Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 4
ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2016
(n° 279 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/14238
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Juin 2016 -Cour d'Appel de PARIS - RG n° 16/01923
DEMANDERESSE À LA REQUÊTE
SAS SOPRAVIT SA
ayant son siège social [Adresse 1]
[Localité 1]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Maître Jean-Michel HOCQUARD de la SCP HOCQUARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0087
Ayant pour avocat plaidant Maître Vincent PERRAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0087
DÉFENDERESSE À LA REQUÊTE
SAS BAYER venant aux droits de la Société BAYER ENVIRONMENTAL SCIENCE SAS
ayant son siège social [Adresse 2]
[Adresse 3]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Maître Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 Novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Irène LUC, Présidente, chargée du rapport et Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Irène LUC, Présidente de chambre, rédacteur
Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère
Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère appelée d'une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l'article R.312-3 du Code de l'Organisation Judiciaire,
qui en ont délibéré,
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Irène LUC dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile,
Greffier, lors des débats : M. Vincent BRÉANT
ARRÊT :
- contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Irène LUC, Présidente et par Monsieur Vincent BRÉANT, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
A la suite de l'assignation délivrée par la société Sopravit à la société Bayer Environmental Science, le tribunal de commerce de Lyon a, par jugement du 20 juillet 2015 :
-débouté la société Bayer Environmental Science de sa demande de nullité de l'assignation,
-dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner à la société Bayer Environmental Science la production de la lettre de résiliation adressée à la société DBS,
-débouté la société Sopravit de sa demande d'expertise,
-dit que la société Sopravit a été informée, selon préavis notifié par écrit, de la décision de la société Bayer SAS de mettre un terme aux relations commerciales entre les parties,
-jugé que le délai de préavis de 11 mois a été suffisant au sens de la loi pour lui permettre la réorganisation de son activité,
-dit la société Sopravit mal fondée en ses demandes et l'en a déboutée dans l'intégralité,
-condamné la société Sopravit à payer à la société Bayer SAS la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné la société Sopravit aux entiers dépens de l'instance.
Le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 20 juillet 2015 a été signifié le 31 juillet 2015 à la société Sopravit, l'acte de signification indiquant qu'il était possible d'en interjeter appel devant la cour d'appel de Lyon. La société Sopravit a fait appel de ce jugement devant la cour d'appel de Lyon, par déclaration d'appel reçue le 22 août 215.
Le 7 septembre 2015, le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 20 juillet 2015 a été à nouveau signifié à la société Sopravit, l'huissier précisant dans l'acte qu'il « annule et remplace mon acte du 31 juillet 2015 », et indiquant qu'appel peut être interjeté de cette décision devant la cour d'appel de Paris.
Par ordonnance du 6 octobre 2015, le conseiller de la cour d'appel de Lyon a, au vu des conclusions du 22 septembre 2015 prises par la société Sopravit, constaté le désistement d'appel, l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour.
Par déclaration d'appel reçue au greffe de la cour d'appel de Paris le 11 janvier 2016, la société Sopravit a interjeté appel du jugement du 20 juillet 2015 et a assigné la société Bayer SAS à comparaître devant la cour d'appel de Paris par acte du 28 janvier 2016.
La société Bayer SAS a introduit un incident devant le conseiller de la mise en état.
Par ordonnance du 14 juin 2016, le conseiller de la mise en état a déclaré l'appel introduit le 11 janvier 2016 par la société Sopravit irrecevable, débouté la société Bayer de sa demande en procédure abusive, condamné la société Sopravit aux dépens et au paiement de la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Le conseiller de la mise en état a jugé que le désistement de l'appel interjeté devant la cour d'appel de Lyon par Sopravit « ne pouvait valoir acquiescement au jugement au sens de l'article 403 du code de procédure civile, de sorte que l'appel interjeté devant la cour d'appel de Paris est recevable ». Il a estimé que la signification du jugement du 7 septembre 2015 à la société Bayer Environmental Science et non à la société Bayer qui l'a absorbée le 4 janvier 10 et radiée le 9 février 2010, n'était pas affectée d'une nullité de fond et avait fait courir le délai d'appel. Il a donc jugé que l'assignation était affectée d'un vice de forme ne faisant pas grief à la société Sopravit, celle-ci étant informée de la fusion intervenue dès l'introduction de l'instance, puisqu'elle a visé dans celle-ci le numéro RCS de la société Bayer et son adresse, identique à celle de Bayer Environmental Science. Par ailleurs, ses conclusions au fond devant le tribunal de commerce de Lyon visaient la société Bayer, de même que sa déclaration d'appel devant la cour d'appel de Lyon du 27 août 2015, et l'ordonnance de désistement du conseiller de la mise en état de Lyon, du 6 octobre 2015. Par ailleurs, l'acte de signification du 17 septembre 2015, délivré à Bayer Environmental Science mentionne l'adresse de Bayer. Il a donc conclu que la mention erronée n'avait pu conduire la société Sopravit à se méprendre sur l'identité de la société qui lui signifiait l'acte.
La cour
Vu le déféré interjeté par la société Sopravit et ses conclusions dans lesquelles elle demande à la cour :
-d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a dit irrecevable comme tardif l'appel inscrit par la société Sopravit, condamné aux dépens et à payer une indemnité de procédure,
et, statuant à nouveau,
- juger que la signification à partie du jugement opérée le 7 septembre 2015, est entachée d'une nullité de fond pour avoir été instrumentée à la requête d'une société dénuée de personnalité morale,
en conséquence,
-dire et juger l'appel de la société Sopravit recevable,
-condamner la société Bayer à payer à la société Sopravit la somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions de la société Bayer, dans lesquelles elle demande à la cour de :
-rejeter les prétentions de la société Sopravit,
-confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 14 juin 2016 en ce qu'elle a dit irrecevable comme tardif l'appel inscrit par la société Sopravit, condamné celle-ci aux dépens et à payer une indemnité de procédure,
-infirmer partiellement cette même ordonnance en ce qu'elle a considéré que le désistement d'appel de Lyon n'emportait pas renonciation à saisir la cour d'appel de Paris,
-prendre acte de l'acquiescement par la société Sopravit au jugement rendu le 20 juillet 2015 par le tribunal de commerce de Lyon et sa renonciation aux voies de recours en raison de son désistement d'appel,
en conséquence,
-déclarer irrecevables l'appel interjeté par la société Sopravit le 11 janvier 2016 à l'encontre du jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 20 juillet 2015 ainsi que les conclusions d'appel de la société Sopravit,
à titre infiniment subsidiaire,
-juger nulles la déclaration d'appel ainsi que l'assignation délivrée le 28 janvier 2016 par la société Sopravit,
-condamner la société Sopravit à payer à la société Bayer la somme de 50 000 euros au titre de l'abus du droit d'ester en justice,
-condamner la société Sopravit à payer à la société Bayer SAS la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens de l'instance ;
La société Sopravit expose que la nullité encourue par l'acte de signification constitue une nullité de fond, applicable en l'absence de griefs. La signification à une personne morale inexistante constitue, selon elle, cette nullité de fond, la jurisprudence relative à la signification à une mauvaise dénomination d'une société étant inapplicable dans ce cas de figure.
La société Bayer maintient, quant à elle, que l'appel de Sopravit est tardif et, à titre surabondant, irrecevable, Sopravit s'étant désistée de son appel devant la cour d'appel de Lyon.
Sur ce,
Sur l'irrecevabilité de l'appel, interjeté hors délai
La signification du 7 septembre 2015 a été délivrée au nom de la société Bayer Environmental Science, dont le siège social est situé [Adresse 4]. Si cette société n'existait plus à cette date, ayant été absorbée par la société Bayer SAS, il convient de souligner que la société Sopravit connaissait cette circonstance, les deux sociétés étant de surcroit domiciliées à la même adresse. Il ne s'agit donc que d'une erreur de dénomination, de pure forme, la signification étant réalisée sous le nom de la société Bayer Environmental Science ayant perdu la personnalité morale et ayant été absorbée par la société Bayer, qui a repris ses droits et obligations.
Cette erreur n'a pu tromper la société Sopravit qui connaissait cette circonstance et ne saurait entraîner la nullité de la signification, la requérante ne démontrant pas l'existence d'un grief, conformément à l'article 114 du code de procédure civile.
Il y a lieu de souligner en effet que l'acte introductif d'instance a été délivré par la société Sopravit, le 16 février 2012, à l'encontre de la société Bayer Environmental Science, tout en visant le siège et le numéro de RCS de la société Bayer SAS. Dans le prolongement de cette assignation, la société Sopravit a systématiquement rédigé ses écritures en les adressant à la société Bayer SAS. La première signification du jugement entrepris a été effectuée au nom de la société Bayer Environmental Science et, à la suite de cette signification, la société Sopravit s'est constituée devant la cour d'appel de Lyon contre la société Bayer SAS, démontrant, de ce fait, qu'elle ne s'était pas méprise sur la personne morale qui lui a fait signifier le jugement. De même, la société Sopravit a également fait sa déclaration d'appel devant la cour de céans contre la société Bayer SAS.
Il y a donc lieu de confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état, en ce qu'il a jugé régulière la signification du 7 septembre 2015. Celle-ci ayant fait courir le délai d'appel, l'appel interjeté par la société Sopravit est tardif et donc irrecevable, sans qu'il soit besoin de statuer sur la portée du désistement d'appel de la société Sopravit devant la cour d'appel de Lyon, ce moyen étant soulevé à titre surabondant.
Sur la procédure abusive
L'abus du droit d'agir n'étant pas démontré, il y a lieu de rejeter la demande de la société Bayer.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
La société Sopravit succombant, sera condamnée aux dépens et à payer à la société Bayer la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 14 juin 2016,
DÉBOUTE la société Bayer de sa demande pour procédure abusive,
CONDAMNE la société Sopravit aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le GreffierLa Présidente
Vincent BRÉANT Irène LUC