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12/01/2017 | FRANCE | N°15/17010

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 3, 12 janvier 2017, 15/17010


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 3



ARRÊT DU 12 JANVIER 2017



(n° , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/17010



Sur renvoi après cassation, selon l'arrêt rendu le 10 juin 2015 par la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation (pourvoi n° P 14-15-961 ), de l'arrêt rendu le 28/01/2014 par le pôle 4 chambre 4 de la cour d'appel de paris (RG 11/21004 , sur appel d'u

n jugement rendu le 27 octobre 2011 5ème chambre 2ème section par le Tribunal de grande instance de Paris (RG / 07/11396)





APPELANTS



Monsieur [N] ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 3

ARRÊT DU 12 JANVIER 2017

(n° , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/17010

Sur renvoi après cassation, selon l'arrêt rendu le 10 juin 2015 par la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation (pourvoi n° P 14-15-961 ), de l'arrêt rendu le 28/01/2014 par le pôle 4 chambre 4 de la cour d'appel de paris (RG 11/21004 , sur appel d'un jugement rendu le 27 octobre 2011 5ème chambre 2ème section par le Tribunal de grande instance de Paris (RG / 07/11396)

APPELANTS

Monsieur [N] [V] [D]

Né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1] (Algérie)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Gilbert ABOUKRAT de la SELEURL GMAB AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0470

Ayant pour avocat plaidant Me Gilbert ABOUKRAT avocat au barreau de PARIS, toque : A0470

SCP [N] [V] [D] [I] [M] ET [A] [V]

N° SIRET : [D]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Gilbert ABOUKRAT de la SELEURL GMAB AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0470

Ayant pour avocat plaidant Me Gilbert ABOUKRAT avocat au barreau de PARIS, toque : A0470

INTIMES

Monsieur [P] [F]

Né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 2]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Thomas RONZEAU de la SCP RONZEAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Ayant pour avocat plaidant :Me Thomas RONZEAU avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Organisme CAISSE DE RETRAITE DES NOTAIRES

N° SIRET : 784 338 899 00015

[Adresse 4]

[Adresse 2]

Représentée par Me Laurent DELVOLVE de l'AARPI Delvolvé Poniatowski Suay Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : C0542

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Isabelle VERDEAUX, Présidente de chambre

Madame Isabelle BROGLY, Conseillère

M. Philippe JAVELAS, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Viviane REA

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Mme Isabelle VERDEAUX, présidente, dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

ARRET : CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle VERDEAUX, président et par Mme Viviane REA, greffier présent lors du prononcé.

******

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte authentique reçu par Maître [P] [F], notaire à Paris, en date des 21 et 28 juillet 1994, intitulé ' bail professionnel', la Caisse de Retraite des Notaires a donné à bail à la SCP [P] [Y] et [W] [J], notaires associés, ainsi qu'à Maître [M] [D], notaire, intervenant en qualité de futur associé de la SCP sus-dénommée, des locaux situés à [Adresse 5], ainsi que les caves numérotées A6 à A10 du 1er sous-sol et quatre parkings numéros 548, 546, 544, 542 du 5ème sous- sol du parking Hoche-Courcelles, pour une durée de douze années à compter du 1er janvier 1995 expirant le 31 décembre 2006, moyennant un loyer trimestriel de 450 000 euros.

L'acte précisait que les lieux étaient destinés à l'exercice de l'activité professionnelle de notaire et que le preneur, qui était informé que les lieux étaient jusqu'alors à usage d'habitation, acceptait de faire son affaire de l'obtention des autorisations administratives nécessaires à son installation.

Par acte d'huissier en date du 23 juin 2006, la Caisse de Retraite des Notaires a fait délivrer congé à la SCP [M] [D], notaire associé, titulaire d'un office notarial, à titre personnel et en sa qualité de successeur de la SCP [P] [Y] et [W] [J] , notaires associés, à Maître [M] [D], notaire, ainsi qu'à la SCP [P] [Y] et [W] [J], en leur qualité de cosignataires du bail, pour le 31 décembre 2006, terme du bail .

Les lieux ont été restitués le 31 décembre 2008.

Soutenant que le bail était en contravention avec les dispositions de l'article L 631-7 du Code de la construction et de l'habitation, Monsieur [M] [D] et la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés, ont fait assigner la Caisse de Retraite des Notaires devant le tribunal de grande instance de Paris, par acte d'huissier en date du 6 août 2007, en annulation du bail, en restitution des loyers et paiement de dommages et intérêts.

Par acte d'huissier en date du 9 juin 2008, la Caisse de Retraite des Notaires a fait assigner Monsieur [F] en garantie. Son successeur et héritier, Maître [P] [F], a été appelé en cause.

Par jugement en date du 27 octobre 2011, le tribunal de grande instance de Paris a:

- débouté Monsieur [M] [D] et la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés, de l'intégralité de leurs demandes,

- condamné in solidum Monsieur [M] [D] et la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés, à régler à la Caisse de Retraite des Notaires la somme de 154 460, 54 euros TTC et celle de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire, sauf en ce qui concerne les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ,

- condamné in solidum Monsieur [M] [D] et la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés, aux dépens.

Monsieur [M] [D] et la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés, ont interjeté appel de ladite décision le 23 novembre 2011.

Par arrêt en date du 14 mai 2013 la cour d'appel de Paris, Pôle 4 - Chambre 4, a:

- ordonné la réouverture des débats,

- révoqué l'ordonnance de clôture,

- renvoyé l'affaire à la mise en état,

- dit que les appelants devaient conclure avant le 15 juin 2013,

- dit que les intimés pourraient éventuellement répliquer avant le 15 septembre 2013,

- fixé le prononcé de l'ordonnance de clôture au 29 octobre 2013 et celle des plaidoiries au 26 novembre 2013,

- réservé les dépens.

Par arrêt en date du 28 janvier 2014, la cour d'appel de Paris, Pôle 4 - Chambre 4, a:

- confirmé en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 27 octobre 2011 par le tribunal de grande instance de Paris,

Y ajoutant,

- débouté la Caisse de Retraite des Notaires de sa demande en paiement de dommages -intérêts pour procédure abusive,

- condamné in solidum Maître [M] [D] et la SCP [D] et Associés à payer à la Caisse de Retraite des Notaires la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum Maître [M] [D] et la SCP [D] et Associés à payer à Maître [P] [F] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum Maître [M] [D] et la SCP [D] et Associés aux dépens d'appel.

Par arrêt en date du 10 juin 2015, la cour de cassation a cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 janvier 2014, entre les parties, par la cour de Paris, remis , en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris autrement composée.

Par conclusions en date du 17 octobre 2016, Monsieur [M] [D] , appelant, demande à la Cour de:

Vu l'article L631-7 du Code de la construction et de l'habitation,

Vu les articles 1131,1235, 1376, 1719-1° et 1720 du Code civil,

Vu l' arrêt du 14 mai 2013,

Vu l' arrêt de cassation du 10 juin 2015,

- recevoir la SCP [M] [D] en son appel et l'y déclarer bien fondée ,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a validé un bail atteint de nullité d'ordre public,

Et statuant à nouveau:

- dire et juger que la nullité du bail constatée remet les parties en l'état antérieur à la conclusion du bail,

- condamner la Caisse de Retraite des Notaires à restituer à la SCP [D] et Associés les sommes de:

' 1 353 241,34 euros au titre de la restitution des loyers et travaux,

' 300 000 euros au titre du préjudice subi en raison de la déloyauté de la Caisse de Retraite des Notaires dans la régularisation des autorisations liées à l'occupation des locaux,

- fixer à 300 000 euros au maximum l'indemnité d'occupation des locaux à la charge de la SCP [D] et Associés,

- condamner la Caisse de Retraite des Notaires à payer à la SCP [D] et Associés la somme de 23 920 euros TTC sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuer ce que de droit sur l'appel en garantie formé par la Caisse de Retraite des Notaires contre Maître [P] [F],

- débouter Maître [F] de toute demande dirigée contre la SCP [D] et Associés,

- condamner la Caisse de Retraite des Notaires aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions en date du 3 mai 2016, la Caisse de Retraite des Notaires, intimée, demande à la cour de:

- ordonner la jonction de la présente procédure avec la procédure pendante devant la cour d'appel de Paris enregistrée devant le Pôle 4 - Chambre 3, sous le numéro de RG 15/17015,

En conséquence;

S'agissant des conséquences de la nullité du contrat de bail:

- dire et juger que Maître [D] et la SCP [D] et Associés ont renoncé à se prévaloir des conséquences de la nullité du bail,

- dire et juger qu'en raison de leur parfaite mauvaise foi, Maître [D] et la SCP [M] [D] et Associés sont mal fondés à solliciter la restitution de l'intégralité des loyers versés à la Caisse de Retraite des Notaires depuis leur entrée dans les lieux et , en conséquence, les débouter de leur demande,

- dire et juger que Maître [D] et la SCP [D] et Associés sont conjointement et solidairement redevables d'une indemnité d'occupation pour la jouissance des lieux donnés à bail du 1er janvier 1995 au 31 décembre 2008, correspondant au prix des loyers d'habitation qu'ils auraient dû payer pour cette période ,

- fixer à la somme de 1 077 722 euros HT et hors charges le montant de l'indemnité d'occupation due par Maître [D] et la SCP [D] et Associés par référence à un bail d'habitation au prix du marché selon l'OLAP, pour la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 2008,

- dire et juger que Maître [D] et la SCP [D] et Associés devenue SCP [N] - [V] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés, sont conjointement et solidairement redevables envers la Caisse de Retraite des Notaires de la somme de 30 079, 92 euros au titre des charges non payées pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008,

- constater que la SCP [D] et Associés a réglé au titre du bail une somme de 860 327,94 euros HT et hors charges,

- ordonner la compensation entre la somme due à la Caisse de Retraite des Notaires par Maître [D] et la SCP [D] et Associés au titre de l'occupation des lieux loués pour la période du

1er janvier 1995 au 31 décembre 2008 ( 1 077 722 euros HT), et les sommes réglées par la SCP [D] et Associés au titre du bail ( 860 327,94 euros HT), soit un solde de 217 394 euros HT(

260 003,22 euros TTC), augmenté des charges non payées pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 ( 30 079,92 euros TTC), soit 290 083,14 euros TTC au profit de la Caisse de Retraite des Notaires,

- condamner conjointement et solidairement Maître [D] et la SCP [D] , [I] [M] et [A] [V], notaires associés' à payer à la Caisse de Retraite des Notaires par compensation une indemnité d'occupation pour la jouissance des locaux pendant 14 ans d'un montant de 290 083, 14 euros TTC couvrant la période du jour de l'entrée dans les lieux au 31 décembre 2008,

S'agissant du prétendu préjudice subi du fait de la nullité du contrat de bail

- dire et juger que Maître [D] et la SCP ' [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés', n'ont subi aucun préjudice du fait de cette nullité en raison de la jouissance des locaux pendant 12 ans, à un loyer inférieur aux loyers d'habitation, ces locaux ayant bénéficié des travaux réparatoires aux frais de la Caisse de Retraite des Notaires , selon protocole,

- dire et juger que Maître [D] et la SCP ' [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés'ne démontrent aucune attitude déloyale de la Caisse de Retraite des Notaires dans la régularisation des autorisations liées à l'occupation des lieux,

- en conséquence, débouter Maître [D] et la SCP ' [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés'de toutes leurs demandes,

- condamner conjointement et solidairement Maître [D] et la SCP ' [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés'à payer à la Caisse de Retraite des Notaires à titre de dommages et intérêts à raison de la mauvaise foi dudit notaire, une somme de 20 000 euros au titre de son préjudice moral,

S'agissant de l'appel en garantie formé à l'encontre de Monsieur [P] [F],

- dire et juger que Maître [P] [F], notaire, en dressant un acte authentique dont les clauses sont ultérieurement annulées a engagé sa responsabilité civile professionnelle en raison de son manquement à son devoir de conseil et à son obligation d'assurer à la fois la validité et l'efficacité des actes qu'il reçoit,

- en conséquence, condamner Maître [P] [F] , intervenant en qualité d'héritier de Me [P] [F], notaire, à relever et garantir intégralement la Caisse de Retraite des Notaires de toute condamnation qui serait prononcée au profit de Maître [D] et la SCP ' [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés',

S'agissant de l'article 700 du code de procédure civile ,

- condamner solidairement et conjointement Maître [D] et la SCP ' [M] [D], [I] [M] et [A] [V], notaires associés', et Me [P] [F] à payer à la Caisse de Retraite des Notaires la somme de 7000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions en date du 28 octobre 2016, Maître [P] [F], intimé, demande à la cour de:

- déclarer la Caisse de Retraite des Notaires irrecevable et mal fondée en son appel dirigé contre Maître [P] [F],

- l'en débouter,

Vu l'absence de faute, l'absence de préjudice indemnisable et l'absence de lien de causalité entre les deux,

- débouter la Caisse de Retraite des Notaires et toute autre partie, de toutes demandes dirigées contre Maître [P] [F],

- condamner la Caisse de Retraite des Notaires et toute autre partie succombante à payer à Maître [P] [F] la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Caisse de Retraite des Notaires et toute partie succombante aux entiers dépens.

Considérant que par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé aux conclusions visées ci-dessus pour l'exposé des prétentions et moyens des parties;

MOTIFS

Sur la nullité du bail

Considérant que l'article L 631- 7 du Code de la construction et de l'habitation dans sa rédaction en vigueur lors de la signature, les 21 et 28 juillet 1994, du contrat de bail dont la nullité est sollicitée dispose que:

' Dans les communes définies à l'article 10-7 de la loi n° 1360 du 1er septembre 1948 modifiée:

1° Les locaux à usage d'habitation ne peuvent être , ni affectés à un autre usage, ni transformés en meublés, hôtels, pensions de famille ou autres établissements similaires dont l'exploitant exerce la profession de loueur de meublé au sens du premier alinéa de la loi n° 49-458 du 2 avril 1949 modifiée, accordant le bénéfice du maintien dans les lieux à certains clients des hôtels, pensions de famille et meublés; les présentes dispositions n'étant pas applicables aux locations en meublé mentionnées au deuxième alinéa dudit article 2

2° Les locaux à usage professionnel ou administratif ainsi que les meublés, hôtels, pensions de famille ou établissements similaires ne peuvent, s'ils ne conservent pas leur destination primitive, être affectés à un usage autre que l'habitation;

3° Les garages et remises mentionnés à l'article 2 de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 précités ne peuvent être affectés à un usage commercial, industriel ou artisanal.

Il ne peut être dérogé à ces interdictions que par autorisation administrative préalable et motivée après avis du maire.

Le représentant de l'Etat dans le département peut autoriser l'exercice, sous certaines conditions, dans une partie d'un local d'habitation d'une profession, qui ne puisse à aucun moment revêtir un caractère commercial si ce local constitue en même temps la résidence du demandeur.

Ces dérogations et autorisations sont accordées à titre personnel. Cependant, les bénéficiaires membres d'une profession libérale réglementée, qui rendent à l'habitation le local qui était devenu totalement ou partiellement professionnel, peuvent être autorisés à transformer un autre local d'habitation en local professionnel pour une surface équivalente.

La dérogation et l'autorisation cessent de produire effet lorsqu'il est mis fin, à titre définitif , pour quelque raison que ce soit, à l'exercice professionnel du bénéficiaire.

Sont nuls de plein droit, tous accords ou conventions conclus en violation du présent article.

Toutefois le locataire ou occupant d'un local d'habitation irrégulièrement transformé en meublé et ré-affecté à la location nue bénéficie de plein droit, quelle que soit la date de son entrée dans les lieux, du maintien dans les lieux dans les conditions prévues au chapitres 1er et II de la loi précitée du 1er septembre 1948";

Considérant que par acte reçu par M.[P] [F] les 21 et 28 juillet 1994, à effet au 1er janvier 1995, la Caisse de Retraite des Notaires a donné à bail à Maître [D] et à la SCP [Y] et [J], aux droits de laquelle se trouve la SCP Jacquin- Ichou- [V] des locaux d'habitation à usage d'office notarial;

Considérant que le contrat de bail , prévoyant que le preneur ne pouvait utiliser les locaux qu'à usage professionnel pour une étude notariale, contenait la stipulation suivante page 5, 18° à la rubrique ' formalités administratives':

' Le preneur déclare faire son affaire de l'obtention de toutes autorisations administratives qui seraient nécessaires pour son installation dans les locaux loués, de manière à ce que le bailleur ne soit jamais inquiété ou recherché à ce sujet, le preneur étant informé de ce que les locaux, objet des présentes, étaient jusqu'alors à usage d'habitation';

Considérant qu'en application des dispositions susvisées applicables au cas d'espèce, dans les communes définies à l'article 10 -7 de la loi du 1er septembre 1948, les locaux à usage d'habitation ne peuvent être ni affectés à un autre usage ni transformés et qu'il ne peut être dérogé à ces interdictions que par autorisation administrative préalable et motivée, après avis du maire; que sont nuls de plein droit tous accords ou conventions conclus en violation de ces dispositions;

Considérant que le contrat de bail des 21 et 28 juillet 1994, reportant sur les preneurs l'obligation légale de demander les autorisations administratives préalables nécessaires au changement d'affectation, qui sont accordées à titre personnel, alors que l'autorisation administrative exigée par la loi aurait dû être obtenue par le propriétaire, préalablement à la signature du bail, a donc été conclu en violation de l'article L 631-7 du Code de la construction et de l'habitation ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'infirmer le jugement entrepris, et de prononcer la nullité du contrat de bail en date des 21 et 28 juillet 1994;

Sur les conséquences de la nullité du contrat de bail

- sur la renonciation à se prévaloir des conséquences de la nullité du bail

Considérant que la Caisse de Retraite des Notaires soutient que Maître [D] et la SCP [D] et Associés ont renoncé à se prévaloir des conséquences de la nullité du bail, même d'ordre public, et qu'en conséquence, ils ne sont pas fondés à demander la restitution des sommes versées; qu'elle fait valoir que les preneurs ont accepté en toute connaissance de cause de prendre à leur charge l'obtention de toutes les autorisations administratives nécessaires à la modification de la destination des locaux, qu'ils n'ont ni sollicitées, ni obtenues, tout en continuant à jouir du local aux conditions du bail jusqu'à son échéance, et même au delà , en réglant un loyer fixé sur le prix des loyers d'habitation et non des loyers professionnels, alors qu'en leur qualité de notaire, ils ne pouvaient ignorer la nécessité d'obtenir l'autorisation des services de la préfecture pour exercer leur profession dans ces locaux et pourles affecter à un usage exclusivement professionnel;

Considérant que la renonciation au bénéfice de dispositions légales doit être expresse et qu'elle ne se présume pas;

Considérant qu'il ne peut se déduire de la seule qualité de notaire de Me [D] que celui-ci avait connaissance de l'obligation qui pesait sur le propriétaire d'obtenir, préalablement à la signature du bail, l'autorisation administrative exigée par la loi, et qu'il a renoncé, en connaissance de cause, à se prévaloir de la nullité dudit bail conclu en violation des dispositions de l'article L631-7 du Code de la construction et de l'habitation; qu'en tout état de cause, cette méconnaissance de la réglementation applicable doit être également reprochée à la Caisse de Retraite des Notaires, qui en sa qualité de notaire, et au surplus de bailleur, ne pouvait encore moins ignorer les obligations qui étaient les siennes;

Considérant en l'espèce que, ni le versement des loyers par Maître [D] et la SCP [D] et Associés des loyers pendant plusieurs années, sans réserve ni contestation, ni la jouissance qu'ils ont eu des locaux aux conditions du bail jusqu'à son échéance, et même au-delà, ne constituent des actes non équivoques d'une renonciation de leur part en connaissance de cause à se prévaloir de la nullité dudit bail, ni aux conséquences d'une telle nullité; qu'en conséquence, la Caisse de Retraite des Notaires n'est pas fondée à prétendre que Maître [D] et la SCP [D] et Associés ont renoncé à se prévaloir des conséquences de la nullité du contrat de bail;

- sur les conséquences de l'exécution du contrat de bail annulé

Considérant que dans le cas où un contrat nul a été exécuté, les parties doivent être remises dans l'état où elles se trouvaient avant cette exécution et que, lorsque cette remise en état se révèle impossible, la partie qui a bénéficié d'une prestation qu'elle ne peut restituer, comme la jouissance d'un bien loué, doit s'acquitter du prix correspondant à cette prestation;

Considérant que la nullité du bail implique donc l'obligation pour la Caisse de Retraite des Notaires de restituer les loyers qu'elle a perçus de Maître [D] et la SCP [D] et Associés au titre de la convention locative, de même que l'obligation pour Maître [D] et la SCP [D] et Associés de payer une indemnité d'occupation représentative de la valeur locative des lieux occupés au titre de la présence de la SCP [D] et Associés dans les lieux, et jusqu'à son départ effectif;

- sur la restitution des loyers

Considérant que Maître [D] et la SCP [D] et Associés demandent la condamnation de la Caisse de Retraite des Notaires à la restitution au profit de la SCP [D] et Associés des sommes versées au titre des loyers et des travaux pendant la durée du bail, soit la somme de 1 353 241,34 euros, augmentée des intérêts légaux limités à cinq années en vertu de la prescription quinquennale de l'article 2277 ancien du Code civil;

Considérant que selon le récapitulatif produit par les appelants, la somme de 1 353 241,34 euros dont Maître [D] et la SCP [D] et Associés demandent la restitution au profit de la SCP [D] et Associés se décompose comme suit:

- travaux réglés par l'office de Maître [D] : 330 320,73 euros

- loyers: 791 253,88 euros

- charges locatives: 171 698,88 euros

- taxes foncières: 59 967,85 euros

Considérant, s'agissant des travaux, que les appelants ne produisent aucun justificatif de leur paiement, alors qu'il résulte d'un protocole du 25/11/1994 que le règlement des travaux et des honoraires de l'architecte, incombait au bailleur à hauteur de 262 212,31 euros ( 1 720 000 francs), ce même protocole prévoyant que les honoraires de l'architecte seraient supportés par le preneur; qu'en conséquence, les appelants ne sont pas fondés en leur demande de restitution de la somme de 330 320,73 euros au titre des travaux, pas plus qu'en leur demande de restitution de la somme de 59 967,85 euros au titre des taxes foncières dont le paiement par leurs soins n'est pas davantage justifié, et dont, en tout état de cause, ils demeurent redevables, s'agissant de taxes correspondant dans leur décompte aux taxes sur les bureaux, à raison de l'activité professionnelle qu'ils ont exercée dans les lieux ;

Considérant qu'en ce qui concerne les charges locatives, Monsieur [M] [D] et la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], qui n'en contestent pas le montant, ne sont pas fondés en leur demande de restitution de la somme de 171 698,88 euros, dès lors qu'ils ont bénéficié des prestations qu'elles recouvrent pendant la durée de la jouissance des lieux, et qu'ils en sont donc redevables en leur qualité d'occupants; qu'ils seront, en conséquence, déboutés de ce chef de demande, les charges acquittées demeurant acquises à la Caisse de Retraite des Notaires qui pourra recouvrer celles non encore réglées;

Considérant, s'agissant des loyers, que les sommes dues au titre des loyers versés ne sont pas payables à des termes successifs et ne correspondent pas à celles prévues par l'article 2277 ancien du code civil; qu'il s'ensuit que l'action en répétition de sommes versées indûment à titre de loyers n'est pas soumise à la prescription abrégée de l'article 2277 du Code civil;

Considérant que la somme de 58 859,98 euros correspondant à six mois de loyers versée spontanément par Maître [D] à la Caisse de Retraite des Notaires, postérieurement à la date d'effet du congé, pour une occupation des locaux du 1er janvier 2007 au 30 juin 2007, ne constitue pas un loyer mais une indemnité d'occupation, que la Caisse de Retraite des Notaires n'est donc pas tenue de la restituer;

Considérant qu'il résulte du décompte de la Caisse de Retraite des Notaires, que les sommes réglées par la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V] au titre des loyers, entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 2006, date d'expiration du bail, s'élèvent à la somme de

801 467,96 euros HT; qu'il y a lieu, en conséquence, de condamner la Caisse de Retraite des Notaires à restituer à la SCP [D] et Associés la somme de 801 467,96 euros HT;

Considérant que la cour, en application de l'article 954 du code de procédure civile, ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'elle n'est donc pas saisie de la demande des appelants en paiement des intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2003 sur le montant des loyers payés, s'agissant d'une demande qui ne figure pas dans les prétentions énoncées au dispositif de leurs conclusions;

- sur l'indemnité d'occupation

Considérant que Monsieur [M] [D] et la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V] soutiennent que la violation par la Caisse de Retraite des Notaires de son obligation de délivrer un local professionnel conforme aux dispositions de l'article L631-7 du Code de la construction et de l'habitation a engendré une occupation des lieux illicite et a créé une situation de fait ouvrant droit à une indemnisation sur le fondement de l'article 1382 du Code civil; qu'ils font valoir que l'indemnité d'occupation ne peut être ni égale ni supérieure à la somme stipulée dans le bail, sauf à gratifier le bailleur de sa défaillance fautive, que la prescription quinquennale de l'ancien article 2277 du Code civil s'applique à la demande d'indemnité d'occupation de la Caisse de Retraite des Notaires, et qu'ils demandent que l'indemnité d'occupation soit fixée au maximum à la somme de 300 000 euros correspondant à la moitié des loyers réglés pendant les cinq dernières années à hauteur de 15 000 euros par trimestre;

Considérant que la Caisse de Retraite des Notaires soutient que la SCP [D] et Associés est redevable d'une indemnité d'occupation dans la mesure où elle a joui des locaux qu'elle a occupés pendant la durée du bail, et même au-delà, même si cette occupation s'est effectuée en dehors de tout cadre juridique du fait de la nullité du bail; qu'il n'existe aucun préjudice indemnisable du fait des sommes qu'elle a été amenées à verser en contrepartie de cette occupation, et qu'en réglant la somme de 58 859,98 euros, correspondant à six mois de loyers, à la Caisse de Retraite des Notaires postérieurement à la date d'effet du congé, Me [D] a expressément reconnu que l'occupation du [Adresse 4] sans droit ni titre justifiait le règlement d'une indemnité d'occupation au titre de la jouissance des lieux;

Considérant que la Caisse de Retraite des Notaires soutient que le calcul de l'indemnité d'occupation se fait par référence au prix du loyer d'un local à usage d'habitation, alors que les appelants ont bénéficié d'un loyer inférieur, non seulement au loyer des baux professionnels, mais également à celui des baux d'habitation; qu'elle fait également valoir que la prescription quinquennale ne s'applique, ni à l'action en répétition des loyers indus, ni à l'indemnité d'occupation fixée globalement; qu'elle fait valoir qu'il ne s'agit pas d'une demande en paiement dès lors que les sommes en litige ont été effectivement payées , que ces paiements qui sont rentrés dans son patrimoine ont eu pour effet d'interrompre la prescription d'une action en paiement d'une indemnité d'occupation, qui n'a donc pas commencé à courir; qu'elle demande la compensation de l'indemnité d'occupation due par la SCP [D] et Associés avec les loyers réglés par celle-ci, et que sa demande en paiement ne concerne que l'éventuelle différence entre les loyers réglés et le montant de l'indemnité d'occupation qui sera fixée par le juge;

Considérant que la Caisse de Retraite des Notaires soutient que la prescription quinquennale ne s'applique pas, dès lors qu'elle forme une demande d'indemnité globale d'occupation, et que sa créance ne répond pas à la condition de périodicité de l'article 2277 du Code civil, et aussi dès lors qu'il ne s'agit pas d'une créance certaine dont le montant n'est pas déterminé ;

Considérant qu'en conséquence de l'annulation rétroactive du contrat de bail, le locataire est redevable d'une indemnité d'occupation représentative de la valeur locative des lieux occupés constitués par un appartement situé à [Adresse 6], 4ème étage, d'une surface totale de 453 m2, deux caves et quatre parkings du 5ème sous- sol du parking Hoche-Courcelles;

Considérant qu'en raison de sa nature mixte, indemnitaire et compensatoire, l'indemnité d'occupation constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des lieux et assure, en outre, la réparation du préjudice résultant d'une occupation sans bail; qu'en l'espèce, étant la conséquence des prestations effectivement échangées par les parties en exécution du contrat annulé, elle relève du seul droit des restitutions et est étrangère à la réparation des conséquences préjudiciables issues de l'annulation du contrat;

Considérant que Monsieur [M] [D] et la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], qui pendant quatorze ans, alors que le bail avait été consenti pour une durée de douze années, ont bénéficié de la jouissance de locaux dans lesquels ils ont exercé leur activité de notaire pour un loyer inférieur à celui d'un bail d'habitation, et encore davantage à celui d'un bail professionnel, ne sont pas fondés à invoquer un quelconque préjudice au soutien de leur demande de réduction de l'indemnité d'occupation sollicitée par la Caisse de Retraite des Notaires;

Considérant cependant que la prescription quinquennale de l'article 2277 ancien du Code civil s'applique à toutes les indemnités d'occupation, s'agissant, même si elle est fixée globalement après coup, d'une dette périodique calculée sur la base d'un montant mensuel ou trimestriel multiplié par le nombre de mois ou de trimestres d'occupation; qu'en raison de l'effet rétroactif de l'annulation du contrat de bail, qui est réputé n'avoir jamais existé, les paiements effectués par la SCP [D] et Associés à titre de loyers sont rétroactivement effacés, les choses sont remises en l'état où elles étaient avant la souscription du contrat, et la Caisse de Retraite des Notaires n'est donc pas fondée à prétendre qu'ils ont eu pour effet d'interrompre son action en paiement d'une indemnité d'occupation, pas plus qu'elle n'est fondée à prétendre que la créance n'est pas certaine ou que son montant n'est pas déterminé;

Considérant que la Caisse de Retraite des Notaires ayant formé sa demande en paiement d'une indemnité d'occupation pour la première fois dans son assignation du 31 mars 2010 , elle ne peut donc prétendre au paiement d'une telle indemnité que pour la période comprise entre le 1er avril 2005 et le 31 décembre 2008 , date de restitution des lieux;

Considérant que l'indemnité d'occupation doit donc être fixée en fonction de la valeur locative des lieux occupés au titre d'un bail d'habitation; que la cour, sur la base de la reconstitution par l'OLAP pour les années 1995 à 2006 d'un loyer pour un appartement similaire dans le même quartier, dispose des éléments suffisants pour fixer l'indemnité d'occupation au montant des sommes demandées par la Caisse de Retraite des Notaires à compter du 1er avril 2005 et jusqu'au 31 décembre 2008 ;

Considérant qu'en se basant sur les estimations de la valeur locative de l'OLAP, la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], est donc redevable, au titre de son occupation depuis le 1er avril 2005 jusqu'au 31 décembre 2008 d'une indemnité d'occupation de 63 588,75 euros ( déduction faite du premier trimestre 2005) pour l'année 2005, et de 86 820 euros pour chacune des années 2006 à 2008, soit un montant total de 324 048,75 euros hors charges, et hors taxes, l'indemnité d'occupation, qui n'a pas la nature d'un loyer, n'étant pas soumise à la TVA en ce qu'elle n'est pas la contrepartie d'une prestation licite; qu' il convient en outre de déduire de ce montant la somme de 58 859,98 euros versée spontanément par la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], à la Caisse de Retraite des Notaires, postérieurement à la date d'effet du congé;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence de condamner la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], à payer à la Caisse de Retraite des Notaires la somme de 265 188,77 euros au titre de l'indemnité d'occupation dont elle est redevable pour la période comprise entre le 1er avril 2005 et jusqu'au 31 décembre 2008;

Considérant, s'agissant des charges, que si les charges acquittées demeurent acquises à la Caisse de Retraite des Notaires, celle-ci est également fondée à recouvrer les charges, justifiées, non encore réglées; qu'en l'espèce, elle ne justifie d'aucun élément établissant que les charges afférentes à la période comprise entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2008 s'élèvent à la somme de 30 079,92 euros ;

Considérant qu'il convient d'ordonner la compensation entre les créances des parties ;

Considérant que la Caisse de Retraite des Notaires, après compensation et application des règles de prescription, demeurant redevable envers la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V], d'une somme de 536 279, 23 euros, force est de constater que, même si la nullité du contrat de bail des 21 et 28 juillet 1994 lui est imputable, de par la violation de son obligation d'obtenir au préalable l'autorisation administrative nécessaire au changement d'affectation exigée par la loi, au mépris des dispositions de l'article L631-7 du Code de la construction et de l'habitation, qu'elle n'en a tiré aucun enrichissement;

Sur la demande en paiement de la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts

Considérant que Monsieur [M] [D] et la SCP [M] [D], [I] [M] et [A] [V] prétendent que la Caisse de Retraite des Notaires a eu une attitude déloyale à son encontre du fait de l'acquisition de surfaces commerciales le 3 juillet 2007 et de la compensation avec les locaux à usage d'habitation du 5ème étage du [Adresse 4]; qu'ils soutiennent avoir 'multiplié les interventions auprès des services de l'urbanisme de la ville de [Localité 3] et avoir convaincu l'un de leur client de céder des surfaces de commercialité à la Caisse de Retraite des Notaires, et considèrent que l'attitude déloyale de la Caisse de Retraite des Notaires dans la régularisation des autorisations liées à l'occupation des locaux justifie sa condamnation au paiement d'une indemnité égale à 50% du prix de la cession du 3 juillet 2007, soit la somme de 300 000 euros;

Considérant que le 7 décembre 2006, la Section Professionnelle des Notaires a déposé une demande de changement d'usage d'un local d'habitation pour la ' régularisation du caractère juridique des locaux du 4 ème étage de l'immeuble sis [Adresse 7]' , par compensation avec des locaux situés au 5ème étage de l'immeuble sis [Adresse 8];

Considérant que pour permettre ce changement d'usage, la Caisse de Retraite des Notaires a également offert des compensations complémentaires dont la conversion en habitation d'une partie des locaux commerciaux situés au 4ème étage de l'immeuble sis [Adresse 9], le solde de la surface offerte étant affectée au 5ème étage de l'immeuble sis [Adresse 4];

Considérant que le 12 décembre 2007, la préfecture de [Localité 3] donnait son accord de principe sur le projet de changement d'usage des locaux situés au 4 ème et 5ème étages de l'immeuble situé [Adresse 4], et accordait son autorisation le 9 décembre 2008;

Considérant que non seulement les appelants ne justifient pas de leurs multiples interventions auprès des services de l'urbanisme de la ville de Paris pour la régularisation de la situation avant 2006, mais encore ils ne démontrent pas que la Caisse de Retraite des Notaires ait opposé une entrave à la régularisation de la situation locative des lieux loués, ni qu'elle ait été déloyale à leur encontre, alors que les différentes diligences ne permettent pas d'établir qu'elle ait privilégié les occupants du 5ème étage au détriment des occupants du 4ème étage, et alors au surplus qu'il est établi que l'acquisition de surfaces commerciales du 3 juillet 2007, fusse -t-elle réalisée par l'intermédiaire de Maître [D] et la SCP [D] et Associés, ne constituait pas une compensation suffisante pour finaliser la régularisation sollicitée postérieurement à la date d'effet du congé du 31 décembre 2006; que Maître [D] et la SCP [D] et Associés seront donc déboutés de leur demande en paiement d'une indemnité de 300 000 euros;

Sur la garantie de Maître [P] [F]

Considérant que le notaire doit, au titre de son devoir de conseil, assurer à la fois la validité et l'efficacité des actes qu'il reçoit;

Considérant que les 22 et 28 juillet 1994, Maître [P] [F] a reçu l'acte authentique intitulé ' bail professionnel' aux termes duquel la Caisse de Retraite des Notaires a donné à bail à la SCP [P] [Y] et [W] [J], notaires associés, ainsi qu'à Maître [M] [D], notaire, intervenant en qualité de futur associé de la SCP sus-dénommée, des locaux situés à [Adresse 5], ainsi que les caves numérotées A6 à A10 du 1er sous-sol et quatre parkings numéros 548, 546, 544, 542 du 5ème sous- sol du parking Hoche-Courcelles, pour une durée de douze années à compter du 1er janvier 1995 expirant le 31 décembre 2006;

Considérant que ce contrat de bail, précisant que les lieux étaient destinés à l'exercice de l'activité professionnelle de notaire et que le preneur, qui était informé que les lieux étaient jusqu'alors à usage d'habitation, et reportant sur les preneurs l'obligation légale de demander les autorisations administratives préalables nécessaires au changement d'affectation, qui sont accordées à titre personnel, alors que l'autorisation administrative exigée par la loi aurait dû être obtenue par le propriétaire, préalablement à la signature du bail, a été conclu en violation de l'article L 631-7 du Code de la construction et de l'habitation, qu'il est donc nul et de nul effet;

Considérant que le notaire instrumentaire n'est pas fondé à prétendre avoir attiré l'attention des parties à l'acte sur la nécessité de l'obtention des autorisations administratives nécessaires pour l'installation du preneur dans les locaux loués en insérant un paragraphe intitulé ' formalités administratives'alors que précisément la clause prévoyant de mettre à la charge des preneurs l'obligation de demander les autorisations administratives préalables nécessaires au changement d'affectation des locaux est contraire aux dispositions de l'article L 631-7 du Code de la construction et de l'habitation, que ces autorisations doivent être obtenues par le propriétaire préalablement à la signature du bail, qu'elles font défaut en l'espèce, et que cette irrégularité est la cause de la nullité de l'acte, et partant, de son absence d'efficacité ;

Considérant qu'en recevant un acte contenant une clause illicite, entraînant sa nullité, le notaire instrumentaire a failli à son obligation de conseil, la connaissance par la Caisse de Retraite des Notaires, lors de la signature de l'acte, de la nécessité d'obtenir au préalable l'autorisation de changement d'affectation des locaux, que Maître [P] [F] ne démontre pas en l'espèce, ne pouvant le dispenser de son devoir d'information et de conseil;

Considérant en effet que la reprise ultérieurement par les parties d'une clause identique dans un protocole d'accord du 25 novembre 1994 se rapportant à l'exécution de travaux, hors la présence du notaire, n'est pas susceptible d'exonérer celui-ci de sa responsabilité,

Considérant enfin que Maître [P] [F] ne saurait reprocher à la Caisse de Retraite des Notaires de ne pas avoir mis en oeuvre la clause résolutoire contenue dans le bail et de ne pas avoir mis en demeure le preneur de justifier de la demande et de l'obtention des autorisations administratives, alors précisément que cette condition , insérée par le notaire instrumentaire, est entachée de nullité;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence, de condamner Maître [P] [F], pris en sa qualité d'héritier de Maître [P] [F], à relever et garantir la Caisse de Retraite des Notaires de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, dont principalement la condamnation à la restitution à restituer à la SCP [D] et Associés de la somme de 801 467,96 euros HT au titre des sommes versées à titre de loyers en exécution du bail qui résulte directement de la nullité du contrat de bail consécutive à la faute du notaire, ainsi que les condamnations prononcées au titre des dépens et des frais irrépétibles;

Sur les dommages intérêts

Considérant que le droit d'ester en justice ou d'exercer une voie de recours ne dégénère en abus que s'il révèle de la part de son auteur une intention maligne ou une erreur grossière, équipollente au dol, dans l'appréciation de ses droits; que faute de démontrer que ces conditions sont réunies, la Caisse de Retraite des Notaires sera débouté de sa demande en dommages et intérêts au titre de son préjudice moral pour procédure abusive qu'elle forme à l'encontre de Maître [D] et la SCP [D] et Associés F;

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens

Considérant que la Caisse de Retraite des Notaires qui succombe en ses prétentions, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés;

Considérant que la somme qui doit être mise à la charge de la Caisse de Retraite des Notaires au titre des frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel par la SCP [D] et Associés peut être équitablement fixée à 5000 euros;

Considérant que Maître [P] [F], pris en sa qualité d'héritier de Maître [P] [F], sera débouté de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, et contradictoirement ,

INFIRME le jugement attaqué en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

PRONONCE la nullité du bail des 21 et 28 juillet 1994 conclu entre la Caisse de Retraite des Notaires et la SCP [P] [Y] et [W] [J] et Maître [M] [D],

CONSTATE que la Cour n'est pas saisie de la demande des appelants en paiement des intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2003 sur le montant des loyers payés,

CONDAMNE la Caisse de Retraite des Notaires à restituer à la SCP [D] et Associés à restituer à la SCP [D] et Associés la somme de 801 467,96 euros HT au titre des sommes versées à titre de loyers en exécution du bail annulé des 21 et 28 juillet 1994,

CONDAMNE Maître [D] et la SCP [D] et Associés à payer à la Caisse de Retraite des Notaires la somme de 265 188,77 euros au titre de l'indemnité d'occupation dont elle est redevable pour la période comprise entre le 1er avril 2005 et jusqu'au 31 décembre 2008,

CONDAMNE Maître [D] et la SCP [D] et Associés à payer à la Caisse de Retraite des Notaires les charges afférentes à la période comprise entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2008 justifiées et non acquittées,

ORDONNE la compensation entre les créances respectives des parties,

CONDAMNE Maître [P] [F], pris en sa qualité d'héritier de Maître [P] [F], à relever et garantir la Caisse de Retraite des Notaires de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre , en ce les condamnations prononcées au titre des dépens et des frais irrépétibles,

DÉBOUTE les parties de toutes autres ou plus amples demandes,

Condamne la Caisse de Retraite des Notaires à payer à la SCP [D] et Associés la somme de 5000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Caisse de Retraite des Notaires aux entiers dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel pouvant être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 15/17010
Date de la décision : 12/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris G3, arrêt n°15/17010 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-12;15.17010 ?
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