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20/01/2017 | FRANCE | N°14/22070

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 11, 20 janvier 2017, 14/22070


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11



ARRET DU 20 JANVIER 2017



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/22070



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Octobre 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n°





APPELANTE



SAS GROUPE EMERAUDE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège<

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[Adresse 1]

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N° SIRET : B 394 792 832 ([Localité 2])



Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

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Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRET DU 20 JANVIER 2017

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/22070

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Octobre 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n°

APPELANTE

SAS GROUPE EMERAUDE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : B 394 792 832 ([Localité 2])

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Représentée par Me Christian-Clément KHERACHI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0294

INTIMEE

SAS [A] TRAVAUX PUBLICS, prise en la personne de son représentant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIRET : [A] ([Localité 4])

Représentée par Me Sophie VICHATZKY de l'ASSOCIATION TREHET VICHATZKY, avocat au barreau de PARIS, toque : J119

Représentée par Me Franck LANGLOIS, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Octobre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant M. Patrick BIROLLEAU, Président de la chambre, et Mme Michèle LIS SCHAAL, Présidente de chambre.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Patrick BIROLLEAU, Président de la chambre, chargé du rapport

Mme Michèle LIS SCHAAL, Présidente de chambre

M. François THOMAS, Conseiller, désignée par Ordonnance du Premier Président pour compléter la Cour

Greffier, lors des débats : Mme Patricia DARDAS

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Patrick BIROLLEAU, président et par Mme Patricia DARDAS, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Le groupe [A], dont Monsieur [K] [A] était le dirigeant et l'actionnaire majoritaire, comprenait essentiellement deux branches d'activités :

- l'une, de travaux publics, constituée principalement de la SAS [A] TRAVAUX PUBLICS et des sociétés y rattachées ([A]) ;

- l'autre, de casinos, dont les différentes sociétés y rattachées sont demeurées regroupées sous la société FINANCIÈRE [K] [A], qui deviendra la société GROUPE EMERAUDE SAS (EMERAUDE).

À la suite de l'ouverture de la succession de Monsieur [K] [A] le 30 octobre 2003, un protocole d'accord sur la répartition des éléments d'actif et de passif est intervenu le 22 novembre 2004, entre ses deux filles héritières, soit :

- d'une part, Madame [J] [A], veuve [N], née le [Date naissance 1] 1959 ;

- d'autre part, Mademoiselle [R] [A], née le [Date naissance 2] 2002, représentée par sa mère, Madame [N] [F], veuve [K] [A], administratrice légale sous contrôle judiciaire.

Aux termes de la succession, l'activité travaux publics revenait à la cadette [R] [A] et l'activité de casinos à l'aînée [J] [A]. Cette dernière qui, après le décès de son père avait été désignée dans les organes d'administration de la SAS [A] TRAVAUX PUBLICS et les sociétés commerciales y rattachées, s'est en outre engagée, dans la limite d'un montant de 4 Meuros, à garantir la société [A] TRAVAUX PUBLICS attribuée à sa cadette, des conséquences financières d'un contentieux dit des « enrobés 76 », relatif à d'éventuelles pratiques anti-concurrentielles dans le secteur des travaux routiers en Seine Maritime, affectant ladite société et ses filiales, par une garantie à première demande émise par un établissement bancaire de premier rang.

L'acte notarié du 31 mars 2005, de projet de partage successoral a été approuvé par ordonnance du 16 septembre 2005 du juge des tutelles du tribunal d'instance de Pont l'Évêque, la succession ayant fait l'objet d'un partage définitif par acte notarié du 17 octobre 2005, rectifié le 24 octobre suivant, homologué par jugement du 28 octobre 2005 du tribunal de grande instance de Lisieux.

Le 22 décembre 2005, le CRÉDIT LYONNAIS a émis une garantie autonome de paiement à première demande d'un montant maximum de 4 millions d'euros, en visant expressément les procédures en cours devant le Conseil de la concurrence et devant le tribunal correctionnel de Rouen.

Le dossier des «enrobés 76» a fait l'objet :

- le 15 décembre 2005, d'une décision du Conseil de la concurrence ayant condamné la société [A] au paiement d'une amende d'un montant de 2,9 millions d'euros, mise en recouvrement le 12 juillet 2006, le recours à l'encontre de cette décision ayant été rejeté par arrêt du 30 janvier 2007 de la cour d'appel de Paris ; le pourvoi dirigé à l'encontre de la décision de la cour d'appel a été rejeté par arrêt du 15 janvier 2008 de la Cour de cassation et la requête du 10 juillet 2008 de la société [A] devant la Cour européenne des droits de l'homme a été déclarée irrecevable par décision du 17 juin 2010 ;

- le 11 septembre 2008 (dans le cadre de la fixation du montant des intérêts civils en marge de la poursuite correctionnelle à l'encontre de l'ancien directeur général), de la condamnation solidaire de la société [A] avec les autres prévenus civilement responsables, par jugement du tribunal de grande instance de Rouen, au paiement d'une somme globale d'un montant de 4.956.158 euros au département de la Seine Maritime, dont la part de la société [A] a été fixée à hauteur de la somme de 495.615,81 euros à la suite de l'accord de transaction du 20 octobre 2008 entre les différents civilement responsables.

Émetteur de la garantie, le CRÉDIT LYONNAIS a réglé à la société [A] le montant des condamnations à hauteur de la somme de 3.395.615,81 euros (2.900.000 + 495.615,81).

Le 25 janvier 2010, le département de la Seine Maritime a en outre saisi le tribunal administratif de Rouen de différentes requêtes en annulation de marchés de travaux publics liés à l'affaire des « enrobés 76 » et en restitution des sommes antérieurement versées au titre de ces marchés. À la suite d'un accord général du 11 juillet 2013, entre la collectivité départementale et les différentes entreprises protagonistes de l'affaire, la société [A] s'est engagée à verser la somme de 500.000 euros au département.

Entre temps, le 4 janvier 2011, aux motifs qu'elle n'aurait pas été associée à la défense des intérêts de la société [A] tant devant le Conseil de la concurrence que devant le tribunal correctionnel de Rouen, la société EMERAUDE a attrait la société [A] devant le tribunal de commerce de Bernay afin d'obtenir la restitution de la somme de 3.395.615,81 euros initialement versée par le CRÉDIT LYONNAIS. Tout en s'y opposant, la société [A] a reconventionnellement sollicité la condamnation de la société EMERAUDE à lui fournir une garantie bancaire [complémentaire] à première demande à hauteur du montant non appelé de la garantie initiale, soit à hauteur de la somme de 601.384,19 euros [en réalité 4.000.000 - 3.395.615,81 = 604.384,19], valable jusqu'au terme des nouvelles procédures administratives engagées. Le tribunal de commerce de Bernay, par jugement du 4 mars 2013, confirmé par arrêt du 16 janvier 2014 de la cour d'appel de Rouen, a débouté les parties de toutes leurs demandes. Le pourvoi à l'encontre de cette dernière décision a été rejeté par arrêt du 29 septembre 2015 de la Cour de cassation.

Le 30 avril 2014, faisant état d'une partie des motifs de l'arrêt précité du 16 janvier 2014 de la cour d'appel de Rouen, la société [A] a attrait la société EMERAUDE devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de l'entendre condamner à lui payer la somme de 500.000 euros majorée des intérêts à compter de l'assignation, outre la somme de 25.000 euros de dommages et intérêts « pour résistance abusive » et l'indemnisation de ses frais irrépétibles. La société EMERAUDE :

- à titre principal, a soulevé l'irrecevabilité des demandes en invoquant l'instance précédemment diligentée à [Localité 4] et à [Localité 5] et l'obligation de concentration des moyens, en sollicitant reconventionnellement la condamnation de la société [A] à lui payer la somme de 50.000 euros de dommages et intérêts « pour procédure abusive » outre l'indemnisation de ses frais non compris dans les dépens ;

- subsidiairement, s'est opposée aux demandes.

Par jugement contradictoire du 17 octobre 2014 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris, après avoir écarté la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité alléguée des demandes, a condamné la société EMERAUDE à payer à la société [A], la somme de 500.000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation, outre la somme de 20.000 euros au titre des frais irrépétibles, en retenant essentiellement « qu'il résulte des éléments du débat ['] que les trois séries de procédures relèvent d'un seul et même contentieux ['] des « enrobés 76 », que l'objectif recherché par les parties ['] étaient d'assurer l'équilibre financier du partage successoral en faisant supporter à Madame [J] [A] (à laquelle s'est substituée la société GROUPE EMERAUDE) le risque lié au dossier dit des « enrobés 76 » jusqu'à 4 millions d'euros et que, dans ce cas, la limitation à une ou des procédures particulières n'aurait eu, au regard de ces objectifs, aucun sens ».

Vu l'appel régulièrement interjeté le 4 novembre 2014 par la société EMERAUDE ;

Vu ses dernières écritures transmises par le RPVA le 16 octobre 2015 par lesquelles elle demande à la Cour de :

- infirmer le jugement :

à titre principal, dire les demandes irrecevables ;

subsidiairement, les rejeter ;

- en tout état de cause, condamner la société [A] à rembourser les sommes de 500.000 euros et de 20.000 euros « majorées des intérêts au taux légal à compter de leur paiement », en soutenant essentiellement que « les garanties dues sont limitées aux deux seules procédures initiées devant le Conseil de la concurrence et le tribunal de grande instance de Rouen », et en faisant principalement valoir :

d'une part, que la société [A] ne s'appuie pas sur les accords contractuels, mais sur l'interprétation de la cour d'appel de Rouen ;

d'autre part, que le tribunal de commerce de Paris a dénaturé les engagements souscrits par Madame [N] aux droits de laquelle vient désormais la société GROUPE EMERAUDE ;

- condamner la société [A] la somme de 20.000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Vu les dernières conclusions transmises par le RPVA le 26 juin 2015 par la société [A] qui demande à la Cour de confirmer le jugement et de condamner la société EMERAUDE au paiement de la somme de 20.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

SUR CE

Sur la recevabilité des demandes de la société [A] au titre de la présente nouvelle instance

Considérant que la société EMERAUDE soutient que la demande reconventionnelle formulée par la société [A] devant le tribunal de commerce de Bernay et la cour d'appel de Rouen « visait à obtenir une garantie financière du risque lié aux procédures administratives engagées par le département 76 », et qu'au moment où l'affaire a été débattue à la fin de l'année 2013 devant la cour d'appel de Rouen, la société [A] en connaissait le montant depuis l'accord du 11 juillet 2013, pour en déduire que :

- dès ce moment, la société [A] « recherchait exclusivement le paiement d'une somme non pas directement par la société EMERAUDE, mais par la voie de la garantie à première demande qui lui avait été consentie » ;

- la procédure engagée devant le tribunal de commerce de Paris vise à obtenir le même résultat « du paiement d'une somme d'argent ['] d'un montant de 500.000 euros au titre du contentieux des enrobés 76 » ;

Qu'elle fait en conséquence valoir qu'il incombe aux parties de présenter, dès l'instance initiale, l'ensemble des moyens qui sont de nature soit à fonder la demande, soit à justifier son rejet total ou partiel, et que l'obligation de concentration des moyens fait obstacle à l'introduction d'une nouvelle action tendant aux mêmes fins, même sur un fondement juridique différent, dès lors qu'il y a identité d'objet de la demande ;

Que la société [A] estime que la demande de paiement d'une somme principale de 500.000 euros, présentée devant le tribunal de commerce de Paris est différente de celle présentée devant la juridiction consulaire de Bernay et la cour d'appel de Rouen, qui portait sur la remise d'une garantie bancaire à première demande à hauteur d'une somme de 601.384,19 euros ; qu'elle précise que :

- au jour de la formulation de sa demande reconventionnelle devant le tribunal de commerce de Bernay, elle ignorait quel serait le montant qui serait finalement dû au titre des actions du département de la Seine Maritime en annulation des marchés de travaux publics et en remboursement des sommes qui avaient été versées, justifiant ainsi sa demande de garantie complémentaire par rapport à la garantie globale d'un montant de 4 millions d'euros, dans la limite du montant des sommes qui n'avaient pas été appelées dans le cadre des contentieux antérieurs devant le tribunal correctionnel de Rouen et le Conseil de la concurrence ;

- lors des débats, le 21 novembre 2013, devant la cour d'appel de Rouen, outre que les délais de recours par les parties à l'instance devant la juridiction administrative n'étaient pas encore expirés, elle ne pouvait pas modifier sa demande pour tenir compte du montant de la somme fixée quelques semaines auparavant désormais connue, dans la mesure où cela aurait constitué [selon l'intimée] une demande nouvelle en cause d'appel par rapport aux demandes formulées en première instance devant le tribunal de commerce de Bernay ;

Considérant que les premiers juges ont pertinemment relevé que la présente demande du paiement de 500.000 euros est différente de la demande d'octroi d'une nouvelle garantie bancaire à première demande à hauteur d'un montant maximum de 601.384,19 euros, initialement demandée devant le tribunal de commerce de Bernay ; que les deux instances n'ayant pas le même objet, dès lors que l'une concernait l'octroi d'un engagement bancaire par signature, et l'autre le paiement d'une somme d'argent par la société EMERAUDE au titre de la garantie des conséquences financières du contentieux des « enrobés 76 », le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir soulevée par la société EMERAUDE ;

Sur le fond

Considérant, liminairement, que les moyens de l'une et l'autre des parties se fondant sur les motifs du jugement du tribunal de commerce de Bernay, de l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Rouen et du rapport du conseiller à la chambre commerciale et économique de la Cour de cassation dans l'instance ayant abouti au rejet du pourvoi, sont totalement inopérants dans la présente instance, l'autorité de la chose jugée ne s'appliquant qu'au dispositif des décisions ;

Qu'il n'est pas contesté que :

- au moment de la souscription du protocole d'accord du 22 novembre 2004, l'évaluation des différents éléments d'actifs de la succession de Monsieur [K] [A] n'a pas pris en compte «les risques afférents au contentieux dit «des enrobés 76», affectant les sociétés du pôle Travaux Publics devant revenir à Mademoiselle [R] [A]», et qu'en conséquence Madame [J] [N] s'est engagée «à titre personnel à garantir ces sociétés contre ce risque à hauteur de 4.000.000 d'euros, par une garantie à première demande émise par un établissement bancaire», étant observé que le protocole d'accord précité ne limite nullement l'engagement de cette dernière aux procédures alors déjà en cours ;

- cet engagement a été repris en termes identiques dans le projet de partage du 31 mars 2005 (page 57), approuvé le 16 septembre 2005 par le juge des tutelles ;

- sans opposition de la part de Mademoiselle [R] [A] - alors représentée par sa mère en qualité d'administratrice légal sous contrôle judiciaire - ce même engagement a été repris en termes quasi identiques dans l'acte de partage définitif du 17 octobre 2005 (page 58), objet de l'homologation par le tribunal de grande instance de Lisieux du 28 octobre suivant, mais l'engagement étant désormais pris par la société FINANCIERE [K] [A] (devenue GROUPE EMERAUDE SAS) qui s'est substituée à Madame [J] [N] personnellement ;

- dans un acte sous seing privé du 21 décembre 2005, le CRÉDIT LYONNAIS, connaissance préalablement prise du litige relatif à d'éventuelles pratiques anti-concurrentielles ayant donné lieu tant à la procédure engagée devant le tribunal de grande instance de Rouen qu'à celle initiée par le Conseil de la concurrence, a déclaré se porter garant à première demande, à concurrence d'une somme maximale et forfaitaire de 4 millions d'euros, en faveur de la société [A] TRAVAUX PUBLICS (bénéficiaire) de manière irrévocable et inconditionnelle à raison des dommages comme des amendes pécuniaires qui pourraient lui être réclamés à l'issue desdites procédures ;

Considérant que, dès avant la promulgation de l'article 2321 du code civil par l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, la garantie autonome alors créée par la pratique consistait à offrir à un bénéficiaire une sûreté rapidement et aisément réalisable, si le donneur d'ordre à cette garantie n'exécutait pas ses propres obligations souscrites par ailleurs au profit de ce même bénéficiaire ;

Que cette garantie se caractérise par l'engagement du garant, non à payer la dette d'autrui, mais à verser une somme d'argent au bénéficiaire si les conditions propres à la garantie autonome sont réalisées, nonobstant les éventuelles contestations survenues entre le donneur d'ordre de la garantie autonome et son bénéficiaire à propos de l'engagement principal sous-jacent ayant causé la souscription de la garantie autonome ;

Que la société EMERAUDE est poursuivie sur le fondement de son engagement contractuel ; que, nonobstant une rédaction contractée de la phrase litigieuse, l'engagement à titre personnel de Madame [N] (repris par la société EMERAUDE) :

- s'analyse en un engagement principal de prendre elle-même en charge le risque financier du contentieux des « enrobés 76 » dans la limite de la somme de 4 millions d'euros, cet engagement constituant une obligation de payer si nécessaire une somme d'argent sans qu'il n'est été limité aux procédures alors déjà connues ; que la copie versée aux débats de l'acte notarié du 17 octobre 2005 [pièces n° 4 de l'appelante et de l'intimée] ne comporte pas la mention manuscrite de Madame [N], alléguée par la société EMERAUDE concernant la procédure alors nouvellement initiée par le Conseil de la concurrence, l'appelante n'ayant, au surplus, pas démenti l'intimée qui indique que « la mention manuscrite a été apposée par Madame [J] [A] non dans le paragraphe relatif aux limites de la garantie, mais dans l'annexe relatant les déclarations faites par l'intéressée en sa qualité [au jour de l'acte] de mandataire des différentes sociétés commerciales au titre de la gestion intercalaire » ;

- est lui même garanti par un engagement « à première demande » délivré par une banque, cet engagement ne porttant que sur les deux procédures connues au jour de sa souscription stipulée par le CRÉDIT LYONNAIS - limitant l'engagement bancaire aux résultats de ces deux procédures - mais n'ayant pas pu avoir pour effet de limiter aussi l'engagement principal de Madame [N], repris par la société EMERAUDE ;

Qu'au demeurant, le CRÉDIT LYONNAIS n'ayant aucune responsabilité dans le partage de la succession de feu [K] [A], son engagement autonome de paiement 'à première demande', détachée de l'obligation principale par ailleurs directement souscrite (en dernier lieu) par la société EMERAUDE, ne trouve sa cause que dans ledit engagement principal antérieur de la société EMERAUDE de garantir la société [A] des éventuelles conséquences financières découlant du contentieux « enrobés 76 » ;

Qu'en outre, en ayant tenté, par son assignation du 4 janvier 2011 devant le tribunal de commerce de Bernay, d'obtenir directement la restitution de la somme d'un montant de 3.395.615,81 euros initialement versée par le CRÉDIT LYONNAIS, la société EMERAUDE a ainsi implicitement mais nécessairement admis avoir effectivement subi le risque final au titre de son engagement principal, puisqu'elle ne pouvait justifier sa qualité à agir dans cette instance que parce qu'après paiement de la somme par la Banque, celle-ci s'est retournée contre la société EMERAUDE en sollicitant le remboursement de la somme versée, démontrant ainsi que la société EMERAUDE avait bien souscrit un engagement principal distinct de la garantie à première demande délivrée par la Banque ;

Que le jugement entrepris doit, dans ces conditions, être confirmé ;

Considérant que, succombant dans son recours, la société EMERAUDE ne saurait prospérer dans sa demande d'indemnisation de ses frais irrépétibles mais qu'il serait, en revanche, inéquitable de laisser à la société [A] la charge définitive des frais supplémentaires non compris dans les dépens, qu'elle a dû exposés en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

CONDAMNE la société GROUPE EMERAUDE SAS aux dépens et à verser à la SAS [A] TRAVAUX PUBLICS la somme complémentaire de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

ADMET Maître Sophie VICHATZKY (association TREHET VICHATZKY), avocat postulant, au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 14/22070
Date de la décision : 20/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris J2, arrêt n°14/22070 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-20;14.22070 ?
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