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09/02/2017 | FRANCE | N°16/05575

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 09 février 2017, 16/05575


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRÊT DU 09 FEVRIER 2017



AUDIENCE SOLENNELLE



(n° 72 , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/05575



Décision déférée à la Cour : Décision du 31 Décembre 2015 - Conseil de l'ordre des avocats de PARIS



DEMANDEUR AU RECOURS



Monsieur [M] [N]

Elisant domicile au cabinet de Me Abdelhak NACIRI BENNA

NI

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par Me Olivier BESSON, avocat au barreau de PARIS, toque : A928, substituant Me Abdelhak NACIRI BENNANI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRÊT DU 09 FEVRIER 2017

AUDIENCE SOLENNELLE

(n° 72 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/05575

Décision déférée à la Cour : Décision du 31 Décembre 2015 - Conseil de l'ordre des avocats de PARIS

DEMANDEUR AU RECOURS

Monsieur [M] [N]

Elisant domicile au cabinet de Me Abdelhak NACIRI BENNANI

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Olivier BESSON, avocat au barreau de PARIS, toque : A928, substituant Me Abdelhak NACIRI BENNANI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0928

DÉFENDEUR AU RECOURS

LE CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DE PARIS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Hervé ROBERT de la SCP Hervé ROBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0277

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 Novembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

- M. Jacques BICHARD, Président de chambre

- Monsieur Jacques LAYLAVOIX, Président de chambre

- Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère

- Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

- Madame Isabelle CHESNOT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

MINISTERE PUBLIC :

L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur Michel LERNOUT, Avocat Général, qui a fait connaître son avis et qui n'a pas déposé de conclusions écrites antérieures à l'audience.

DÉBATS : à l'audience tenue le 24 Novembre 2016, on été entendus :

- Madame HERVE, en son rapport

- Maître BESSON, en ses observations

- Maître ROBERT, avocat représentant le Conseil de l'Ordre des avocats au Barreau de PARIS, en ses observations

- Monsieur LERNOUT, Avocat Général, se joint aux observations présentées,

Par ordonnance en date du 30 Août 2016, le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Paris a été invité à présenter ses observations.

Le Conseil de l'Ordre a déposé des écritures préalablement à l'audience qui ont été communiquées à Monsieur [M] [N].

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier.

* * *

Par arrêté du 31 décembre 2015, la formation administrative n°2 du conseil de l'ordre des avocats de Paris a rejeté la demande d'inscription au barreau de Paris présentée par M. [N] sur le fondement des dispositions de l'article 971° et 3 ° du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.

La notification de cet arrêté a été adressée le 8 janvier 2016 à M [N] demeurant à Rabat, au Maroc.

M. [N] a formé un recours contre cette décision, le 26 février 2016.

Par des écritures déposées et soutenues oralement à l'audience, il demande que son recours soit déclaré recevable, que l'arrêté du 31 décembre 2015 soit infirmé et que sa demande d'inscription au tableau soit acceptée.

Par des écritures déposées le 23 novembre 2016 et développées oralement à l'audience, le conseil de l'ordre des avocats de Paris conclut à la confirmation de l'arrêté du 31 décembre 2015.

Le procureur général qui n'a pas pris d'écritures, s'en rapporte aux observations du conseil de l'ordre.

MOTIFS DE LA DECISION :

M. [N] de nationalité marocaine expose qu'il est titulaire d'une maîtrise en droit privé obtenue auprès de l'université [Établissement 1], qu'il a été reçu à l'Institut supérieur de la magistrature marocain en 1986 et a exercé les fonctions de magistrat du 29 juin 1987 au 13 décembre 2010, date à laquelle il a été révoqué pour des motifs non contraires à l'honneur et à la probité, puis qu'il a exercé des fonctions de conseiller juridique auprès du ministre chargé des relations avec le parlement à compter du 3 janvier 2012 tout en exerçant à partir du 17 octobre 2014, les fonctions de conseiller à la cour d'appel du Koweit.

Il fait valoir sa maîtrise de la langue française et la grande proximité du droit français et du droit marocain ainsi que des techniques de rédaction des décisions judiciaires dans les deux pays.

Il invoque le principe de la réciprocité de droit et de fait entre la France et le Maroc. S'agissant de la réciprocité de droit, il rappelle les dispositions de la convention franco-marocaine de 1957, du décret du 27 novembre 1991, celles du décret du 1er septembre 1969 ainsi que du protocole relatif aux professions libérales judiciaires et aux activités d'ordre juridique.

Il estime que la décision du conseil de l'ordre est insuffisamment motivée et ne répond pas à ses moyens.

Le conseil de l'ordre fait valoir que les fonctions de magistrat visées par l'article 97 du décret doivent avoir été exercées en France et que M. [N] ne peut non plus se prévaloir de l'article 98 pour sa qualité de conseiller juridique au cabinet d'un ministre marocain car il est necessaire de justifier d'une expérience acquise en France. Enfin il soutient que M. [N] ne remplit pas les conditions d'accès à la profession édictées par l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 de sorte que la convention franco-marocaine et le protocole relatif aux professions libérales judiciaires ne peuvent recevoir application.

L'article 11-3° de la loi du 31 décembre 1971 dispose que nul ne peut accéder à la profession d'avocat s'il n'est pas notamment titulaire d'un certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA).

L'article 97 du décret du 27 novembre 1991 énonce néanmoins que : Sont dispensés de la condition de diplôme prévue à l'article 11 2° de la loi du 31 décembre 1971, de la formation théorique et pratique, du certificat d'aptitude et de stage :

1° les membres et anciens membres du conseil d'Etat et les membres et anciens membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel

3 ° les magistrats et anciens magistrats de l'ordre judiciaire régis par l'ordonnance du 22 décembre 1958.

L'article 97 du décret pose des conditions dérogatoires à l'accès à la profession d'avocat qui doivent à ce titre, être interprétées strictement et les personnes ne pouvant prétendre à leur bénéfice, conservent la possibilité d'accéder à la profession d'avocat selon les modalités générales fixées par l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971.

L'exigence d'appartenance à un corps de magistrats de l'ordre administratif ou de soumission au statut de l'ordonnance de 1958 pour les magistrats de l'ordre judiciaire, a pour effet de réserver le bénéfice de ces dispositions dérogatoires aux magistrats français. Cette condition d' appartenance à la magistrature française a pour finalité d'assurer chez le candidat à l'inscription au barreau dispensé du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, une connaissance suffisante du droit national qui s'il peut avoir de nombreux points communs avec le droit marocain, est cependant différent dans de nombreuses matières, notamment pour le droit des personnes. Elle exclut qu'un magistrat marocain n'ayant jamais exercé en France et n'ayant ainsi jamais mis en application le droit français, puisse bénéficier de conditions dérogatoires d'accès à la profession d'avocat.

M.[N] qui entend se prévaloir d'une réciprocité de droit et de fait, verse aux débats en pièce 19 une liste d'avocats parisiens qui exerceraient leur profession au Maroc.

Néanmoins, il ne se déduit pas du fait que les nationaux français et marocains puissent exercer leur profession d'avocat dans l'un ou l'autre des deux pays qu'ils y bénéficient de conditions dérogatoires d'accès.

La convention judiciaire franco marocaine de 1957 traite de la possibilité de mettre à la disposition du Maroc des magistrats français qui dans l'exercice de leurs fonctions ont les mêmes droits et les mêmes devoirs que les magistrats marocains.

Cette convention ajoute que les citoyens français ont accès au Maroc aux professions libérales dans les mêmes conditions que les nationaux marocains sans qu'aucune mesure discriminatoire puisse être prise à leur égard.

Le protocole relatif aux professions libérales judiciaires et aux activités d'ordre juridique dispose également que les citoyens marocains ont accès en France aux professions libérales judiciaires dans les mêmes conditions que les citoyens français sans qu'aucune mesure discriminatoire puisse être prise à son égard.

Néanmoins la réciprocité permet uniquement à un citoyen marocain d'exercer la profession d'avocat et d'être inscrit à un barreau en France dans les conditions de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971, mais elle n'ouvre pas à un magistrat marocain qui n'a pas appliqué le droit français, le bénéfice des dispositions dérogatoires aux conditions d'accès à la profession d'avocat applicables aux personnes offrant des garanties de compétence en droit français suffisamment sérieuses pour être dispensées du CAPA.

Ainsi, le fait de refuser à un magistrat marocain le bénéfice des conditions dérogatoires offertes à certaines catégories professionnelles en raison de compétences acquises en droit français, ne constitue pas une violation des traités liant la France et le Maroc ni incidemment de la Convention de Vienne et de la Constitution française.

Il y a donc lieu de confirmer la décision du conseil de l'ordre, laquelle était motivée en droit comme en fait.

PAR CES MOTIFS :

Confirme la décision du conseil de l'ordre des avocats de Paris du 31 décembre 2015,

Laisse les dépens à la charge de M.[N].

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 16/05575
Date de la décision : 09/02/2017

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°16/05575 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-09;16.05575 ?
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