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12/01/2017 | FRANCE | N°15/16690

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 12 janvier 2017, 15/16690


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 9



ARRÊT DU 12 JANVIER 2017



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/16690



Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de Paris en date du 25 Juin 2015 - RG n° 2014064682



APPELANTE



SA HERMITAGE GESTION PRIVEE

immatriculée au RCS de PARIS sous le n°378 570 014

ayant son siège s

ocial [Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



Représentée par Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARI...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRÊT DU 12 JANVIER 2017

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/16690

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de Paris en date du 25 Juin 2015 - RG n° 2014064682

APPELANTE

SA HERMITAGE GESTION PRIVEE

immatriculée au RCS de PARIS sous le n°378 570 014

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998

ayant pour avocat plaidant Me Stéphane SALEMBIEN, avocat au barreau de PARIS, toque : R35

INTIMÉS

1) Monsieur [M] [P]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 2] (MAROC)

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Laurent BERNET de la SELAS BCW & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0490

SARL CALHIC

immatriculée au RCS de LUXEMBOURG sous le n° B 120466

[Adresse 3]

[Localité 4]E / LUXEMBOURG

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Laurent BERNET de la SELAS BCW & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0490

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Novembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Madame Michèle PICARD, Conseillère

Madame Christine ROSSI, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Pauline ROBERT

Ministère Public : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François FRANCHI, président et par Mme Pauline ROBERT, greffier présent lors du prononcé.

*

Le 4 juin 2009, monsieur [M] [P] et monsieur [W] [C] sont venu rejoindre Monsieur [W] [V], président directeur général de la société anonyme Affinity Gestion, afin de participer à son développement, en remplaçant certains administrateurs et actionnaires démissionnaires et en apportant de nouvelles compétences ainsi que leur clientèle respective.

Cette société de gestion de portefeuille, constituée en 1990 sous le nom de Jcl Finance, est devenue la société Affinity Gestion en 2007, puis est devenue la société anonyme Hermitage Gestion Privée (ci-après dénommée "la société Hgp") le 16 juillet 2009.

Monsieur [P] était, avant de rejoindre la société Hgp, gérant de portefeuille au sein de la société Financière Lamartine et avait été le promoteur au travers de sa société domiciliée au Luxembourg ([P] et Associés, devenue la société Calhic) de deux fonds commun de placement - "[P] Patrimoine" (en 2005) et "Europe Multigestion Pea" (en 2007) - dont la gestion avait été confiée à la société Vega Mutlimanager (devenue la société Compagnie 1818-Gestion) et dont la société Vega Finance (devenue la société Compagnie 1818-Banque Privée) était dépositaire.

Consécutivement à l'accord du 4 juin 2009, diverses conventions ont été conclues entre les parties visant à organiser l'exercice des activités de monsieur [P] et de ses sociétés - [P] et Associés (à Paris) et [Localité 5] (au Luxembourg) - au sein de la société Hgp :

- une première convention d' "apporteur d'affaires" conclue en date du 22 juin 2009 pour prise d'effet au 1er juillet 2009 entre la société Hgp, la société [P] et Associés et monsieur [P], dont l'objet était celui de l'apport de comptes de titres, de plan d'épargne en actions et de mandats de gestion par la société [P] et Associés à la société Hgp, moyennant une rémunération sur les encours à définir suivant un contrat à venir ;

- un contrat de travail à plein temps de gérant de portefeuille signé le 22 juin 2009 entre monsieur [P] et la société Hgp pour la prise de fonction au 1er juillet 2009 ;

- une convention dite "promoteur" conclue le 22 juin 2009 entre la société Hgp, la société Calhic et monsieur [P], dont l'objet était le transfert de la gestion des deux fonds commun de placement dont la société [P] et Associés était le promoteur, à savoir "[P] Patrimoine" (dans un premier temps) et "Europe Multigestion Pea" (dans un deuxième temps) depuis la société de gestion Compagnie 1818-Gestion (ci-après dénommée "Cie 1818") vers la société Hgp avec recrutement chez Hgp de monsieur [P] comme gérant multigestion, devant s'occuper de la gestion des deux fonds commun de placement avec l'aide des autres gérants ;

- une convention dite "de partenariat" établie le 1er juillet 2009 entre les sociétés Hgp et Calhic.

En exécution de la convention "promoteur" du 22 juin 2009, monsieur [P] a organisé le transfert de la gestion des sociétés de fonds commun de placement, la société [P] Patrimoine et la société Europe Multigestion Pea à la société Hgp à partir de son arrivée en juillet 2009 au sein de la société Hgp en tant que gérant de portefeuille :

- dans un premier temps, c'est le transfert du fonds commun de placement [P] Patrimoine qui a été entériné le 1er juillet 2009 par le conseil d'administration de la société Hgp, avec :

- changement de nom en "Mif" ou "Multigestion Internationale Flexible"

- maintien de monsieur [P] comme responsable de ce fonds commun de placement,

- reprise à la charge de la société Hgp des engagements de la convention de gestion conclue avec la Cie 1818,

- changement de dépositaire de la société Compagnie 1818-Banque Privée vers la société RBC,

- dans le cas du fonds commun de placement Europe Multigestion Pea, une fusion avec la société Everest a été réalisée et entérinée par le conseil d'administration de la société Hgp du 30 novembre 2009 et la gestion a été transférée à monsieur [W] [V], président de la société Hgp.

Début 2013, un conflit est né entre monsieur [P] et la société Hgp concernant l'interprétation et l'exécution des diverses conventions signées entre les parties.

Il s'en est suivi une forte dégradation des relations entre monsieur [P] et les associés et cadres de la société Hgp ayant pour conséquence les décision suivantes :

- le changement de gérance du fonds commun de placement Mif aux dépens de monsieur [P] par décision du conseil d'administration de la société Hgp du 4 juillet 2013, avec transfert de la gérance aux autres dirigeants de la société Hgp ;

- la révocation de la société Calhic en sa qualité d'administrateur par une assemblée générale extraordinaire en date du 23 juillet 2013 dont monsieur [P] conteste la validité et la privation de la rémunération de ce dernier qu'il avait à travers la société Calhic ;

- des mises en garde et avertissements sur ses absences, son manque de respect des calendriers de l'entreprise, ses abus sur les frais de société, etc... qui lui ont été faites à plusieurs reprises pendant le 2ème semestre 2013 ;

- enfin, le licenciement pour faute grave à effet immédiat le 24 décembre 2013.

A la suite de ces événements monsieur [P] a dénoncé la convention "promoteur" du 22 juin 2009 par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 27 juin 2013, courrier par lequel il a indiqué son intention de transférer la gestion du fonds commun de placement Mif à une nouvelle société de gestion, si possible dans le délai de préavis de 6 mois, soit avant fin décembre 2013. Monsieur [P] a aussi signifié dans cette lettre son intérêt pour récupérer le fonds commun de placement Everest. Il a fait remarquer que la dénonciation a été faite dans les termes de la convention, reprenant eux-mêmes intégralement les termes des conventions et avenants initiaux conclus avec la société Cie 1818 au moment où en 2009 il avait été demandé à cette dernière de transférer le fonds commun de placement [P] Patrimoine (devenu Mif) et le fonds commun de placement Europe Multigestion Pea (devenu Everest) à la société Hgp.

La société Hgp a indiqué en réponse que la convention du 22 juin 2009 a été rendue caduque par la signature de la convention du 1er juillet 2009 et qu'elle entendait rester gestionnaire des fonds commun de placement Mif et Everest.

Par courrier en date du 30 avril 2014, monsieur [P] a dénoncé les manquements de la société Hgp à ses obligations contractuelles et a mis en demeure la société Hgp de se conformer à son engagement de faciliter le transfert de la gestion du fonds commun de placement Mif et lui a confirmé le 19 juin 2014 sa demande de transfert à la société [P] et Associés et de changement du dépositaire et valorisateur RBC au bénéfice de CM-CIC.

Par assignation devant le président du tribunal de commerce de Paris délivrée à la société Hgp le 29 septembre 2014, la société Calhic et monsieur [P] ont sollicité le transfert de la gestion du fonds commun de placement Mif sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard.

Par ordonnance du 15 octobre 2014 le président du tribunal de commerce a jugé qu'il n'y avait lieu à référé et a renvoyé l'affaire devant une audience collégiale du tribunal de commerce :

Par jugement en date du 25 juin 2015 assorti de l'exécution provisoire le tribunal de commerce de Paris a, d'une part, fait droit aux demandes de la société Calhic et de monsieur [P] relatives aux différentes instructions sous astreintes ordonnées à la société Hgp mais a fixé cette astreinte à hauteur de 1.000 euros par jour de retard à partir de 15 jours après la signification de la décision, pendant une durée d'un mois, au delà duquel il sera de nouveau statué et a, d'autre part, a condamné la société Hgp à payer à la société Calhic et à monsieur [P] chacun, la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a considéré que la convention de partenariat du 1er juillet 2009 ne concernait pas le transfert du FCP et qu'elle n'avait pas vocation à se substituer à la convention promoteur du 22 juin 2009 ni même à la convention d'apporteur d'affaires du 22 juin 2009, la clause de substitution y figurant n'étant qu'une clause standard. La convention de promoteur du 22 juin 2009 n'est selon le tribunal, ni frappée de nullité ni de caducité. Le tribunal a ensuite considéré que ce contrat avait été résiliée par monsieur [P] le 27 juin 2013, que celui-ci disposait des droits de promoteur des Fcp, reconnus par Hgp lors du transfert de Cie 1818 vers Hgp et qu'Hgp ne pouvait s'opposer au transfert de la gestion du Fcp Mif à [P] et Associés et de la fonction de dépositaire de RBC à CM-CIC puisque ces facultés de transfert avaient été acceptées par CIE 1818 Gestion et Cie 1818 Banque Privée puis par Hgp dans le cadre de la convention promoteur.

Par déclaration au greffe en date du 30 juillet 2015, la société Hgp a relevé appel de cette décision.

***

Dans ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 12 octobre 2016, la société Hermitage Gestion Privée demande à la cour d'appel au visa des articles L.214-8 et suivants du code des marchés financiers et des articles 1134 et 1165 du code civil de réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré, et statuant à nouveau :

- de débouter la société Calhic et monsieur [P] de toutes prétentions et demandes de transfert du fonds commun de placement Mif, sur tous fondements et de toutes demandes subséquentes,

- de dire que la société Calhic et monsieur [P] ne peuvent pas plus fonder leur demande de transfert du fonds commun de placement Mif sur les conventions du 14 mars 2005 et du 12 mars 2007 auxquelles la société Hgp n'a pas consenti, et les débouter de cette demande et de celles subséquentes sur ce fondement,

- de dire à titre subsidiaire du point précédent, qu'à supposer par impossible qu'il soit jugé que la convention du 12 mars 2007 oblige la société Hgp, celle -ci est radicalement nulle et de nul effet comme contraire aux règles sur les sociétés de gestion et les organismes de placements collectif en valeurs mobilières du code des marchés financiers,

- de dire que la convention "promoteur" du 22 juin 2009 est caduque si bien qu'elle ne peut fonder la demande de transfert du fonds commun de placement Mif quelle que soit l'analyse de la clause de résiliation,

- d'ordonner la restitution du fonds commun de placement Mif à la société Hgp avec transfert de tous documents et informations utiles à sa gestion ; donner toutes instructions utiles aux fins de mise en 'uvre de ce transfert au profit de la société Hgp, et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à partir de 15 jours après la signification de l'arrêt à intervenir,

- de condamner solidairement la société Calhic et monsieur [P] au paiement à la société Hgp de la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts et de 3.000 euros à titre d'amende civile en application de l'article 32-1 du code de procédure civil,

- de condamner solidairement la société Calhic et monsieur [P] au paiement à la société Hgp de la somme de 207.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice subi suite à l'exécution du jugement déféré,

- de condamner solidairement la société Calhic et monsieur [P] au paiement à la société Hgp de la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

***

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 octobre 2016, la société Calhic et monsieur [P] demandent à la cour d'appel :

A titre principal,

- de confirmer le jugement déféré,

- de débouter la société Hgp de l'ensemble de ses demandes,

- d'ordonner à la société Hgp, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, de communiquer sous 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir les éléments d'information et documents relatifs à la gestion du fonds commun de placement Mif pour le mois d'août 2015 : fichier des ordres passés, avis d'opérés, fichiers des valorisations quotidiennes, recettes du fonds commun de placement Mif (commissions de mouvements + frais de gestion fixes + frais de gestion variables), détail des frais facturés par la banque dépositaire et le valorisateur et des honoraires payés au commissaire aux comptes, fichiers de souscriptions et rachats de parts du fonds commun de placement Mif, fichier de calcul des rétrocessions des organismes de placements collectif en valeurs mobilières sous-jacents, relevés de compte mensuel titres et espèces,

A titre incident,

- de condamner la société Hgp à payer à la société Calhic et monsieur [P] chacun la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

***

L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 octobre 2016.

L'audience de plaidoirie a eu lieu le 3 novembre 2016.

SUR CE

Monsieur [P] fait valoir qu'il est le promoteur du Fcp [P] Patrimoine devenu Mif, que la gestion de ce fonds a été confié à la société Hgp selon la convention promoteur du 22 juin 2009, que cette convention de gestion est un mandat qui peut être révoqué et monsieur [P] y a mis fin. En vertu de la convention du 12 mars 2007 conclue entre [P] et Associés et Compagnie 1818-Gestion reprise explicitement par Affinity Gestion dans la convention du 22 juin 2009 le tout entériné par le Conseil d'administration d'Affinity Gestion, le gestionnaire 'facilitera le transfert de la gestion du fonds à un autre gérant et dépositaire' au terme du mandat. La société de gestion s'étant ainsi engagée à faciliter le transfert de la gestion de ce fonds à la nouvelle société désignée par le promoteur, il appartient à Hgp d'exécuter son obligation.

Pour refuser de transférer à la société [P] et Associés la gestion du fonds commun de placement dénommé "Mif" la société Hgp soutient que les conventions existantes ne peuvent fonder la demande de transfert du fonds commun de placement Mif et que le régime juridique du fonds commun de placement est exclusif de toute possibilité de revendication du transfert du fonds commun de placement Mif par les requérants.

La société Hgp soutient en premier lieu qu' à supposer même que la convention dite "promoteur" du 22 juin 2009 soit applicable, elle prévoit que seule la clientèle des Fcp devrait être transférée, et non le fonds lui-même et que la clientèle du fonds commun de placement Mif ayant pour origine la société Calhic a d'ores et déjà été transférée par la société Hgp à la société [P] et Associés depuis août 2014.

La société Calhic et monsieur [P] font valoir que le détournement de sens est total alors que la clause de la convention dite "promoteur" du 22 juin 2009, vise très exactement le contrai de ce qu'indique la société Hgp, à savoir l'engagement pris par le promoteur de faciliter pour la société Hgp le transfert de sa clientèle sur d'autres fonds une fois que celui-ci a ordonné le transfert de la gestion du fonds commun de placement Mif auprès d'une autre société de gestion de portefeuilles.

La société Hgp fait valoir en deuxième lieu que les intimés ne peuvent se prévaloir de contrats anciens conclus entre la société Calhic et la société 1818 Gestion. Elle expose que monsieur [P] avait confié la gestion de deux Fcp, dont le fonds Mif, à la société 1818 Gestion (auparavant Véga Finance) et que les relations entre Calhic et la société Cie 1818 Gestion étaient définies par deux convention du 14 mars 2005 et du 12 mars 2007 selon lesquelles le promoteur des fonds commun de placement Mif et Europe Multigestion Pea a confié à la Cie 1818 la gestion des fonds commun de placement et dont l'article 6 de la convention de 2007 prévoit qu'à son terme le gestionnaire "facilitera le transfert de la gestion du fonds à un autre gérant et dépositaire" Or les relations entre les parties ne sont pas construites sur ce schéma et ces conventions ne lient pas la société Hgp. En effet, le contrat de distribution du Fcp Mif du 14 mars 2005 prévoyait que la société Calhic avait l'exclusivité de la prescription du Fcp auprès de sa clientèle de sorte que les clients ayant investi dans ce fond provenaient exclusivement de la société Calhic. Ainsi, en cas de transfert du fonds ce ne pouvait être que le transfert de la gestion du fonds et non de la clientèle du fonds puisque la clientèle provenait exclusivement de la société Calhic. Or pour ce qui concerne la société Hgp le schéma est différent puisque outre les clients existant du Fcp Mif d'autres clients provenaient de la société Hgp. Ainsi après la prise de gestion du Fcp par la société Hgp sur les 17 millions d'euros investis 10 millions provenaient de la clientèle de Hgp. Les règles ne pouvaient donc être les mêmes et il ne peut s'agir donc que d'un transfert de clientèle.

La société Hgp soutient au surplus que la convention conclue entre la société Calhic et la Cie 1818-Gestion le 12 mars 2007, convention par laquelle le promoteur des fonds commun de placement Mif et Europe Multigestion Pea a confié à la Cie 1818 la gestion des fonds commun de placement ne lui est pas opposable puisqu'elle n'y était pas partie. Elle soutient enfin que cette convention du 12 mars 2007 est nulle comme contraire à la réglementation financière en vigueur, la société Calhic n'étant pas une société de gestion agréée par l'AMF elle ne peut donner à un tiers le soin de gérer des Fcp en son nom et pour son compte.

La société Calhic et monsieur [P] font valoir que la société Hgp ne conteste pas sa signature de la convention du 22 juin 2009 qui fait littéralement référence à la convention du 12 mars 2007. Ainsi l'argumentation de la société Hgp en la cause constitue un reniement des effets de sa signature. Enfin si la société Hgp a signé une convention renvoyant à une annexe dont elle ignorait l'existence, ce qui est mensonger, il lui appartient alors d'assumer aujourd'hui son inconséquence.

La société Hgp soutient enfin que la convention du 22 juin 2009 dite "promoteur" est devenue sans objet depuis que la Cie 1818 Gestion a accepté de transférer la gestion du fonds commun de placement Mif en février 2010. Elle est donc caduque et ne pourrait en toute hypothèse fonder un quelconque droit de transfert du fonds commun de placement Mif.

En réponse, la société Calhic et monsieur [P] font valoir que la convention dite "promoteur" du 22 juin 2009 est la première convention signée entre les parties, les autres ayant été conclues à des dates postérieures, ce qu'établit encore l'approbation de cette convention par le conseil d'administration de la société Hgp dès le 1er juillet 2009, que la convention du 22 juin 2009 dite "promoteur", prétendument caduque a été exécutée, qu'enfin, quand bien même il devrait être considéré que la convention dite "promoteur" du 22 juin 2009 serait effectivement devenue caduque, cela ne changerait strictement rien au fait que la gestion des fonds commun de placement a été indubitablement transférée dans le cadre d'un mandat confié à la société Hgp par la société Calhic et monsieur [P], mandat accepté par la société Hgp, par nature révocable et dont la société Hgp n'a aujourd'hui d'autre choix que celui de l'abandonner et d'en faciliter le transfert.

La société Hgp soutient finalement que le régime juridique du fonds commun de placement est exclusif de toute possibilité de revendication du transfert du fonds commun de placement Mif par les requérants. Au soutien de cette prétention elle expose dans un premier temps, que monsieur [P] et/ou la société Calhic, qui n'ont pas la qualité de gestionnaire de portefeuille agréé par l'autorité des marchés financiers, ne peuvent avoir créé les fonds commun de placement Mif ou Europe Multigestion Pea, que l'initiative de cette création n'étant permise qu'au seul gestionnaire de portefeuille, monsieur [P] et/ou la société Calhic, ne peuvent revendiquer la qualité qu'ils invoquent sous le terme équivoque de "promoteur", qu'aussi ils ne peuvent prétendre avoir créé ce fonds commun de placement Mif et non plus en avoir confié la gestion dans le cadre d'un mandat, ni en exiger le transfert et qu'en conséquence, cette seule raison justifie le débouté pur et simple des prétentions adverses et la réformation du jugement déféré.

En réponse, la société Calhic et monsieur [P] soutiennent que l'argument de la société Hgp consistant à indiquer que la société Calhic ou monsieur [P] n'auraient pas pouvoir de donner un mandat de gestion à défaut d'être l'un ou l'autre société de gestion agréée par l'autorité des marchés financiers, est hors sujet alors que l'une et l'autre ne font valoir que leurs droits de promoteur ou de personnes habilitées.

La cour relève que la convention du 22 juin 2009 par laquelle la gestion du Fcp Mif, anciennement [P] Patrimoine, est transféré de la société Cie 1818 Gestion à la société Affinity Gestion par la société [P] et Associés et monsieur [P] précise dans son préambule 'Rappel du contexte' que la société [P] et Associés est le promoteur de ce fonds commun de placement. Elle stipule dans son paragraphe 3 que 'AFFINITY GESTION reprend à sa charge la convention avec la Cie 1818 Gestion dans les mêmes termes' et dans son dernier paragraphe 'Durée de la Convention' qu'elle est renouvelée 'chaque 1er janvier par tacite reconduction' et qu'elle 'pourra être résiliée par chacune des parties avec un préavis de six mois; dans ce cas les parties s'engagent à faciliter le transfert de la clientèle, à écourter au mieux le préavis et à ne demander aucune indemnité du fait de la résiliation de la Convention (...)'.

La Convention avec la société Cie 1818 Gestion à laquelle il est fait sans aucun doute référence dans la convention de transfert de gestion du 22 juin 2009 précitée, est celle du 12 mars 2007. Elle a été signée entre la société [P] et Associés (appelée le Promoteur) et la Compagnie 1818 Gestion. Elle stipule dans son article 6 relatif à sa durée et à sa dénonciation que 'La Compagnie 1818, si besoin est, facilitera le transfert de la gestion du fonds à un autre gérant et dépositaire.'

La cour note en premier lieu que la convention du 22 juin 2009 a été signée par la société Calhic et par monsieur [P] en leur qualité de 'Promoteur' et non par la société 1818 Gestion. Il en résulte que ce sont eux qui avaient le pouvoir et le contrôle sur le Fcp et non la société 1818 Gestion.

La fonction de promoteur d'un fonds d'investissement n'est certes pas réglementée et peut avoir plusieurs sens. En l'espèce il ressort de l'ensemble des pièces produites que le promoteur est entendu comme étant celui qui est à l'initiative de la création du fonds et qui en a la maîtrise notamment la fixation des règles d'investissement et la rédaction des documents d'investissement ainsi que le pouvoir d'en confier la gestion à telle société qu'il choisit.

Ainsi, la convention du 22 juin 2009 transfère la gestion du fonds litigieux à la société Hgp. Cette convention indique explicitement que la société Affinity Gestion (Hgp) reprend à sa charge la convention du 12 mars 2007 conclue avec le précédent gestionnaire, la société Cie 1818 Gestion qui prévoit ainsi qu'il a été vu, que la gestion du fond pourra être transférée à un autre gérant. La société Hgp est donc liée par cette obligation qu'elle a prise et ne peut prétendre l'avoir ignorée alors qu'elle a signé la convention et que, bien que la date de la convention à laquelle il est fait référence ne soit pas indiquée, il ne peut s'agir que de la convention de gestion précédente par laquelle le promoteur avait confié la gestion du fonds à la société Cie 1818.

La cour considère également que cette convention du 22 juin 2009 n'est pas devenue caduque du fait de conventions postérieures qui n'ont pas le même objet.

L'interprétation par Hgp de la clause litigieuse de la convention du 22 juin 2009 relative au transfert de la seule clientèle ne peut en conséquence être retenue.

L'argument selon lequel les relations entre [P] et Cie 1818 sont fondamentalement différentes de celles existant entre [P] et Hgp puisque dans ce dernier cas la société Hgp a sa clientèle propre, n'est pas fondé en l'absence d'obstacle à un transfert de la clientèle de Hgp en cas de dénonciation de la convention..

La cour considère en outre que la société Hgp ne peut soulever la nullité de la convention du 12 mars 2007 alors qu'elle n'est pas partie à cette convention et qu'en tout état de cause la qualité de 'promoteur' d'un Fcp ne se confond pas avec la gestion du fond et qu'il n'est donc pas nécessaire de le promoteur soit agréé par l'AMF.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement attaqué.

La société Calhic et monsieur [P] demandent que leur soient communiqués sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard sous 15 jours à compter de la signification de la présente décision un certain nombre de documents qu'ils n'auraient pas déjà reçu. La société Hgp ne répond pas sur ce point. Il convient en conséquence de faire droit à cette demande qui n'est pas contestée.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

La société Calhic et monsieur [P] sollicitent chacun le paiement de la somme de 15.000 euros.

Il serait inéquitable de laisser à leur charges les fari qi'ils ont exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il convient en conséquence de faire droit à la demande.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 25 juin 2015,

Y ajoutant,

Ordonne à la société Hermitage Gestion Privée sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de 15 jours après la signification de la présente décision de communiquer les éléments d'information et documents relatifs à la gestion du fonds commun de placement Mif pour le mois d'août 2015, soit le fichier des ordres passés, les avis d'opérés, les fichiers des valorisations quotidiennes, les recettes du fonds commun de placement Mif (commissions de mouvements + frais de gestion fixes + frais de gestion variables), le détail des frais facturés par la banque dépositaire et le valorisateur et des honoraires payés au commissaire aux comptes, les fichiers de souscriptions et rachats de parts du fonds commun de placement Mif, le fichier de calcul des rétrocessions des organismes de placements collectif en valeurs mobilières sous-jacents et les relevés de compte mensuel titres et espèces,

Condamne la société Hermitage Gestion Privée à payer à la société Calhic et à monsieur [M] [P] chacun la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la société Hermitage Gestion Privée aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Pauline ROBERT François FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 15/16690
Date de la décision : 12/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°15/16690 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-12;15.16690 ?
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