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05/01/2017 | FRANCE | N°15/09397

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 05 janvier 2017, 15/09397


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 05 Janvier 2017



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09397



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 26 juin 2015 par le conseil de prud'hommes de CRETEIL -section industrie- RG n° 14/02052





APPELANT



Monsieur [C] [V]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 2]

comparant

en personne, assisté de Me Ekrame KBIDA, avocat au barreau de PARIS, PB 187







INTIMÉE



SA SANOFI CHIMIE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Sandrine LOSI, avocat au barreau d...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 05 Janvier 2017

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09397

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 26 juin 2015 par le conseil de prud'hommes de CRETEIL -section industrie- RG n° 14/02052

APPELANT

Monsieur [C] [V]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Ekrame KBIDA, avocat au barreau de PARIS, PB 187

INTIMÉE

SA SANOFI CHIMIE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Sandrine LOSI, avocat au barreau de PARIS, K0020 substitué par Me Alexandra VELHO TOME, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 octobre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine SOMMÉ, président

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Madame Christine LETHIEC, conseiller

Greffier : Madame Marine POLLET, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine SOMMÉ, président et par Madame Marine POLLET, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Créteil du 26 juin 2015 ayant':

- prononcé « la requalification du CDD en CDI » et, en conséquence, condamné la SA SANOFI FRANCE à payer à M. [C] [V] la somme indemnitaire afférente de 2'612,20 €

- condamné la Sa SANOFI à régler à M. [C] [V] les autres sommes de':

5'224,40 € d'indemnité compensatrice légale de préavis et 522,40 € d'incidence congés payés,

2'721,42 € d'indemnité légale de licenciement,

20'000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

1'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal,

- rejeté le surplus des demandes

- condamné la SA SANOFI CHIMIE aux dépens';

Vu la déclaration d'appel de M. [C] [V] reçue au greffe de la cour le 25 septembre 2015';

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 20 octobre 2016 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de M. [C] [V] qui demande à la cour':

-de confirmer le jugement entrepris seulement en ce qu'il a « ordonné la requalification des CDD en CDI »,

-de l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau, condamner la SA SANOFI CHIMIE à lui régler les sommes de':

3'198,60 € d'indemnité légale de requalification,

38'383,20 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

3'838,32 € d'indemnité conventionnelle de licenciement,

6'397,20 € d'indemnité compensatrice légale de préavis et 639,72 € d'incidence congés payés,

80'000 € de dommages-intérêts au titre de la perte de chance de bénéficier du plan de sauvegarde de l'emploi,

4'286,06 € de rappel de prime de nettoyage et 428,60 € de congés payés afférents (demande nouvelle),

2'500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 20 octobre 2016 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SA SANOFI CHIMIE qui demande à la cour de':

- confirmer la décision déférée en ses dispositions au titre de l'indemnité de requalification en un contrat à durée indéterminée, de l'indemnité compensatrice légale de préavis, et en ce qu'il a rejeté la demande indemnitaire de M. [C] [V] relative à la perte de chance de bénéficier du plan de sauvegarde de l'emploi,

- l'infirmer pour le surplus des demandes indemnitaires dans leur quantum et, statuant à nouveau, la condamner à payer à M. [C] [V] les sommes de 1'919,16 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, ainsi que 17'508,43 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

MOTIFS

Sur la demande de requalification en un contrat à durée indéterminée

M. [C] [V] a conclu six contrats de mission avec la SAS MANPOWER, entreprise de travail temporaire, sur la période du 2 juin 2009 au 30 avril 2011 en vue de sa mise à disposition auprès de la SA SANOFI CHIMIE pour y occuper un emploi d'agent de fabrication, puis de chef d'équipe.

Les premier et dernier contrats mentionnent comme motif de recours un « accroissement temporaire d'activité », les autres celui du « départ définitif d'un salarié précédant la suppression de son poste» ou le «remplacement d'un salarié absent ».

A la suite de cette série de contrats de mission, la SA SANOFI CHIMIE a conclu avec l'appelant un contrat de travail à durée déterminée à temps plein du 1er mai 2011 au 30 avril 2012 en vue du « remplacement d'un salarié dont le poste est supprimé », en qualité d'opérateur de fabrication au coefficient 205 de la convention collective nationale des industries chimiques, moyennant un salaire de 2'048 € bruts mensuels.

Ce dernier contrat a été renouvelé à compter du 1er 2012 jusqu'au 30 avril 2013, date à laquelle les parties ont cessé définitivement toute collaboration.

*

En réponse au moyen soulevé par M. [C] [V] qui fait observer que le motif d'« accroissement temporaire d'activité » n'est pas réellement établi, la SA SANOFI CHIMIE demande à la cour « la confirmation du jugement sur le principe de la requalification », ne développant aucun moyen.

*

Sur le fondement des articles L.1251-5 du code du travail rappelant que le contrat de mission conclu entre l'entreprise de travail temporaire et le salarié ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice, L.1251-6 précisant qu'il peut être fait appel à un salarié temporaire notamment en cas d'« accroissement temporaire de l'activité » de l'entreprise utilisatrice qui doit en cas de litige prouver la réalité de ce motif, ce dont la SA SANOFI CHIMIE s'abstient au stade du premier contrat de mission ayant débuté le 2 juin 2009, et L.1251-40 visant l'hypothèse où une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d'une entreprise de travail temporaire en méconnaissance notamment de l'article L.1251-6, comme le prévoit le dernier texte précité, M. [C] [V] peut ainsi faire valoir auprès de l'intimée, en tant qu'entreprise utilisatrice, les droits correspondant à un contrat à durée indéterminée avec une prise d'effet en l'espèce au premier jour de son premier contrat de mission.

Les droits dont il est question procèdent d'une requalification en un contrat de travail à durée indéterminée, ce que demande M. [C] [V] à la cour qui, précise-t-il dans ses écritures en page 5, devra « requalifier ses contrats précaires en contrat à durée indéterminée prenant effet à la date du premier contrat de mission irrégulier soit le 2 juin 2009 ».

Le jugement déféré sera ainsi confirmé en ce qu'il a prononcé la requalification en un contrat de travail à durée indéterminée, sauf à ajouter que cette requalification prendra effet au 2 juin 2009, date du début du premier contrat de mission entre la SAS MANPOWER et M. [C] [V].

*

L'article L.1251-41 du code du travail prévoit que s'il est fait droit à la demande de requalification d'un contrat de mission en un contrat à durée indéterminée, l'entreprise utilisatrice est redevable envers le salarié d'une indemnité afférente au moins égale à un mois de salaire.

En réponse au moyen de M. [C] [V] qui, pour la détermination de l'indemnité légale de requalification lui revenant se base à juste titre sur la dernière moyenne des salaires mensuels qu'il a perçus pendant son dernier contrat de travail, l'intimée lui oppose un critère, en soi inopérant, selon que le salaire servi varie ou non de manière significative chaque mois, affirmant que seule la perception d'une rémunération d'amplitude variable justifierait la référence à la dernière moyenne de salaire mensuel.

La dernière moyenne de salaire mensuel lors de l'exécution du contrat de travail à durée déterminée, renouvelé sur la période du 1er mai 2012 au 30 avril 2013, étant de 3'198,60 € au vu des bulletins de paie produits, infirmant le jugement critiqué sur le quantum, l'intimée sera condamnée à payer à M. [C] [V] à titre d'indemnité légale de requalification ladite somme majorée des intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2014, date de réception par l'employeur de sa convocation directe en bureau de jugement.

Sur les autres demandes indemnitaires ensuite de la requalification en un contrat à durée indéterminée

L'article L.1251-41 du code du travail, en son dernier alinéa in fine, rappelle que la requalification s'opère « sans préjudice de l'application des dispositions 'relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée ».

Infirmant la décision querellée sur les montants des indemnités qui reviennent à M. [C] [V] comme étant conséquence de la requalification judiciaire en un contrat de travail à durée indéterminée dont l'exécution a cessé sans respect des règles du licenciement après le 30 avril 2013, l'intimée sera condamnée à lui régler les autres sommes de':

- 6'397,20 € d'indemnité compensatrice légale de préavis équivalente à deux mois de salaires (3'198,60 € x 2), et 639,72 € de congés payés afférents,

- 3'838,32 € d'indemnité conventionnelle (article 28) de licenciement (3'198,60 € x 3/10 x 4 ans),

avec intérêts au taux légal partant du 2 octobre 2014';

- et 25'600 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail, représentant l'équivalent de 8 mois de salaires compte tenu de son âge (40 ans) et de son ancienneté dans l'entreprise (4 années) lors de la rupture du lien contractuel, avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt.

L'application de l'article L.1235-3 du code du travail appelle celle de l'article L.2235-4 concernant le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de la totalité des indemnités de chômage versées à M. [C] [V] dans la limite de six mois.

Sur la demande de dommages-intérêts au titre de la perte de chance

Au soutien de sa demande à ce titre, M. [C] [V] considère que du fait de sa situation de travailleur précaire il n'a pu bénéficier des mesures contenues dans la plan de sauvegarde de l'emploi que mettait en 'uvre au même moment l'intimée, que s'il avait pu bénéficier d'un contrat à durée indéterminée dès le début il y aurait été éligible, ce qui constitue une perte de chance dont il sollicite la réparation indemnitaire à concurrence de la somme de 80'000 €, ce à quoi la SA SANOFI CHIMIE s'oppose dès lors qu'elle ne l'a engagé directement que dans le cadre d'un contrat à durée déterminée avec une affectation sur le site de [Localité 4] ayant pris effet le 1er mai 2011après l'adoption du plan de sauvegarde de l'emploi de [Localité 4] courant octobre 2010, d'une part, et que même si la cour venait à faire droit à sa demande de requalification ab initio de ses contrats de mission en un contrat à durée indéterminée , il ne pouvait pas davantage prétendre tant au plan de sauvegarde de l'emploi sur le site de [Localité 5] adopté le 2 juillet 2008 avant son premier contrat de mission ayant débuté le 2 juin 2009, qu'à celui précité de [Localité 4] où il n'a été mis à sa disposition par la SAS MANPOWER qu'à compter du 10 janvier 2011, d'autre part.

*

Devant être considéré que par principe un plan de sauvegarde de l'emploi n'a vocation à s'appliquer qu'aux seuls salariés présents dans l'entreprise lors de son élaboration et de sa négociation avec les institutions représentatives du personnel, il en résulte que M. [C] [V] ne peut en revendiquer le bénéfice pour ce qui le concerne, même après requalification en un contrat à durée indéterminée de son premier contrat de mission, dans la mesure où il n'a été initialement affecté à [Localité 5] qu'à compter du 2 juin 2009 après l'adoption sur ce site d'un 1er plan de sauvegarde de l'emploi le 2 juillet 2008, d'une part, et que dans le cadre de cette succession de contrats de mission il n'a été mis à la disposition de l'intimée par la SAS MANPOWER sur [Localité 4] que le 10 janvier 2011 postérieurement encore une fois à l'adoption du 2ème plan de sauvegarde de l'emploi sur ce site le 20 octobre 2010, d'autre part.

*

La décision entreprise sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a débouté l'appelant de sa demande de dommages-intérêts à ce titre.

Sur le rappel de prime de nettoyage

Pour solliciter un rappel à ce titre, l'appelant précise qu'il percevait l'équivalent de six euros mensuels quand il était affecté à l'établissement de [Localité 4] alors que dans celui de [Localité 5] ladite prime était rémunérée les jours travaillés à concurrence de 30 minutes au taux horaire normal, ou dans celui d'[Localité 6] 30 minutes au taux majoré pour les heures supplémentaires, ce qui constitue une différence de traitement non justifiée objectivement, ce à quoi la SA SANOFI CHIMIE répond que M. [C] [V] ne prouve pas qu'il était placé dans une situation identique à celle des salariés des établissements précités distincts.

Dès lors que M. [C] [V], alors affecté au sein de l'établissement de [Localité 4], ne fait pas expressément état dans ses écritures d'une identité de situation avec celle des salariés des établissements de [Localité 5] et d'[Localité 6] auxquels il se réfère, et qu'il ne soumet précisément devant la cour aucun élément susceptible de caractériser avec ceux-ci une identité de tâches, de responsabilités et de conditions d'emploi, ce qui ne permet pas retenir une inégalité de traitement contrairement à ce qu'il prétend, sa demande nouvelle de ce chef sera rejetée.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La SA SANOFI CHIMIE sera condamnée en équité à payer à l'appelant la somme complémentaire de 2'500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS':

LA COUR,

CONFIRME le jugement entrepris seulement en ce qu'il a prononcé la requalification en un contrat de travail à durée indéterminée, ainsi qu'en ses dispositions sur la demande indemnitaire pour perte de chance, l'article 700 du code de procédure civile et les dépens';

L'INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau,

CONDAMNE la SA SANOFI CHIMIE à régler à M. [C] [V] les sommes de':

3'198,60 € à titre d'indemnité légale de requalification,

6'397,20 € d'indemnité compensatrice légale de préavis et 639,72 € de congés payés afférents,

3'838,32 € d'indemnité conventionnelle de licenciement,

avec intérêts au taux légal partant du 2 octobre 2014,

25'600 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt';

Y ajoutant,

DIT que la requalification en un contrat de travail à durée indéterminée prend effet au 2 juin 2009 ;

ORDONNE le remboursement par la SA SANOFI CHIMIE aux organismes intéressés de la totalité des indemnités de chômage versées à M. [C] [V] dans la limite de six mois ;

DÉBOUTE M. [C] [V] de sa demande de rappel de prime de nettoyage ;

CONDAMNE la SA SANOFI CHIMIE à payer à M. [C] [V] la somme de 2'500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile';

CONDAMNE la SA SANOFI CHIMIE aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 15/09397
Date de la décision : 05/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°15/09397 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-05;15.09397 ?
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