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07/12/2016 | FRANCE | N°15/16303

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 07 décembre 2016, 15/16303


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 07 DECEMBRE 2016



(n° 537 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/16303



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/02763





APPELANTE



Madame [Q] [B]

[Adresse 1]

[Localité 1]



née le [Date naissance 1] 1955 à [Loca

lité 2] (Brésil)



Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocat plaidant Me Vanessa COULOUMY, ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 07 DECEMBRE 2016

(n° 537 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/16303

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/02763

APPELANTE

Madame [Q] [B]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 2] (Brésil)

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocat plaidant Me Vanessa COULOUMY, avocat au barreau de PARIS, toque : E0197

INTIMES

Monsieur [A] [C]

[Adresse 2]

[Localité 3]

né le [Date naissance 2] 1955 à[Localité 4] (Val de Marne)

Représenté par Me Thomas RONZEAU de la SCP RONZEAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Ayant pour avocat plaidant Me Stéphanie BACH de la SCP RONZEAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Monsieur [P] [U]

[Adresse 3]

[Localité 5] (Italie)

Né le [Date naissance 3] 1970 à [Localité 6]

Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Charles ROUSSEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0221

Monsieur [S] [U]

[Adresse 4]

[Localité 7] (Chili)

Né le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 6]

Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Charles ROUSSEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0221

Monsieur [X] [U]

[Adresse 5]

[Localité 8] (Royaume-Uni)

Né le [Date naissance 4] 1967 à[Localité 4] (94)

Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Charles ROUSSEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0221

INTERVENANT

LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE PARIS

[Adresse 6]

[Localité 9]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Octobre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jacques BICHARD, Président de chambre

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

Madame Isabelle BROGLY, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier.

*****

Le 26 novembre 2002, [Y] [U], alors hospitalisé à l'hôpital [Établissement 1] et décédé le [Date décès 1] 2003, a révoqué le testament du 9 septembre 2002 par lequel il désignait sa compagne Mme [B], légataire de 10% de la totalité de ses biens et lui a légué 12,5% de la quotité disponible de ses biens, désignant M [C], notaire, comme exécuteur testamentaire. Il a donné le même jour procuration à tous clercs du notaire ou à son fils [X] pour établir l'acte de donation-partage qui a été reçu le 7 décembre 2002 , [Y] [U] étant représenté par un clerc de l'étude. Cet acte contenait donation au profit des trois enfants d'[Y] [U] de la totalité des actions qu'il détenait dans la société SNF avec obligation pour les donataires de transmettre 30 247 actions à Mme [B]. Par testament du 22 décembre 2002 [Y] [U] a révoqué toute disposition antérieure et a légué à Mme [B] tous ses droits dans la SCI MCM propriétaire d'une maison à[Localité 10]. Ce legs a été délivré le 21 janvier 2004.

Le 30 juin 2006 les ayants droit ont cédé par acte sous seing privé à la société SNF, devenue SPCM, leurs actions et le 23 décembre 2006 Mme [B], assistée de son notaire M [F] a accepté la donation secondaire de la somme de 2 945 844,30 € correspondant à la contre valeur de ses 30 247 actions, déduction faite des frais. Cet acte a été reçu par maître [C].

Soutenant que le notaire qui avait manqué à son obligation d'information et avait cautionné la sous évaluation des actions lui avait fait perdre une chance d'obtenir une somme supplémentaire, Mme [B] a recherché la responsabilité de maître [C], puis a formé une inscription de faux incident contre l'acte de procuration d'[Y] [U] reçu le 26 novembre 2002 par maître [C], sollicitant si besoin est la désignation d'un expert et la production en original de l'acte du 26 novembre 2002.

MM [P], [X] et [S] [U] sont intervenus volontairement à la procédure.

Par jugement du 18 juin 2015 le tribunal de grande instance de Paris a déclaré recevable l'intervention volontaire de MM [P], [X] et [S] [U] et après vérification d'écriture a rejeté l'inscription de faux de Mme [B] condamnée à payer à MM [P], [X] et [S] [U] la somme de 1 000€ chacun à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive outre une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que celle de 2 000 € à titre d'amende civile et les dépens, renvoyant sur le fond l'affaire à la mise en état.

Mme [B] a interjeté appel de cette décision et dans ses conclusions notifiées le 28 septembre 2016 elle demande à la cour d'infirmer le jugement , de déclarer faux l'acte du 26 novembre 2002 contenant procuration reçu par maître [C], d'ordonner s'il y a lieu une expertise en écriture afin de déterminer si la signature et les paraphes apposés sur l'acte contenant procuration daté du 26 novembre 2002 et attribués à [Y] [U] sont ou non les siens, d'ordonner la production en original par maître [C] à l'expert désigné de l'acte du 26 novembre 2002 dans les conditions prévues à l'article 27 du décret du 26 novembre 1971 ainsi que des testaments olographes des 9 septembre, 26 novembre et 22 décembre 2002 aux fins de comparaison et ce sous astreinte de 10 000 € par jour de retard à première demande de l'expert, de débouter les intimés de leurs demandes, de les condamner à lui verser la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner maître [C] aux dépens.

Dans ses conclusions notifiées le 5 septembre 2016 maître [C] demande à la cour de confirmer le jugement, de déclarer irrecevables et subsidiairement mal fondés les griefs formulés sur le fond contre l'acte du 26 novembre 2002 dans le cadre de la procédure d'inscription de faux, de débouter Mme [B] de sa demande tendant à voir dire faux l'acte valant procuration du 26 novembre 2002 et de sa demande d'expertise, subsidiairement, de donner acte au notaire de ses protestations et réserves sur la demande d'expertise et débouter Mme [B] de sa demande tendant à voir ordonner la production sous astreinte de la procuration et des testaments en original, de lui donner acte qu'il tiendra les originaux de ces actes à la disposition de l'expert pour qu'il les consulte et les examine à l'étude notariale, de condamner Mme [B] à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Dans leurs conclusions notifiées le 18 décembre 2015 MM [P], [X] et [S] [U], (les consorts [U]), demandent à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf à porter le montant des dommages-intérêts alloués à chacun à la somme de 5 000 € ; de les déclarer recevables à intervenir volontairement à la procédure en inscription de faux, de débouter Mme [B] de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à leur verser à chacun la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, outre celle de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens d'appel.

Le ministère public a conclu le 2 septembre 2016 à la confirmation de la décision déférée à la cour.

MOTIFS DE LA DECISION :

Mme [B] soutient que la signature et les paraphes d'[Y] [U] sur l'acte de procuration du 26 novembre 2002 reçu par maître [C] sont faux et qu'il s'agirait d'imitations comme le révèlent les conclusions de l'expertise technique de Mme [P], expert près de la cour d'appel de Paris, conclusions qui doivent être confortées par une expertise judiciaire et qu'[Y] [U] était alors dans l'impossibilité tant matérielle qu'intellectuelle d'apposer sa signature sur cet acte, ce qu'elle a intérêt à démontrer pour établir le comportement fautif du notaire.

Maître [C] fait valoir que Mme [B], qui était présente lorsqu'il a reçu la procuration d'[Y] [U] le 26 novembre 2002 et qui ne conteste pas la possibilité tant matérielle qu'intellectuelle pour ce dernier de signer et parapher le testament du même jour puis celui du 22 décembre 2002 révoquant les dispositions antérieures et lui léguant la propriété [Localité 11], ne peut utilement alléguer que la procuration litigieuse serait un faux au vu d'un examen technique effectué par Mme [P] dont l'appréciation a été biaisée en raison des documents de comparaison remis tous largement antérieurs à l'affaiblissement physique d'[Y] [U].

Il soutient également que les contestations sur le caractère prétendu général du mandat, sur l'absence de sa notification ou son caractère incompatible avec les dernières volontés du défunt relèvent du fond dont le tribunal de grande instance est toujours saisi malgré l'ordonnance de radiation rendue le 1er octobre 2015 faute de diligence de la demanderesse.

Il s'oppose enfin à la désignation d'un expert qui devrait être nommé au contradictoire des consorts [U] seuls à même de produire des documents originaux de la même époque et subsidiairement fait valoir qu'il ne peut se dessaisir des originaux des documents déposés en son étude que l'expert devrait examiner au sein de celle-ci sans qu'il y ait lieu de prévoir une astreinte à son encontre.

Les consorts [U] font valoir que Mme [B] et M [X] [U] étaient physiquement présents le 26 novembre 2002 et ont personnellement assisté à la signature de la procuration par [Y] [U] en même temps que celle du testament révoqué le 22 décembre 2002 par un nouveau testament dont Mme [B] ne conteste pas qu'il a pu être signé par [Y] [U]; qu'elle n'a pas davantage contesté la donation-partage du 7 décembre 2002 établie en exécution de la dite procuration dont elle avait connaissance bien avant la présente procédure lors de la signature de la donation secondaire qui lui a été consentie le 23 décembre 2006 et que cette dernière a été déclarée parfaite par la cour d'appel de Lyon.

Ils soutiennent également l'absence de motif légitime à la mesure d'expertise sollicitée afin d'obtenir l'annulation de l'acte de procuration ce qui reviendrait à annuler la donation partage du 7 décembre 2002 ainsi que la donation secondaire du 23 décembre 2006 qui a permis à Mme [B] de percevoir la somme de 2 945 844,30 € et alors que les circonstances entourant la signature de la procuration comme l'existence d'un testament olographe du même jour rendent une telle mesure inutile.

La cour n'étant saisie que de l'appel relatif à la procédure de faux incident concernant la procuration du 26 novembre 2002, il n'y a pas lieu d'examiner la validité de cet acte au regard d'autres motifs, ni de statuer sur l'action en responsabilité à l'encontre du notaire.

Devant la cour, Mme [B] ne conteste plus la recevabilité de l'intervention volontaire des consorts [U] de sorte que la décision déférée qui a déclaré recevable l'intervention volontaire de MM [P], [X] et [S] [U] est définitive de ce chef.

En application des dispositions de l'article 144 du code de procédure civile le juge peut ordonner une mesure d'expertise s'il ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer.

En l'espèce Mme [B] soutient que tant les circonstances entourant la signature de la procuration arguée de faux que l'expertise réalisée par Mme [P] révèlent que ce document n'a pas été signé ni paraphé par [Y] [U] et que si la cour estime ces éléments insuffisants il convient d'ordonner une mesure d'expertise judiciaire.

Le tribunal a jugé qu'aucun élément ne permettait de retenir l'existence d'un faux sans qu'il y ait lieu d'ordonner une mesure d'expertise judiciaire.

En effet d'une part les circonstances précises entourant la signature de la procuration ne permettent pas de retenir l'existence d'un doute quant à son auteur puisque:

- l'acte de procuration a été reçu personnellement par le notaire qui s'est rendu à l'hôpital [Établissement 1] où se trouvait [Y] [U] en présence de son fils [X] et de Mme [B] comme ce dernier en atteste,

- l'expertise produite par l'appelante, si elle mentionne que la signature et les paraphes pourraient être des imitations réalisées après un certain entraînement d'après modèle, conclut à l'absence de signe suspect de falsification ou d'imitation lors de l'examen intrinsèque du document litigieux et ne pouvoir émettre un avis péremptoire après examen comparatif en l'absence des documents en originaux et de davantage de spécimens de paraphes et signature datant de 2002, ce qui est donc insuffisant pour mettre en doute les circonstances entourant la signature de la procuration ci-dessus rappelées.

D'autre part Mme [B] qui se prévaut du testament olographe établi le même jour par le défunt ne peut soutenir qu'[Y] [U] était alors physiquement et intellectuellement incapable de signer et de parapher un tel acte alors que le testament de plus d'une page est écrit et signé de sa main.

En conséquence il n'y a pas lieu de faire droit à la mesure d'expertise judiciaire sollicitée par Mme [B] et le jugement qui a rejeté l'inscription de faux sera confirmé de ce chef.

En application de l'article 305 du code de procédure civile le demandeur en faux qui succombe est condamné à une amende civile sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés et c'est à juste titre que le tribunal a condamné Mme [B] au paiement d'une amende de 2 000 € de ce chef.

En revanche le caractère abusif de la procédure d'inscription de faux à l'égard des consorts [U] qui sont intervenus volontairement à la procédure n'est pas établi et il n'y a pas lieu de faire droit à la demande en dommages-intérêts présentée de ce chef par ces derniers à l'encontre de Mme [B].

Mme [B] qui succombe en son appel sera condamnée aux dépens et il convient en application de l'article 700 du code de procédure civile de la condamner à payer à chacun des consorts [U] la somme de 1 000 € et à maître [C] celle de

3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

- Confirme le jugement déféré à la cour sauf en ce qu'il a condamné Mme [B] à payer la somme de 1 000 € chacun à MM [P], [X] et [S] [U] à titre de dommages-intérêts ;

Statuant à nouveau de ce chef,

- Déboute MM [P], [X] et [S] [U] de leur demande en dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Y ajoutant,

- Condamne Mme [B] à payer à MM [P], [X] et [S] [U], à chacun la somme de 1 000 € et à maître [C] celle de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne Mme [B] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en ont fait la demande.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 15/16303
Date de la décision : 07/12/2016

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°15/16303 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-12-07;15.16303 ?
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