre et par Madame Vidjaya DIVITY, greffier présent lors du prononcé.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Des désordres (fissures), sont survenus en 2004 dans la maison acquise en 1996 par les époux [H] à [Localité 3] (94) [Adresse 3]en 2004, qui ont donné lieu à une déclaration de sinistre auprès de leur assureur la MAIF, laquelle a dans un premier temps dénié sa garantie en l'absence d'arrêté de catastrophe naturelle sur cette commune, à la suite de l'épisode de grande sécheresse de l'été 2003. Les époux [H] avaient alors pris l'avis d'un architecte M. [M] pour déterminer les travaux nécessaires à remédier aux désordres.

Courant 2005 un arrêté préfectoral a étendu à la Commune de [Localité 3] la déclaration de catastrophe naturelle, de sorte que la MAIF a accordé sa garantie dans la prise en charge du sinistre, et des travaux réparatoires ont été confiés par les époux [H] à l'entreprise CIBTP assurée auprès de COVEA RISK pour un montant de l'ordre de 25000€.

Ces travaux n'ayant pas mis fin aux désordres, le cabinet [C] expert d'assureur mandaté par la MAIF, a procédé à des investigations faisant pratiquer un examen des sols par la société UNISOL et des canalisations par l'entreprise CEBAS.

COVEA RISKS a de son côté mandaté le cabinet d'expertise [L] en novembre 2008.

Une expertise judiciaire a été confiée à M.[E] qui a clos son rapport en l'état le 30 avril 2013.

Par jugement rendu le 9 janvier 2015 par le tribunal de grande instance de Créteil a':

-condamné seule la Société CIBTP in solidum avec son assureur, la société COVEA RISKS, à payer aux époux [H] les sommes de :

-254 393,16 € TTC en réparation de leur préjudice matériel avec actualisation selon indice BT 01 de la construction,

-36 000 € en réparation de leur préjudice immatériel,

-4 800 € en réparation du trouble de jouissance subi pendant les travaux de reprise,

-6 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Mis les entiers dépens en ce compris les frais d'expertise mis à la charge des Sociétés CIBTP et COVEA RISKS.

COVEA RISK et son assurée la société CIBTP ont interjeté appel de cette décision.

Par arrêt du 15 JUIN 2016 la cour a ordonné la réouverture des débats, motif pris de ce que les époux [H] avaient vendu entre-temps leur maison concernée par les désordres, et qu'il était nécessaire de vérifier par la production de l'acte authentique de vente leur qualité à agir.

Par dernières conclusions du 29 septembre 2016 les sociétés CIBTP et MMA IARD Assurances Mutuelles et MMA IARD, venant aux droits de COVEA RISKS, demandent à la cour au visa des articles 1792, 1134 et 1147, 1108 et 1315 du code civil, de':

A titre principal

-les déclarer recevables et fondées en leurs demandes,

-juger que'les époux [H] sont dépourvus du droit d'agir à défaut de qualité et défaut d'intérêt pour des prétendues réparations d'une maison dont ils ne sont plus propriétaires, et qu'ils ne sont plus titulaires de l'action en responsabilité décennale du fait de la vente de leur maison,

-déclarer les époux [H] irrecevables en leurs demandes.

A titre subsidiaire de':

-déclarer recevables et biens fondées les Sociétés CIBTP et MMA IARD Assurances Mutuelles et MMA IARD, venant aux droits de COVEA RISKS, en leurs demandes ;

-réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- juger que':

-l'absence d'étude des sols et le mauvais entretien des réseaux d'évacuation sont imputables aux époux [H],

-l'absence d'étude des sols préalablement à tout avis technique et la mauvaise orientation de la solution de reprise prescrite sont imputables à M. [M],

-constater les manquements de M. [M] à son obligation précontractuelle de renseignement et à son obligation contractuelle dans la préconisation de la solution de reprise, dans le cadre du contrat le liant aux époux [H], à titre principal en application de l'article 1792 du code civil et subsidiairement en application des articles 1134 et 1147 du Code civil,

-juger que les parts de responsabilité des époux [H] et de M. [M] dans la réalisation des désordres telles que déterminées par l'Expert judiciaire sont insuffisantes,

-réévaluer à la hausse les parts de responsabilité des Epoux [H] et de M. [M], conformément à l'étendue des désordres qui leurs sont respectivement imputables qui ne saurait, en ce qui concerne M. [M], être inférieure à 70%,

-condamner les époux [H] et M. [M] à payer les sommes correspondants à leur part de responsabilité qui sera déterminée par la Cour,

-juger que la société CIBTP n'est nullement responsable des désordres ayant affecté la maison des époux [H] et l'exonérer de toute part de responsabilité,

-juger que M. [M] et les époux [H] devront relever et garantir la Société CIBTP de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre elle,

-débouter les Epoux [H] de leur demande de réparation de leurs préjudices de jouissance dont celui pour troubles de jouissance pendant les travaux de réfection qu'ils n'auront pas à souffrir du fait de la vente de leur maison,

-débouter en tout état de cause les époux [H] de toute demande en paiement d'une somme représentant le coût des travaux prescrits par l'Expert judiciaire ainsi que de toute autres demandes qui ne se justifient plus, les époux [H] n'étant plus propriétaires de leur maison,

-condamner les époux [H], en cas de réformation du jugement, à rembourser les sommes perçues au titre de l'exécution provisoire majorées des intérêts au taux légal outre leur capitalisation,

-débouter M. [M] de sa demande de dommages et intérêts au titre d'une procédure abusive,

-condamner in solidum les époux [H] et M. [M] à payer aux sociétés CIBTP et MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, venant aux droits de COVEA RISKS, la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-condamner in solidum les époux [H] et M. [M] en tous les dépens y compris ceux du référé et les frais et honoraires taxés de l'Expert judiciaire, dont le recouvrement sera effectué conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

2-Par conclusions du 24 octobre 2016 Mme et M.[H] demandent à la cour au visa des articles 1792 et suivants et 1134 de code civil de :

-confirmer les termes du Jugement entrepris,

En conséquence :

-débouter la société CIBTP, la société COVEA RISK, M. [M] de toutes leurs demandes,

-condamner in solidum la société CIBTP, la société COVEA RISK, M. [M] à leur payer':

- la somme de 254.393,16€'; [dire] que cette somme sera indexée sur l'indice BT01 en prenant pour base le dernier indice publié au jour du dépôt du rapport de M. [E] soit le 30 avril 2013 et pour multiplicateur le dernier indice publié au jour du jugement à intervenir,

- la somme de 36.000€ au titre du préjudice de jouissance,

- la somme de 4.800€ au titre de la perte de jouissance pendant la réalisation des travaux,

- les entiers dépens de l'instance qui comprendront ceux du référé et les frais et honoraires taxés de l'Expert judiciaire dont distraction au profit de Maître Alain CROS Avocat outre la somme de 6.000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant,

-condamner in solidum la société CIBTP, la société COVEA RISK, M. [M] à leur payer la somme de 6 000 € au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel outre les dépens de l'instance d'appel.

- «'ordonner l'exécution provisoire'»

Par conclusions du 19 juillet 2016 M. [M] demande à la cour au visa des articles 122 et 700 du code de procédure civile, 1134, 1792 et suivants du code civil de':

-juger que les époux [H] n'ont plus qualité pour agir en réparation de prétendus vices affectant un pavillon dont ils ne sont plus propriétaires depuis août 2015'; les déclarer irrecevables en leurs demandes,

A titre subsidiaire,

- les en débouter,

-confirmer le jugement entrepris,

-débouter COVEA RISKS, CIBTP et Mme et M.[H] de toutes leurs demandes à son encontre';

Le mettre hors de cause,

-condamner Mme et M.[H] et/ou CIBTP et COVEA RISKS à lui verser la somme de 6000 € à titre de dommages-intérêts pour mise en cause manifestement abusive, et celle de 4000€ au titre de l'article 700,

Plus subsidiairement,

-condamner CIBTP et COVEA RISKS à le garantir de toute condamnation,

-condamner Mme et M.[H] et/ou CIBTP et COVEA RISKS aux entiers dépens avec bénéfice du recouvrement selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture a été prononcée le 8 novembre 2016.

SUR CE,

La Cour,

Sur la demande en paiement de travaux réparatoires

Considérant que la demande principale des époux [H] tend à obtenir le paiement du montant des réparations nécessaires pour faire cesser les désordres affectant la maison par eux acquise en 1996, qui ont donné lieu à une mesure d'expertise judiciaire confiée à M'.[E]';

Considérant que la recevabilité de leurs demandes est contestée par les appelantes et par M. [M] au motif que les époux [H] ont perdu leur qualité à agir à ce titre par suite de la vente de leur maison intervenue par acte authentique du 10 août 2015, soit postérieurement au jugement entrepris, rendu le 9 janvier 2015';

Considérant que les époux [H] soutiennent avoir conservé leur qualité à agir contre les constructeurs et l'assureur, par suite de la clause insérée dans l'acte de vente de leur maison, aux termes de laquelle (pages 10-11)

Le VENDEUR déclare que des désordres sont apparus en juin 2004 sur le BIEN objet des présentes, suite à l'état de sécheresse survenu au cours de l'année 2003 et qui a fait l'objet en 2005 d'un arrêté de catastrophe naturelle pour la Commune de [Localité 3].

Le VENDEUR a chargé l'entreprise CIBTP de travaux visant à remédier aux désordres apparus dans la maison.

Une fois les travaux effectués par ladite Entreprise pour remédier à ces désordres, d'autre désordres sont apparus et une aggravation des désordres que cette Entreprise était censée remédier est apparue.

Une procédure a par conséquent été engagée par le VENDEUR auprès du TGI de CRETEIL et un rapport d'expertise en l'état clos le 30 avril 2013 a été rendu dont copie est annexée aux présentes.

Le Tribunal de Grande Instance a rendu son jugement le 9 janvier 2015 condamnant in solidum la société CIBTP et sa compagnie d'assurances SA COVEA RISKS (jugement prévoyant l'exécution provisoire). Ces deux sociétés ont depuis interjeté appel de ce jugement ainsi déclaré par le VENDEUR.

Depuis ces travaux litigieux, aucun travaux visant à remédier à ces désordres n'a été entrepris par le VENDEUR, ce que l'ACQUEREUR reconnaît et déclarant en faire son affaire personnelle.

Il est expressément convenu entre les parties que le VENDEUR restera partie à la procédure en cours et ne subrogera pas l'ACQUEREUR dans la suite de cette procédure.

Que les époux [H] indiquent qu'ils se sont ainsi clairement réservé le droit de poursuivre la procédure en cours et que leur propriété a été vendue en l'état sans travaux de réparation'; qu'ils précisent s'être ainsi réservé la poursuite d'une action judiciaire personnelle, fondée sur la garantie décennale, et visant non pas à la réparation de leur maison, mais à l'allocation de dommages-intérêts';

Considérant que selon les dispositions de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile,'les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif'; qu'il appartient par ailleurs au juge conformément à ce que prescrit l'article 12 dudit code de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables'; que toutefois il ne peut changer la dénomination ou le fondement juridique lorsque les parties, en vertu d'un accord exprès et pour les droits dont elle ont la libre disposition, l'ont lié par les qualifications et points de droit auxquelles elles entendent limiter le débat';

Considérant que selon les termes du dispositif de leurs dernières conclusions les époux [H] demandent cependant expressément à la cour de':

«'condamner in solidum de la société CIBTP, la société COVEA RISK et M. [M] à leur payer':

- la somme de 254.393,16€'; [dire] que cette somme sera indexée sur l'indice BT01 en prenant pour base le dernier indice publié au jour du dépôt du rapport de M. [E] soit le 30 avril 2013 et pour multiplicateur le dernier indice publié au jour du jugement à intervenir,

- la somme de 36.000€ au titre du préjudice de jouissance,

- la somme de 4.800€ au titre de la perte de jouissance pendant la réalisation des travaux'»,

Qu'agissant au visa de l'article 1792 du code civil et sur le fondement de l'action en garantie décennale, la recevabilité de leurs demandes est nécessairement attachée à la qualité de maître d'ouvrage'propriétaire ; qu'ils ont cependant perdu cette qualité par transfert de la propriété de leur maison à leurs acquéreurs'; que la clause de l'acte de vente citée ne vise ni ne pouvait d'ailleurs en aucun cas viser une conservation par les époux [H] de la qualité de maître d'ouvrage'; qu'il ne résulte pas de l'acte de vente que l'acquéreur ait déclarer renoncer à la transmission de plein droit de la garantie décennale des constructeurs attachée, de par l'effet de la loi, au transfert de propriété du la maison';

Que l'action des époux [H] est sans équivoque une action à fin de réparation se fondant sur l'évaluation expertale des travaux de reprise des fondations nécessaires à remédier aux désordres, et demandant au surplus l'actualisation de l'indemnisation en fonction de l'indice BT 01, ce qui vise expressément l'indexation de travaux réparatoires, alors enfin qu'il est même demandé une indemnisation au titre de la perte de jouissance pendant la réalisation des travaux, qu'ils ne feront jamais exécuter';

Considérant en conséquence que les époux [H] sont irrecevables à agir au titre de la garantie décennale';

Considérant que les motifs qui précèdent sont également exclusifs de la recevabilité de leur demande formée subsidiairement sur le fondement contractuel puisque la demande de condamnation à percevoir le coût de travaux qui ne pourront pas être réalisés puisqu'ils ne seront plus propriétaires du bien, est dépourvue d'objet';

Considérant en effet qu'est inopérante l'argumentation selon laquelle en vendant leur maison en l'état, ils ont renoncé à percevoir le prix qu'ils pouvaient en espérer si les désordres avaient été supprimés'ce qui a constitué pour un préjudice';

Qu'ils ont en effet choisi en toute connaissance de cause de vendre leur maison en l'état et sans réparation de sorte que le préjudice de moindre prix, encore à démontrer, ne trouve pas sa cause dans le fait des constructeurs mais dans le fait d'avoir choisi de vendre leur maison dans de telles conditions'étant rappelé que la vente ne concerne que les parties à l'acte et ne saurait fonder une recherche de responsabilité des constructeurs recherchés';

Considérant qu'il convient en conséquence, vu l'évolution du litige, d'infirmer le jugement entrepris et de rejeter les demandes de ce chef comme irrecevables ;

Sur la demande d'indemnisation du trouble de jouissance

2-1- Evaluation du préjudice

Considérant que les époux [H] ont été occupants de leur maison jusqu'à sa vente en 2015'; que le jugement entrepris dont ils demandent la confirmation sur ce point leur a alloué la somme de 36'000€ à titre de dommages intérêts pour le préjudice de jouissance subi';

Considérant qu'ils sont recevables et fondés dans le principe de cette demande d'indemnisation'à caractère personnel qui est cependant contestée par les parties adverses';

Considérant que s'il est sur ce point indiqué que «'les parties n'ont fait valoir aucun préjudice devant l'expert'» (Rapport page 44)'les époux [H] soutiennent devant la cour la réalité d'un préjudice ainsi décrit': basculement important de la terrasse prolongeant le séjour de la maison qui présente des fissures inquiétantes, défaut de planéité et «'aspect fissuré décourageant son usage'»'; qu'ils indiquent n'avoir de ce fait pas pu profiter de leur terrasse dans les conditions normales depuis 2005 soit pendant près de 10 années à ce jour'» et estiment ce préjudice à 48'000€ dans le corps de leurs conclusions sur la base d'une attestation de valeur locative de Century 21, tout en demandant la confirmation de la condamnation à la somme retenue par le tribunal';

Considérant que cette attestation fixe à 1600€ charges comprises la valeur du bien dans son ensemble et à 1200€ charges comprises «'si l'on tient compte de la terrasse qui est actuellement hors service et donc inutilisable'» (pièce 15) ce qui représente une réduction du quart de la valeur locative du fait des désordres affectant la terrasse';

Considérant cependant que l'absence de réclamation à ce titre devant l'expert peut s'expliquer par le fait, constaté par procès-verbal d'huissier de justice du 6 octobre 2010, que l'étaiement préconisé par M. [M] dans son rapport du 5 juillet 2004 avait été réalisé de sorte qu'il n'y avait donc plus aucun risque à utiliser cette terrasse'; qu'il ne résulte aucunement de l'expertise que la terrasse ait été inutilisable au-delà de cette mesure à caractère préventif, les désordres relevés consistant essentiellement en fissures et lézardes au nombre de deux selon le descriptif de l'expert (page 31)'; que par ailleurs au regard de la surface habitable de 147,33M² pour une maison de 8 pièces dont 6 chambres, il paraît excessif de retenir un abattement locatif de 25% pour une terrasse dont rien ne démontre que l'usage, qui n'est en toute hypothèse pas permanent, était impossible de 2005 à 2015';

Considérant en conséquence que la cour fixera à 10% de la valeur locative l'indemnisation du préjudice d'agrément qui a pu être subi de ce chef soit 9600 € sur cinq années, par infirmation du jugement entrepris sur le quantum';

2-2- Obligation à la réparation du préjudice

Considérant que par motifs qui précèdent l'obligation de réparation ne peut être fondée que sur le fondement contractuel';

Que l'expert analysant les interventions de CIBTP auteure des travaux réparatoires alors réalisés, a retenu comme causes des désordres':

-la nature très instable du sol et les variations climatiques importantes entre 1993 et 1995 puis en 2003,

-l'absence d'étude géotechnique

-l'avis de M. [M] architecte notamment en ce qu'il avait conseillé une solution de consolidation des fondations générant des désordres («'point dur'») car il en résultait une absence d'homogénéité des fondations

-la non-conformité des ouvrages réalisés par CIBTP avec notamment deux puits de fondation en gros béton, réalisés entre décembre 2004 et janvier 2005, descendus «'arbitrairement'» à une profondeur de -1,65m sous le niveau supérieur du dallage du sous-sol, sans réelle recherche du «'bon sol'» qui ne pouvait être connu que par une étude de sols géotechnique,

-l'état vétuste et fuyard des réseaux d'évacuation EP et drainage du sol, imputable à un défaut d'entretien des époux [H],

-la malfaçon réalisée par CIBTP dans la pose d'un drain qui a provoqué une «'sape'» du sol d'assise des fondations.

Que l'expert a proposé un partage de responsabilité à raison de 10% pour M. [M], 10% pour les époux [H] et 80 % pour CIBTP';

Considérant que les éléments versés aux débats permettent à la Cour de retenir que':

- l'entreprise a manqué à son obligation de conseil en ne préconisant pas au maître d'ouvrage une étude préalable de sol et en réalisant des fondations générant un système d'assise de l'ouvrage hétérogène et générateur de tassements différentiels à l'origine des désordres, outre la pose non conforme d'un drain qui a généré un écoulement fragilisant l'assise des fondations'; en l'absence d'une maîtrise d''uvre distincte lors de son intervention, il incombait CIBTP d'assurer elle-même le rôle de maître d''uvre.

- M. [M] n'est pas intervenu en tant que maître d''uvre des époux [H], mais pour procéder à un relevé des fissures et émettre un avis sur les causes ce qu'il a fait selon rapport du 5 juillet 2004. Cependant ce rapport comporte une approche descriptive précise de l'ouvrage et de la structure rappelant que dans ce quartier le terrain, constitué de marnes jaunes, est connu, il propose des mesures réparatoires, certes dans l'urgence (page 2 in fine) mais sans cependant faire référence à la nécessité d'une étude préalable de sols, manquant ainsi à son obligation générale de conseil. La Cour retiendra l'existence d'un lien de causalité entre ce manquement et la survenance du sinistre, à tout le moins par perte de chance d'être informé de la nécessité de recourir à une étude de sol préalable, qui aurait corrigé l'absence de conseil de l'entreprise sur ce point.

- le défaut d'entretien et les fuites du réseau d'évacuation des eaux pluviales, ont certainement eu une incidence sur la plasticité du sol marneux mais sans cependant que le lien de causalité avec le sinistre soit avéré puisque le sinistre est apparu à la suite de périodes d'importantes sécheresses.

Considérant que la cour retiendra un partage de responsabilité à raison de 95% pour l'entreprise et de 5% pour M. [M] de sorte que les époux [H] seront en conséquence admis en leur demande pour l'intégralité du trouble de jouissance'; que la CIBTP et son assureur MMA IARD venue aux droits de COVEA RISKS d'une part et M. [M], de seconde part, seront tenus in solidum de leur verser, avec charge définitive à hauteur 95% pour CIBTP et COVEA RISKS celle-ci dans la limite des plafond et franchise contractuels et 5% pour M. [M]';

Que M. [M] devra garantir la société CIBTP et son assureur dans cette proportion, étant observé que M. [M] n'a pas pour sa part formé de recours en garantie';

Sur la perte de jouissance pendant la réalisation des travaux

Considérant que cette demande est devenue sans objet puisque les époux [H] ne les ont pas fait réaliser et ne les subiront pas puisqu'ils ont vendu leur maison'; que le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il avait fait droit à leur demande à ce titre';

4-Sur les autres demandes

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'ordonner le remboursement des sommes versées en exécution du jugement entrepris, le présent arrêt en ce qu'il infirme ce jugement valant titre exécutoire pour restitution des sommes ainsi versées';

Considérant qu'il sera rappelé que l'arrêt est exécutoire de plein droit';

Considérant qu'il sera statué sur les dépens et frais irrépétibles dans les termes du litige';

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

DECLARE Mme et M.[H] irrecevables en leur demande en paiement des travaux réparatoires de la maison leur ayant appartenu située [Adresse 3] (94), qu'ils ont vendue selon acte du 29 juin 2015,

CONDAMNE in solidum d'une part la société CIBTP et son assureur la compagnie MMA IARD venue aux droits de la société COVEA RISKS, celle-ci dans la limite des franchise et plafond applicables, d'autre part M. [M] à payer à Mme et M.[H] la somme de 9600€ en réparation de leur préjudice de jouissance,

FIXE la part respective de responsabilité à raison de 95% pour la société CIBTP et 5% pour M. [M],

RAPPELLE que le présent arrêt en ce qu'il infirme le jugement entrepris vaut titre exécutoire pour restitution des sommes versées en exécution de ce jugement,

CONDAMNE in solidum la société CIBTP et son assureur la compagnie MMA IARD venue aux droits de la société COVEA RISKS, ainsi que M. [M] à payer à Mme et M.[H] la somme globale de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec charge définitive dans la proportion précédemment fixée,

DIT n'y avoir lieu de faire application de ces dispositions pour le surplus des demandes,

FAIT masse des dépens de première instance et d'appel incluant les frais de l'expertise judiciaire, et dit qu'ils seront supportés in solidum par la société CIBTP et son assureur la compagnie MMA IARD venue aux droits de la société COVEA RISKS, ainsi que par M. [M], avec charge définitive dans la proportion fixée,

DIT que les dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par le conseil de Mme et M.[H].

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 15/04470
Date de la décision : 15/02/2017

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°15/04470 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-15;15.04470 ?
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