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06/12/2016 | FRANCE | N°16/02028

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 06 décembre 2016, 16/02028


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 06 Décembre 2016



(n° , 06 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/02028



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Novembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 14/09849





APPELANTE

Madame [E] [O] épouse [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1990 à MAROC (99020)



représentée par Me Jacqueline SEROUX DARMON, avocat au barreau de PARIS, toque : C0294





INTIMEE

SARL LES SOURCES DE L'ORIENT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Madame [M] [...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 06 Décembre 2016

(n° , 06 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/02028

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Novembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 14/09849

APPELANTE

Madame [E] [O] épouse [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 1] 1990 à MAROC (99020)

représentée par Me Jacqueline SEROUX DARMON, avocat au barreau de PARIS, toque : C0294

INTIMEE

SARL LES SOURCES DE L'ORIENT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Madame [M] [J] ,Gérante, assistée de Me Jean-Yves FELTESSE de la SELARL FELTESSE WARUSFEL PASQUIER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0028

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 octobre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Daniel FONTANAUD, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Valérie LETOURNEUR, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Valérie LETOURNEUR, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige

Madame [E] [O] [X], embauchée par la société LES SOURCES DE L'ORIENT le 1er mars 2013 en qualité d'employée polyvalente, au dernier salaire mensuel brut de 1667, 46 euros, a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 30 avril 2014.

Par jugement du 30 novembre 2015, le Conseil de Prud'hommes de Paris a débouté Madame [X] de ses demandes, notamment à titre de rappel de salaires et indemnités de rupture de son contrat de travail.

Madame [X] en a relevé appel.

Par conclusions visées au greffe le 3 octobre 2016 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Madame [X] demande à la cour d'infirmer la décision du conseil de prud'hommes, de juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de condamner la SARL Les Sources de l'Orient au versement des sommes suivantes :

- 1 667,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ainsi que 166,75 euros au titre des congés payés afférents ;

- 416,86 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

- 5 002,38 euros au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;

- 853,63 euros au titre du rappel de salaire de base restant dû ainsi que 85,36 euros au titre des congés payés afférents ;

- 6950 euros au titre du rappel de salaire correspondant aux heures effectuées le dimanche ainsi que 695 euros au titre des congés payés afférents ;

- 10 004,76 euros au titre des dommages et intérêts pour travail dissimulé ;

- 142,65 euros au titre de l'indemnité de transport restant due.

Elle demande d'ordonner la remise d'une attestation Assedic, d'un certificat de travail et d'un bulletin de paie du mois d'avril 2014 conformes à l'arrêt et sollicite 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 3 octobre 2016 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la SARL LES SOURCES DE L'ORIENT demande de débouter Madame [O] [X] de ses demandes, de la condamner au paiement de 1666,92 euros au titre de l'indemnité de préavis, 1.662,96 euros pour rupture abusive et 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle demande de lui donner acte de ce qu'elle offre à verser le complément des frais de transport de Madame [O] [X] à hauteur de 142,65 euros, si la Cour considère que cette somme est réellement due au regard des pièces produites par la salariée.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

****

MOTIFS

Sur les demandes de rappel de salaire

Principe de droit applicable :

Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Ainsi, si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Application du droit à l'espèce

Madame [X] expose avoir régulièrement travaillé le dimanche, sauf quand elle était en congés et fait valoir que sa rémunération n'a pas été doublée en violation de la Convention collective Esthétique-Cosmétique et enseignement technique et professionnel lié aux métiers de l'esthétique et de la parfumerie qui est applicable aux parties et qui prévoit dans son article 10.4.4.5. que ' La rémunération des heures effectuées le dimanche est au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente'.

Elle indique qu'elle travaillait 5 jours par semaine à raison de 8 heures par jour, soit 5 heures supplémentaires par semaine, effectuées le dimanche, car la durée des 35 heures hebdomadaires est appréciée du lundi au dimanche.

Elle rappelle que l'employeur reconnaît le principe des heures supplémentaires mas ne les a payées que très partiellement sur certains bulletins de paie (17,33 heures supplémentaires sur les bulletins de paie de mai à octobre 2013) et les a payées sur la base du taux horaire sans majoration, puis a cessé de les payer à partir de novembre 2013, alors qu'aux termes de la convention collective susvisée, ' Par principe les heures supplémentaires sont rémunérées. Pour chaque heure supplémentaire, le taux sera majoré : de 25% de la 36e heure à la 43e heure de travail effectif au cours d'une semaine'.

En conséquence, la salariée calcule les heures effectuées le dimanche à raison de 3 heures doublées et 5 heures qui cumulent le paiement double avec la majoration pour heure supplémentaire de 25 % sur la base d'un salaire mensuel brut de 1667,46 euros, d'un taux horaire brut ordinaire de 10,99 euros, d'un taux horaire brut le dimanche de 21,98 euros, et enfin, d'un taux horaire brut majoré à 25% le dimanche de 27,47 euros.

Madame [X] indique avoir travaillé 43 dimanches en 2013 (du 3 mars au 31 décembre) et que l'employeur lui doit dès lors :

- 144 heures qui auraient dû être payées doubles et ont été payées sans majoration, soit : 144 x 10,99 = 1 582,56 €

- 200 heures supplémentaires qui auraient dû être réglées doublées et majorées de 25 % et n'ont été payées que partiellement et sans majoration. Elle réclame le paiement de ces heures, déduction faite des sommes payées au titre des heures supplémentaires sur les bulletins de salaire de mars et de mai à octobre 2013, soit : (200 x 27,47) ' (68,71 + 208,33 + 208,33 + 208,33 + 208,33 + 208,33 + 208,33) = 4 175,31 €.

Pour l'année 2014, la salariée expose avoir travaillé 7 dimanches (du 1er janvier au 31 avril) et indique que l'employeur lui reste devoir 21 heures qui auraient dû lui être payées doubles et ont été payées sans majoration, soit : 21 X 10,99 = 230,79 €, ainsi que 35 heures supplémentaires qui auraient dû lui être réglées doublées et majorées de 25 %, et qui ne lui ont pas été payées, soit : 35 x 27,47 = 961,45 €.

En conséquence, Madame [X] réclame un rappel de salaire dû au titre des heures effectuées le dimanche (paiement double et cumul du paiement double avec les majorations pour heures supplémentaires) pour un montant total de 6 950 € brut auquel s'ajoutent 695 € au titre des congés payés afférents.

Madame [X] produit par ailleurs l'affichage des horaires de l'établissement : du lundi au dimanche de 11h à 19h, et le vendredi de 11h à 21h ainsi qu'un tableau des heures effectuées par semaine pour la période du 25 mai 2013 au 20 mars 2014 mentionnant pour l'essentiel 40 heures effectuées par semaine pour 35 heures rémunérées et indiquent le nombre et les catégories d'heures devant être majorées.

Madame [X] fournit ainsi des éléments des éléments de nature à étayer sa demande.

En réponse, l'employeur expose que l'expert comptable de la société avait à l'époque établi une note permettant de comprendre l'évolution de salaire de Madame [O] [X], ce qui a conduit à procéder à une régularisation de ses salaires et au paiement des heures supplémentaires entre mai et octobre 2013. Elle ajoute qu'à partir du mois de décembre, les salaires nets sur la base de 151,67 heures (1300 €) nets sont payés normalement).

Sur les demandes précises de la salariée, la société LES SOURCES DE L'ORIENT indique simplement n'avoir rien à se reprocher s'agissant du paiement des salaires et les heures supplémentaires de Madame [O] [X].

E, l'espèce, il convient de constater que l'employeur n'apporte aucun élément sur l'horaire de sa salariée pendant la semaine et le dimanche de nature à justifier les horaires effectivement réalisés.

En conséquence, et au vu de l'ensemble des éléments versés au débat et, en particulier des éléments précis apportés par Madame [X] concernant les heures supplémentaires effectuées le dimanche, le calcul présenté par l'intéressé est retenu.

.

Le jugement du conseil de prud'hommes est donc infirmé sur ce point et la SARL LES SOURCES DE L'ORIENT est condamnée à verser à Madame [X] la somme de 6950 euros au titre du rappel de salaire correspondant aux heures effectuées le dimanche ainsi que 695 euros au titre des congés payés afférents.

En revanche, s'agissant de la demande de rappel sur le salaire de base à hauteur de 853,63 euros et de 85,36 euros au titre des congés payés afférents, elle n'est pas justifiée au vu des éléments versés au débat, l'employeur apportant notamment des éléments sur le paiement effectif en espèce devant une salariée témoin, Madame [N], d'un acompte de 800 euros déduit sur le bulletin de salaire . et portée sans contestation sur la fiche de salaire du mois de novembre 2013, soit bien avant la prise d'acte du 3 mai 2014.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a débouté Madame [X] de cette demande.

Sur la demande d'indemnité au titre du travail dissimulé

Les circonstances de l'espèce ne permettent pas de considérer que la SARL LES SOURCES DE L'ORIENT a mentionné intentionnellement sur les bulletins de salaire un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ou s'est soustrait volontairement à ses obligations de déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales. Il s'ensuit qu'il n'est pas établi que l'employeur s'est rendu coupable de travail dissimulé au sens des disposition du code du travail. Madame [X] sera donc déboutée de sa demande à ce titre.

Sur la demande au titre de l'indemnité de transport

La SARL LES SOURCES DE L'ORIENT reconnaît que la régularisation du paiement de l'indemnité de transport de Madame [X] n'avait pas été faite après le déménagement de Madame [O] [X] de [Localité 1] à [Localité 2]94) en juillet 2013, la salariée étant passée de la zone 2 à la zone 4 mais indique que la salariée n'en avait pas expressément avisé l'employeur.

Au vu des éléments versés au débat, la SARL LES SOURCES DE L'ORIENT est condamnée à verser 142,65 euros à Madame [X] au titre de l'indemnité de transport restant due.

Sur la prise d'acte par le salarié de la rupture du contrat de travail

En application de l'article L 1231-1 du code du travail, lorsque le salarié prend acte de la rupture en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifient, soit d'une démission dans le cas contraire.

Application du droit à l'espèce

En l'espèce, Madame [X] reproche notamment à son employeur de ne pas avoir majoré les heures travaillées le dimanche et de ne lui avoir payé que très partiellement ses heures supplémentaires.

En l'espèce, il est établi que Madame [X] ne percevait pas les salaires qui lui étaient dûs conformément aux dispositions légales et à la convention collective applicable au titre des heures supplémentaires et du travail le dimanche. Ce seul manquement est en l'espèce suffisamment grave pour justifier le fait que la salariée ait décidé de prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur, sans même qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs. Cette rupture produit donc les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au vu des pièces et des explications fournies, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Madame [X], de son âge, de son ancienneté de 13 mois et du fait qu'elle a repris une activité dès le 30 avril 2014 et n'apporte pas de pièce sur un préjudice matériel éventuel, la cour dispose des éléments nécessaires et suffisants pour fixer à 500 euros le montant de la réparation du préjudice subi en application de l'article L.1235-5 du code du travail.

Par ailleurs, compte tenu de l'ancienneté de Madame [X], la SARL LES SOURCES DE L'ORIENT est condamnée à verser 1667,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ainsi que 166,75 euros au titre des congés payés afférents et 416,86 euros au titre de l'indemnité de licenciement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par un arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a débouté Madame [X] de ses demandes au titre du rappel de salaire de base restant dû et congés payés afférents ainsi qu'au titre des dommages et intérêts pour travail dissimulé,

et statuant à nouveau,

CONDAMNE la SARL LES SOURCES DE L'ORIENT à payer à Madame [E] [O] épouse [X] les sommes de :

- 1 667,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 166,75 euros au titre des congés payés afférents,

- 416,86 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

- 500 euros au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

- 6950 euros au titre du rappel de salaire correspondant aux heures effectuées le dimanche ainsi - 695 euros au titre des congés payés afférents ;

- 142,65 euros au titre de l'indemnité de transport restant due.

- Y AJOUTANT,

DIT que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt,

ORDONNE la remise par la SARL LES SOURCES DE L'ORIENT à Madame [X] d'un bulletin de paie du mois d'avril 2014, d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail conformes au présent arrêt,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL LES SOURCES DE L'ORIENT à payer à Madame [X] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties du surplus des demandes,

LAISSE les dépens à la charge de la SARL LES SOURCES DE L'ORIENT.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 16/02028
Date de la décision : 06/12/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°16/02028 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-12-06;16.02028 ?
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