RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRÊT DU 09 Février 2017
(n° , 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/10017
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes d'EVRY - section industrie - RG n° 15/00214
APPELANTS
Madame [I] [B]
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Madame [M] [L]
[Adresse 3]
[Adresse 4]
Monsieur [X] [M]
[Adresse 5]
[Adresse 6]
Monsieur [R] [Y]
[Adresse 7]
[Adresse 8]
Monsieur [J] [K]
[Adresse 9]
[Adresse 8]
Monsieur [H] [N]
[Adresse 10]
[Adresse 11]
Monsieur [N] [Q]
[Adresse 12]
[Adresse 13]
Monsieur [D] [T]
[Adresse 14]
[Adresse 15]
Monsieur [Q] [W]
[Adresse 16]
[Adresse 17]
Madame [Z] [E]
[Adresse 18]
[Adresse 19]
Monsieur [L] [G]
[Adresse 20]
[Adresse 21]
Monsieur [J]
[Adresse 22]
[Adresse 23]
Monsieur [L] [C]
[Adresse 7]
[Adresse 8]
Monsieur [X] [C] [Z]
[Adresse 24]
[Adresse 8]
Madame [G] [P]
[Adresse 25]
[Adresse 26]
Monsieur [V] [F]
[Adresse 27]
[Adresse 28]
Madame [K] [O]
[Adresse 29]
[Adresse 4]
Madame [G] [X]
[Adresse 30]
[Adresse 31]
Madame [A] [I]
[Adresse 32]
[Adresse 33]
Monsieur [C] [U]
[Adresse 34]
[Adresse 26]
Madame [T] [D]
[Adresse 35]
[Adresse 36]
Monsieur [O] [H]
[Adresse 37]
[Adresse 38]
Monsieur [P] [A]
[Adresse 25]
[Adresse 26]
Monsieur [F] [V]
[Adresse 39]
[Adresse 40]
Monsieur [Y] [R]
[Adresse 41]
[Adresse 42]
Madame [U] [S]
[Adresse 43]
[Adresse 44]
Madame [S] [NN]
[Adresse 45]
[Adresse 46]
Monsieur [B] [BB]
[Adresse 47]
[Adresse 48]
Madame [E] [QQ]
[Adresse 49]
[Adresse 50]
Monsieur [MM]
[Adresse 51]
[Adresse 26]
Madame [W] [SS]
[Adresse 52]
[Adresse 53]
Monsieur [LL] [HH]
[Adresse 54]
[Adresse 55]
Monsieur [AA] [WW]
[Adresse 56]
[Adresse 57]
Monsieur [NN] [II]
[Adresse 58]
[Adresse 59]
Monsieur [PP] [OO]
[Adresse 60]
[Adresse 61]
représentés par Me Michel HENRY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0099
INTIMEES
Me [CC] [UU] - Mandataire liquidateur de la SAS TAAG
[Adresse 62]
[Adresse 63]
représenté par Me Nicolas BILLON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0411
CGEA ILE DE FRANCE EST
[Adresse 64]
[Adresse 65]
représentée par Me Pascal GOURDAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1205 substitué par Me Thierry BLAZICEK
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 1er décembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Catherine MÉTADIEU, Président
Madame Martine CANTAT, Conseiller
Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, Président et par Madame FOULON, Greffier.
**********
Vu l'arrêt rendu le 24 mars 2016 par cette chambre qui a :
- infirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions
- dit la juridiction prud'homale compétente pour connaître du bien fondé de leur licenciement par les appelants, salariés protégés compris
- évoqué le fond
- renvoyé l'affaire à l'audience collégiale du 1er décembre 2016
- sursis à statuer sur le surplus des demandes ;
Vu les conclusions déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement par [PP] [OO], [I] [B], [M] [L], [X] [M], [R] [Y], [J] [K], [H] [N], [N] [Q], [D] [T], [Q] [W], [Z] [E], [L] [G], M.[YY], [L] [C], [X] [C] [Z], [G] [P], [V] [F], [K] [O], [G] [X], [A] [I], [C] [U], [T] [YY], [F] [V], [Y] [R], [U] [S], [S] [NN], [B] [BB], [E] [QQ], M.[MM], [W] [SS], [LL] [HH] qui demandent à la cour de :
- les dire recevables et bien fondés à réclamer l'indemnisation prévue par l'article L.1233-58 alinéa 5 à raison de la notification de leur licenciement avant homologation du plan de sauvegarde de l'emploi
- dire que les licenciements sont sans cause réelle et sérieuse comme étant la conséquence de la légèreté blâmable de la société caractérisée par les fautes de gestion des dirigeants qui ont conduit à la ruine de l'entreprise
- dire en outre que les licenciements n'ont pas de cause réelle et sérieuse à raison de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi sur la base d'informations inexactes du principal actionnaire
En conséquence,
- fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Taag les sommes suivantes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
[PP] [OO] 60 300 €
[I] [B] 35 055 €
[M] [L] 36 900 €
[X] [M] 62 395 €
[R] [Y] 40 104 €
[J] [K] 44 000 €
[H] [N] 44 991 €
[N] [Q] 39 312 €
[D] [T] 36 435 €
[Q] [W] 35 000 €
[Z] [E] 58 411 €
[L] [G] 51 863 €
M. [J] 41 455 €
[L] [C] 45 000 €
[X] [C] [Z] 57 106 €
[G] [P] 41 281 €
[V] [F] 60 264 €
[K] [O] 34 891 €
[G] [X] 31 005 €
[A] [I] 39 708 €
[C] [U] 37 582 €
[T] [YY] 37 695 €
[F] [V] 40 140 €
[Y] [R] 44 145 €
[U] [S] 36 032 €
[S] [NN] 36 693 €
[B] [BB] 89 152 €
[E] [QQ] 37 119 €
M.[MM] 29 860 €
[W] [SS] 38 795 €
[LL] [HH] 34 142 €
- dire que ces sommes seront garanties par l'Ags Cgea d'Ile de France Est dans la limite des plafonds applicables appréciés en net, c'est à dire en excluant les créances des organismes sociaux ;
Vu les conclusions déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement par [AA] [WW], [NN] [II] et [P] [A], salariés protégés, qui demandent à la cour de:
- dire leurs licenciements sans cause réelle et sérieuse, en tout cas abusifs, sur le fondement de l'article 1382 du code civil comme étant la conséquence de la conséquence de la légèreté blâmable de la société caractérisée par les fautes de gestion des dirigeants qui ont conduit à la ruine de l'entreprise et en raison de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi sur la base d'informations inexactes du dirigeant, principal actionnaire
En conséquence,
- fixer au passif de la liquidation judiciaire de la Sas Taag les sommes suivantes, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en tout cas fautif :
[AA] [WW]48 001 €
[NN] [II] 45 250 €
[P] [A]35 488 €
- dire que ces sommes seront garanties par l'Ags Cgea d'Ile de France Est dans la limite des plafonds applicables appréciés en net c'est à dire en excluant les créances des organismes sociaux;
Vu les conclusions déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement par Maître [UU] [CC] en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sas Techniques Appliquées aux Arts Graphiques (Taag) qui demande à la cour de :
- juger qu'elle a respecté son obligation de reclassement
- juger que les licenciements des appelants sont bien fondés
- juger qu'elle ne saurait, en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sas Taag, être tenue pour responsable de faute ou d'une légèreté blâmable qu'elle n'a pu commettre dès lors que les appelants ne visent que la responsabilité de l'ancienne direction de la Sas Taag, à savoir la société [VV] Scientific Inc
En conséquence,
- débouter les appelants de leurs demandes
En tout état de cause,
- condamner solidairement les appelants à lui verser, en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sas Taag la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement par l'Ags Cgea d'Ile de France Est qui demande à la cour de :
A titre principal,
Vu la décision d'homologation du document unilatéral portant Pse,
Vu la décision de liquidation judiciaire
- constater que le licenciement repose sur un motif économique incontestable
- débouter les salariés de leurs demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
A titre subsidiaire, sur l'absence d'homologation du Pse,
Vu l'article L.1233-58 II du code du travail
- réduire la demande des salariés à six mois de salaires
A titre subsidiaire, sur la faute détachable,
- juger toute demande de dommages-intérêts fondée sur une faute détachable de l'employeur inopposable à l'Ags
Sur la garantie,
- dire que s'il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de sa garantie légale
- juger qu'en tout état de cause, sa garantie telle que prévue par l'article L.3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues au titre de l'exécution du contrat de travail au sens de l'article L.3253-8 du même code, les astreintes, dommages-intérêts mettant en oeuvre la responsabilité de droit commun de l'employeur ou article 700 étant ainsi exclus de sa garantie
- juger qu'en tout état de cause sa garantie ne pourra excéder, toutes créances confondues le plafond des cotisations maximum au régime d'assurance chômage en vertu des articles L.3253-17 et D-3253-5 du code du travail, ce plafond consistant en la somme brute versée par l'Ags entre les mains du mandataire liquidateur et non en la somme nette perçue par le salarié ;
La cour faisant expressément référence aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties ;
SUR CE LA COUR,
Sur la demande des salariés non protégés :
Les appelants font valoir que :
- la Sas Taag, imprimerie de labeur créée le 4 mai 2000, avait un effectif d'environ soixante salariés avant son rachat par la société Frontere,
- ses dirigeants fondateurs ont cédé l'activité et les moyens de productions à la société Research Solutions Inc (société californienne),
- la société Taag a alors été présidée par la société [VV] Scientific Inc, détenue à 100 % par la société Research Solutions Inc et représentée par son dirigeant de nationalité française [EE] [VV].
Ils exposent que l'entreprise a connu des difficultés qui n'ont cessé de s'aggraver conduisant à la mise en oeuvre en novembre 2012 d'un projet de licenciement collectif qui s'est traduit par six départs en janvier 2013, que le 4 novembre 2013 le nouveau directeur de la société, [H] [DD] a avisé l'autorité administrative d'un projet de changement d'implantation géographique et d'un projet de plan de sauvegarde de l'emploi de grande ampleur, ce dont n'auront connaissance les représentants du personnel qu'un an plus tard, que treize salariés ont quitté l'entreprise entre 2012 et 2013, que le commissaire aux comptes a lancé la première phase d'une procédure d'alerte en raison de l'existence de capitaux propres négatifs de 342 000 € au 30 juin 2013 et que dans ce contexte économique dégradé elle a néanmoins entrepris de racheter la société Frontere.
Après avoir fait observer que le tribunal de commerce de Pau, dans son jugement en date 8 avril 2004, a ordonné la cession totale de la Sas Taag, la reprise du fonds de commerce, la reprise du matériel de production et la clientèle, le transfert de 22 contrats de travail, pris acte d'un engagement d'un apport de 200 000 €, et ordonné l'inaliénabilité des biens cédés pour une durée de 5 ans,les appelants soutiennent qu'entre le 16 avril et le mois de juillet 2014, le président [EE] [VV] et le directeur [H] [DD] vont provoquer 'la faillite de la Sas Taag par une succession d'initiatives irrationnelles et frauduleuses' en :
- vendant sur instruction personnelle de [EE] [VV] non pas les «'presses offset feuille'» du site de Grigne comme le prévoyait l'offre de reprise homologuée par le tribunal de commerce, mais celles de la société Frontere pour un prix moindre et sans rapport avec les estimations de l'expert désigné par l'expert judiciaire,
- en décidant de sous-traiter auprès d'autres imprimeries les marchés de Frontere, ce qui a entraîné un surcoût de facturation de 25 à 50 % qui a eu pour effet de faire fuir la clientèle attachée à l'imprimerie de Frontere,
- en élevant le niveau de facturation pour les travaux effectués en interne et donc avec les mêmes effets que précédemment,
- en ne respectant pas le plan, notamment en n'apportant aucune activité à la société Frontere et en ne versant pas l'apport en compte courant de 200 000 €,
l'ensemble de ces décisions ayant précipité la chute du chiffre d'affaires.
Ils indiquent que le comité d'entreprise a été convoqué le 25 août 2014 pour une réunion sous forme de conférence téléphonique le 29 suivant avec pour ordre du jour le rapport spécial d'alerte dont les membres du comité d'entreprise n'avaient pas été informés auparavant alors que la procédure d'alerte avait été lancée en novembre 2013, que la société a déposé le bilan peu après et que le tribunal de commerce d'Evry a ouvert une procédure de redressement judiciaire avec une période d'observation de six mois, Me [CC] étant désignée en qualité de mandataire judiciaire et Me [EE] en qualité d'administrateur judiciaire.
Ils soutiennent que le 29 septembre 2014, M. [VV] a décidé de 'saborder la société en adressant un courrier à l'administrateur judiciaire pour obtenir la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire', laquelle sera prononcée le 6 octobre 2014.
Les appelants demandent à la cour de faire application des dispositions de l'article L.1233-58 alinéa 3, et, dès lors que :
- aucune décision d'homologation ou de refus d'homologation n'est intervenue avant la notification des licenciements,
- postérieurement à l'envoi des lettres de licenciement le 14 octobre, la Directe a refusé le 24 octobre d'homologuer le plan de sauvegarde de l'emploi,
- il est de jurisprudence constante que lorsque la rupture du contrat de travail est subordonnée à un acte administratif, en l'espèce l'homologation d'un plan de sauvegarde de l'emploi, elle's'analyse en un licenciement non motivé, le fait pour l'employeur d'adresser au salarié sans attendre la décision relative à l'homologation une attestation Assedic et solde de tout compte même si l'homologation est prononcée ultérieurement',
de dire que la décision de la Directe du 17 novembre 2014 d'homologuer un nouveau plan de sauvegarde de l'emploi (Pse) après reprise de la consultation des instances représentatives du personnel est sans effet sur les licenciements irrégulièrement prononcés le 24 octobre et ne pouvait pas faire revivre des contrats de travail rompus irrégulièrement, ni effacer l'infraction définie et sanctionnée spécifiquement par l'article L.1233-58 alinéa 5 dont la mise en oeuvre ne relève que du juge prud'homal.
Ils invoquent en outre l'absence de cause réelle et sérieuse de leurs licenciements en raison des fautes et de la légèreté blâmable de l'employeur ayant conduit à la liquidation de l'entreprise.
Me [CC] en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sas Taag fait valoir que
- le jugement du tribunal de commerce d'Evry en date du 6 octobre 2014 la désignant n'a jamais fait l'objet de contestation, le procureur de la république comme le juge commissaire ayant émis un avis favorable à la conversion,
- postérieurement au refus d'homologation du 24 octobre 2014, elle a repris la procédure de licenciement économique collectif ayant abouti à l'homologation par la Directe d'Ile de France, le 17 novembre du plan de sauvegarde de l'emploi qu'elle avait mis en place par voie de document unilatéral en date du 12 novembre 2014 ayant donc fait l'objet d'un contrôle de proportionnalité,
- la décision du 17 novembre 2014 n'a fait l'objet d'aucun recours.
Elle soutient que les licenciements sont bien fondés, le motif économique n'étant pas contestable dès lors que la Sas Taag a fait l'objet d'une liquidation judiciaire, que la décision d'homologation est très claire et motivée sur le respect de son obligation de reclassement, et que la Cour de Cassation rappelle que dès lors que l'employeur a démontré l'absence de poste disponible dans l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient, à l'époque du licenciement, il ne peut lui être reproché des efforts de reclassement insuffisants
Elle souligne enfin que tous les développements des appelants relatifs à des fautes de l'employeur ou à sa légèreté blâmable concernent en réalité soit la société-mère de la Sas Taag, la société Research Solutions, soit l'ancienne direction de la Sas Taag, la société [VV] Scientific Inc représentée par son président [EE] [EE] [VV], et qu'elle ne peut être tenue responsable des fautes de l'employeur ou à la légèreté blâmable de ces fautes de ces derniers, lesquels n'ont jamais été appelés en la cause.
L'Ags Cgea d'Ile de France Est conclut au rejet de toutes demandes relevant de la compétence du juge administratif et sur les autres demandes, fait observer que les salariés ont bénéficié de l'avantage du plan de sauvegarde de l'emploi.
Elle fait valoir que si la cour estime que les salariés ont subi malgré tout un préjudice, seul l'article L.1233-58 du code du travail serait applicable en cas de procédure collective et que les salariés ne peuvent prétendre qu'à des dommages-intérêts à hauteur de six mois de salaires.
Aux termes de l'article L.1233-39 du code du travail, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, l'employeur notifie au salarié le licenciement pour motif économique par lettre recommandée avec avis de réception.
La lettre de notification ne peut être adressée avant l'expiration d'un délai courant à compter de la notification du projet de licenciement à l'autorité administrative.
Ce délai ne peut être inférieur à trente jours.
Une convention collective peut prévoir des délais plus favorables.
Dans les entreprises de plus de cinquante salariés ou plus, lorsque le projet de licenciement concerne dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, l'employeur notifie le licenciement selon les modalités prévues au premier aliéna du présent article, après la notification par l'autorité administrative de la décision de validation mentionnée à l'article L.1233-57-2 ou de la décision d'homologation mentionnée à l'article L.1233-57-3 ou à l'expiration des délais prévus à l'article L.1233-57-4.
Il ne peut prononcer à peine de nullité la rupture des contrats de travail avant la notification de cette décision d'homologation ou de validation ou l'expiration des délais prévus à l'article L.1233-57-4.
Selon l'article L.1233-58 du code du travail, en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, l'employeur, l'administrateur ou le liquidateur, selon le cas, qui envisage des licenciements économiques, met en 'uvre un plan de sauvegarde de l'emploi dans les conditions de l'article L.2323-31 du code du travail.
Il est précisé au point II de cet article que pour les licenciements d'au moins dix salariés dans une entreprise d'au moins cinquante salariés, l'employeur, l'administrateur ou le liquidateur ne peut procéder sous peine d'irrégularité à la rupture des contrats de travail avant la notification de la décision favorable de validation ou d'homologation, ou l'expiration des délais mentionnés au quatrième alinéa du point [...].
En cas de décision défavorable de validation ou d'homologation ou en cas d'annulation d'une décision ayant procédé à la validation ou à l'homologation, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être inférieure aux six derniers mois.
L'article L.1235-16 ne s'applique pas.
Selon la chronologie des faits telle que résultant des pièces, le tribunal de commerce d'Evry a, par jugement en date du 6 octobre 2014, prononcé la liquidation judiciaire de la Sas Taag et désigné Me [CC] en qualité de mandataire liquidateur.
Me [CC] ès qualités a notifié aux salariés non protégés leurs licenciements pour motif économique par lettre recommandée du 14 octobre 2014.
Le projet de licenciement économique collectif prévoyant la suppression de 59 emplois dont 37 pour le site Taag situé à Grigny et 22 pour le site Frontere situé à Salies de Béarn, a été notifié à la Direccte le 16 octobre 2014 et la demande d'homologation d'un document unilatéral lui a été adressée le 23 octobre suivant.
Le 24 octobre 2014, la Direccte a refusé d'homologuer le document unilatéral signé le 20 octobre 2014 en raison d'irrégularités de procédure, à savoir notamment que :
- la procédure d'information et de consultation des instances représentatives du personnel était irrégulière,
- 'les lettres de notification de licenciement dans lesquelles figure la proposition de contrat de sécurisation professionnelle faisait courir le délai de réflexion de 21 jours de ces derniers, ont été adressées aux salariés concernés avant la décision d'homologation du document unilatéral contrairement aux dispositions de l'article L.1233-39 du code du travail'.
Le second document unilatéral signé le 12 novembre 2014 portant sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi prévu à l'article 1233-24-4 du code du travail dont l'homologation a été sollicitée par le mandataire liquidateur le 14 novembre suivant, a été homologué par une décision en date du 17 novembre 2014 par l'administration.
Il est par conséquent incontestable que les licenciements ont été notifiés aux salariés non protégés avant même la notification d'une décision favorable d'homologation du document unilatéral.
Le fait que postérieurement à la décision de refus du 24 octobre 2014, l'administration ait homologué le nouveau document unique signé le 12 novembre 2014, établi par Me [CC] ès qualités, ne saurait avoir pour effet de couvrir l'irrégularité affectant les licenciements prononcés en violation des dispositions des articles L.1233-39 et L.1233-58 du code du travail.
Les salariés non protégés dès lors que leurs licenciements sont intervenus à un moment où aucune décision relative à l'homologation du document unique n'avait été prononcée, sont fondés à solliciter l'indemnité telle que prévue à l'article L.1233-58 du code du travail.
Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à chacun des appelants, de leur âge et de leur ancienneté respectifs, de leur capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à leur formation et à leur expérience professionnelle et des conséquences de la rupture de son contrat de travail, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Taag les sommes suivantes revenant, au titre de l'indemnité prévue à l'article L.1233-58 du code du travail, à :
[PP] [OO] 23 450 €
[I] [B] 23 375 €
[M] [L] 32 800 €
[X] [M] 48 550 €
[R] [Y] 40 104 €
[J] [K] 44 000 €
[H] [N] 35 000 €
[N] [Q] 22 000 €
[D] [T] 20 500 €
[Q] [W] 35 000 €
[Z] [E] 30 000 €
[L] [G] 21 000 €
M.[J] 18 850 €
[L] [C] 45 000 €
[X] [C] [Z] 57 106 €
[G] [P]27 540 €
[V] [F]40 200 €
[K] [O] 28 000 €
[G] [X] 10 335 €
[A] [I] 26 500 €
[C] [U] 25 200 €
[T] [YY] 14 500 €
[F] [V] 40 140 €
[Y] [R] 24 150 €
[U] [S] 36 032 €
[S] [NN]33 000 €
[B] [BB]80 000 €
[E] [QQ] 25 000 €
M. [MM] 17 000 €
[W] [SS] 30 250 €
[LL] [HH] 22 800 €
Il convient de dire que ces sommes seront garanties par l'Ags Cgea d'Ile de France Est dans la limite des plafonds applicables appréciés en net, les créances des organismes sociaux étant exclues.
Sur la demande des salariés protégés :
[AA] [WW], [NN] [II], [P] [A] étaient salariés protégés.
Le 22 décembre, l'inspection du travail a autorisé leur licenciement.
Ils ont reçu la notification de leur licenciement par lettres recommandées des 29 et 30 décembre 2014.
Tous trois font valoir que le jugement de liquidation judiciaire de la Sas Taag qui fonde les licenciements est la conséquence des fautes commises par l'employeur à savoir :
- le rachat de la société Frontere à un moment où la Sas Taag était dans une situation financière obérée,
- la violation du plan de reprise de la société Frontere, la société-mère n'ayant pas apporté en compte courant la somme de 200 000 € prévue et les dirigeants de la Sas Taag n'ayant pas respecté la décision du tribunal de commerce de Pau qui avait ordonné l'inaliénabilité des biens cédés pendant cinq ans,
- le sabordage des activités,
- l'embauche et l'auto-licenciement de M. [JJ], directeur commercial et ami du directeur;
- la transmission d'informations mensongères communiquées par le dirigeant au mandataire ayant conduit à l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi indigent.
Force est de constater que le motif économique ayant conduit au licenciement des intéressés est justifié, leur poste ayant été supprimé et les difficultés économiques ayant été reconnues par le tribunal de commerce d'Evry qui, par jugement définitif, a prononcé la liquidation judiciaire de la Sas Taag .
Les trois salariés protégés concernés soutiennent qu'en réalité le président de la Sas Taag, en concertation avec le dirigeant de la société-mère de droit californien, la société Research Solutions Inc, dont il y a lieu de relever qu'elle n'a pas été appelée en la cause, a agi à l'encontre de l'intérêt social de la société, lui causant un préjudice ayant eu pour effet de provoquer sa liquidation judiciaire ainsi qu'aux salariés dont les emplois ont été supprimés.
Les éléments versés aux débats ne permettent toutefois pas de démontrer que 'les dirigeants' de la Sas Taag ont délibérément opéré des choix 'sans considération de la situation financière de Taag et des conséquences graves' qu'ils pouvaient entraîner, 'à l'insu des représentants du personnel', s'agissant notamment de la décision de sous-traiter certains travaux, et d'engager puis de licencier deux ans plus tard M. [JJ], quand bien même il était ami du dirigeant de la société.
Ils sont enfin irrecevables à critiquer les mesures prises dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi lequel n'a fait l'objet d'aucun recours dans le délai prévu à cet effet.
[AA] [WW], [NN] [II], [P] [A] n'établissent pas que leur licenciement respectif est sans cause réelle et sérieuse faute de caractériser les fautes et la légèreté blâmable qu'ils imputent à l'employeur.
Il convient par conséquent de les débouter de leurs demandes.
PAR CES MOTIFS
Vu l'arrêt de cette chambre en date du 16 juin 2016
Dit [PP] [OO], [I] [B], [M] [L], [X] [M], [R] [Y], [J] [K], [H] [N], [N] [Q], [D] [T], [Q] [W], [Z] [E], [L] [G], M.[YY], [L] [C], [X] [C] [Z], [G] [P], [V] [F], [K] [O], [G] [X], [A] [I], [C] [U], [T] [YY], [F] [V], [Y] [R], [U] [S], [S] [NN], [B] [BB], [E] [QQ], M.[MM], [W] [SS], [LL] [HH] recevables et bien fondés en leurs demandes d'indemnisation en raison de l'irrégularité de la rupture de leurs contrats de travail
Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société Taag les sommes dues au titre de l'indemnité prévue à l'article L.1233-58 du code du travail à :
- [PP] [OO] 23 450 €
- [I] [B] 23 375 €
- [M] [L] 32 800 €
- [X] [M] 48 550 €
- [R] [Y] 40 104 €
- [J] [K] 44 000 €
- [H] [N] 35 000 €
- [N] [Q] 22 000 €
- [D] [T] 20 500 €
- [Q] [W] 35 000 €
- [Z] [E] 30 000 €
- [L] [G]21 000 €
- M.[J]18 850 €
- [L] [C]45 000 €
- [X] [C] [Z] 57 106 €
- [G] [P] 27 540 €
- [V] [F]40 200 €
- [K] [O] 28 000 €
- [G] [X]10 335 €
- [A] [I] 26 500 €
- [C] [U] 25 200 €
- [T] [YY] 14 500 €
- [F] [V] 40 140 €
- [Y] [R] 24 150 €
- [U] [S] 36 032 €
- [S] [NN]33 000 €
- [B] [BB]80 000 €
- [E] [QQ] 25 000 €
- M.[MM] 17 000 €
- [W] [SS] 30 250 €
- [LL] [HH] 22 800 €
Dit que ces sommes seront garanties par l'Ags Cgea d'Ile de France Est dans la limite des plafonds applicables en net, créances des organismes sociaux exclus
Déboute [AA] [WW], [NN] [II], [P] [A] de l'ensemble de leurs demandes
Affecte les dépens au passif de la Sas Taag .
LE GREFFIER LE PRESIDENT