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24/01/2017 | FRANCE | N°16/00617

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 24 janvier 2017, 16/00617


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 24 JANVIER 2017



(n° 32 , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/00617



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Décembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 13/09549





APPELANTS



Monsieur [Z] [V]

[Adresse 1]

[Adresse 2]



né le [Date naissance 1] 198

5 à [Localité 1] (75)



Représenté par Me Véronique KIEFFER JOLY, avocat au barreau de PARIS, toque : L0028

Ayant pour avocat plaidant Me Laetitia EUDELLE, de la SELARL VAUBAN, avocat au barreau de C...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 24 JANVIER 2017

(n° 32 , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/00617

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Décembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 13/09549

APPELANTS

Monsieur [Z] [V]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 1] (75)

Représenté par Me Véronique KIEFFER JOLY, avocat au barreau de PARIS, toque : L0028

Ayant pour avocat plaidant Me Laetitia EUDELLE, de la SELARL VAUBAN, avocat au barreau de COMPIEGNE

Monsieur [C] [F] [V]

[Adresse 3]

LES PARCS DE SAINT TROPEZ

[Adresse 4]

né le [Date naissance 2] 1942 à [Localité 2] (Tunisie)

Représenté par Me Véronique KIEFFER JOLY, avocat au barreau de PARIS, toque : L0028

Ayant pour avocat plaidant Me Laetitia EUDELLE, de la SELARL VAUBAN, avocat au barreau de COMPIEGNE

SCI TEMPLAVOYE agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 5]

[Adresse 2]

N° SIRET : 484 405 428

Représentée par Me Véronique KIEFFER JOLY, avocat au barreau de PARIS, toque : L0028

Ayant pour avocat plaidant Me Laetitia EUDELLE, de la SELARL VAUBAN, avocat au barreau de COMPIEGNE

INTIMES

Monsieur [N] [Y]

[Adresse 6]

[Adresse 7]

né le [Date naissance 3] 1936 à [Localité 1] (75)

Représenté par Me Arié ALIMI de la SELARLU ARIÉ ALIMI AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1899

Ayant pour avocat plaidant Me Madeleine LAZETTES DE ST LEGER, de la SELARLU ARIÉ ALIMI AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1899

Madame [Y] [Y] épouse [Y]

[Adresse 6]

[Adresse 7]

née le [Date naissance 4] 1935 à [Localité 1] (75)

Représenté par Me Arié ALIMI de la SELARLU ARIÉ ALIMI AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1899

Ayant pour avocat plaidant Me Madeleine LAZETTES DE ST LEGER, de la SELARLU ARIÉ ALIMI AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1899

MONSIEUR LE TRESORIER DE MOUGINS

[Adresse 8]

[Adresse 9]

Représenté par Me Alain STIBBE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0211

Ayant pour avocat plaidant Me Audrey DUFAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0211

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Sophie RICHARD, Conseillère, faisant fonction de Présidente de chambre,

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère, chargée du rapport

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Sophie RICHARD, Conseillère,

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère,

Mme Annick HECQ-CAUQUIL, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Sophie RICHARD, Conseillère, faisant fonction de présidente et par Mme Lydie SUEUR, greffier.

*****

Le 30 octobre 1986, M. [Y] a acquis en indivision avec M.[V] un immeuble en copropriété situé [Adresse 5].

En 1989, M. et Mme [Y] ont adopté le régime matrimonial de la communauté universelle.

Le trésorier de Mougins a inscrit en 2000 une hypothèque légale sur les lots 101, 104, 201, 202, 301, 303, 305, 308, 400 à 402, 404 et 405, renouvelée en 2010 en garantie d'une créance fiscale de 373 195, 43 €.

Par acte authentique du 2 août 2005, M. [C] [V] et les époux [Y] ont constitué une SCI dénommée TEMPLAVOYE et les époux [Y] ont notamment apporté la moitié indivise en pleine propriété des lots leur appartenant dans l'immeuble du [Adresse 10]. Ils se sont vus attribuer 9 860 parts et M. [C] [V] 1part, d'une valeur nominale de 100 €.

Par acte notarié du 28 septembre 2005, les époux [Y] ont cédé à M. [C] [V] l'ensemble de leurs parts dans la SCI pour la somme de 225 000 €.

Par acte du 24 janvier 2011, M. [C] [V] a donné à son fils, M. [Z] [V], la nue-propriété de toutes ses parts.

Le 17 juin 2013, le trésorier de Mougins a fait assigner les époux [Y] ainsi que M. [C] [V] devant le tribunal de grande instance de Paris sur le fondement de l'action paulienne. Le 5 septembre 2014, il a fait assigner en intervention forcée M. [Z] [V].

Par un jugement du 1er décembre 2015, le tribunal a notamment :

- déclaré recevable l'intervention forcée de M. [Z] [V],

- débouté les époux [Y], la SCI TEMPLAVOYE, M. [C] [V] et M. [Z] [V] de leurs demandes,

- déclaré inopposable au trésorier de Mougins l'acte d'apport du 2 août 2005 contenant apport de la moitié indivise de la propriété des lots 1, 2, 3, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 20, 22, 25, 28, 33, 48, 49, 50, 53, 54, 55, 101, 104, 201, 202, 203, 301, 303 305, 308, 401, 402, 404 et 405 de l'immeuble du [Adresse 5],

- déclaré inopposable au trésorier de Mougins l'acte dressé le 28 septembre 2005 contenant cession des 9 860 parts de la SCI TEMPLAVOYE à M. [C] [V],

- dit le trésorier de Mougins fondé à poursuivre à l'encontre de la SCI TEMPLAVOYE le règlement de sa créance de 390 830,91 € ,

- dit que copie du jugement sera communiquée à la 2ème chambre 1ère section du tribunal de grande instance de Paris,

- ordonné le partage de l'indivision entre les époux [Y] et M. [C] [V] relativement à l'immeuble susmentionné,

- désigné pour y procéder le président de la chambre interdépartementale des notaires de Paris avec faculté de délégation,

- préalablement à ces opérations et pour y parvenir, ordonné sur les poursuites du trésorier de Mougins et en présence de la SCI TEMPLAVOYE et de M.[V] la licitation à l'audience des criées du tribunal de grande instance de Paris la vente judiciaire de l'indivision entre les époux [Y] et M. [C] [V] de l'immeuble ci dessus désigné,

- condamné in solidum époux [Y] et M. [C] [V] au paiement de la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [C] [V], M. [Z] [V] et la SCI TEMPLAVOYE ont formé appel de cette décision le 11 janvier 2016.

Dans leurs dernières conclusions communiquées par voie électronique le 15 février 2016, les appelants demandent à la cour, avant dire droit, de déclarer le trésorier de Mougins irrecevable en son action paulienne dirigée à l'encontre de M. [Z] [V], à titre principal, de déclarer le trésorier de Mougins irrecevable dans son action paulienne et son action oblique dirigées à l'encontre de la SCI TEMPLAVOYE et de M. [C] [V], subsidiairement, de débouter le trésorier de Mougins de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la SCI TEMPLAVOYE et de M. [C] [V], dans tous les cas, de condamner le trésorier de Mougins à payer à la SCI TEMPLAVOYE, à M. [C] [V] et à M. [Z] [V] la somme de 10 000 € chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 14 avril 2016, le trésorier de Mougins sollicite la confirmation du jugement, l'irrecevabilité des contestations de M. [Z] [V], de la SCI TEMPLAVOYE et de M. [C] [V] sur le montant des sommes dues par les époux [Y], la condamnation in solidum de époux [Y], de M. [Z] [V], de la SCI TEMPLAVOYE et de M. [C] [V] à lui payer la somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts pour fraude paulienne et la somme de 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions communiquées par voie électronique le 6 avril 2016, les époux [Y] demandent à M ou Mme le 1er président de la cour d'infirmer le jugement du 1er décembre 2005, de 'déclarer irrecevable l'incompétence' au profit de la juridiction administrative soulevée par le trésorier de Mougins , de constater que les conditions de l'action paulienne ne sont pas réunies, de déclarer le trésorier de Mougins irrecevable, en conséquence de le débouter de l'ensemble de ses demandes à leur encontre, en tout état de cause, de condamner le trésorier de Mougins à leur payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

1 - Sur la recevabilité de l'action paulienne :

Les époux [Y] font valoir que l'action en recouvrement de l'impôt est prescrite en application de l'article L274 du livre des procédures fiscales et qu'ainsi l'action paulienne est irrecevable.

Le trésorier de Mougins réplique qu'il n'entre pas dans la compétence du juge judiciaire de constater la prescription de l'action en recouvrement de l'impôt. Il ajoute qu'en toute hypothèse celle-ci n'est pas prescrite alors que des actes interruptifs de prescription sont intervenus entre la date de mise en recouvrement de l'imposition et la présente instance.

Les époux [Y] n'élèvent aucune critique contre les différents actes de poursuite invoqués par le trésorier de Mougins comme ayant interrompu la prescription et que le tribunal a énumérés dans son jugement ; aussi le moyen tiré de l'existence d'une prescription doit être écarté.

Il n'y a donc pas lieu de déclarer l'action paulienne irrecevable à ce titre.

Les appelants exposent qu'en application des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008 sur la prescription, le trésorier de Mougins pouvait agir jusqu'au 19 juin 2013 pour solliciter l'inopposabilité de l'acte d'apport des époux [Y] à la SCI TEMPLAVOYE du 2 août 2005 et qu'en omettant d'attraire M. [Z] [V] avant cette date du 19 juin 2013 devant le tribunal de grande instance de Paris, le trésorier de Mougins a laissé prescrire l'action à son égard. Ils ajoutent que l'acte introductif d'instance du 17 juin 2013 ne peut avoir eu d'effet interruptif à l'égard de M. [Z] [V] alors que celui-ci n'était pas visé par cet acte et n'en a pas reçu signification. Ils concluent donc à l'irrecevabilité de l'action paulienne à l'égard de M. [Z] [V].

Les appelants font ensuite valoir que M. [C] [V] a fait donation à son fils M. [Z] [V] de la nue-propriété des parts sociales et que ce dernier constitue une partie nécessairement intéressée au litige, qu'ainsi, il devait être attrait à la cause en sa qualité de tiers acquéreur à titre gratuit afin que l'acte de donation du 24 janvier 2011 soit déclaré inopposable au trésorier de Mougins.

Estimant que M. [Z] [V] n'a pas été valablement attrait à la cause, les appelants concluent à l'irrecevabilité de l'action paulienne dirigée à l'encontre de la SCI TEMPLAVOYE et de M. [C] [V].

Le trésorier de Mougins expose qu'il a fait assigner M. [Z] [V] en intervention forcée pour mettre un terme au débat initié par les défendeurs sur la recevabilité de l'action mais que la présence de M. [Z] [V] était superfétatoire. Le trésorier de Mougins soutient en effet que les deux actes visés par l'action paulienne concernaient pour le 1er la SCI TEMPLAVOYE et pour le 2nd M. [C] [V] qui sont tous deux parties à l'instance et tiers acquéreurs. Il ajoute que M. [Z] [V] qui est le donataire de la nue- propriété des parts de la SCI n'a pas la qualité de tiers acquéreur et que sa mise en cause n'était pas nécessaire. ll considère au surplus que le délai de prescription de l'action a été interrompu par l'assignation en justice du 17 juin 2013 et que l'intervention forcée bénéficie également de cette interruption dès lors que celle-ci accessoire à l'action principale, vise le même objet et tend au même but.

Le trésorier de Mougins a fait assigner le 17 juin 2013 les époux [Y], la SCI TEMPLAVOYE et M. [C] [V] en vue de voir déclarer inopposables à sa personne l'acte d'apport du 2 août 2005 ainsi que l'acte de cession des parts du 28 septembre suivant.

Le 5 septembre 2014, le trésorier de Mougins a fait assigner M. [Z] [V] en intervention forcée afin que soit prononcée la jonction avec l'instance principale.

Il convient tout d'abord de relever que M. [C] [V] n'a donné à son fils que la nue-propriété des parts sociales de sorte que M. [C] [V] reste propriétaire de l'usufruit et que pour ce droit, la présence de son fils à l'action n'était pas nécessaire de sorte que l'action paulienne est en toutes hypothèses recevable en ce qu'elle concerne l'usufruit des parts sociales.

S'agissant de la nue-propriété appartenant à M. [Z] [V], celui-ci n'était partie ni à l'acte constitutif de la SCI TEMPLAVOYE du 2 août 2005 ni à l'acte de cession du 28 septembre suivant; néanmoins, la mise en cause des effets de ces deux actes est de nature à lui faire perdre le bénéfice des droits acquis sur les parts sociales par la donation qui lui a été consentie par son père. Aussi et même si M. [Z] [V] a acquis les parts sociales à titre gratuit, il y a lieu d'admettre que sa présence à l'instance était nécessaire pour ce qui concerne la nue-propriété des parts.

Il n'est pas contesté que l'action paulienne dirigée contre la SCI TEMPLAVOYE et M. [C] [V] a été exercée dans le délai de la prescription le 17 juin 2013, le délai de 30 ans ayant commencé à courir depuis 2005, réduit dans les conditions fixées par l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, ayant expiré le 19 juin 2013.

L'action en intervention forcée n'a aucune autonomie par rapport à l'action principale et M. [Z] [V] contre qui aucune demande n'est formée, n'est présent à l'instance qu'en qualité d'ayant droit de M. [C] [V] du fait de la donation, de sorte que l'assignation en justice délivrée à son père le 17 juin 2013 a produit un effet interruptif à son égard.

Surabondamment il y a lieu de constater que M. [Z] [V] n'est lui même devenu titulaire de la nue-propriété des parts sociales que par un acte de donation du 24 janvier 2011 et qu'il s'est écoulé moins de 5 ans entre cet acte et sa publication et l'assignation en intervention forcée du 5 septembre 2014.

Aussi il y a lieu de constater que M. [Z] [V] a été régulièrement mis en cause dans le cadre de l'instance née de l'exercice par le trésorier de Mougins de l'action paulienne contre les actes des 2 août et 28 septembre 2005 sans qu'il y ait eu prescription à son égard et que les demandes du trésorier de Mougins fondées sur ladite action paulienne sont donc recevables.

2 - Sur la recevabilité de l'action oblique en liquidation-partage :

La SCI TEMPLAVOYE, M. [C] [V] et son fils se fondant sur l'article 1360 du code de procédure civile, soulèvent également l'irrecevabilité de l'action oblique faute pour le trésorier de Mougins de justifier de ses diligences pour parvenir à un partage amiable.

Le trésorier de Mougins répond que l'article 1360 du code de procédure civile n'est pas applicable car le créancier personnel d'un des co-indivisaires dispose uniquement de la faculté de provoquer le partage au nom de son débiteur.

Le créancier personnel de l'indivisaire ne dispose sur le fondement de l'article 815-17 du code civil que de la faculté de provoquer le partage au nom de son débiteur de sorte que les dispositions de l'article 1360 du code de procédure civile qui imposent à l'indivisaire, demandeur en partage, de préciser les diligences entreprises pour parvenir à un partage amiable, ne sont pas applicables.

Aussi l'action oblique en liquidation partage exercée par le trésorier de Mougins doit être déclarée recevable.

3 - Sur l'action paulienne :

Les appelants font valoir que l'action paulienne n'est pas ouverte au créancier hypothécaire si l'aliénation du bien n'a pas eu pour effet de réduire la garantie qui résulte de son droit de suite. Ils ajoutent que l'apport de l'immeuble à la SCI TEMPLAVOYE n'a pas pour effet d'en amoindrir la valeur.

Ils soutiennent en outre que le trésorier de Mougins ne pouvait saisir la part de son débiteur indivisaire de sorte que le recouvrement de sa créance n'étant pas possible sur l'immeuble, son apport à la société ne pouvait pas présenter de caractère frauduleux.

Le trésorier de Mougins répond que l'acte d'apport à la SCI TEMPLAVOYE a appauvri les époux [Y] et que le droit de suite lié à l'hypothèque était inopérant puisque celle-ci n'était inscrite que sur les parts et portions de époux [Y] qui ne détenaient que la moitié indivise de l'immeuble. Le trésorier de Mougins ajoute que préalablement à la saisie, il devait provoquer le partage et qu'il ne peut plus le faire désormais puisque les époux [Y] ne font plus partie de la SCI. Il conclut que l'action paulienne lui est ouverte dès lors que par le montage juridique effectué, l'efficacité de l'exercice de la sûreté hypothécaire est compromise.

Le trésorier de Mougins répond en outre que le fait que le bien en cause ait été acquis en indivision avec M. [C] [V] ne l'empêchait pas de le saisir après avoir provoqué le partage.

Le créancier qui dispose d'une hypothèque sur la part de son débiteur dans un bien indivis, ne peut exercer ses droits qu'en provoquant préalablement le partage de l'indivision.

En faisant apport de sa part indivise à la SCI TEMPLAVOYE puis en cédant les parts de la société à M. [C] [V], les époux [Y] ont privé le trésorier de Mougins de la possibilité de provoquer le partage puisqu'ils ne sont plus propriétaires indivis de l'immeuble; ainsi l'hypothèque inscrite sur ledit immeuble est devenue inopérante.

Le montage juridique reposant sur l'acte d'apport puis sur la cession de parts sociales a ainsi compromis l'efficacité de la garantie hypothécaire dont bénéficiait le trésorier de Mougins .

Par ailleurs, si le trésorier de Mougins ne pouvait procéder directement à la saisie du bien indivis, il pouvait néanmoins provoquer le partage de l'indivision pour poursuivre le recouvrement de sa créance.

Les époux [Y] soutiennent que le trésorier de Mougins n'établit ni son préjudice ni leur intention frauduleuse ni la complicité de la SCI TEMPLAVOYE.

S'agissant du préjudice, il n'est pas contesté que [Adresse 11] a évalué l'immeuble en cause à la somme de 4 252 000 € (valeur libre) et à 3 297 000 € (valeur occupé), qu'il a été apporté à la SCI TEMPLAVOYE contre 9 860 parts d'une valeur de 100 € soit pour la somme de 986 000 € et que lesdites parts ont été cédées à M. [C] [V] pour la somme de 225 000 €.

Les époux [Y] critiquent l'évaluation de [Adresse 11] en faisant valoir qu'elle remonte à 2010; néanmoins, ils n'invoquent aucune cause propre à l'immeuble qui pourrait avoir entraîner une diminution de sa valeur alors que les prix sur le marché immobilier parisien n'ont pas connu de baisse significative depuis cette date, étant par ailleurs précisé que le bien avait été acquis en 1986 pour le prix de 2 667 857 €. Par ailleurs les époux [Y] justifient le prix de cession des parts sans commune mesure avec la valeur de l'immeuble par le passif de la SCI TEMPLAVOYE. Cependant, ils ne versent aux débats aucune pièce de nature à établir l'existence de dettes à la charge de la SCI.

Il est ainsi suffisamment établi que les deux opérations d'apport en société et de cessions des parts sociales à un tiers ont causé un préjudice au trésorier de Mougins alors qu'il ne parvenait pas à obtenir le règlement de sa créance.

Il importe peu que les actes d'apport et de cession des parts sociales présentent une régularité juridique dès lors qu'ils ont été effectués en vue de soustraire un bien immobilier aux poursuites du créancier qui par les deux opérations susvisées se trouvait dans l'impossibilité de poursuivre le paiement de sa créance malgré l'hypothèque dont il bénéficiait.

Enfin l'autonomie juridique de la personne morale ne suffit pas à écarter la complicité de la SCI TEMPLAVOYE alors que les époux [Y] en détenaient 99% des parts.

Ainsi le trésorier de Mougins est il bien fondé à exercer l'action paulienne.

4 - Sur l'action oblique :

Les appelants font valoir en se fondant sur les articles 1377 du code de procédure civile et 1686 du code civil que l'immeuble composé de divers lots est facilement partageable et qu'il n'y a pas lieu d'en solliciter la licitation.

Le trésorier de Mougins répond que l'immeuble ayant été acquis par indivision, et n'étant pas partageable par nature, il n'avait d'autre choix que d'en provoquer la licitation partage. Il ajoute qu'aucune proposition de partage n'a été effectuée.

L'article 815-17 du code civil autorise le créancier personnel d'un débiteur indivisaire à provoquer le partage de l'indivision.

En l'absence de tout partage réalisé entre les co-indivisaires, le trésorier de Mougins est recevable et bien fondé à agir en justice pour provoquer celui-ci.

5 - Sur le quantum de la créance :

Les appelants contestent le montant de la créance du trésorier de Mougins en ce qu'elle inclut la somme de 161 191,26 € au titre des frais, qui n'est pas justifiée. Ils déclarent également que le trésorier de Mougins ne justifie pas de son préjudice à l'appui de sa demande en dommages-intérêts.

Le trésorier de Mougins déclare qu'il justifie de sa créance par la production du bordereau fiscal, de l'extrait d'avis d'imposition pour les revenus 1994 des époux [Y] et du décompte des intérêts. Il soutient que la SCI templavoye, Mrs. [C] et [Z] [V] n'ont pas qualité pour contester les impositions mises définitivement à la charge des époux [Y]. Il réclame en outre 20 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la fraude à laquelle la SCI TEMPLAVOYE, Mrs. [C] et [Z] [V] ont activement participé.

Le trésorier de Mougins verse aux débats l'avis d'imposition des époux [Y] pour les revenus de 1994 faisant apparaître un impôt dû de 244 937, 24 € ainsi que le décompte des intérêts moratoires arrêtés à la somme de

- 83 733, 85 € pour la période du1er janvier 2001 au 30 juin 2009,

- 17 635, 48 € pour la période du 1er juillet 2009 au 31 décembre 2010,

- 17 635, 48 € pour la période du 1er janvier 2011 au 30 juin 2012

- 17 635, 48 € pour la période du 1er juillet 2012 au 31 décembre 2013

Total = 136 640, 29 €.

Le trésorier de Mougins justifie ainsi être créancier des époux [Y] à hauteur de 244 937, 24 € (impôt)+ 136 640, 29 € ( intérêts)+ 9 802, 94€ (majoration).

Il est donc bien fondé à poursuivre le recouvrement de la somme de 390 830, 91€ par la voie de l'action paulienne et de l'action oblique.

Le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 1er décembre 2015 qui a fait droit aux demandes dU trésorier de Mougins, doit donc être confirmé.

Le trésorier de Mougins réclame également la somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts en raison de la fraude commise par les époux [Y], les consorts [V] et la SCI TEMPLAVOYE.

Néanmoins il ne caractérise pas son préjudice aussi il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande et le jugement du 1er décembre 2015 sera également confirmé sur ce point.

Il y a lieu de condamner in solidum les époux [Y], M. [C] [V] et la SCI TEMPLAVOYE à payer au trésorier de Mougins la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les autres demandes formées à ce titre étant rejetées.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 1er décembre 2005,

Condamne in solidum les époux [Y], M. [C] [V] et la SCI TEMPLAVOYE à payer au trésorier de Mougins la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum les époux [Y], M. [C] [V], M. [Z] [V] et la SCI TEMPLAVOYE aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de maître STIBBE, selon l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,Madame RICHARD, Conseillère,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 16/00617
Date de la décision : 24/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°16/00617 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-24;16.00617 ?
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