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05/12/2016 | FRANCE | N°15/20642

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 05 décembre 2016, 15/20642


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 05 DÉCEMBRE 2016



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/20642



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Septembre 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS 04 - RG n° 2013073751





APPELANTE



SASU PORTAFEU

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SI

RET : 391 861 069

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barrea...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 05 DÉCEMBRE 2016

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/20642

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Septembre 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS 04 - RG n° 2013073751

APPELANTE

SASU PORTAFEU

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 391 861 069

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Représentée par Me Erwan POISSON du LLP ALLEN & OVERY LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J022 substitué par Me Stéphane PAGES

INTIMEE

SASU PREZIOSO LINGEBYGG

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 573 680 162

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

Représentée par Me Gaëlle MEILHAC, de la SELARL QUARTESE, avocate au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 Octobre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président, rédacteur

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Edouard LOOS dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Edouard LOOS, président et par Madame Cyrielle BURBAN, greffière auquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La société Portafeu est spécialisée dans la fabrication de portes et fenêtres en métal.

La société Prezioso a une activité de peinture industrielle.

Par contrat du 30 juillet 2009, la société EDF a confié au groupement d'entreprises solidaires Prezioso et Portafeu un marché relatif à la fourniture et à la pose de cellules oxyprivatives (portes coupe feu) destinées aux centrales nucléaires pour la production d'électricité à [Localité 1], [Localité 2] et [Localité 3].

Une « convention de groupement momentané d'entreprises solidaires »(GMES) a été signée le 4 novembre 2009 entre les sociétés Prezioso et Portafeu régissant les obligations réciproques des deux entreprises dans le cadre de la réalisation du marché et instituant la société Portafeu mandataire du groupement.

Le contrat a prévu une répartition des tâches entre les cocontractants, la société Portafeu étant en charge des études préalables, de la conception et de la fabrication des caissons pour 2.179.638 euros et la société Prezioso devant finaliser la fabrication, mise en peinture et pose sur le site pour un montant de 1.621.771 euros. Le délaide réalisation était de 12 mois.

Des difficultés sont apparues provoquant un retard dans la réalisation du chantier.

Le 9 novembre 2011, EDF a informé la société Portafeu de la résiliation du contrat.

La société Prezioso a imputé à la société Portafeu la responsabilité de la résiliation du marché .

Par acte du 2 décembre 2013, la société Prezioso a fait assigner la société Portafeu.

* * *

Vu le jugement prononcé le 25 septembre 2015 par le tribunal de commerce de Paris qui a:

- dit la société Portafeu responsable de la résiliation du marché du 30 juillet 2009 entre le groupement solidaire et EDF,

- condamné la société Portafeu à verser à la société Prezioso la somme de 370.908 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamné la société Portafeu à verser à la société Prezioso la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, 370.908 euros à titre de dommages et intérêts,

- ordonné l'exécution provisoire,

Vu l'appel de la société Portafeu le 19 octobre 2015,

Vu les dernières conclusions de la société Portafeu signifiées le 20 mai 2016 ,

Vu les dernières conclusions de la société Prezioso signifiées le 16 septembre 2016,

La société Portafeu demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit:

a) à titre principal :

- constater que la résiliation du marché du 30 juillet 2009 n'est pas imputable à de quelconques manquements de Portafeu ;

En conséquence :

- infirmer le jugement déféré,

Et statuant à nouveau :

- débouter la société Prezioso de l'ensemble de ses demandes,

- ordonner à la société Prezioso de restituer l'intégralité des sommes perçues en exécution du jugement de première instance, dont intérêts légaux à compter de la date de l'arrêt à intervenir ;

b) à titre subsidiaire :

- constater que les manquements de la société Prezioso ont contribué à la résiliation du marché du 30 juillet 2009,

En conséquence:

- infirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau :

- débouter la société Prezioso de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- ordonner à la société Prezioso de restituer l'intégralité des sommes perçues en exécution du jugement de première instance, dont intérêts légaux à compter de la date de l'arrêt à intervenir ;

c) à titre très subsidiaire :

- constater que la société Prezioso ne justifie pas de son prétendu préjudice ;

En conséquence,

- infirmer le jugement déféré,

Et statuant à nouveau :

- débouter la société Prezioso de l'ensemble de ses demandes,

- ordonner à la société Prezioso de restituer l'intégralité des sommes perçues en exécution du jugement de première instance, dont intérêts légaux à compter de la date de l'arrêt à intervenir ;

En tout état de cause :

- condamner la société Prezioso à payer à la société Portafeu une somme de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

La société Portafeu soutient que EDF n'a jamais définitivement et totalement arrêté l'ensemble des spécifications techniques des caissons oxyprivatifs durant l'exécution du contrat et a reconnu la complexité des cellules commandées et le fait que les besoins réels des exploitants tant quantitatifs que qualitatifs devaient être redéfinis en raison de modifications techniques s'avérant nécessaires. L'appelante poursuit en indiquant que, postérieurement à la résiliation du marché litigieux, EDF l'a sollicitée pour lui présenter une même gamme de produits destinée aux mêmes chantiers, cette proposition étant exclusive de tout grief relatif à un comportement fautif.

La société Prezioso demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :

- dire la Société Portafeu mal fondée en son appel,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 25/09/2015 en ce qu'il a :

* retenu la responsabilité de la société Portafeu dans la résiliation du marché,

* condamné la société Portafeu à payer à la société Prezioso, la somme de 360 908 euros à titre de la perte de dommages et intérêts pour la perte de marge brute ;

* condamné la société Portafeu à payer à la société Prezioso une indemnité de

5 000 euros au titre de l'article 700 CPC, et les dépens de première instance ;

Recevant la société Prezioso en son appel incident:

- condamner la société Portafeu à payer à la société la société Prezioso la somme de 183 064,46 euros (543 972,46 - 360 908) à titre de dommages et intérêts pour le préjudice engendré par les retards et défauts de coordination de la société Portafeu,

- condamner la société Portafeu à payer à la société la société Prezioso la somme de 197 559,73 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice liés aux erreurs commises par la société Portefeu,

- condamner la société Portafeu à payer à la société la société Preziosi la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

La société Prezioso soutient que la société Portafeu a commis des manquements caractérisés par des défaillances et retards dans son rôle coordinateur et des erreurs et insuffisances dans la conception du marché qui sont à l'origine de sa résiliation par le maître de l'ouvrage.

SUR CE,

Considérant que le 30 juillet 2009 a été conclu entre la société EDF et la société Portafeu le marché à réaliser par un groupement momentané d'entreprises solidaires(GMES) relatif à la fourniture et à la pose de cellules oxyprivatives (portes coupe feu) destinées aux centrales nucléaires pour la production d'électricité à [Localité 1], [Localité 2] et [Localité 3], la convention relative au GMES ayant été régularisée le 4 novembre 2009 entre la société Portafeu et la société Prezioso, la première ayant été instituée mandataire commun ; que les fonctions techniques des deux membres ont été définies comme suit :

* Société Portafeu :

« Relevés sur site, étude, qualification des solutions techniques, fourniture et fabrication des panneaux coupe-feu 90'et des portes, fourniture et fabrication des structures métalliques porteuses et de la protection intérieure par tôle, pose des portes, contrôle technique externe, gestion administrative de l'affaire , transport vers un atelier de peinture ou directement sur les sites si la peinture se fait sur chantier, établissement de tous les documents « d'études de conception et de fabrication »,

* Société Prezioso :

« Pose sur l'ensemble des sites des structures métalliques, des tôles intérieures et extérieures et des panneaux CF90', fourniture et fabrication des tôles extérieures de protection (objet de l'option 1), la gestion, le pilotage et le paiement des sous-traitants électricité, sprinklage et ventilation, peinture atelier et/ou chantier, établissement du planning et suivi de celui-ci, rebouchage des trémies et passages de câbles électriques et divers tuyaux, amenée à pied d''uvre des portes, transport depuis les ateliers de peinture si celle-ci est effectuée en atelier, établissement et suivi de tous les documents chantiers» ;

Considérant que, par LRAR du 29 avril 2011 adressée à la société Portafeu, la société EDF a dénoncé le non respect des engagements et a mis la société Portafeu en demeure pour le 10 mai 2011 de présenter une organisation pérenne pour mener à bien le projet, d'arrêter un planning consolidé ( site de [Localité 3]), de faire une présentation de l'avancement des études (sites de [Localité 2] et [Localité 1]) et de réaliser une analyse de deux incidents survenus à [Localité 3] ;

Considérant que, par courrier du 9 novembre 2011 adressé à la société Portafeu, EDF rappelle la mise en demeure du 29 avril 2011, un plan d'actions arrêté lors d'une réunion commune le 10 mai 2011 et décide de la résiliation du marché C44C96950 pour les motifs suivants :

- persistance de difficultés d'organisation de vos ressources qui ne permet pas d'honorer vos obligations contractuelles,

- non respect de vos engagements pris en terme de délais dans vos derniers plannings du 7 juillet 2011,

- nouvelles non conformités lors des travaux sur site et manquements en matière d'assurance qualité dans les documents produits,

Considérant qu'il se déduit de ce qui précède que les difficultés d'organisation et les retards pris ayant conduit la société EDF à résilier le contrat sont pour partie imputables à la société Portafeu en sa double qualité de mandataire du groupement dont les missions sont précisées à l'article 7 des conditions générales et en charge de la réalisation des premiers travaux selon l'énumération figurant à l'article IV des conditions particulières ; que le contenu des courriers adressés par EDF à la société Portafeu et les messages adressées à la société Portafeu par la société Prezioso (courrier du 17 février 2011, courriel du 28 avril 2011) confirment ces défaillances dans la coordination du chantier, le non respect des plannings annoncés et donc les retards affectant le lancement du projet ; qu'au jour de la résiliation le 9 novembre 2011, seul 5% du marché avait été réalisé alors que la société EDF avait versé 25% de son coût global ; que, contrairement à ce que soutient la société Portafeu, le courrier daté du 3 décembre 2012 que lui a dressé la société EDF confirme la décision de résiliation et rappelle une réunion précédente s'étant tenue le 14 novembre 2012 lors de laquelle ont été dénoncés le manque de maîtrise, de pilotage et de management du groupement ;

Mais considérant que la société EDF a également adressé deux courriers à la société Prezioso les 9 mars et 14 avril 2011 ; que dans le premier courrier elle relate que le 8 mars 2011 le personnel de cette société travaillant sur les cellules oxyprivatives ne respectait les normes de sécurité et avait fait l'objet d'un rappel à l'ordre ; que, dans le courrier du 14 avril 2011, la société EDF relève la même difficulté pour la journée du 13 avril qui a entraîné dans un premier temps l'arrêt du chantier ; que, dans un troisième courrier daté du 2 septembre 2011 également adressé à la société Prezioso, la société EDF dénonce sur le site SLB différents manquements de cette société vis à vis de l'assurance qualité ;

Considérant qu'il se déduit de ce qui précède que si la lettre de résiliation d'EDF se réfère à des manquements imputables à la société Portafeu, ce client formule également des griefs à l'encontre de la société Prezioso en dénonçant des « non conformités lors des travaux sur site et manquements en matière d'assurance qualité dans les documents produits »; que, sans nécessité de se prononcer sur le caractère fondé ou non de la décision de résiliation du contrat par la société EDF, cette question faisant l'objet d'une autre procédure actuellement en cours engagée par la société Portafeu, il est donc établi que la décision de résiliation a été prise par la société EDF au vu de manquements qu'elle impute aux deux sociétés ; que, dans ces conditions, la société Prezioso est mal fondée à reprocher à la société Portafeu la décision prise par le client à laquelle elle a elle-même concouru ; que le jugement doit être infirmé ; que la société Prezoso doit être déboutée de toutes ses demandes présentées à l'encontre de la société Portafeu tendant à être indemnisée des conséquences de la résiliation du contrat ; que le jugement déféré doit être infirmé ;

Considérant que l'infirmation du jugement emporte restitution des sommes versées en exécution du jugement déféré sans nécessité d'en prévoir la restitution.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

INFIRME le jugement déféré ;

Statuant de nouveau :

DIT que la lettre de résiliation d'EDF comporte des griefs tant à l'encontre de la société Portafeu qu'à l'encontre de la société Prezioso Linjebygg ;

DÉBOUTE la société Prezioso Linjebygg de toutes ses demandes ;

CONDAMNE la société Prezioso Linjebygg à verser à la société Portafeu la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes ;

CONDAMNE la société Prezioso Linjebygg aux entiers dépens de procédure de première instance et d'appel et accorde à la Selarl Lexavoue Paris-Versailles le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 15/20642
Date de la décision : 05/12/2016

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°15/20642 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-12-05;15.20642 ?
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