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18/01/2017 | FRANCE | N°15/01847

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 18 janvier 2017, 15/01847


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2



ARRET DU 18 JANVIER 2017



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/01847



Décision déférée à la Cour : Jugement du 4 Décembre 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/11388





APPELANT



Monsieur [A] [J], en personne,

Né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1]

[Adresse 1]
>[Adresse 1]



Représenté et assisté à l'audience de Me Jacqueline AUSSANT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1638





INTIME



Syndicat des copropriétaires DE L'IMMEUBLE SIS [Adresse 1], ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRET DU 18 JANVIER 2017

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/01847

Décision déférée à la Cour : Jugement du 4 Décembre 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/11388

APPELANT

Monsieur [A] [J], en personne,

Né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté et assisté à l'audience de Me Jacqueline AUSSANT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1638

INTIME

Syndicat des copropriétaires DE L'IMMEUBLE SIS [Adresse 1], représenté par son syndic, S.T.B GESTION - IMMO - GESTION, SAS inscrite au RCS de PARIS, SIRET n° 722 043 957 00033,agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Frédérique ETEVENARD, avocat postulant au barreau de PARIS, toque : K0065

Assisté à l'audience de Me Catherine TRONCQUEE de la SCP GASNIER TRONCQUEE, avocat plaidant au barreau de PARIS, toque : P0351

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Claudine ROYER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Loup CARRIERE, Président de chambre,

Madame Claudine ROYER, Conseillère,

Madame Agnès DENJOY, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Mme Stéphanie JACQUET

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Loup CARRIERE, président et par Madame Stéphanie JACQUET, greffier présent lors du prononcé.

***

Monsieur [A] [J] est propriétaire dans l'immeuble en copropriété sis [Adresse 1], d'un appartement (lot n° 101) donnant sur la cour intérieure et de caves en sous-sol situées sous son appartement, (lots n° 131,135, 136 et 137).

Un conflit l'oppose au syndicat des copropriétaires qui lui reproche :

d'une part d'avoir réalisé divers aménagements privatifs dans la cour de l'immeuble (partie commune) et notamment d'avoir installé du mobilier de jardin, stocké divers objets, installé des tuyaux sur le robinet de l'immeuble, ainsi qu'une échelle de communication entre la cour et son appartement ;

d'autre part d'avoir effectué des travaux dans ses parties privatives en installant notamment une trémie et un escalier pour relier son appartement aux caves lui appartenant.

Dans le cadre de ces difficultés, l'assemblée générale des copropriétaires a été amenée à prendre plusieurs décisions.

Une assemblée générale du 31 mai 2012 a adopté une résolution n°15 autorisant le syndic à « engager une action en justice à l'encontre de M. [J] à l'effet d'obtenir la suppression à ses frais exclusifs, de l'intégralité des aménagements privatifs réalisés par lui et notamment de l'installation de mobilier de jardin, d'objets divers stockés actuellement dans la cour ainsi que l'échelle de communication entre la cour et son appartement et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'ordonnance à intervenir. »

Par acte d'huissier du 25 juillet 2012, Monsieur [J] a fait assigner le syndicat des copropriétaires de son immeuble afin d'obtenir l'annulation de cette résolution n°15 de l'assemblée générale du 31 mai 2012.

Cependant sur assignation du syndicat des copropriétaires délivrée à M. [J] le 26 juillet 2012, une ordonnance de référés du 30 octobre 2012 a condamné M. [J] à débarrasser à ses frais exclusifs la cour et la courette de l'ensemble des aménagements privatifs réalisés sans autorisation et notamment à retirer le mobilier de jardin, les tuyaux installés sur le robinet de l'immeuble et de l'échelle de communication entre la cour et son appartement, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé le délai de 8 jours à compter de la signification de la décision.

Une assemblée générale du 28 juin 2013 a ensuite adopté trois résolutions :

une résolution n°16 donnant mandat au syndic à l'effet d'obtenir la condamnation de M. [J] « à procéder à ses frais à la dépose de l'ensemble des jardinières, bacs ainsi qu'à l'enlèvement des terres et des plantations réalisées dans la courette, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir »,

une résolution n°17 donnant mandat au syndic afin d'obtenir la condamnation de M. [J] « à procéder à ses frais à la remise en état des lieux par comblement de la trémie, suppression de l'escalier menant du rez-de-chaussée au sous-sol et remise en état des caves pour qu'elles soient restaurées à leur affectation d'origine, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir ». Il était précisé que cette demande pourrait « être soutenue à titre reconventionnel dans le cadre de l'instance pendante devant le Tribunal de grande instance de Paris, soit dans le cadre d'une nouvelle action à entreprendre », les copropriétaires autorisant d'ores et déjà le syndic, à l'effet de saisir les juridictions compétentes pour liquider l'astreinte ;

une résolution n°25 rejetant la réalisation de travaux de ravalement du mur mitoyen de la cour, face à l'immeuble.

Dans le cadre de l'action engagée par lui le 25 juillet 2012, Monsieur [J] a demandé au tribunal dans ses dernières conclusions du 28 mars 2014, outre l'annulation de la résolution n°15 de l'assemblée générale du 31 mai 2012,

- d'annuler les résolutions n°16, 17 et 25 de l'assemblée générale du 28 juin 2013,

- de rejeter les demandes du syndicat,

- d'enjoindre au syndicat de justifier des fondements sur lesquels reposaient la mise en place de chaudières privatives du premier au 6ème étage dans les parties communes de l'immeuble constituées par les anciens sanitaires attenant à l'escalier de service, d'en prévoir la dépose dans le cas où aucune assemblée n'aurait autorisé lesdits travaux,

- condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par jugement du 4 décembre 2014 le Tribunal de grande instance de Paris (8ème chambre) a :

- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [J],

- rejeté les demandes de nullité présentées par Monsieur [J],

- condamné Monsieur [J] à procéder à la dépose de l'ensemble des jardinières, bacs avec enlèvement des terres et des plantations réalisées dans la cour sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant trois mois à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la signification de la décision,

- condamné Monsieur [J] à procéder à ses frais à la remise en état de son appartement par comblement de la trémie, suppression de l'escalier menant du rez-de-chaussée au sous-sol et remise en état des caves pour qu'elles soient restaurées à leur affectation d'origine, à savoir celle de caves, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard pendant trois mois, à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la signification de la décision,

- condamné Monsieur [J] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné Monsieur [J] aux dépens qui pourront être recouvrés par Maître TRONCQUEE.

Monsieur [A] [J] a relevé appel de ce jugement, par déclaration d'appel du 26 janvier 2015, demandant à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 19 mai 2016 :

- d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- dire qu'il avait été autorisé à effectuer l'aménagement floral de la cour de l'immeuble par l'assemblée générale du 23 juin 1984,

- dire les travaux de création d'une trémie entre les lots 101, 131, 135 136 et 137 et de l'escalier menant au sous-sol, ainsi que le changement de destination des caves n'avaient pas à être soumis à autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires,

- prononcer à titre principal l'annulation de la résolution n°15 de l'assemblée générale du 31 mai 2012 ainsi que des résolutions n°16 et 17 de l'assemblée générale du 28 juin 2013,

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes,

- à titre subsidiaire, déclarer prescrites les demandes ayant pour objet :

la dépose de l'ensemble des jardinières,

le comblement de la trémie,

la suppression de l'escalier menant au rez-de-chaussée au sous-sol,

la restitution aux caves de leur destination initiale,

- condamner en tout état de cause le syndicat des copropriétaires à lui payer une somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction possible conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] demande à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 2 mai 2016, de :

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts,

- statuant à nouveau sur cette demande, condamner Monsieur [J] à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner Monsieur [J] à lui payer la somme de 7.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés en cause d'appel,

- condamner Monsieur [J] aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments dont elle est saisie, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 25 mai 2016.

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,

Sur la demande en annulation de la résolution n°15 de l'assemblée générale du 31 mai 2012

Cette résolution, ci-dessus rappelée, qui portait sur les aménagements privatifs effectués par Monsieur [J] dans la cour commune de l'immeuble a été votée à la majorité des copropriétaires présents et représentés. Bien que cette résolution parle de « l'intégralité des aménagements privatifs réalisés », elle visait « notamment » l'installation de mobilier de jardin, des objets divers stockés dans la cour, et l'installation d'une échelle de communication entre la cour et l'appartement de l'appelant.

Monsieur [J] prétend à titre principal qu'une autorisation lui a été donnée pour ces aménagements par une assemblée générale du 23 juin 1984 et qu'il bénéficie d'un droit acquis à laquelle la résolution litigieuse a porté atteinte.

Subsidiairement, il soulève la prescription décennale de l'article 42 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965 en soutenant que les aménagements floraux effectués par lui dans la cour remontent à 1985 et que l'habilitation donnée au syndic d'agir en suppression de ces aménagements est prescrite.

Le syndicat des copropriétaires prétend que la résolution n°8 du 23 juin 1984 n'était pas une décision, génératrice de droit pour M. [J] ; qu'elle n'a été sanctionnée par aucun vote et n'a conféré aucun droit à M. [J], lequel n'a jamais sollicité aucune autorisation pour l'aménagement floral de la courette qui ne doit générer aucun désordre. Il prétend que Monsieur [J] tente vainement de se prévaloir d'un « droit acquis » en faisant état d'un accord de principe qui résulterait d'un courrier du conseil syndical, ou dans le préambule de la résolution litigieuse n°15, ou encore dans l'ordonnance de référé du 30 octobre 2012.

Il ressort des pièces produites que le 23 juin 1984, les copropriétaires réunis en assemblée générale ont dans une résolution n°8 accordé à M. [J] la possibilité de faire un aménagement floral de la cour en ces termes: « les copropriétaires demandent à Monsieur [J], lors de la mise au point de la question du ravalement, de demander un prix pour la remise en état des enduits des murs de clôture de la cour principale. Ils sont d'accord pour que, ensuite, celui-ci puisse aménager floralement cette cour sans que cela n'entraîne un droit de jouissance sur cette cour. »

En réalité, les parties mélangent sans cesse dans cette affaire la question des plantations et bacs à fleurs installés par M. [J] et les autres aménagements visés spécifiquement dans la résolution n°15 à savoir : l'installation de mobilier de jardin, des objets divers stockés dans la cour, et l'installation d'une échelle de communication entre la cour et l'appartement de l'appelant.

Bien que la résolution litigieuse parle de «'l'intégralité des aménagements privatifs réalisés'» sans les énumérer, il faut considérer qu'ils ne concernent en réalité que l'installation de mobilier de jardin, des objets divers stockés dans la cour, et l'installation d'une échelle de communication entre la cour et l'appartement.

Le préambule commun aux résolutions n°15 et 16 est très clair à ce sujet. Il précise que M. [J] s'était octroyé sans autorisation, un droit de jouissance sur la cour commune avec des aménagements privatifs, et notamment une communication directe entre son appartement et la cour, le stockage de différents objets de jardinage, mais également une table avec des chaises. L'assemblée considérait que l'assemblée de 1984 n'avait autorisé que l'aménagement floral de la cour, sans que cela n'entraîne un droit de jouissance de ladite cour, et que M. [J] était allé au delà des autorisations données par la copropriété.

Tout ce qui concerne dans ce préambule des infiltrations affectant le plafond des caves dans une zone se situant au droit des plantations opérées par M. [J], est en réalité à rattacher au vote de la résolution n°16 de cette même assemblée du 31 mai 2012, qui visait précisément l'autorisation donnée au syndic d'agir contre M. [J] pour obtenir une mesure d'expertise à l'effet de déterminer les travaux de confortation nécessaire au niveau des plafonds et des caves et plus généralement des éléments de structures parties communes suite à la mise en place de plantations par M. [J] dans des conditions non conformes. Cette résolution n°16 a été rejetée par les copropriétaires.

La résolution n°15, qui ne visait précisément que l'installation de mobilier de jardin, d'objets divers stockés dans la cour, et l'échelle installée entre la cour et l'appartement de l'appelant, ne sanctionnait en réalité que l'utilisation irrégulière par M. [J] de la cour commune de l'immeuble, ses aménagements révélant qu'il utilisait cette cour comme s'il en avait la jouissance privative.

Il résulte de ces éléments que Monsieur [J] ne pouvait pour les aménagements privatifs visés par la 15ème résolution, se prévaloir de la résolution n° 8 de l'assemblée du 23 juin 1984 (ne concernant qu'une possibilité d'aménagement floral) et soutenir qu'il bénéficiait d'un droit acquis à laquelle la résolution litigieuse aurait porté atteinte.

Il y a lieu dans ces conditions de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande en nullité de la résolution n°15 de l'assemblée générale du 31 mai 2012.

Sur la demande en annulation de la résolution n°16 de l'assemblée générale du 28 juin 2013

Cette résolution, adoptée à la majorité de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965 et contestée par voie de conclusions, concernait uniquement l'autorisation d'ester en justice donnée au syndic à l'effet d'obtenir la condamnation sous astreinte de Monsieur [J] de procéder à la dépose de l'ensemble des jardinières, bacs et enlèvement des terres et des plantations réalisées par lui.

Cette résolution expose en préambule que le juge des référés avait rejeté la demande du syndicat des copropriétaires concernant l'enlèvement des plantations et bacs à fleurs, demande qu'il avait également formée reconventionnellement dans le cadre de l'action en nullité de l'assemblée générale du 31 mai 2012.

Monsieur [J] se prévaut toujours pour ces plantations et bacs à fleurs de l'autorisation de l'assemblée générale du 23 juin 1984. Il soulève subsidiairement la prescription de l'autorisation d'agir donnée au syndicat qui est selon lui de nature décennale.

Le syndicat reprend sur ce point son argumentation précédente sur la résolution n°8 du 23 juin 1984 non génératrice de droit pour n'avoir été sanctionnée par aucun vote. Il prétend que M. [J] n'avait jamais sollicité d'autorisation pour l'aménagement floral de la cour, qui ne devait en tout état de cause générer aucun désordre. Il prétend que Monsieur [J] tente vainement de se prévaloir d'un «'droit acquis'» en faisant état d'un accord de principe qui résulterait d'un courrier du conseil syndical, reconnu dans le préambule de la résolution n°15, ou encore dans l'ordonnance de référé du 30 octobre 2012.

Sur la prescription soulevée, le syndicat prétend qu'il s'agit d'une action réelle trentenaire et non une action personnelle. Subsidiairement, s'il s'agissait d'une prescription décennale, il soutient qu'elle n'est nullement acquisen ; que l'action du syndicat vise à mettre fin aux infiltrations lesquelles n'ont été constatées qu'en 2011par un constat d'huissier ; qu'en tout état de cause, l'engagement pris par M. [J] de dégager ses installations, valent renonciation à se prévaloir d'une quelconque prescription.

Il n'est pas sérieusement contestable que la possibilité donnée le 23 juin 1984 à Monsieur [J] de faire un aménagement floral dans la cour commune ne constituait pas une «'décision'» au sens de l'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, celle-ci n'ayant effectivement fait l'objet d'aucun vote, ce que reconnaît l'appelant. Il ne peut donc se prévaloir d'une réelle autorisation de l'assemblée générale pour réaliser ses aménagements floraux, ainsi que l'a indiqué le premier juge.

En revanche le tribunal n'a pas statué sur la prescription soulevée relative à l'action autorisée pour l'enlèvement des plantations et bacs à fleurs.

Contrairement à ce que soutient le syndicat des copropriétaires, la prescription applicable n'est pas une prescription trentenaire, le syndic n'ayant pas été habilité à initier une action en restitution de parties communes annexées par un copropriétaire, mais à exercer une action visant à la dépose des jardinières, bacs avec enlèvement des terres et des plantations réalisées. Il s'agit clairement d'une action personnelle concernant des aménagements réalisés sur une partie commune, relevant de la prescription décennale de l'article 42 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965.

Contrairement encore à ce que soutient le syndicat des copropriétaires, le point de départ de cette prescription doit être fixé à compter du jour où l'action est née, c'est-à-dire, à compter de la réalisation des plantations et installation de bacs à fleurs, et non à compter de la date de prétendus désordres générés par ces aménagements. Or, cette installation remonte à 1985, ainsi que le révèle une lettre de la présidente du conseil syndical au syndic du 26 juillet 1985 sollicitant pour qu'il soit demandé à M. [J] de surseoir à l'aménagement floral de la cour commune. Ce courrier précise que si la copropriété avait bien donné un accord de principe pour un aménagement floral, aucun plan ne lui avait été proposé avant cette mise devant le fait accompli. Il est donc certain qu'à cette date, les aménagements floraux avaient déjà été réalisés.

Au vu de ces éléments l'action visée par la résolution litigieuse est bien prescrite. Il y a donc lieu d'annuler la résolution n°16 de l'assemblée générale du 28 juin 2013 et d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur [J] à procéder à la dépose sous astreinte de l'ensemble des jardinières, bacs avec enlèvement des terres et des plantations réalisées dans la cour.

Sur la demande en annulation de la résolution n°17 de l'assemblée générale du 28 juin 2013

Cette résolution votée comme la précédente à la majorité de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965 et contestée également par voie de conclusions, a donné mandat au syndic d'agir en justice contre M. [J] pour obtenir sa condamnation sous astreinte à la remise en état des lieux par comblement de la trémie, suppression de l'escalier menant du rez-de-chaussée au sous-sol, et remise en état des caves pour qu'elles soient restaurées à leur affectation d'origine.

Monsieur [J] ne conteste pas avoir réalisé ses travaux sans aucune autorisations pour relier son appartement aux caves situées juste au dessous, l'ensemble des lots lui appartenant.

Il prétend qu'il n'avait aucune autorisation à demander, au regard du règlement de copropriété prévoyant que les séparations entre les appartements, chambres de domestiques et caves ainsi que les poutres et solives soutenant le plancher et auxquels est attaché le plafond, ne sont pas des parties communes à l'ensemble des copropriétaires, mais des parties communes spéciales entre propriétaires, verticales pour les séparations, et horizontales pour les poutres et les solives.

Dans l'hypothèse où ces travaux auraient dû être autorisés, M. [J] soulève la prescription de l'action du syndicat, ces travaux relevant selon lui de la prescription décennale de l'article 42 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965 et ayant été précisément effectués en 1990.

Le syndicat des copropriétaires répond à juste titre que même s'il s'agissait d'une partie commune spéciale, une autorisation préalable de l'assemblée générale était nécessaire, non seulement pour les travaux en cause qui ne devaient porter atteinte ni à la solidité de l'immeuble, ni à sa destination, ni aux droits des autres copropriétaires. L'appelant ne peut donc soutenir qu'il n'avait aucune autorisation à demander.

Cette autorisation étant nécessaire, il faut maintenant vérifier que la demande du syndicat des copropriétaires n'était pas prescrite.

Le premier juge a rejeté le moyen tiré de la prescription au motif que M. [J] n'établissait pas que les travaux de réunion entre appartement et caves avaient été réalisés depuis plus de 10 ans.

Monsieur [J], qui prétend avoir réalisé ces travaux en 1990, verse cependant en appel une photographie de son bureau en novembre 1993, une déclaration fiscale faisant état de ces travaux au titre des immobilisations et amortissements, un plan d'aménagement de la cave et de la création de l'escalier datant de septembre 1990, et plusieurs attestations d'amis ou relations déclarant avoir toujours connu depuis plus de 30 ans l'existence de l'escalier menant aux pièces du sous-sol.

Au vu de ces éléments, il est établi que les travaux litigieux ont été réalisés depuis plus de 10 ans. Il en résulte que l'action autorisée par les copropriétaires en vue de la remise en état des lieux dans leur état d'origine et aux fins de réaffectation des caves à leur destination d'origine, est prescrite.

Il y a donc lieu d'annuler la résolution n°17 de l'assemblée générale du 28 juin 2013 et d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur [J] à procéder à ses frais et sous astreinte à la remise en état de son appartement par comblement de la trémie, suppression de l'escalier menant du rez-de-chaussée au sous-sol et remise en état des caves pour qu'elles soient restaurées à leur affectation d'origine.

Sur les demandes accessoires et les dépens

L'appel de Monsieur [J] ayant abouti à l'annulation de deux résolutions d'assemblée générale sur les trois qu'il contestait établit que sa procédure n'était pas abusive. La demande du syndicat des copropriétaires tendant à l'allocation d'une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive sera donc rejetée.

Par ailleurs et au vu du contexte de cette affaire, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties en cause la charge des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel. Les demandes formées de part et d'autre au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées. Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il à condamné Monsieur [J] à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens de première instance et d'appel seront supportés par le syndicat des copropriétaires qui succombe. Ces dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il avait condamné M. [J] aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement et contradictoirement,

Infirmant partiellement le jugement déféré,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande en nullité de la résolution n°15 de l'assemblée générale du 31 mai 2012,

Déclare prescrites les autorisations d'action en justice données au syndic de l'immeuble [Adresse 1] par les résolutions n°16 et 17 de l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1], du 28 juin 2013,

Annule les résolutions n°16 et 17 de l'assemblée générale du 28 juin 2013,

Annule en conséquence les dispositions du jugement condamnant Monsieur [A] [J] à procéder :

à la dépose sous astreinte de l'ensemble des jardinières, bacs avec enlèvement des terres et des plantations réalisées dans la cour,

à la remise en état sous astreinte de son appartement par comblement de la trémie, suppression de l'escalier menant du rez-de-chaussée au sous-sol et remise en état des caves pour qu'elles soient restaurées à leur affectation d'origine,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] aux entiers dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 15/01847
Date de la décision : 18/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris G2, arrêt n°15/01847 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-18;15.01847 ?
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