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07/02/2017 | FRANCE | N°14/13889

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 07 février 2017, 14/13889


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 07 Février 2017

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/13889



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Novembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section industrie RG n° 14/04261





APPELANTE



SARL ANA

[Adresse 1]

[Localité 1]

RCS B 508 446 002

représentée par Me Em

manuele REDLER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1103





INTIME



Monsieur [F] [H] [Q] [Q]

[Adresse 2]

[Localité 2]

né le [Date naissance 1]68 en Egypte

comparant en personne, assist...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 07 Février 2017

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/13889

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Novembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section industrie RG n° 14/04261

APPELANTE

SARL ANA

[Adresse 1]

[Localité 1]

RCS B 508 446 002

représentée par Me Emmanuele REDLER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1103

INTIME

Monsieur [F] [H] [Q] [Q]

[Adresse 2]

[Localité 2]

né le [Date naissance 1]68 en Egypte

comparant en personne, assisté de Me Nicolas BORDACAHAR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1833 substitué par Me Lol CAUDAN VILA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1833

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Août 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne PUIG-COURAGE, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bruno BLANC, Président

Mme Soleine HUNTER FALCK, Conseillère

Mme Roselyne GAUTIER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Chantal HUTEAU, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile et prorogé à ce jour.

- signé par Monsieur Bruno BLANC, Président et par Madame Chantal HUTEAU, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

LA COUR,

A partir du 27 mars 2012, Monsieur [F] [H] [Q] [Q], né le [Date naissance 2] 1968, a été engagé par la SARL ANA, qui emploie moins de 11 salariés, par contrat à durée déterminée jusqu'au 31 août 2012, puis pour 6 mois à compter du 1er septembre 2012, et enfin par contrat à durée indéterminée verbal, en qualité d'ouvrier peintre, pour 75 heures par semaine, moyennant une rémunération mensuelle brute de 689,25 euros, aux conditions générales de la convention collective nationale du bâtiment.

Le 24 février 2014, Monsieur [F] [H] [Q] [Q] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 3 mars 2014 et le7 mars 2014, il a été licencié pour faute grave. Il lui est reproché :

« ...Nous vous avions convoqué en nos bureaux en date du lundi 03 mars 2014 pour un entretien pour vous exposer les raisons qui nous amenaient à envisager votre licenciement pour motif

«  ABANDON DE POSTE »

Or vous ne vous êtes pas présenté à votre entretien, de plus le double du courrier à été adressé à l'Inspecteur du Travail qui nous a confirmé par courrier la bonne réception de notre lettre et nous informe que la copie de cette dernière vous sera adressée par lui.

En ce qui concerne enfin les motifs de votre licenciement nous vous rappelons qu'il s'agit de ceux qui vous ont été exposés ci-dessus à savoir :

" ABANDON DE POSTE"

Nous vous rappelons qu'étant donné votre abandon de poste, aucun préavis ne sera

effectué. »

Le 27 mars 2014, [F] [H] [Q] [Q] a saisi le conseil de prud'hommes d'une contestation de son licenciement et d'une demande en paiement de diverses indemnités.

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la SARL ANA du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris le 13 novembre 2014 qui :

- a requalifïé le licenciement de Monsieur [F] [H] [Q] [Q] en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- l'a condamnée à verser à Monsieur [F] [H] [Q] [Q] les sommes suivantes:

* 4.243,50 euros au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

* 707,25 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

* 70,72 euros au titre de congés payés afférents ;

* 271,11 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

* 321,47 euros au titre du rappel de salaire du 1er décembre 2013 au 10 décembre 2013 ;

*32,14 euros au titre des congés payés afférents ;

* 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- lui a ordonné de remettre à Monsieur [F] [H] [Q] [Q] l'attestation d'employeur destinée à Pôle Emploi ainsi que le certificat de travail et les bulletins de paie récapitulatifs.

- a débouté Monsieur [F] [H] [Q] [Q] du surplus de ses demandes en condamnant la SARL ANA aux dépens.

Vu les conclusions du 31 août 2016 au soutien de ses observations orales par lesquelles la SARL ANA demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris ;

- de débouter Monsieur [Q] de l'ensemble de ses demandes ;

- de condamner Monsieur [Q] à lui régler une indemnité de 1 500 euros

sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en le condamnant aux entiers dépens.

Vu les conclusions du 31 août 2016 au soutien de ses observations orales par lesquelles Monsieur [F] [H] [Q] [Q] demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société ANA à lui verser les sommes suivantes :

* 4.243,50 euros au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

* 707,25 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

* 70,72 euros au titre de congés payés afférents ;

* 271,11 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

* 321,47 euros au titre du rappel de salaire du 1er décembre 2013 au 10 décembre 2013 ;

*32,14 euros au titre des congés payés afférents ;

* 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; y ajouter,

- condamner société ANA à lui verser les sommes suivantes :

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour inexécution de bonne foi du contrat de travail ;

* 707,25 € à titre d'indemnité pour non-respect procédure de licenciement ;

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour non délivrance de l'attestation Pôle Emploi conforme ;

* 3.545,68 € au tire des congés payés acquis au jour de la rupture du contrat de travail ;

* 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

il sollicite, en outre, que soient ordonnées :

- la remise d'un bulletin de salaire récapitulatif conforme à l'arrêt à intervenir, sous

astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 8ème suivant notification de l'arrêt ; - la prise en charge des entiers dépens.

Sur ce :

Sur le licenciement

Il résulte des articles L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l'espèce, la SARL ANA reproche au salarié d'avoir arrêté de se présenter à son poste, à compter de début décembre 2013 et d'être resté injoignable à partir de ce moment.

Monsieur [F] [H] [Q] [Q] conteste l'abandon de poste reproché, il fait valoir qu'il s'est, au contraire, tenu à la disposition de son employeur. Il ajoute avoir sollicité un contrat écrit précisant ses jours et heures de travail, eu égard au temps partiel qu'il effectuait, refusant de continuer à travailler sans ces indications précises et explique que c'est à partir de ce moment que l'employeur ne l'a plus contacté pour lui fournir du travail comme il le faisait auparavant, le dernier jour travaillé étant le 10 décembre 2013.

Il résulte des pièces versées aux débats que la société ANA, ne peut justifier de la date à partir de laquelle le salarié se serait absenté de son poste, la mention dans ses écritures de « début décembre », est très imprécise, et ne figure pas dans la lettre de licenciement. Elle ne prouve pas non plus avoir mis en demeure le salarié de reprendre son poste ou de justifier de ses absences, de sorte qu'elle ne peut établir ne pas avoir elle-même a cessé de fournir du travail à Monsieur [F] [H] [Q] [Q].

La cour considère en conséquence que le grief d'abandon de poste reproché au salarié n'est pas établi et que s'agissant du seul grief mentionné dans la lettre de licenciement, la rupture du contrat de travail sera nécessairement considérée comme étant abusive.

Sur les conséquences financières de la rupture

La cour ayant considéré le licenciement de Monsieur [F] [H] [Q] [Q] comme étant abusif, il convient de le rétablir dans ses droits.

Sur l'indemnité de préavis

Monsieur [F] [H] [Q] [Q] ayant travaillé un an et onze mois dans l'entreprise, il convient de lui allouer une indemnité compensatrice de préavis à hauteur de 707,25 euros, outre 70,72 euros au titre des congés payés afférents.

Sur l'indemnité légale de licenciement

Eu égard à l'ancienneté de Monsieur [F] [H] [Q] [Q] dans l'entreprise, il convient de lui allouer une somme de 271,11 euros à titre d'indemnité légale de licenciement.

Sur les dommages et intérêts pour rupture abusive

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Monsieur [F] [H] [Q] [Q], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1235-5 du code du travail, une somme de 4.243,50 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Sur l'indemnité pour irrégularité de procédure

Monsieur [F] [H] [Q] [Q] fait valoir qu'il n'a pas été mis en mesure d'assister à une entretien préalable au licenciement, ni informé de la possibilité d' y être assisté par un conseiller.

Il résulte des pièces versées aux débats que la société ANA a convoqué Monsieur [F] [H] [Q] [Q] à l'entretien préalable par un courrier du 24 février 2014, dont il a été avisé le 25 février 2014, mais qu'il n'a pas réclamé. Il ne peut donc se prévaloir du défaut d'entretien préalable.

Toutefois, il convient de relever que ce courrier, s'il mentionne la possibilité pour le salarié de se faire assister d'un conseil, ne donne aucune information sur le lieu où le salarié peut avoir accès à la liste des conseillers. Ce manquement de l'employeur crée de fait un préjudice au salarié, qu'il convient d'indemniser à hauteur de 350 euros.

Sur le rappel de salaire

Monsieur [F] [H] [Q] [Q] expose avoir travaillé jusqu'au 10 décembre 2013 et ne pas avoir reçu de salaire pour la période comprise entre le 1er et le 10 décembre 2013. L'employeur qui invoque un abandon de poste début décembre 2013, sans fournir de précision quant à la date de cessation du travail, ne rapporte pas la preuve de l'absence du salarié entre le 1er et le 10 décembre 2013. La cour considère en conséquence que le salaire pour la période concernée est dû. Il convient donc d'allouer à Monsieur [F] [H] [Q] [Q] une somme de 321,47 euros à ce titre, outre celle de 32,14 euros au titre des congés payés afférents.

Sur le rappel de congés payés

Monsieur [F] [H] [Q] [Q] indique qu'il avait acquis en mars 2014, 47 jours de congés payés alors qu'aucune somme ne lui a été versée à ce titre. La société ANA ne conclut pas sur ce point. Il résulte du bulletin de salaire du mois de mars 2014, que Monsieur [F] [H] [Q] [Q] avait acquis 26 jours de congés payés au titre de l'année précédente et 21 jours au titre de l'année en cours. Il convient donc de faire droit à la demande du salarié de ce chef à hauteur de 3 545,68 euros.

Sur l'inexécution de bonne foi du contrat de travail et le préjudice moral lié aux conditions du licenciement.

Monsieur [F] [H] [Q] [Q] ne rapporte aucun élément permettant d'établir que le contrat n'aurait pas été exécuté de bonne foi. Il ne justifie pas non plus d'un préjudice particulier et distinct de celui déjà indemnisé par les dommages et intérêts accordés pour le licenciement abusif quant aux conditions de la rupture.

Sur la remise d'une attestation Pôle Emploi erronée

Monsieur [F] [H] [Q] [Q] verse aux débats des courriers de Pôle Emploi datés des 27 mars 2014 et 12 juin 2014 rejetant sa demande d'allocation au motif qu'il aurait quitté volontairement son emploi, l'employeur ayant indiqué dans l'attestation destinée à cet organisme à la rubrique « motif de la rupture » « abandon de poste » au lieu de faute grave, ce qui a conduit les services de pôle Emploi à interpréter ce motif comme étant une démission. Cette erreur non rectifiée par l'employeur malgré les décisions du conseil de prud'hommes lui ayant ordonné de procéder à cette rectification, a préjudicié au salarié qui a été privé de son droit à percevoir les allocations auxquelles il pouvait prétendre. Il convient de lui accorder une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts à ce titre.

Monsieur [F] [H] [Q] [Q] sollicite que la remise des documents sociaux conformes soit ordonnée, il convient de faire droit à cette demande, sans toutefois l'assortir de l'astreinte sollicitée.

Sur les frais irrépétibles

L 'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait droit à la demande du salarié en application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif.

Il y a lieu de dire que l'employeur conservera à sa charge ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARE l'appel recevable,

CONFIRME, par substitution de motifs, le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

y ajoutant,

CONDAMNE la SARL ANA à payer à [F] [H] [Q] [Q] les sommes suivantes:

* 350 euros au titre de l'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement ; * 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non délivrance de l'attestation Pôle Emploi conforme ;

* 3545,68 euros au titre des congés payés acquis ; * 1 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

DIT que les sommes à caractère salarial porteront intérêt au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter et dans la proportion de la décision qui les a prononcées ;

ORDONNE la remise par la SARL ANA des documents sociaux conformes, sans qu'il y ait lieu de prononcer une astreinte ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE la SARL ANA aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 14/13889
Date de la décision : 07/02/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°14/13889 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-07;14.13889 ?
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