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18/01/2017 | FRANCE | N°15/23701

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 18 janvier 2017, 15/23701


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 18 JANVIER 2017



(n° 26 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/23701



Décision déférée à la Cour : Décision du 06 Novembre 2015 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS





APPELANT

Monsieur [B] [Y]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1]r>




Représenté par Me Jacques MONTACIE, avocat au barreau de PARIS, toque : R285

Ayant pour avocat plaidant Me Hubert D'ALVERNY de la SELEURL PHISERGA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0532


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Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 18 JANVIER 2017

(n° 26 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/23701

Décision déférée à la Cour : Décision du 06 Novembre 2015 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS

APPELANT

Monsieur [B] [Y]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1]

Représenté par Me Jacques MONTACIE, avocat au barreau de PARIS, toque : R285

Ayant pour avocat plaidant Me Hubert D'ALVERNY de la SELEURL PHISERGA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0532

INTIMEE

LA SELARL [B] ET ASSOCIES

[Adresse 2]

[Adresse 1]

Représenté par son gérant, Monsieur [W] [B]

N° SIRET : [B]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Octobre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jacques BICHARD, Président de chambre

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

Mme Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère, appelée pour compléter de la cour en vertu de l'article R312-3 du code de l'organisation judiciaire

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier.

*****

Vu le recours exercé le 9 décembre 2015 par M. [B] [Y] à l'encontre de la décision rendue le 6 novembre 2015 par le délégué du bâtonnier de l'ordre des avocats de [Localité 2] à l'occasion du différend l'opposant à la SELARL [B] & ASSOCIÉS et qui a :

- dit que M. [B] [Y] s'est rendu coupable de manoeuvres déloyales afin de capter une partie de la clientèle de la SELARL [B] & ASSOCIÉS,

- dit et jugé que ces manoeuvres ont causé un préjudice à ladite société compensé par l'allocation d'une somme de 50 000 euros à titre de dommages intérêts, ladite somme portant intérêts au taux légal à compter de la décision avec application de l'article 1154 du code civil,

- condamné M. [B] [Y] à payer à la SELARL [B] & ASSOCIÉS une indemnité d'un montant de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs prétentions,

- dit que les dépens seront supportés par M. [B] [Y].

Entendues à l'audience du 19 octobre 2016 les parties en leurs observations conformes à leurs écritures :

- constater qu'il n'a commis aucune manoeuvre déloyale,

- infirmer la décision déférée,

- condamner la SELARL [B] & ASSOCIÉS à lui payer une indemnité de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a retenu les manoeuvres déloyales de M. [B] [Y],

- l'infirmer pour le surplus et condamner M. [B] [Y] à lui payer :

* la somme de 1 535 780 euros à titre de dommages intérêts pour la baisse du chiffre d'affaires entre le 1er août 2011 et le 1er août 2014, ladite somme étant augmentée des intérêts au taux légal à compter de la décision à rendre,

* une indemnité de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI LA COUR

M. [B] [Y] a été associé de la SELARL [B] & ASSOCIÉS du 6 décembre 2005 au 29 juillet 2011.

Le 1er août 2011 il a cédé l'ensemble des 120 parts qu'il détenait au sein de cette société pour le prix de 50 000 euros.

La SELARL [B] & ASSOCIÉS reproche à M. [B] [Y] d'avoir détourné une partie importante de sa clientèle et d'avoir à cette fin employé des manoeuvres déloyales :

- reprise à titre personnel de sa ligne de téléphone mobile en avril 2011, soit peu de temps avant que de lui notifier son retrait en mai 2011 et ceci afin de garder un lien avec la clientèle qu'il traitait,

- transfert par les services postaux à sa nouvelle adresse de l'ensemble des courriers mentionnant son nom et adresse,

- indications par lui données sur sa nouvelle adresse professionnelle présentée comme un simple changement d'adresse,

- exploitation par internet pour son compte personnel de la notoriété résultant de ses interventions médiatiques au nom de la SELARL [B] & ASSOCIÉS,

- utilisation ' de méthodes odieuses pour massacrer la réputation et l'honneur de son ancien associé ' (sic).

Elle lui fait également grief d'avoir systématiquement méconnu la procédure de succession d'avocats dans plusieurs dossiers qu'elle a listés.

M. [B] [Y] conteste la totalité des griefs qui sont formulés à son encontre.

Mais c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le délégué du bâtonnier, après avoir rappelé le principe du libre choix par le client de son conseil qu'il peut décider de suivre au cas où celui-ci change de structure d'exercice de sa profession, sous la seule réserve que ledit avocat s'abstienne de toute manoeuvre déloyale à cette fin, a retenu qu'au cas d'espèce M. [B] [Y] avait mis en place un stratagème consistant en un ensemble de manoeuvres visant à conserver des clients dont il traitait le dossier au sein de la SELARL [B]& ASSOCIÉS qui n'étaient pas ses clients personnels, ce qui était impossible en sa qualité d'associé, mais ceux de cette société.

C'est ainsi que M. [B] [Y] qui quittait, seul, une structure juridique exerçant sous la forme d'une Selarl pour intégrer une nouvelle structure, la SELARL [G], ne pouvait dés lors dans sa communication extérieure vis à vis du public parler du cabinet [Y], et procéder aux annonces suivantes ' nouvelle adresse, nouveau site (....) Maître [Y] et ses collaborateurs déménagent le 1er septembre dans de nouveaux locaux dans le 16ème à [Localité 2]' , ' Le cabinet [Y] déménage le 1er septembre, toujours dans le 16ème, pour mieux répondre à l'expansion du Cabinet et aux attentes des clients. En attendant toujours joignable sur le 06 79 65 27 79 ', ' Cabinet [Y] (...) Déménagement du Cabinet aujourd'hui.....', ' Le Cabinet [Y] déménage et s'agrandit'.

En effet une telle communication était de nature à accréditer l'idée, erronée, particulièrement chez les clients de la SELARL [B] & ASSOCIÉS que le cabinet d'avocat était celui de M. [B] [Y] et que celui-ci déménageait afin de s'agrandir.

Elle ne correspondait donc en rien à la réalité de la situation nouvelle de l'appelant, à savoir son départ en tant qu'associé de la SELARL [B] & ASSOCIÉS afin de rejoindre une autre Selarl, le cabinet [Y] n'ayant aucune existence juridique et le déménagement invoqué n'étant que le retrait de l'appelant d'une structure professionnelle afin d'exercer au sein d'une autre et non pas à titre individuel dans le cadre d'un cabinet qu'il aurait personnellement créé à cette fin.

Cette communication fallacieuse voyait par ailleurs son effet renforcé par la référence directe à la ligne téléphonique personnelle de M. [B] [Y] sur laquelle il était désormais possible de le joindre, ligne téléphonique dont disposait la SELARL [B] & ASSOCIÉS et qu'il a récupérée fin avril 2011, soit peu de temps avant d'annoncer son retrait, ce qui lui permettait ainsi de maintenir un contact direct avec la clientèle de celle-ci.

Et pour accentuer l'efficacité de cette manoeuvre, M. [B] [Y] a souscrit auprès des services postaux un contrat de réexpédition de tous les courriers portant l'intitulé ' [B] [Y] AVOCAT ' lui permettant ainsi de récupérer une très large part du courrier adressé à la SELARL [B] & ASSOCIÉS que les dossiers concernés aient été ou non transférés à son profit, soumettant à ses seule appréciation et décision les retours de certains d'entre eux vers la SELARL [B] & ASSOCIÉS et ceci alors même que le délégué du bâtonnier relève à juste titre que les règles déontologiques obligeaient la SELARL [B] & ASSOCIÉS à faire suivre à M. [B] [Y] toutes les correspondances le concernant personnellement.

Ainsi M. [B] [Y] qui en raison même du fonctionnement de la SELARL [B] & ASSOCIÉS qu'il ne conteste pas, à savoir qu'il assurait la gestion de l'intégralité des rendez-vous avec la clientèle, de la communication de la société et du secteur pénal alors que M. [B] était chargé de l'administration et de la gestion du secteur droit administratif, dans une société d'avocat spécialisée en droit routier, était ainsi l'interlocuteur quasiment unique de la clientèle, a mis en oeuvre un système déloyal visant à attirer celle-ci au détriment de la Selarl à laquelle seule elle était attachée.

Pour autant il demeure que la SELARL [B] & ASSOCIÉS ne peut démontrer que les clients qui ont suivi M. [B] [Y] ont agi du fait des manoeuvres déloyales mises en place par M. [B] [Y] et non pas librement, par choix personnel.

Elle fait ainsi état des 20 dossiers suivants : M. [C], M. [P], M. [E], M. [V], Mme [K], M. [X], M. [T], M. [D], M. [M], M. [S], M. [N], M. [J], Mme [H], M. [A], M. [F], M. [Q], M. [I], Mme [O], M. [Z], M. [L], dont elle soutient qu'ils concernent des clients que M. [B] [Y] auraient détournés et au sujet desquels il n'aurait pas suivi la procédure réglementaire de succession d'avocats.

Or il convient d'observer en premier lieu que l'éventuel non respect de la procédure prévue par l'article 9.1 du règlement intérieur national, notamment en ce qu'il oblige l'avocat qui succède à un confrère à s'assurer qu'aucune honoraire ne lui reste dû par le client, susceptible de constituer un manquement d'ordre déontologique n'est cependant pas en lui même constitutif d'un détournement déloyal du client concerné.

Mais de surcroît dans son arrêté du 12 mai 2015, le conseil de discipline de l'ordre des avocats de [Localité 2] n'a retenu aucun manquement de ce chef à l'encontre de M. [B] [Y] au titre ces dossiers [M], [N], [D], [S], [L], le conseil constatant en outre l'absence de tout détournement de clientèle en ce qui concerne M. [M] et M. [N].

Dans un autre arrêté du 21 juillet 2015, ledit conseil de discipline n' a également retenu aucune faute à l'encontre de M. [B] [Y] dans les dossiers [I] et [Q].

Ainsi pour l'ensemble de ces dossiers la SELARL [B] & ASSOCIÉS ne peut établir que M. [B] [Y] les aurait détournés et ainsi obtenus de façon déloyale.

Par ailleurs elle considère que les attestations fournies à M. [B] [Y] par d'autres clients qui l'ont suivi se retournent contre lui et établissent la réalité des détournements qu'elle lui impute.

Ces témoignages sont ceux de M. [R], Mme [W], M. [U], M. [GG], Mme [TT], M. [FF], M. [PP], Mme [EE], M. [JJ], M. [ZZ], Mme [AA], M. [XX], M. [SS], M. [HH], M. [VV], M. [RR], M. [DD], Mme [NN], M. [WW], M. [OO], M. [T].

Or aucun d'entre eux ne permet de constater que M. [B] [Y] a agi pour ce qui les concernait de façon déloyale à l'encontre de la SELARL [B] & ASSOCIÉS afin de les conserver ou de les récupérer.

Au demeurant les écritures de la SELARL [B] & ASSOCIÉS traduisent ses doutes sur la réalité des détournements qu'elle dénonce puisqu'elle les qualifie de probables.

Ainsi faute de rapporter la preuve que les manoeuvres, certes élaborées par M. [B] [Y] sont directement à l'origine d'un détournement d'une partie de sa clientèle et donc du préjudice financier qu'elle prétend avoir subi par la baisse de son chiffre d'affaires, la SELARL [B] & ASSOCIÉS sera déboutée de la totalité de ses prétentions.

La solution du différend eu égard à l'équité ne commande pas d'accueillir les demandes présentées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Confirme la décision déférée sauf en ce qu'elle a :

- dit et jugé que ces manoeuvres ont causé un préjudice à ladite société compensé par l'allocation d'une somme de 50 000 euros à titre de dommages intérêts, ladite somme portant intérêts au taux légal à compter de la décision avec application de l'article 1154 du code civil,

- condamné M. [B] [Y] à payer à la SELARL [B] & ASSOCIÉS une indemnité d'un montant de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs prétentions,

- dit que les dépens seront supportés par M. [B] [Y].

L'infirme dans cette limite,

Statuant à nouveau,

Déboute la SELARL SAMNSON & ASSOCIÉS de sa demande en paiement de la somme de 1 535 780 euros, augmentée des intérêts au taux légal et avec application des dispositions de l'article 1154 du code civil.

Dit n'y avoir lieu à appliquer les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit que chaque partie supportera les dépens par elle exposés.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 15/23701
Date de la décision : 18/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°15/23701 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-18;15.23701 ?
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