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15/11/2016 | FRANCE | N°14/03434

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 15 novembre 2016, 14/03434


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 15 Novembre 2016



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/03434



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Novembre 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/17143





APPELANT

Monsieur [T] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 1]

comparant en

personne,

assisté de Me Thierry PIERRON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0831

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/060631 du 08/02/2016 accordée par le burea...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 15 Novembre 2016

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/03434

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Novembre 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/17143

APPELANT

Monsieur [T] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 1]

comparant en personne,

assisté de Me Thierry PIERRON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0831

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/060631 du 08/02/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

SA FRANCE TELEVISIONS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Halima ABBAS TOUAZI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0208

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Septembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Claire CHESNEAU, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [T] a collaboré au sein des sociétés RFO et France 3 , devenues la société FRANCE TELEVISIONS en qualité de collaborateur journaliste rémunéré à la pige à des dates s'échelonnant entre le 18 avril 2008 et le 4 septembre 2011 dans les termes suivants :

18-25 avril 2008 contrat d'usage collaborateur journaliste à RFO

26 avril 2008 contrat d'usage collaborateur journaliste à RFO

29 novembre 2008 contrat d'usage collaborateur journaliste à RFO

13 au 14 décembre 2008 contrat d'usage collaborateur journaliste à RFO

20 décembre 2008 contrat d'usage collaborateur journaliste à RFO

1er avril 2009 contrat d'usage collaborateur à l'émission Paris en ligne auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

12 mai 2009 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production Groupe KANEKA auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

30 mai 2009 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production capitaine de soirées créoles auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

12 au 13 juin 2009 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production Reportages auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

19 juin au 22 juin 2009 contrat d'usage collaborateur auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

30 au 31 octobre 2009 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production rue des négriers auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

3 novembre 2009 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production retour du théâtre de l'air nouveau auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

11 novembre 2009 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production Reportage RFO auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

28 novembre 2009 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production Reportage RFO auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

10 janvier 2010 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production FOOT/PSG/Aubervilliers auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

17 février 2010 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou Production Reportage RFO auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

20 février 2010 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production FUTSAL auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

13 juin 2010 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production ACTU RFO auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

18 octobre 2010 au 28 novembre 2010 : CDD au vu de faire face à un accroissement temporaire d'activité découlant du JT locale 19/20. Le contractant est engagé en qualité de journaliste ' reporteur d'images pour exercer ses fonctions au sein du service rédaction régionale centre située FTV [Localité 2]

20 décembre 2010 au 2 janvier 2011: CDD en vue de faire face au remplacement d'un salarié absent pour congés payés [F] [I]. Le contractant est engagé en qualité de journaliste reporter d'images et exerce ses fonctions au sein du service pôle SE situé FTV [Localité 3]

21 février 2011 au 27 février 2011 :CDD en vue de faire face au remplacement d'un salarié absent temporairement [H] [S] [H] , grand reporteur Palier 3. Le contractant est engagé en qualité de journaliste reporter d'images et exerce ses fonctions au sein du service pôle SE situé FTV [Localité 3]

7 mars au 13 mars 2011 CDD en vue de faire face au remplacement d'un salarié absent pour congés payés [I] [B] , journaliste spécialisé. Le contractant est engagé en qualité de journaliste reporter d'images et exerce ses fonctions au sein du service pôle SE situé FTV [Localité 4]

20 mars 2011 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production ARTS MARTIAUX auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision:

21 mars au 27 mars 2011 CDD au vu de faire face à un accroissement temporaire d'activité découlant championnat de natation Le contractant est engagé en qualité de journaliste ' reporteur d'images pour exercer ses fonctions au sein du service information de proxi situé Maison de France Télévisions

30 mars 2011 contrat d'usage collaborateur auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision: convention collective nationale de travail des journalistes

2 avril 2011 contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production SAMBO COMBAT/championnat de France auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision: convention collective nationale de travail des journalistes

4 avril au 10 avril 2011 CDD en vue de faire face au remplacement d'un salarié absent en congé maladie [X] [G]. Le contractant est engagé en qualité de journaliste reporter d'images et exerce ses fonctions au sein du service pôle NE situé FTV [Localité 5]

11 avril au 17 avril 2011 CDD en vue de faire face au remplacement d'un salarié absent temporairement en stage de formation [X] [G] Le contractant est engagé en qualité de journaliste reporter d'images et exerce ses fonctions au sein du service pôle SE situé FTV [Localité 5]

22 avril 2011 CDD en vue de faire face au remplacement d'un salarié absent temporairement remplacement de personnel en RTT [M] [C] . Le contractant est engagé en qualité de journaliste reporter d'images et exerce ses fonctions au sein du service information de proxi situé Maison de France télévisions

25 avril 2011 au 1er mai 2011 CDD en vue de faire face au remplacement d'un salarié absent pour congés [G] [P], journaliste spécialisé Palier 1 . Le contractant est engagé en qualité de journaliste reporter d'images et exerce ses fonctions au sein du service pôle SE situé FTV [Localité 4]

3 mai 2011 au 7 mai 2011 CDD en vue de faire face au remplacement d'un salarié absent pour congés payés [V] [W], journaliste spécialisé, . Le contractant est engagé en qualité de journaliste reporter d'images et exerce ses fonctions au sein du service pôle SE situé FTV [Localité 4]

24 juin 2011 au 26 juin contrat d'usage collaborateur à l'émission ou production Marche blanche Marie-Jeanne auprès de la direction de la rédaction TV de France télévision.

22 août 2011 au 4 septembre 2011 CDD en vue de faire face au remplacement d'un salarié en congés payés [Q] [E] journaliste spécialisé. Le contractant est engagé en qualité de journaliste reporter d'images et exerce ses fonctions au sein du service information situé Maison de France Télévisions

À l'échéance de son dernier contrat à durée déterminée en date du 4 septembre 2011, il n'a plus travaillé pour la société FRANCE TELEVISIONS.

Par jugement rendu le 5 novembre 2013 le conseil de prud'hommes de Paris, saisi à titre principal, d'une demande de requalification des contrats de travail en un contrat à durée indéterminée et de demandes indemnitaires au titre de la nullité de la rupture a débouté Monsieur [T] de l'ensemble de ses demandes.

Monsieur [T] a interjeté appel de ce jugement par déclaration au greffe du 25 mars 2014.

Par ordonnance du 18 décembre 2015, un médiateur a été désigné.

Suite à l'échec de la médiation, les parties ont été rappelées à l'audience du 12 septembre 2016.

Par conclusions visées au greffe le 12 septembre 2016 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [T] demande l'infirmation du jugement et la condamnation de la société FRANCE TELEVISIONS à lui régler les sommes suivantes :

13'320,12 euros à titre d'indemnité de requalification,

4440,04 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 444 € au titre des congés payés afférents,

8415,57 euros à titre d'indemnité de licenciement,

70'000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

4440 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

90'018,23 euros à titre de rappel de salaire du 18 avril 2008 au 4 septembre 2011 outre 9001,82 euros au titre des congés payés afférents,

subsidiairement, 50'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

la remise d'un certificat de travail, d'une attestation Pôle emploi conformes sous astreinte de 100 € par jour de retard et par document,

3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

le prononcé d'intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.

Par conclusions visées au greffe le 12 septembre 2016 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la société FRANCE TELEVISIONS demande la confirmation du jugement et le rejet des demandes de Monsieur [T].

MOTIFS

- Sur la demande de requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée

Les pièces produites aux débats justifient que Monsieur [T] a fait l'objet de contrats à durée déterminée d'usage en tant que collaborateur journaliste pour les périodes suivantes: 18 au 25 avril 2008/ 26 avril 2008 / 29 novembre 2008/ 13 au 14 décembre 2008/ 20 décembre 2008/ 1er avril 2009 (collaboration à l'émission Paris en ligne) / 12 mai 2009 (collaboration à l'émission ou la production Groupe Kaneka) / 30 mai 2009 (collaboration à l'émission capitaine de soirées créole) / 12 juin 2009 (reportages) / 19 au 22 juin 2009 / 30 au 31octobre 2009 (collaboration à l'émission rue des négriers) / 3 novembre 2009 (collaboration à l'émission retour du théâtre de l'air nouveau) / 11 novembre 2009 (reportage RFO)/ 28 novembre 2009 (reportage RFO)/ 10 janvier 2010 (foot/PSG/Aubervilliers) / 17 février 2010 (reportage RFO) / 20 février 2010 (émission FUTSAL) / 13 juin 2010 (ACTU RFO) / 20 mars 2011 (émission arts martiaux) / 30 mars 2011 / 2 avril 2011 (émission Sambo Combat/championnat de France) / 24 au 26 juin 2011(marche blanche Marie-Jeanne);

Le salarié a également fait l'objet de contrats à durée déterminée en qualité de journaliste reporter d'images afin de faire face à un accroissement temporaire d'activité du 18 octobre 2010 au 28 novembre 2010 au sein de la rédaction régionale centre située FTV [Localité 2] (JT local 19/20) et du 21 mars au 27 mars 2011 (service information maison de France télévision)

Il a fait l'objet de contrats à durée déterminée afin de remplacer un salarié absent pour les périodes s'étendant du 20 décembre 2010 au 2 janvier 2011 puis 21 février au 27 février 2011 ( fonctions au sein du service Pôle SE situé FTV [Localité 3]/ 7 mars au 13 mars 2011)

( fonctions au sein du service Pôle SE situé FTV [Localité 4])/ 4 avril 2011- 10 avril 2011 puis11 avril ' 17 avril 2011(( fonctions au sein du service Pôle SE situé FTV [Localité 5]) / 22 avril 2011 (service information maison de France télévision) / 25 avril 2011 et 3 mai 2011 - 5 mai 2011 ( fonctions au sein du service Pôle SE situé FTV [Localité 4])/ 22 août au 4 septembre 2011 (maison de France télévision);

S'agissant des contrats d'usage, il est rappelé que selon l'article L. 1242-2 3° du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, dit contrat d'usage, peut être conclu pour les emplois, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accords collectifs de travail étendu, où il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée déterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de l'emploi.

Si le secteur de l'audiovisuel est visé à l'article D 1242-1 parmi ceux dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être ainsi conclus, le recours à de tels contrats n'en doit pas moins être justifié par des raisons objectives qui s'entendent par l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi ;

Par ailleurs, le recours au contrat de travail à durée déterminée d'usage ne dispense pas l'employeur d'établir un contrat écrit comportant la définition précise de son motif;

Or, en l'espèce, il convient de relever que les contrats successivement conclus pour les périodes suivantes: 18 avril 2008 au 25 avril 2008 , 26 avril 2008, 29 novembre 2008, 13 décembre 2008 au 14 décembre 2008, 20 décembre 2008 mentionnent l'embauche de Monsieur [T] en qualité de collaborateur journaliste à RFO , sans autre mention permettant d'établir la réalité du motif précis de chacun des contrats, et sans rendre vérifiable en conséquence la nature ponctuelle et temporaire de l'emploi exercé;

Aucune mention de l'émission ou de la production donnant lieu au contrat souscrit pour la période s'étendant du 19 juin au 22 juin 2009 n'est non plus précisée non plus que pour celle afférente au 30 mars 2011;

La preuve de la transmission de certains des contrats dans le délai de deux jours ouvrables suivant l'embauche dans les termes de l'article L 1242-13 du code du travail n'est pas non plus apportée par l'employeur, la cour observant que le contrat conclu pour la période du 18 au 25 avril 2008 a été signé par le salarié le 25, que celui conclu pour la journée du 26 avril a été signé par le salarié le 5 mai, que celui conclu pour la journée du 29 novembre a été signé par le salarié le 4 décembre ;

Si par ailleurs, le recours aux contrats d'usage dispensent du respect du délai de carence entre les missions, tel n'est pas le cas s'agissant des autres contrats à durée déterminée auquel se rattache le contrat conclu du 21 au 27 mars pour accroissement temporaire d'activité lequel a été signé cependant immédiatement après le contrat d'usage du 20 mars.

Ces éléments qui justifient du défaut des mentions relatives aux motif précis de recours aux contrats du 18 avril au 20 décembre 2008, du défaut de la désignation du poste occupé pour deux contrats en 2009 et 2011 et du respect du délai de transmission des contrats pour trois d'entre eux conduiront à requalifier les contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée à compter du 18 avril 2008.

- Sur les demandes en paiement faisant suite à la requalification

- sur les demandes salariales

Le salarié, engagé aux termes de plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée, ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées séparant chaque contrat que s'il s'est tenu à la disposition de l'employeur durant chacune des périodes interstitielles;

Monsieur [T] fait ici valoir qu'il est resté en permanence à la disposition de la société FRANCE TELEVISIONS entre deux engagements, qu'il n'a eu de cesse de fournir à l'intimée ses disponibilités pour pouvoir travailler, qu'il avait dès lors droit au paiement des salaires pendant les périodes intercalaires étant observé que l'ancienneté des relations contractuelles et la succession des contrats avait non seulement pour effet mais pour objet de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Il sollicite donc un rappel de salaire sur la base d'un salaire contractuel de base d'un montant de 2220,02 euros

Il se déduit cependant des pièces produites que les 33 contrats n'ont pas fait, au cas d'espèce, l'objet d'une succession ininterrompue depuis 2008, qu'ainsi Monsieur [T] n'a pas été embauché de mai à novembre 2008, de décembre 2008 à avril 2009, du 2 avril 2009 au 12 mai 2009, du 23 juin 2009 au 30 octobre 2009, de mi juin à fin octobre 2009, de mars au 12 juin 2010 puis du 14 juin 2010 au 17 octobre 2010, qu'il a travaillé 7jours en 2008,14 jours en 2009,45 jours en 2010;

Les fonctions de Monsieur [T] n'étaient d'ailleurs pas les mêmes durant toute la période alors qu'il a effectué selon les cas des reportages, des collaborations à des journaux télévisés ou à des émissions ou productions variées et identifiées ce, dans des rédactions différentes tant nationale que régionales;

La cour ne constate la succession de contrats qu'à compter du 21 février 2011 jusqu'au 4 septembre 2011, période durant laquelle se succèdent 13 contrats dont 6 pour FR3

Durant cette période, les contrats s'enchaînent en effet avec de très courtes interruptions rendant impossible la disponibilité du salarié pour d'autres emplois, Monsieur [T] justifiant , par son envoi de courriels semaine après semaine, sans interruption, aux termes desquels il mentionne sa disponibilité, de ce qu'il se tenait alors constamment à la disposition de l'intimée pour effectuer un travail;

Étant tenu compte d'une rémunération perçue du 21 février au 4 septembre d'un montant total de 7865,93 euros déduction faite des indemnités de fin de contrat, et du salaire journalier s'en déduisant, la société FRANCE TELEVISIONS sera condamnée à payer à Monsieur [T] la somme de 14'363,87 euros à titre de rappel de salaire outre 1436 euros au titre des congés payés afférents pour la période ici retenue par la cour.

-sur les indemnités de requalification, de préavis et de licenciement

Selon l'article L 1245-2 du code du travail, lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande de requalification du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.

Étant ici intégré le rappel de salaire susvisé relativement à la dernière année travaillée, il sera retenu une rémunération mensuelle brute d'un montant de 2220,02 euros dans les termes sollicités par le salarié;

Au regard de la durée de la relation de travail et de la précarité induite, la société FRANCE TELEVISIONS sera condamnée à payer à Monsieur [T] la somme de 7000 €

à titre d'indemnité de requalification ;

L'indemnité compensatrice de préavis sera fixée à la somme de 4440,04 euros outre 444 € au titre des congés payés afférents;

Sur la base des dispositions de la convention collective des journalistes, il est du une indemnité légale de licenciement d'un montant de 7770,07 euros.

- Sur la demande indemnitaire au titre de la rupture

-Sur la demande portant sur la nullité de la rupture au regard de la discrimination invoquée

En vertu de l'article 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine,

L'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Monsieur [T] fait ici valoir que c'est en raison de son origine qu'il a fait l'objet d'un traitement discriminatoire et ne s'est finalement plus vu proposer de mission après le 4 septembre 2011, qu'à compétences égales, il s'est vu proposer du travail moins souvent que d'autres salariés non issus de la diversité et ne s'est pas vu proposer de contrats à durée déterminés longs et n'a pas non plus été intégré en contrat à durée indéterminée contrairement à certains salariés ayant les mêmes compétences que lui;

Il évoque la situation d'autres salariés tels [L] [L], [R] [D], [B] [Y], [P] [Z], [K] [M],

Il mentionne que des appréciations négatives le concernant, qu'il conteste et réfute, ont été relayées par des directeurs de ressources humaines Monsieur [Y] [F] et [O] [A]; ainsi que par le rédacteur en chef de la direction locale de [Localité 2],

Il relève qu'il est fort probable qu'il a fait partie des salariés ayant fait l'objet d'un affichage occulte ce qui a conduit à la condamnation de la société FRANCE TELEVISIONS par ordonnance rendue le 11 mai 2016, que d'ores et déjà en 2001, il avait dû faire appel à un représentant syndical de France 2 alors qu'il était victime de discrimination, que malgré ses disponibilités, il lui a été refusé des embauches auprès du bureau de [Localité 1], que dans le cadre de la mission du 25 avril au 7 mai 2011 à [Localité 4], il a été victime de discrimination et de harcèlement aboutissant à un arrêt de travail du 7 mai au 27 mai 2011, son état dépressif étant confirmé un an plus tard le 25 juin 2012 et en 2013;

Il mentionne également qu'en juillet 2011 il a appris qu'il n'était plus référencé dans le système informatique Omega utilisé par la société FRANCE TELEVISIONS pour référencer les contrats à durée déterminée disponibles alors qu'il n'avait jamais émis le souhait d'arrêter d'effectuer des missions, que les motifs avancés par la société FRANCE TELEVISIONS dans une lettre du 18 octobre 2011 pour voir cesser définitivement la relation de travail avec l'entreprise ne sont pas fondées;

Au regard des pièces produites par le salarié, la cour observe cependant que la lettre de Monsieur [R], délégué syndical central CGT écrite le 11 octobre 2012 se limite à faire état des dénonciations par Monsieur [T] de faits de discrimination en 2001 sans éléments précis ce , dans le même temps où elle rapporte la faveur donnée à son travail par d'autres journalistes rédacteurs;

Il ressort également des débats que Monsieur [T] a effectué en 2006 et 2007 des stages notamment auprès de France 2 qui lui ont permis de progresser en devenant rédacteur reporter d'images,

Le relevé des stagiaires ayant suivi la formation de 'journalisme audiovisuel, formation de rédacteurs reporters d'images' en septembre et décembre 2007 reste insuffisant pour justifier d'éléments de fait laissant supposer une discrimination, aucun élément n'étant donné sur le déroulé de leurs carrières ni ne venant établir qu' à ancienneté, diplômes et expériences comparables, Monsieur [T] aurait subi un traitement discriminatoire par rapport à ceux ci;

Les termes de la lettre émanant de Monsieur [O] le 31 mai 2010 en réponse à la candidature à France 3 Sud ne permet pas non plus de laisser supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte alors qu'elle se limite , sans autre élément, à ne pas retenir sa candidature et qu'aucun élément de contexte ne vient étayer la thèse développée par le salarié;

Il en est de même de la lettre de Madame [K] responsable des ressources humaines en date du 8 février 2011;

Les pièces versées par Monsieur [T] relatives à Monsieur [Y] ne sont pas pour leur part datées. Elles justifient que ce dernier, journaliste rédacteur, reporter d'images et chef opérateur a travaillé à compter de 2006 pour France 3 après avoir sillonné la France de région en région, la cour observant qu'il se déduit des pièces produites que ce salarié reste lui même dans une situation professionnelle précaire, travaillant également pour le Magazine de la santé et recherchant tout type de collaboration;

Il ressort par ailleurs des échanges de courriels produits tout particulièrement pour l'année 2011 aux termes desquels l'intéressé fait état de ses disponibilités que ses demandes font toujours l'objet de réponses;

Le lien entre les pièces médicales produites et la discrimination dont fait état Monsieur [T] n'est pas établi;

Le litige ayant opposé la société FRANCE TELEVISIONS à des salariés entre septembre 2015 et mai 2016 apparaît être lié, dans les termes de l'ordonnance du conseil de prud'hommes de Paris du 11 mai 2016, à des fiches profil de performances sans qu'il ne soit justifié d'un lien avec les termes du présent débat;

Le courrier du 18 octobre 2011 aux termes duquel la direction des ressources humaines France 3 confirme la cessation de toute relation de travail avec l'intéressé à compter du 4 septembre 2011 fait référence à des retards récurrents à la rédaction locale de [Localité 2], un faible investissement au sein de l'équipe, des retards enregistrés lors du passage à [Localité 4], un manque d'intérêt pour les sujets à tourner et une relation insuffisante avec les confrères journalistes rédacteurs outre des dommages non signalés par l'intéressé à un véhicule reportage à [Localité 4];

À cet égard, l'employeur produit aux débats un courriel de Madame [A] ( Antenne des [Localité 6]) en date du 10 mai 2011 rapportant que l'intéressé est arrivé plusieurs fois en retard en prenant son service le premier jour à 12 heures au lieu de 9 heures, avait manqué d'intérêt pour les sujets à tourner et n'avait pas fait d'efforts dans sa relation avec les journalistes rédacteurs, qu'ayant par ailleurs endommagé un véhicule reportage sans prendre la peine de le signaler, il ne serait désormais plus sollicité pour un remplacement à [Localité 4];

Les faits matériels ainsi énoncés de façon circonstanciée ne permettent pas de laisser présumer que la rupture serait fondée sur des faits laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ;

Les demandes de ce chef de Monsieur [T] ont donc lieu d'être écartées.

- sur la cause réelle et sérieuse de la rupture

Le juge qui requalifie la relation contractuelle en un contrat de travail à durée indéterminée doit rechercher si la lettre de rupture des relations contractuelles vaut lettre de licenciement et si les motifs de rupture énoncés constituent des griefs matériellement vérifiables permettant de décider si le licenciement a une cause réelle et sérieuse;

En l'espèce, la cour a d'ores et déjà énoncé que par lettre du 18 octobre 2011, l'employeur a énuméré un certain nombre de griefs à l'encontre de Monsieur [T] pour justifier le défaut de continuation de la relation de travail;

Par ailleurs, il ressort d'un courrier de la directrice des ressources humaines de France 3 en date du 28 novembre 2011 qu'à la suite d'un entretien avec Monsieur [L] [V], en charge des dossiers concernant les journalistes et au cours duquel Monsieur [T] était accompagné de Monsieur [W] [N] délégué syndical SNU , les termes du courrier du 18 octobre 2011 ont été confirmés;

Il convient cependant de relever que la lettre susvisée du 18 octobre se rapporte à des événements en lien avec les missions de Monsieur [T] à [Localité 2] puis à [Localité 4] au mois de mai 2011, que postérieurement, la société FRANCE TELEVISIONS a engagé Monsieur [T] au titre d'un contrat d'usage du 24 juin 2011 au 26 juin 2011 puis dans le cadre d'un contrat à durée déterminée du 22 août 2011 au 4 septembre 2011 ;

Il s'en déduit que, l'employeur qui a continué la relation de travail avec le salarié entre le mois de mai et le mois de septembre 2011 sans démontrer que celle-ci a donné lieu à difficultés ne donne pas de cause réelle et sérieuse à la rupture intervenue à cette dernière date;

En conséquence, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié , de son âge, de son ancienneté depuis le 15 avril 2008, de son défaut de retour à l'emploi et des conséquences de la rupture à son égard, tels qu'elles résultent des pièces et des explications fournies, il lui sera alloué une somme de 35'000 € à titre indemnitaire compte tenu du défaut de cause réelle et sérieuse de la rupture, cette somme englobant l'indemnité allouée au titre de l'article L 1235-2 du code du travail .

En application de l'article L 1235-4 du code du travail, l'employeur sera tenu de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées au salarié licencié dans la limite de 3 mois d'indemnités de chômage

La société FRANCE TELEVISIONS devra remettre à Monsieur [T] un certificat de travail et une attestation Pôle emploi conformes au présent arrêt sans que les circonstances de l'espèce ne justifient d'assortir cette obligation d'une astreinte.

Il est rappelé que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes soit le 2 janvier 2012 et que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la présente décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement entrepris,

Requalifie la relation de travail en contrat à durée indéterminée à compter du 18 avril 2008,

Condamne la société FRANCE TELEVISIONS à payer à Monsieur [T] les sommes suivantes :

7000 € à titre d'indemnité de requalification,

4440,04 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 444 € au titre des congés payés afférents,

7770,07 euro à titre d'indemnité de licenciement,

14'363,87 euros à titre de rappel de salaire et 1436,38 euros au titre des congés payés afférents,

35'000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter du 2 janvier 2012 et que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Ordonne le remboursement par la société FRANCE TELEVISIONS à Pôle emploi des indemnités de chômage payées à la suite de la rupture dans la limite de 3 mois ;

Ordonne la remise par la société FRANCE TELEVISIONS à Monsieur [T] d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail rectifiés conformes au présent arrêt ;

Dit avoir lieu d'assortir cette obligation d'une astreinte;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ,

Condamne la société FRANCE TELEVISIONS à payer à Monsieur [T] en cause d'appel la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société FRANCE TELEVISIONS aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 14/03434
Date de la décision : 15/11/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°14/03434 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-15;14.03434 ?
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