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27/01/2017 | FRANCE | N°13/08409

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 27 janvier 2017, 13/08409


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 27 Janvier 2017

(n° , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/08409



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 10/11523





APPELANT

Monsieur [L] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Loc

alité 1]



représenté par Me Christophe MEYNIEL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0083





INTIMEE

CAP MARINE ASSURANCES ET REASSURANCES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



repré...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 27 Janvier 2017

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/08409

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 10/11523

APPELANT

Monsieur [L] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1]

représenté par Me Christophe MEYNIEL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0083

INTIMEE

CAP MARINE ASSURANCES ET REASSURANCES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Stéphane SELEGNY, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Valérie AMAND, Conseillère

Mme Jacqueline LESBROS, Conseillère

M. Christophe BACONNIER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Frédérique LOUVIGNE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Valérie AMAND, faisant fonction de présidente et par Madame Aurélie VARGAS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

La société Cap Marine Assurances et Réassurances (la société Cap Marine ci-après) a employé Monsieur [L] [B] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 25 septembre 2006 en qualité de directeur du développement facultés.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de courtage d'assurances et/ou de réassurances.

Sa rémunération mensuelle brute moyenne s'élevait en dernier lieu à la somme de 8.882 euros.

La société Cap Marine a mis en place un projet d'ouverture du capital au salarié auquel Monsieur [L] [B] a adhéré mais ce projet a été interrompu après que la société Cap Marine a été informée en novembre 2009 de l'engagement d'une procédure par la Société Générale à son encontre en vue de l'obtention d'une indemnité de 500.000.000 USD.

Dans cette procédure introduite devant les juridictions anglaises, l'assureur en responsabilité professionnelle de la société Cap Marine a pris la direction du procès étant précisé que dans ce contentieux, la Société Générale reprochait un manquement du courtier (la société Cap Marine) à son obligation d'information lors de la souscription de la police d'assurance, police qui n'avait pas permis de garantir les préjudices qu'elle avait subis à l'occasion d'un transport d'or, objet du contrat d'assurance litigieux et que Monsieur [L] [B] était, justement au sein de la société Cap Marine, le courtier qui avait conseillé la police litigieuse.

Au cours du premier trimestre 2010, Monsieur [L] [B] a alors monté un projet alternatif à la prise de participation dans la société Cap Marine, destiné à monter une filiale «'Cap Marine [Localité 2]'» à [Localité 2] pour exploiter l'activité dont il est chargé à la société Cap Marine à [Localité 3].

Le 3 septembre 2010, Monsieur [L] [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une action en résiliation judiciaire du contrat de travail, pour demander notamment 150.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 498.565 € de commissions et 30.000 € de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail.

Par lettre notifiée le 29 septembre 2010, Monsieur [L] [B] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 11 octobre 2010.

Monsieur [L] [B] a ensuite été licencié pour faute lourde par lettre notifiée le 18 octobre 2010 ; la lettre de licenciement indique notamment « il résulte de ce qui précède que':

- après avoir entretenu le flou sur votre intention de souscrire ou non à notre partenariat,

- après nous avoir proposé un projet de création de société à [Localité 2], qui consistait en fait à déplacer sous votre management l'actif de notre département faculté du bureau de [Localité 3],

- après avoir laissé entendre que vous entendiez souscrire au projet rectifié que nous avions préparé ensemble pour [Localité 2],

- après avoir développé dès juin 2010 un projet alternatif dont Cap-Marine était exclue, vous avez finalement décidé de poursuivre votre relation avec l'entreprise par une démarche d'agression à l'égard de notre société ne reposant que sur votre volonté de monnayer votre témoignage clé pour l'entreprise dans le dossier Société Générale, dans lequel on nous réclame près de 500 millions de dollars.

Vous avez ainsi':

- élevé de façon totalement artificielle un conflit contre Cap-Marine ,

- formulé des demandes totalement démesurées et tout aussi artificielles à notre encontre, celles-ci intervenant en réponse à la communication de la date de rendez-vous avec [M],

- clairement conditionné votre participation au «'witness statement '' au versement des sommes réclamées devant le Conseil de Prud'hommes, exigeant un accord avant le 27 septembre, soit la date de début des auditions, cette date étant reprise dans le courrier de

votre avocat ,

- mis en 'uvre vos menaces afin de nous conduire à vous verser les sommes totalement indues que vous réclamez.

Un tel comportement consiste à tenter d'obtenir par la menace et la contrainte des fonds au demeurant totalement indus.

Votre comportement ne constitue pas seulement une faute d'une particulière gravité consistant à refuser de collaborer à la défense de la société dans le cadre d'un dossier vital pour l'entreprise et ses salariés, ce qui, en soit n'est pas acceptable, qui plus est de la part d'un cadre dirigeant directement en charge dudit dossier.

Ce n'est pas non plus seulement une insubordination caractérisée consistant à refuser de se rendre à l'entretien fixé avec [M] même pour y entendre la réponse aux craintes que vous auriez pu nourrir.

C'est pire encore, la manifestation d'une intention froide et déterminée de nuire à l'entreprise en tentant à cette occasion d'obtenir indûment des fonds à son détriment.

Un tel comportement est donc constitutif d'une faute lourde (... ) ».

A la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, Monsieur [L] [B] avait une ancienneté de 4 ans.

La société Cap Marine occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Par jugement du 7 mai 2013 auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté Monsieur [L] [B] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens et a débouté la société Cap Marine de ses demandes reconventionnelles au terme des motifs suivants':

« Il résulte des débats et des dossiers remis par les parties :

- que la demande de résiliation judiciaire formée par M. [B] le 3 septembre 2010 repose sur des griefs, à supposer qu'ils soient fondés ce qui n'est pas établi par M. [B], dont le salarié n'a pas réellement cherché à s'entretenir préalablement avec son employeur,

- que ces griefs ont été exposés pour la première fois en juillet 2010 à un moment où le salarié préparait son départ de l'entreprise après avoir renoncé au projet, initié par lui, de filialisation et de délocalisation vers [Localité 2] de l'activité dont il était responsable,

- que les difficultés faites par M. [B] pour accepter de participer à une réunion prévue pour la fin septembre 2010 avec un avocat britannique en vue de recueillir son témoignage dans un contentieux d'une très grande importance pour Cap Marine et lié à une opération menée par lui, étaient manifestement destinées à faire pression sur son employeur pour obtenir une indemnisation à l'occasion de son départ de l'entreprise,

- qu'en décidant de ne pas participer à la dite réunion, M [B] a volontairement pris le risque de nuire aux intérêts de son employeur.

C'est pourquoi, M. [B] sera débouté de ses demandes de résiliation judiciaire de son contrat de travail, de dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ou non justifié par une faute lourde.

M. [B] n'apportant pas la preuve du bien fondé de sa demande de rappel de commissions, il en sera débouté.

Vu les faits de la cause, le conseil estime approprié de ne pas faire droit aux- demandes

reconventionnelles de Cap Marine.'»

Monsieur [L] [B] a relevé appel de ce jugement par déclaration parvenue au greffe de la cour le 9 septembre 2013.

L'affaire a été appelée à l'audience du 10 novembre 2016.

Lors de l'audience et par conclusions régulièrement déposées et visées par le greffier, Monsieur [L] [B] demande à la cour :

« d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :

à titre principal, de prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts exclusifs de la société et de lui faire porter effet à la date du 18 octobre 2010 ;

à titre subsidiaire, de dire que le licenciement de Monsieur [B] est nul ;

à titre plus subsidiaire, de dire que le licenciement de Monsieur [B] est sans cause réelle et sérieuse ;

en tout état de cause, de condamner la société à payer à Monsieur [B] :

- 26.646 € bruts à titre d'indemnité de préavis ;

- 2.664,60 € bruts à titre de congés payés afférents ;

- 27.249,76 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 36.666 € bruts à titre de prime contractuelle de bilan 2010 ;

- 130.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse ; -

- 569.890 € bruts à titre de «'commissions'», à titre principal, ou à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail et perte de chance, à titre subsidiaire ;

- 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail et préjudice distinct ;

- 10.921,33 € à titre de dommages et intérêts pour perte du DIF et de la portabilité ;

- 2.005,02 € à titre de remboursement des frais de traduction,

ces sommes portant intérêt au taux légal à compter du jour de la réception par la

société de sa convocation devant le bureau de conciliation ;

- 5.000 € à titre d'indemnité de l'article 700 du Code de procédure civile ;

de condamner la société à remettre à Monsieur [B] des documents sociaux conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 500 € par document et par jour de retard à compter du huitième jour suivant la notification de l'arrêt ;

de débouter la société de toutes ses demandes

de condamner la société aux entiers dépens.»

Lors de l'audience et par conclusions régulièrement déposées et visées par le greffier, la société Cap Marine s'oppose à toutes les demandes de Monsieur [L] [B] et demande à la cour de':

« Débouter Monsieur [B] de l'intégralité de ses demandes ;

Le condamner à payer à la Société CAP MARINE la somme de 50.000 € à titre dommages et intérêts pour procédure abusive,

Le condamner à payer à la Société CAP MARINE la somme de 200.000 € à titre dommages et intérêts résultant du préjudice que Monsieur [B] lui a délibérément occasionné,

Condamner Monsieur [B] à payer à la Société CAP MARINE la somme de 15.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamner Monsieur [B] aux entiers dépens.»

Lors de l'audience les conseils des parties ont plaidé par observations et s'en sont rapportés pour le surplus à leurs écritures'; l'affaire a alors été mise en délibéré à la date du 27 janvier 2017 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC)

MOTIFS

Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur la résiliation judiciaire

Monsieur [L] [B] demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société Cap Marine.

Le moyen est articulé en page 8 de ses conclusions dans une section «'I' - sur la demande en résiliation judiciaire'» ; cependant Monsieur [L] [B] mentionne dans cette section «'Monsieur [B] croit inutile de développer à plusieurs reprises les arguments qui lui servent, de fait, à la fois à fonder sa demande en résiliation et à se défendre du licenciement notifié.

Aussi, Monsieur [B] renvoie expressément la Cour aux développements qui suivent pour justifier de l'engagement de la procédure en résiliation, la Cour ne devant pas manquer d'y trouver un grand nombre de manquements contractuels de la société.

Sur la base des faits ci-dessous, la Cour prononcera donc à titre principal la résiliation du contrat de Monsieur [B] aux torts exclusifs de la société.'»

La cour constate que les développements qui suivent cette section «'I' - sur la demande en résiliation judiciaire'» sont sur la nullité du licenciement (pages 10 à 15 dans une section intitulée «'II' - sur la nullité du licenciement'»), sur le moyen subsidiaire relatif à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement (pages 16 à 35 dans une section intitulée «'III' - À titre subsidiaire, sur l'absence de cause réelle et sérieuse », sur les diverses demandes en paiement de Monsieur [L] [B] (pages 35 à 54 dans une section intitulée «'IV' - Sur les demandes de Monsieur [B] » et sur les demandes reconventionnelles (pages 54 et 55 dans une section intitulée «'V' - Sur les demandes reconventionnelles de la société », ce qui ne permet pas se voir où les manquements sont finalement articulés.

A la lecture détaillée de ses conclusions, la cour constate que la résiliation est cependant à nouveau mentionnée en page 39 dans la sous section intitulée «'e. Sur les commissions'» qui est l'une des sous partie de la section intitulée «'IV' - Sur les demandes de Monsieur [B] » ; dans cette sous partie développée de la page 39 à la page 52, la cour constate que Monsieur [L] [B] indique':

«'e. Sur les commissions

Il s'agit là d'une difficulté majeure rencontrée par Monsieur [B] dans l'exercice de son contrat de travail qui, compte tenu des enjeux et du comportement de la société, l'a conduit à saisir le Conseil de Prud'hommes en résiliation judiciaire.

La Cour est donc compétente pour trancher ce point du litige, qui relève de l'exercice d'un contrat de travail, contrairement à ce qu'indique la société.'»

La cour note qu'après cette dernière mention de la résiliation judiciaire, la résiliation judiciaire n'est à nouveau mentionnée que dans le dispositif des conclusions.

Malgré la difficulté à identifier des manquements précis articulés au titre de la demande de résiliation judiciaire du fait de la technique de renvoi à des reproches allégués à l'appui d'autres demandes, la cour retient que l'essentiel des manquements articulés contre l'employeur se trouve dans la sous section intitulée «'e. Sur les commissions'», ':

Monsieur [L] [B] invoque son droit contractuel à l'entrée dans le capital de la société Cap Marine, le délai de 2 ans prévu pour cette prise de participation, le mode de financement de cette prise de participation, l'absence de mise en 'uvre de ce projet d'ouverture du capital et le montage d'un projet de substitution à [Localité 2] auquel la société Cap Marine n'a pas été donné suite (page 42),

Monsieur [L] [B] précise que la société Cap Marine a dans le cadre du projet de création d'une filiale à [Localité 2], «'finalement proposé des conditions inacceptables à Monsieur [L] [B] qui ne pouvait que les refuser'» (sic) et «'n'a jamais versé à Monsieur [B] les rémunérations contractuellement prévues pour servir au financement de sa prise de participation ou du projet [Localité 2]'», que «'Cette situation (l'absence d'ouverture du capital et de rémunération supplémentaires) caractérise un manquement contractuel.'» (page 43), que «' la suspension du projet par décision unilatérale de la société et le refus de discuter de bonne foi d'une issue alternative constituent la violation d'un engagement contractuel, et donc une faute.'» (page 44),

Monsieur [L] [B] ajoute «'A titre subsidiaire, et si par extraordinaire la Cour refusait d'allouer à Monsieur [B] les commissions qui lui sont dues, elle ne manquerait pas de stigmatiser, au regard des faits ci-dessus, un comportement d'une grande mauvaise foi de la part de la société, qui a obtenu le consentement d'un salarié à son embauche et l'a fait démissionner de son poste en lui faisant miroiter une association qu'elle ne mettra jamais en place, de façon totalement unilatérale, pour des motifs illégitimes et sans donner suite au projet alternatif proposé par le salarié. Aussi, elle allouera à Monsieur [B] le montant ci-dessus à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail, et perte de chance.'»

La cour note que les développements qui suivent sont clos par la mention «'le contrat doit être honoré'» et sont relatifs aux chiffrages des commissions revendiquées et aux arguments échangés à leur égard.

La cour note par ailleurs que dans la lettre du 2 septembre 2010 (pièce n° 22 salarié) reçue le 8 septembre 2010 (pièce n° 11 employeur) le conseil de Monsieur [L] [B] indique à la société Cap Marine qu'il est chargé de saisir le conseil de prud'hommes d'une action en résiliation judiciaire et mentionne que des accords étaient intervenus sur la rémunération variable pour financer l'entrée dans le capital et que la société Cap Marine ne respecte pas ses engagements en «'refusant de lui ouvrir son capital, refusant de lui verser la rémunération variable qui lui est due compte tenu du point précédent, prenant à son insu un certain nombre de décisions qui lui sont préjudiciables dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail,

adoptant des comportements et un mode de communication interne peu en rapport avec ses obligations élémentaires'»

En rapprochant cette lettre et les conclusions de Monsieur [L] [B], la cour retient que les mentions précitées contenues dans les conclusions peuvent s'analyser en deux griefs':

refus d'exécuter l'engagement relatif à l'entrée dans le capital de la société Cap Marine

refus de lui servir les rémunérations variables convenues qui étaient destinées au financement de sa prise de participation tant dans le cadre de l'entrée dans le capital de la société Cap Marine que dans le cadre du projet alternatif de création d'une filiale à [Localité 2].

La société Cap Marine s'y oppose en contestant les faits allégués à son encontre.

Il est de droit bien établi que le salarié peut saisir le conseil des prud'hommes afin d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat aux torts de l'employeur lorsque celui-ci n'exécute pas une ou plusieurs obligations essentielles du contrat qui lui incombent ; que les juges du fond disposent alors d'un pouvoir souverain pour apprécier si les manquements de l'employeur sont d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat de travail à ses torts.

S'agissant de la charge de la preuve, si la règle selon laquelle le doute profite au salarié est applicable pour apprécier la régularité de la procédure de licenciement et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur (article L. 1235-1 du Code du travail), cette règle n'est pas applicable à l'appréciation de la demande de résiliation judiciaire qui reste régie, sauf texte spécial dérogatoire, par les règles de preuve du droit commun selon lesquelles il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention (article 9 du code de procédure civile) ; il incombe donc au salarié d'apporter la preuve de faits réels et suffisamment graves à l'encontre de l'employeur pour justifier la résiliation du contrat de travail à ses torts.

En ce qui concerne le risque de la preuve, lorsque le juge constate qu'il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués par le salarié à l'appui de sa demande de résiliation judiciaire, il peut estimer à bon droit que le salarié n'a pas établi les faits qu'il alléguait à l'encontre de l'employeur comme cela lui incombait ; en effet, c'est au salarié d'apporter la preuve des faits réels et suffisamment graves justifiant la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur'et il appartient au juge de se prononcer sur la réalité et la gravité des faits allégués par le salarié à l'appui de sa demande de résiliation judiciaire et non de statuer «'au bénéfice du doute'».

Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats que Monsieur [L] [B] n'apporte pas suffisamment d'éléments de preuve pour établir que la société Cap Marine a commis des manquements à son encontre.

En effet la cour retient que la société Cap Marine rapporte la preuve qu'aucun engagement ferme et définitif n'a été pris en ce qui concerne la prise de participation de Monsieur [L] [B] dans le capital de la société Cap Marine, comme cela ressort de son contrat de travail (pièce n° 3 salarié)'; la cour retient que si des pourparlers ont eu lieu emportant la formation d'un projet de prise de participation comme cela ressort de la lettre du 19 juin 2006 confirmant la proposition d'embauche (pièce n° 2 salarié), ce projet n'a pas été contractualisé pas plus que la note de travail du 18/05/2007 qui est un document de travail (pièce n° 6 salarié) et non un contrat ou un document contractuel en sorte que c'est en vain que Monsieur [L] [B] invoque un droit contractuel à la prise de participation et le refus d'exécuter l'engagement relatif à l'entrée dans le capital de la société Cap Marine.

La cour retient tout au contraire que la société Cap Marine n'a pas opposé de refus à ce projet contrairement à ce que soutient Monsieur [L] [B], et qu'elle a même mis en 'uvre ce projet d'ouverture du capital comme cela avait été projeté sans être contractualisé, cela étant établi par les pièces 5, 9, 10 et 11 produites par Monsieur [L] [B] dont il ressort qu'il avait vocation à faire son entrée dans le capital de la société Cap Marine, peu important que cela soit indirectement par le biais de la société NSH. C'est donc en vain que Monsieur [L] [B] invoque que la société Cap Marine a refusé de lui ouvrir son capital'; tout au contraire et Monsieur [L] [B] adhérait au projet ainsi proposé en 2009 dans le courrier électronique qu'il a adressé à son supérieur hiérarchique le 30 novembre 2009 (pièce n° 10 salarié).

La cour retient aussi que la société Cap Marine a dû interrompre la mise en 'uvre de ce projet d'ouverture du capital à ses salariés (pièces n° 12, 14 et 15 employeur), et dont Monsieur [L] [B] devait bénéficier (pièce n° 10 salarié), du fait de la survenance du contentieux avec la Société Générale comme cela ressort des attestations des salariés (pièces n° 25, 26, 28, 209, 31, 32, 33 employeur) ; c'est donc en vain que Monsieur [L] [B] conteste la portée de ce contentieux en faisant valoir que la société Cap Marine l'a considéré comme voué à l'échec (pièce n° 12 salarié) et n'a pas constitué la moindre provision à cet égard (pièce n° 16 salarié) dès lors que, non seulement le commissaire aux comptes a refusé de certifier les comptes de l'exercice 2009 en raison de ce contentieux (pièce n° 47 employeur) mais aussi de ce que, de fait, l'assureur de la société Cap Marine a dû transiger avec la Société Générale et lui verser 2 millions de dollars (pièces n° 54 et 54 bis employeur) et a imposé à son assurée des majorations de franchise et de cotisations d'assurances (pièces n° 63 à 66 employeur).

C'est aussi en vain que Monsieur [L] [B] impute à la société Cap Marine le non aboutissement du projet d'ouverture du capital dès lors qu'il est établi que l'employeur a mis en 'uvre loyalement ce projet comme cela ressort du dossier de présentation de ce projet, du courrier électronique de relance, du rapport du commissaire aux comptes (pièces n° 12, 15 et 47 employeur) et des attestations des salariés (pièces n° 25, 26, 28, 209, 31, 32, 33 employeur) étant précisé que, suspendu en décembre 2009, le projet a été relancé en 2013 après la résolution du contentieux avec la Société Générale, peu important que les salariés concernés ont renoncé à le poursuivre comme cela ressort de leurs attestations (pièces n° 76 à 79 employeur)'; tout au contraire la cour retient que non seulement Monsieur [L] [B] avait un double discours sur ce projet, discours d'adhésion en façade mais de défiance par ailleurs comme cela ressort de l'attestation de M. [P] (pièce n° 25 employeur) mais qu'en outre il a monté de sa propre initiative, sans concertation avec son employeur, un projet alternatif dés décembre 2009 et cela avec des maladresses qui ont créé des tensions comme cela ressort de l'attestation de Madame [F] (pièce n° 70 employeur) et du courrier électronique «'d'excuse'» adressé le 7 janvier 2010 par Monsieur [L] [B] (pièce n° 52 employeur).

La cour retient encore que la société Cap Marine a néanmoins accepté d'accompagner ce projet allant jusqu'à faire une proposition ferme comme cela ressort des statuts, du pacte d'actionnaires, de la licence de marque et du règlement intérieur qui ont été transmis à Monsieur [L] [B] (pièce n°20 salarié et pièce n°2 employeur) sans que cela n'appelle d'objection de sa part, Monsieur [L] [B] ajoutant même la mention manuscrite suivante sur sa pièce 20 «'15 juillet 2010 donc aucun problème à cette date'» en sorte que c'est en vain que Monsieur [L] [B] invoque le montage d'un projet de substitution à [Localité 2] auquel la société Cap Marine n'a pas été donné suite (page 42 de ses conclusions) et précise que la société Cap Marine a dans le cadre du projet de création d'une filiale à [Localité 2], «'finalement proposé des conditions inacceptables à Monsieur [L] [B] qui ne pouvait que les refuser'» (sic).

Tout au contraire, la cour retient que si cette proposition n'a effectivement pas eu de suite, ce n'est pas du fait de la société Cap Marine mais c'est du fait de Monsieur [L] [B] comme cela ressort de l'attestation de M. [U] (pièce n° 36 employeur) étant précisé de surcroît qu'il est établi que Monsieur [L] [B] menait finalement deux projets analogues à la fois, puisqu'il montait de façon concomitante deux projets pour [Localité 2], l'un avec la société Cap Marine dans le projet Cap Marine [Localité 2] (pièce n° 7 employeur) et l'autre, sans la société Cap Marine, au sein de sa future société, la société FORSEA'S SA (pièces n° 44 et 45 employeur) constituée en novembre 2010 pour exploiter une activité de courtage d'assurance à [Localité 2] (pièce n° 46 employeur) avec MM. [J] et [R] avec qui il est établi qu'il a eu des relations au moins à partir du 5 juillet 2010 (pièce n° 68 employeur).

Compte tenu de ce qui précède, la cour retient qu'aucun manquement ne peut être imputé à la société Cap Marine du fait du projet d'ouverture de son capital et du fait du projet alternatif Cap Marine [Localité 2].

Il en est de même en ce qui concerne la rémunération variable'; en effet la cour retient que le contrat de travail ne prévoyait pas de rémunération variable mais seulement un salaire fixe et une prime de bilan exceptionnelle et volontaire (pièce n° 3 salarié), qu'aucun autre document contractuel ne prévoyait une rémunération variable destinée ou non au financement d'une prise de participation'; c'est donc en vain que Monsieur [L] [B] invoque un manquement de l'employeur à «'la rémunération variable qui lui est due'», en invoquant le contrat de travail, la lettre du 19 juin 2006 (pièce n° 2 salarié), ou les courriers électroniques de ses supérieurs hiérarchiques (pièces n° 5 et 6 salarié) dont le dernier inclut le mode de calcul de cette rémunération variable dans un document daté du 18 mai 2007 au motif que Monsieur [L] [B] interprète faussement ces éléments de preuve en y voyant la preuve d'un engagement de l'employeur de payer une rémunération variable alors même qu'aucun engagement de cette nature n'y est mentionné, étant rappelé que la note de travail du 18/05/2007 (pièce n° 6 salarié) qui mentionne un mécanisme d'intéressement ne suffit pas à établir que le projet mentionné a été contractualisé, ce que conteste l'employeur confirmé en cela par le supérieur hiérarchique de Monsieur [L] [B] (pièce n° 30 employeur).

Surabondamment la cour retient que la société Cap Marine a tout de même servi volontairement en 2009 une prime de bilan de 60.000 € pour permettre à Monsieur [L] [B] de financer son entrée dans le capital de la société Cap Marine comme cela ressort de l'attestation du supérieur hiérarchique de Monsieur [L] [B] (pièce n° 30 employeur).

Surabondamment encore, à supposer qu'ils soient dans le débat, alors qu'ils ne ne font l'objet d'aucune articulation dans les conclusions de Monsieur [L] [B], la cour retient que les autres griefs mentionnés par le conseil de Monsieur [L] [B] dans la lettre reçue le 8 septembre 2010 par la société Cap Marine (pièce n° 11 employeur) relativement aux faits que la société Cap Marine ne respecte pas ses engagements en «'prenant à son insu un certain nombre de décisions qui lui sont préjudiciables dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail (et en) adoptant des comportements et un mode de communication interne peu en rapport avec ses obligations élémentaires'», ne sont pas fondés au motif qu'il n'est produit que les pièces 21, 22, 52 et 54 en rapport avec ces griefs, lesquelles sont dépourvues de valeur probante'; en effet la pièce 22 est la lettre que le conseil de Monsieur [L] [B] a adressé à la société Cap Marine pour lui indiquer qu'il était chargé d'introduire une action en résiliation judiciaire et les pièces 21 et 54 sont les courriers électroniques que Monsieur [L] [B] a adressés à ses supérieurs hiérarchiques le 23 et le 1er juillet 2010 dans lesquels il se plaint de sa situation'; ce sont des éléments de preuve que Monsieur [L] [B] s'est constitué pour lui-même et qui sont donc dépourvus de valeur probante dès lors qu'ils ne sont corroborés par aucun autre élément de preuve. Enfin la pièce 52 est un arrêt de travail dépourvu de valeur probante sur l'origine des troubles anxio-dépressifs qui y sont mentionnés.

Surabondamment aussi, à supposer qu'ils soient dans le débat, alors qu'ils ne ne font l'objet d'aucune articulation dans les conclusions de Monsieur [L] [B], la cour retient que les autres faits mentionnés dans le courrier électronique du 23 juillet 2010 (pièce n° 21 salarié) relativement à l'absence d'entretien de fin d'année, à l'annulation du séminaire de direction 2010, à l'instruction donnée pour que les reportings commerciaux mensuels ne lui soient plus communiqués, à la communication illicite de correspondances confidentielles, ne sont pas plus fondés au motif qu'aucun élément de preuve n'est produit en rapport avec ces griefs.

Il ressort de ce qui précède que Monsieur [L] [B] n'établit pas les manquements allégués à l'encontre de la société Cap Marine ; sa demande de résiliation judiciaire est donc rejetée.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [L] [B] de sa demande de résiliation judiciaire.

Sur le licenciement

Il ressort de l'article L. 1235-1 du Code du travail qu'en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties'; si un doute subsiste il profite au salarié.

La faute lourde est celle commise par un salarié avec l'intention de nuire à l'employeur'; elle est sanctionnée par un licenciement immédiat et entraîne pour le salarié la perte du droit aux indemnités de préavis et de licenciement, et la perte de l'indemnité compensatrice de congés payés'; le mobile du du salarié doit être clairement établi. L'intention de nuire à l'employeur ne saurait être déduite de la seule gravité des faits.

Si le licenciement est prononcé pour faute lourde, mais que l'intention de nuire n'est pas établie, le licenciement peut être requalifié par le juge en licenciement pour faute lourde si l'employeur prouve la réalité de la faute lourde, c'est à dire la réalité de la violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail mais aussi que cette faute est telle qu'elle impose le départ immédiat du salarié, le contrat ne pouvant se poursuivre même pour la durée limitée du préavis.

Pour apprécier la gravité de la faute, les juges doivent tenir compte des circonstances qui l'ont entourée et qui peuvent atténuer la faute et la transformer en faute légère.

Si un doute subsiste sur la gravité de la faute reprochée, il doit profiter au salarié.

Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats et des moyens débattus que la société Cap Marine apporte suffisamment d'éléments de preuve pour établir que Monsieur [L] [B] a tenté d'obtenir, par la menace, des fonds de la part de son employeur en conditionnant sa participation au «'witness statement'» prévu dans le cadre du contentieux Société Générale, au versement des sommes réclamées devant le Conseil de Prud'hommes, comme cela ressort de ce qu'il exigeait un accord avant le 27 septembre 2010 (date de début des auditions), et en mettant en 'uvre ses menaces, à cette date, en refusant de collaborer à la défense de la société dans le cadre d'un dossier vital pour l'entreprise et ses salariés, alors qu'il était le cadre dirigeant directement en charge du dossier, ce qui caractérise amplement l'intention de nuire à la société Cap Marine dès lors qu'il a tenté d'obtenir indûment des fonds.

En effet la cour retient que le chantage consistant de la part de Monsieur [L] [B] à subordonner son témoignage dans le contentieux Société Générale au versement d'une indemnité de 750.000 € est établi par le courrier électronique que le supérieur hiérarchique de Monsieur [L] [B] (M. [D]) a adressé au président de la société Cap Marine le 8 septembre 2010 pour rendre compte de l'entretien qu'il avait eu avec Monsieur [L] [B] la veille, savoir le 7 septembre (pièces n° 20, 34 et 71 employeur), dont la teneur (savoir les termes du chantage) est corroborée par des documents reçus postérieurement par la société Cap Marine, savoir la convocation datée du 6 septembre 2010 devant le conseil de prud'hommes reçue le 9 septembre 2010 (pièce n° 10 employeur) qui est le premier document à mentionner le montant des demandes indemnitaires de Monsieur [L] [B] et la lettre datée du 2 septembre 2010 que le conseil de Monsieur [L] [B] a adressé à la société Cap Marine pour lui indiquer qu'il était chargé d'introduire une action en résiliation judiciaire et qui a été reçue le 8 septembre 2010 (pièce n° 11 employeur).

Le courrier électronique de M. [D], envoyé le 8 septembre (pièce n° 20 employeur) corroboré par ses attestations (pièces n° 34 et 71 employeur) établit que Monsieur [L] [B] a clairement indiqué qu'il refuserait de participer à la défense des intérêts de l'entreprise dans le contentieux de la Société Générale si on ne transigeait pas avec lui à hauteur de 750.000 € avant la date de son audition fixée le 27 septembre'; or à la date de cet entretien le 7 septembre 2010 et du courrier électronique établi le 8 septembre 2010 par M. [D] (pièce n° 20 employeur), la société Cap Marine n'avait pas encore reçu la convocation du conseil de prud'hommes qui sera reçue seulement le 9 septembre 2010 (pièce n° 10 employeur) et qui contient le montant des demandes initiales de Monsieur [L] [B], dont la société Cap Marine ignorait tout jusqu'alors et qui se trouvent être du même ordre de grandeur que la somme demandée lors du chantage litigieux.

C'est donc en vain que Monsieur [L] [B] conteste l'existence du chantage relaté par M. [D] au motif que ce dernier ne pouvait mentionner la somme de 750.000 € sans avoir entendu ce qu'il relate dans son courrier électronique du 8 septembre 2010 alors même qu'à ce moment là, il ne savait même pas que Monsieur [L] [B] allait former des demandes en indemnisation du même ordre de grandeur, demande dont la société Cap Marine n'a été informée que le lendemain, à réception de la convocation du conseil de prud'hommes.

La cour retient encore que Monsieur [L] [B] a mis a exécution sa menace de ne pas témoigner le 27 septembre 2010 si aucun accord transactionnel ne survenait avant cette date entre lui et la société Cap Marine comme le montre le fait qu'il a refusé, comme il l'avait annoncé quelques jours plus tôt à [C] [D] si on n'acceptait pas de céder à ses conditions, de collaborer à la défense de la société Cap Marine dans le cadre du contentieux Société Générale dont il se dit lui-même «'témoin clé'», cela ressortant de ce qu'il indique lui-même sur cette affaire dans le document de présentation de la société Cap Marine Marseille (pièce n° 7 employeur)'; en effet à l'examen des multiples courriers électroniques échangés à propos de son audition programmée le 27 septembre 2010 (pièces n° 26 à 35 salarié) la cour retient que Monsieur [L] [B] a multiplié les questions et finalement les prétextes pour retarder sa décision d'aller ou de ne pas se rendre à cette audition, pour finalement décider de ne pas s'y rendre, alors même que les obstacles invoqués constituaient des prétextes et non des raisons sérieuses et que, de surcroît, tant la société Cap Marine que le conseil de son assureur, ont à chaque fois qu'un obstacle était invoqué, apporté une réponse pertinente pour lever l'obstacle'; la multiplication et la teneur des arguments soulevés entre le 23 septembre 2010 et le 27 septembre 2010 (pièces n° 28 à 35 salarié) suffisent à la cour pour retenir que Monsieur [L] [B] était de mauvaise foi en renâclant comme il l'a fait et cherchait seulement des prétextes pour attendre que la société Cap Marine cède au chantage qu'il avait formulé auprès de M. [D] et dont la lettre de son conseil rappelait indirectement la date limite, savoir le 27 septembre 2010 dans une formule habilement suggestive puisque son rédacteur invite la société Cap Marine à transmettre la lettre à son propre conseil'«'afin qu'il entre en relation avec nous, idéalement avant le 27 septembre 2010'»(pièce n° 22 salarié).

La cour retient que ces comportements ayant consisté à tenter d'obtenir, par la menace, des fonds de la part de son employeur en conditionnant sa participation au «'witness statement'» prévu dans le cadre du contentieux Société Générale, au versement des sommes réclamées devant le Conseil de Prud'hommes, comme cela ressort de ce qu'il exigeait un accord avant le 27 septembre 2010 (date de début des auditions), et à mettre en 'uvre ses menaces à cette date en refusant de collaborer à la défense de la société dans le cadre d'un dossier vital pour l'entreprise et ses salariés, alors qu'il était le cadre dirigeant directement en charge du dossier, caractérisent amplement l'intention de nuire à la société Cap Marine dès lors qu'il a tenté d'obtenir indûment des fonds.

En effet, les commissions réclamées par Monsieur [L] [B] correspondent à des rémunérations variables qu'il allègue à tort lui être dues comme cela a déjà été retenu par la cour.

C'est en vain que Monsieur [L] [B] invoque que son licenciement reste nul car il constitue une violation de la liberté fondamentale d'ester en justice dès lors, selon le moyen, que la société Cap Marine lui reproche finalement d'avoir saisi le conseil de prud'hommes; en effet cette analyse procède d'une dénaturation de la lettre de licenciement.

C'est aussi en vain que Monsieur [L] [B] invoque que son licenciement reste nul car il constitue une violation de la liberté fondamentale de témoigner dès lors, selon le moyen, que la société Cap Marine lui reproche de ne pas avoir voulu intervenir dans le cadre du contentieux Société Générale; en effet cette analyse procède d'une dénaturation de la lettre de licenciement.

Et c'est enfin en vain que Monsieur [L] [B] soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en contestant le chantage qui lui est reproché et l'analyse des éléments de preuve (pièces n° 20 et 22 employeur) pour les motifs déjà retenus ci dessus, étant précisé qu'il importe peu que ni M. [D], ni le président de la société Cap Marine, n'ait transféré à Monsieur [L] [B] le courrier électronique constituant le compte rendu de l'entretien du 7 septembre 2010 au cours duquel Monsieur [L] [B] a formulé les termes de son chantage.

Sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner les développements relatifs à l'entrée dans le capital (pages 19 à 22 des conclusions de Monsieur [L] [B]), au projet de création d'une structure à [Localité 2] (pages 22 à 29 des conclusions) et au dossier Société Générale (pages 29 à 35 des conclusions de Monsieur [L] [B]) qui constituent des moyens et des arguments inopérants en ce qui concerne le licenciement, le rappel de ces faits dans la lettre de licenciement n'étant destiné qu'à rappeler le contexte des faits et non à constituer des griefs en plus du chantage et du refus de coopérer à la défense de la société Cap Marine en rétorsion au refus d'accord transactionnel que la société Cap Marine a stigmatisés à juste titre, la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a jugé que le licenciement de Monsieur [L] [B] est justifié par une faute lourde.

Par voie de conséquence le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [L] [B] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse, des demandes formées au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférente à la période de préavis, et au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement.

Sur la prime de bilan 2010

Monsieur [L] [B] demande la somme de 36.666 euros au titre de la prime de bilan 2010 et fait valoir, à l'appui de cette demande qu'il n'a pas reçu de prime de bilan au titre de l'exercice 2010 alors qu'il a eu une prime de bilan de 6712 € début 2007 pour l'exercice 2006, de 25.000 € début 2008 pour l'exercice 2007, de 60.000 € début 2009 pour l'exercice 2008, de 25.000 € début 2010 pour l'exercice 2009 et que le fait de l'en priver en 2010 en raison de son licenciement pour faute lourde est une sanction pécuniaire prohibée et qu'il ne sert à rien de dire qu'elle est discrétionnaire en raison du principe d'égalité de traitement qui justifie qu'il soit traité comme Mesdames et Messieurs [H], [E], [Z], [S], [P] et [T], qui occupaient des fonctions similaires ou équivalentes aux siennes

La société Cap Marine s'y oppose.

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour déboute Monsieur [L] [B] de sa demande formée au titre de la prime de bilan 2010 au motif que la société Cap Marine soutient à juste titre que le contrat de travail prévoit qu'elle est aléatoire et personnalisée, qu'elle ne constitue pas un usage dès lors qu'elle n'est pas constante, générale et fixe comme cela ressort de l'attestation du commissaire aux comptes et de l'expert comptable (pièces n° 56 et 80 employeur) et que l'employeur peut donc tenir compte du comportement de Monsieur [B] pour apprécier l'opportunité de lui verser ou non une prime de bilan.

C'est aussi en vain que Monsieur [L] [B] invoque le principe d'égalité de traitement au motif que la société Cap Marine établit que les différences de traitement relevées par le commissaire aux comptes sur le montant des primes versées (pièce n° 80 employeur) est justifiée par la situation personnelle de M [E] qui gérait un département dont le chiffre d'affaires était deux fois plus élevé que celui de Monsieur [L] [B] (pièces n° 56, 57 et 60 employeur), de M. [H] âgé de 62 ans qui a perçu une prime de bilan 2010 de 5000 € (pièces n° 56 et 90 employeur), de M [Z] recruté en 1996 qui était gestionnaire technico commercial, directeur adjoint, et a perçu une prime de bilan 2010 de 5000 € (pièces n° 82, 83, 86, 87 et 90 employeur), de M. [P] qui était également directeur adjoint et a perçu une prime de bilan 2010 de 10.000 € (pièces n° 81, 83 employeur) étant précisé que M. [S] n'a pas perçu de prime de bilan 2010 (pièce n° 56 employeur) et que M. [T] était administrateur et associé, et directeur général (pièces n° 88 à 90 employeur) en sorte que Monsieur [L] [B] ne peut aucunement invoquer une inégalité de traitement.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [L] [B] de sa demande formée au titre de la prime de bilan 2010.

Sur les commissions

Monsieur [L] [B] demande la somme de 569.890 euros au titre des commissions et fait valoir, à l'appui de cette demande, à titre principal, qu'elles ont été convenues et à titre subsidiaire, que le même montant lui est dû à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail, et perte de chance dès lors que la société Cap Marine «'a obtenu le consentement d'un salarié à son embauche et l'a fait démissionner de son poste en lui faisant miroiter une association qu'elle ne mettra jamais en place, de façon totalement unilatérale, pour des motifs illégitimes et sans donner suite au projet alternatif proposé par le salarié.'» (page 46 des conclusions de Monsieur [L] [B])

La société Cap Marine s'y oppose.

La cour a déjà, par des motifs développés à l'appui de la décision de rejeter la demande de résiliation judiciaire, retenu que Monsieur [L] [B] n'avait pas de droit contractuel aux commissions réclamées dès lors qu'il n'avait pas été contractualisé de rémunération variable mais seulement un salaire fixe et une prime de bilan, et elle a retenu qu'aucun manquement ne pouvait être retenu à l'encontre de la société Cap Marine en ce qui concerne le non aboutissement du projet d'ouverture du capital et le projet d'ouverture d'une filiale à [Localité 2] en sorte que Monsieur [L] [B] est mal fondé dans ses moyens formés à titre principal et à titre subsidiaire à l'appui de sa demande de commissions ou de dommages et intérêts du même montant.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [L] [B] de sa demande formée à hauteur de 569.890 euros au titre des commissions ou à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail, et perte de chance.

Par voie de conséquence, le jugement déféré est aussi confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [L] [B] de sa demande formée à hauteur de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail et préjudice distinct.

Sur le DIF et la portabilité

Monsieur [L] [B] demande la somme de 10.921,33 euros à titre de dommages et intérêts pour perte du DIF et de la portabilité ; la société Cap Marine s'y oppose.

En application des dispositions de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention, en particulier l'existence d'un fait générateur de responsabilité, du préjudice en découlant et donc d'une lien de causalité entre le préjudice et la faute.

Sans qu'il soit besoin d'examiner le fait générateur de responsabilité, il résulte de l'examen des moyens débattus que Monsieur [L] [B] n'articule dans ses conclusions aucun moyen permettant de caractériser le préjudice découlant, selon lui, de la perte du DIF et de la portabilité, dans son quantum'; il n'en a pas été articulé d'avantage lors de l'audience'; dans ces conditions, le moyen de ce chef est donc rejeté.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [L] [B] de sa demande de dommages et intérêts pour perte du DIF et de la portabilité.

Sur la délivrance de documents

Monsieur [L] [B] demande la remise de documents (certificat de travail, bulletins de paie, attestation destinée à Pôle Emploi) sous astreinte.

Il est constant que les documents demandés lui ont déjà été remis et il n'est pas établi qu'ils ne sont pas conformes ; la demande de remise de documents est donc rejetée.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [L] [B] de sa demande de ce chef.

Sur la demande reconventionnelle en dommage et intérêts pour procédure abusive

La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formulée par la société Cap Marine est rejetée, le fait pour Monsieur [L] [B] d'exercer son droit d'agir en raison des litiges opposant les parties et d'être reconnu mal fondé en ses demandes n'étant pas en soi abusifs.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Cap Marine de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur la demande reconventionnelle de 200.000 €

La demande de dommages et intérêts de 200.000 € formulée par la société Cap Marine est rejetée au motif que la société Cap Marine n'établit aucunement que les frais et surcoûts qu'elle invoque sont imputables à une faute commise par Monsieur [L] [B]'; tout au contraire, la cour retient que ces frais découlent directement ou indirectement du seul contentieux Société Générale et qu'il n'est pas établi que Monsieur [L] [B] a commis un manquement à l'obligation d'information qui pesait sur lui comme courtier lors de la souscription de la police d'assurance litigieuse avec la Société Générale.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Cap Marine de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts de 200.000 €.

Sur les autres demandes

La cour condamne Monsieur [L] [B] aux dépens en application de l'article 696 du Code de procédure civile.

Le jugement déféré est confirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il n'apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles de la procédure d'appel.

L'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande, notamment la demande formée par Monsieur [L] [B] en remboursement des frais de traduction qui constituent des frais irrépétibles, ou en défense, est rejeté, leur rejet découlant nécessairement des motifs amplement développés dans tout l'arrêt.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions';

Y Ajoutant,

Déboute la société Cap Marine de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Condamne Monsieur [L] [B] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 13/08409
Date de la décision : 27/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°13/08409 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-27;13.08409 ?
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