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02/11/2016 | FRANCE | N°14/10058

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 02 novembre 2016, 14/10058


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 02 Novembre 2016



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/10058



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Mai 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 10/12671





APPELANTE

SELARL EMJ, prise en la personne de Me [L] [H] - Mandataire judiciaire de la SA PUB OPERA

[Adresse 1]

[Adresse

1]

représenté par Me Daniel VACONSIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0417 substitué par Me Sabine KUSTER HILTGEN, avocat au barreau de PARIS



SELARL [M], prise en la pe...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 02 Novembre 2016

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/10058

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Mai 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 10/12671

APPELANTE

SELARL EMJ, prise en la personne de Me [L] [H] - Mandataire judiciaire de la SA PUB OPERA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Daniel VACONSIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0417 substitué par Me Sabine KUSTER HILTGEN, avocat au barreau de PARIS

SELARL [M], prise en la personne de Me [J] [L] - Commissaire à l'exécution du plan de la SA PUB OPERA

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Daniel VACONSIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0417 substitué par Me Sabine KUSTER HILTGEN, avocat au barreau de PARIS

SA PUB OPERA

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Claude DEBOOSERE, avocat au barreau de , toque : C102

INTIMEES

Me [P] [T] - Mandataire liquidateur de S.A.R.L. NEW PUB

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représenté par Me Jacques LAROUSSE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1017

S.A.R.L. DREAM EVENT

[Adresse 5]

[Localité 1]

défaillante

AGS CGEA [Localité 2]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

substitué par Me Jessica LUSARDI, avocat au barreau de PARIS

Madame [U] [N] épouse [F]

née le [Date naissance 1] 1974 au PHILIPPINES

[Adresse 7]

[Adresse 7]

comparante en personne

assistée de Me Roland LIENHARDT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0974

PARTIE INTERVENANTE :

Monsieur [O] [B]

né le [Date naissance 2] 1942 à [Localité 3] (TUNISIE)

[Adresse 8]

[Localité 1]

comparant en personne

assisté de Me Nicolas CHAIGNEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : D0230

substitué par Me Sophie MORTREUX, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Septembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Antoinette COLAS, président de chambre

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, conseiller

Madame Stéphanie ARNAUD, vice président placé faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 30 juin 2016

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Caroline CHAKELIAN, lors des débats

ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Antoinette COLAS, président de chambre et par Madame Caroline CHAKELIAN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige

La SA Pub Opéra exploite un fonds de commerce, bar, restauration. Elle offre à sa clientèle des animations sous forme d'attractions artistiques de variétés.

Mme [U] [N], chanteuse, a été engagée à compter du 6 mars 2003 suivant des contrats de travail à durée déterminée dits d'usage par le cabaret restaurant.

À compter de mars 2009, l'organisation des spectacles et l'engagement des intermittents ont été confiés à la société Dream Event, titulaire d'une licence d'entrepreneur de spectacles, exclusivement dédiée à cette activité.

Après avoir mis en demeure son employeur de régulariser sa situation par une lettre du 1er octobre 2012, Mme [N] a, par une lettre du 12 octobre 2010, pris acte de la rupture de son contrat de travail et a saisi le conseil de prud'hommes de Paris afin d'obtenir la requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 6 mars 2003 et en condamnation à des rappels de salaire et de dommages-intérêts divers.

Elle avait attrait devant le conseil de prud'hommes, outre la SA Pub Opera, la S.A.R.L. Dream Event, Me [T] [P], en qualité de liquidateur de la S.A.R.L. New Pub et l'AGS CGEA [Localité 2].

Par un jugement en date du 15 mai 2012, le conseil de prud'hommes de Paris a :

- mis hors de cause la S.A.R.L. Dream Event, Maître [P] en qualité de liquidateur de la S.A.R.L. New Pub, l' Unedic CGEA AGS [Localité 2],

- dit que la SA Pub Opéra avait la qualité d'employeur de Mme [N],

- requalifié les contrats de travail à durée déterminée successifs en un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein à compter du 6 mars 2003,

- jugé que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail devait avoir les effets d'une rupture sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SA Pub Opéra à verser à Mme [N] les sommes suivantes :

* 3189,71 euros au titre de l'indemnité de requalification,

* 130 657,29 euros au titre d'un rappel de salaire pour la période du 5 octobre 2005 au 12 octobre 2010,

* 5000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la réglementation relative travail de nuit,

* 2041,98 euros au titre de l'indemnité de précarité,

* 2000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions relatives au paiement des repas et consommations prises sur place,

* 19 138,28 euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 6 379,43 euros au titre du préavis outre les congés payés afférents,

* 637,94 euros des congés payés afférents,

* 1399, 36 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés pour la période du 1er juin 2010 au 12 octobre 2010,

* 4835,61 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- ordonné la remise par l'employeur des documents sociaux sous astreinte de 50 € par jour et par document dans la limite de 15 jours, le conseil se réservant la liquidation de l'astreinte,

- condamné la SA Pub Opéra à régler une indemnité de 1000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 19 décembre 2013, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure collective à l'encontre de la SA Pub Opéra.

Un plan de continuation a été homologué par jugement du 1er janvier 2015. Me [L] [J] a été désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan. La mission du mandataire judiciaire Maître [H] [L] a été maintenue.

Appelante de ce jugement, la SA Pub Opéra, en présence du mandataire judiciaire et de la commissaire exécution du plan, assistée et représentée par un conseil, conclut à l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour, statuant à nouveau, de débouter Mme [N] de l'ensemble de ses prétentions. Elle réclame une indemnité de 2400 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [N] conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a limité à 5000 € le montant des dommages-intérêts pour le non-respect de la réglementation relative au travail de nuit, en ce qu'il s'est déclaré incompétent sur la demande formulée au titre de l'exploitation non autorisée de son image, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnité pour le non-respect des dispositions relatives au remboursement de la carte orange.

Elle demande à la cour, statuant à nouveau et y ajoutant, de condamner la SA Pub Opéra à lui verser les sommes suivantes :

- 2 000 € à titre de rémunération pour l'exploitation non autorisée de son image ou à tout le moins à titre de dommages-intérêts pour exploitation non autorisée de son image

- 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la réglementation relative au travail de nuit,

- 2 000 € pour le non-respect des dispositions relatives au remboursement la carte orange,

- 1098 € pour perte de chance d'utiliser les droits acquis au titre du droit individuel à la formation,

- 19 138,26 euros au titre du travail dissimulé,

- 2250 € au titre de la liquidation de l'astreinte,

- 10 000 € pour résistance abusive dans la délivrance spontanée des dernières fiches de salaire, du certificat de travail, de l'attestation destinée au pôle emploi et du solde de tout compte.

Elle demande à la cour la remise de ces divers documents sociaux sous astreinte de 200 € par jour de retard commençant à courir 15 jours après la signification de l'arrêt à intervenir et sans limitation durée la cour se réservant la liquidation de l'astreinte.

Elle sollicite 5000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle sollicite la condamnation solidaire de M. [O] [B] au paiement de l'ensemble des sommes qui lui seront accordées.

Lors des débats, le conseil de Mme [N] a précisé que les créances antérieures à l'ouverture de la procédure collective devront faire l'objet d'une fixation au passif de la SA Pub Opéra.

Le conseil de la SA Pub Opéra a déclaré représenter M. [O] [B] attrait en son nom personnel. Il s'oppose à toute demande à son encontre.

L'Unedic Cgea Ags Idf conclut à la mise hors de cause de la liquidation judiciaire de la société New Pub, aucune demande n'étant formulée à son encontre.

Elle rappelle que la SA Pub Opéra bénéficie d'un plan de redressement et doit a priori faire face aux créances qui pourraient être reconnues à la salariée, invoque les limites de la garantie, et les exclusions, s'agissant de dommages et intérêts mettant en 'uvre la responsabilité de droit commun de l'employeur, les astreintes et les indemnités allouées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour a rouvert les débats pour inviter les parties à présenter leurs observations sur l'application des dispositions des articles 554 et 555 du code de procédure civile et les a renvoyées à l'audience du 29 août puis du 13 septembre 2016.

Le conseil de M. [B] a soulevé l'irrecevabilité des demandes formulées à son encontre.

Les autres parties ont maintenu les conclusions antérieurement développées devant la cour.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS :

À titre préliminaire, Mme [N] confirme qu'elle ne formule aucune demande à l'encontre de la S.A.R.L. Dream Event et de la S.A.R.L. New Pub représentée par Me [T] [P], en qualité de liquidateur.

Leur mise en de cause sera donc confirmée.

Par ailleurs, seront rejetées des débats des pièces communiquées par la salariée relatives à une procédure pénale pour travail dissimulé dès lors que ces pièces ne la concernent pas mais sont en rapport avec la situation d'autres salariés de la SA Pub Opéra.

Sur la demande de requalification ;

Selon les dispositions de l'article L. 1242-1 du code du travail, un contrat de travail ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

L'article L. 1242-2 du même code dispose que sous réserve des contrats spéciaux prévus à l'article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cinq cas qu'il énumère, parmi lesquels figurent le remplacement d'un salarié, l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, les emplois saisonniers ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, il est d'usage de ne pas recourir aux contrats de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère, par nature temporaire, de ces emplois.

L'article L. 1242-12 du même code dispose que le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif, et notamment les mentions énumérées par ce texte.

Contrairement à ce que soutient l'employeur, en l'absence de contrat écrit, il n'est pas recevable à rapporter la preuve des contrats de travail à durée déterminée d'usage par tout moyen.

Les parties s'accordent dans leurs écritures respectives sur le fait que la salariée a commencé à collaborer à la date du 6 mars 2003, que des contrats écrits ont été établis mais sans que la mention de leur date ne soit précisée. Ces contrats sont donc irréguliers. Leur requalification s'impose à la date du premier contrat irrégulier, soit à compter du 6 mars 2003, comme le demande la salariée. Il sera fait observer que l'exigence d'un écrit comportant les mentions précisées précédemment pour les contrats de travail à durée déterminée découle d'une règle d'ordre public et ne constitue pas une présomption simple susceptible d'être renversée par la preuve contraire.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de requalification et alloué une indemnité de requalification laquelle ne peut être inférieure à un mois de salaire.

Sur la demande de requalification à temps plein ;

Selon l'article L. 3123'14 du code du travail, le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne :

1° la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application de l'article L. 3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois,

2° les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;

3° les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;

4° les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixé par le contrat.

En l'absence d'écrit, le contrat de travail est présumé à temps plein. Il est exact qu'il s'agit là d'une présomption simple que l'employeur peut renverser à la condition qu'il réussisse à établir que la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle était convenue d'autre part, et que la salariée n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition.

Outre que l'employeur n'apporte pas cette preuve par les quelques contrats communiqués et par les feuillets Guso au cours de la période de 2005 à 2010, la cour relève que la fiche de paie de mars 2004 fait mention de 204 heures de travail. Or, lorsque dans le cadre d'un prétendu contrat de travail à temps partiel, la durée de travail est portée au niveau de la durée légale ou conventionnelle, voire la dépasse, le contrat de travail est de plein droit qualifié de contrat de travail à temps plein à compter de la première irrégularité.

C'est donc à juste titre que les premiers juges ont requalifié la relation contractuelle de contrat de travail à durée indéterminée à temps plein. Le jugement sera confirmé sur ce point également.

Sur la demande de rappel de salaire ;

Mme [N] expose l'article 35 de la convention collective étendue des hôtels restaurants applicables énonce que les salaires doivent être établis sur la base 43 heures de travail effectif, l'article 35-2.1° n'excluant l'application de cette règle que lorsque les horaires sont fixés contractuellement sur une base inférieure à 39 heures. Elle invoque également l'application des majorations applicables à compter de la 36 ème heure.

C'est en vain que l'employeur soutient que la convention collective des hôtels restaurant n'est pas applicable alors qu'il a pour activité principale celle d'un bar ainsi qu'il le fait écrire et qu'il l'a mentionné sur des bulletins de salaire.

Toutefois, lorsque des contrats de travail à durée déterminée ont été requalifiés en contrat de travail à durée indéterminée, il incombe à la salariée d'établir qu'elle est restée à la disposition de l'employeur pendant les périodes interstitielles ainsi que le rappelle pertinemment le CGEA AGS [Localité 2]. Or, Mme [N] n'apporte aucun élément à cet égard, ainsi par exemple elle n'a fourni aucune prestation entre mai 2005 et mars 2006 entre novembre 2006 et novembre 2008 notamment.

Au regard des éléments précédemment relevés et compte tenu des éléments communiqués, dans la mesure où l'employeur devait régler des salaires sur la base d'un temps plein tel que le prévoit la convention collective applicable, et ce, en dehors des périodes interstitielles, dès lors que la preuve n'est pas rapportée que la salariée se tenait à sa disposition, la cour fixera la créance de Mme [N] au titre du rappel de salaires à la somme de 6273,58 euros à laquelle seront ajoutés les congés payés afférents.

Sur la demande au titre de la réglementation pour le travail de nuit ;

L'avenant N° 2 du 5 février 2007 sur l'aménagement du temps de travail évoque des dispositions spécifiques pour le travail de nuit passant par la mise en place de repos compensateur, de la vérification que le salarié dispose d'un moyen de transport pour rejoindre son domicile, d'une surveillance médicale accrue, notamment.

Il n'est pas établi en effet que la réglementation a été effectivement respectée à cet égard.

Le préjudice en résultant pour la salariée a fait l'objet d'une juste évaluation par le conseil de prud'hommes. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la prime de précarité ;

C'est à juste titre que les premiers juges ont, après avoir relevé qu'aucun contrat de travail à durée indéterminée n'a jamais été proposé à la salariée, accordé l'indemnité de précarité prévue à l'article L. 1243-8 du code du travail.

Sur la demande au titre du remboursement de la carte orange ;

Selon l'article L. 3261-2 du code du travail, l'employeur prend en charge, dans une proportion des conditions déterminées par voie réglementaire, le prix des titres d'abonnements souscrits par ses salariés pour leurs déplacements entre leur résidence personnelle et leur lieu de travail accompli au moyen de transports publics de personnes de service public, de location de vélos.

La salariée ne communique aucun élément pour justifier des frais engagés. Par ailleurs, les dispositions de l'article 12 de la convention collective applicable ont été prises en compte dans l'analyse du préjudice subi du fait du travail de nuit.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la demande au titre des repas et des consommations ;

C'est par une juste application des dispositions conventionnelles que les premiers juges ont reconnu le principe d'un dommage pour la salariée à ce titre et lui ont accordé 2000 €. Le jugement déféré sera confirmé.

Sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail ;

Les manquements de l'employeur, que la salariée avait soulignés aux termes d'une lettre du 1er octobre 2010 et que la cour a précédemment relevés, sont d'une telle gravité qu'ils rendaient impossible la poursuite des relations contractuelles.

La salariée a mis fin à la poursuite de cette relation par la lettre du 12 octobre 2010, cette rupture devant dans le contexte avoir les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que l'ont retenu les premiers juges.

Le jugement sera confirmé.

Sur les conséquences de la rupture ;

Mme [N] est effectivement fondée à l'obtenir une indemnité compensatrice de deux mois soit 6 379,43 euros outre les congés payés afférents, une indemnité de licenciement de 6 379,43 euros, un rappel de congés payés de 303,36 euros étant observé que, compte tenu des périodes interstitielles pour lesquelles la preuve n'est pas rapportée que la salariée s'est tenue à la disposition de l'employeur, la rémunération globale brute aurait dû atteindre 3036,36 euros pour la période du 1er juin 2010 au 12 octobre 2010.

Par ailleurs, compte tenu de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée, de son âge, de son ancienneté (7 ans et 5 mois), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour est en mesure d'allouer à Mme [N] la somme de 19 138,29 euros, en application de l'article L.1235-3 du Code du travail.

Sur le défaut d'information du DIF ;

La perte de chance de pouvoir utiliser les droits acquis au titre du droit individuel à la formation est nécessairement à l'origine un préjudice pour la salariée qui dans le cas présent peut soutenir qu'elle était susceptible de disposer de 271,6 heures, plafonnées à 120 heures.

Cette perte de chance sera correctement indemnisée par l'allocation d'une somme de 600 €.

Sur la demande au titre du travail dissimulé ;

En application de l'article L. 8221-5 du code du travail est réputé travail dissimulé, par dissimulation d'emploi salarié, le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité de déclaration préalable à l'embauche, de se soustraire à la délivrance de bulletins de paie ou de mentionner sur ce dernier un nombreux d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Encore faut il que soit établi le caractère intentionnel de l'abstention en cause.

Mme [N] soutient que l'employeur s'est abstenu intentionnellement de respecter tout à la fois les dispositions des articles L. 3243-2, R. 3243-1 du code du travail en ce qu'il n'a jamais mentionné la durée du travail effectif sur les fiches de paies émises avant décembre 2010, qu'à partir de 2008 le cumul d'heures sur l'année a été mentionné, qu'au surplus la mention était souvent fantaisiste.

Toutefois, si les dispositions légales et conventionnelles n'ont pas été respectées s'agissant notamment de l'exercice à temps plein d'une activité en dehors des périodes interstitielles, il n'est pas établi de ce seul fait que l'employeur a éludé le paiement des heures effectuées et cotisations afférentes, la cour relevant au contraire que l'employeur a rémunéré, de façon régulière 6,5 heures de travail effectuées par la salariée lors de chacune de ses prestations.

Il ne sera pas fait droit la demande de Mme [N] à ce titre.

Sur le mannequinat ;

S'appuyant sur les dispositions de l'article 7123-2 du code du travail selon lesquelles est considérée comme exerçant une activité de mannequin même si cette activité n'est exercée qu'à titre occasionnel toute personne qui est chargée soit de présenter au public directement ou indirectement par reproduction de son image sur tout support visuel ou audiovisuel un produit, un service. message publicitaire, Mme [N] relève que l'employeur a par reproduction de son image sur des flyers, présenté au public un message publicitaire, que ses prestations étaient distinctes de celles de son emploi de danseuse, qu'elle n'a pour autant pas été rémunérée pour cette activité salariée distincte.

A titre subsidiaire, elle souligne que les trois contrats de cession de son droit à l'image ne comportent aucune limitation temporelle, géographique et aucune exclusion, et sont nuls.

C'est en vain que la SA Pub Opéra soutient que la juridiction prud'homale n'avait pas compétence pour connaître de cette demande dès lors que ces contrats de cession étaient en réalité adossés au contrat de travail de la salariée.

Or ces contrats de cession de droit à l'image sont illicites en ce qu'ils ne comportent aucune limitation de la durée de l'exploitation de la dite image et surtout sont dépourvus de cause aucune contrepartie n'ayant été définie.

Mme [N] est fondée à réclamer des dommages et intérêts pour utilisation de son image à des fins publicitaires.

La cour lui allouera une indemnité de 2000 euros à cet égard.

Interdiction sera faite à la SA Pub Opéra de poursuivre l'exploitation de ces images sur quelque support que ce soit.

Sur la demande de condamnation in solidum du dirigeant de la SA Pub Opéra ;

Selon les dispositions combinées des articles 554 et 555 du code de procédure civile, peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité, ces mêmes personnes peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause.

Toutefois, l'article 555 est d'interprétation stricte dès lors qu'il déroge au double degré de juridiction. Il s'en déduit que si toute personne peut être mise en cause devant une cour d'appel par la voie de l'intervention forcée en cas d'évolution du litige, cette intervention n'est recevable que si elle est motivée par une circonstance révélée postérieurement au jugement entrepris et modifiant les données du litige.

Mme [N] soutient que M. [O] [B] a toujours été son interlocuteur, et l'unique décisionnaire en ce qui concerne la société en général et la relation contractuelle avec elle en particulier dès lors qu'il l'a engagée, gérait son emploi du temps, planifiait les dates et les horaires de ses prestations.

Les demandes de Mme [N] formulées à l'encontre de M. [O] [B] devant la cour d'appel dans le cadre d'une intervention forcée sont irrecevables en ce que les circonstances qu'elle invoque pour mettre en cause sa responsabilité, à savoir que celui-ci était son seul interlocuteur, qu'il l'a délibérément embauchée suivant des contrats de travail à durée déterminée sans lui proposer de contrats écrits réguliers, qu'il la rémunérait avec retard, qu'il gérait son emploi du temps, planifiait les dates et les horaires de ses prestations, étaient connues d'elle lors de l'instance devant le conseil de prud'hommes.

Sur la remise des documents sociaux ;

Mme [N] relève que la SA Pub Opéra n'a pas exécuté les condamnations prononcées par le conseil de prud'hommes, malgré l'exécution provisoire de droit attachée à un certain nombre d'entre elles. Outre qu'elle sollicite la liquidation de l'astreinte ordonnée par le conseil de prud'hommes par jugement du 5 décembre 2012 à la somme de 2250 €, elle sollicite des dommages-intérêts à hauteur de 10 000 € pour résistance abusive manifestée par la SA Pub Opéra tout à la fois pour exécuter les termes du jugement et pour lui délivrer documents en cause, ainsi qu'une nouvelle astreinte de 100 € par jour de retard et par document passé un délai de 15 jours après la notification de l'arrêt à intervenir et ce, sans limitation de durée, la cour se réservant la liquidation de l'astreinte.

Il est exact que le conseil de prud'hommes a, par jugement du 5 décembre 2012, fixé une astreinte provisoire de 50 € par jour et par document passé un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement dans la limite de 15 jours. Il n'est pas à utilement contesté que les documents en cause n'ont pas encore été remis.

Toutefois, la cour est saisie d'un appel concernant le seul jugement du 15 mai 2012 et ne peut en conséquence liquider une astreinte ordonnée par un autre jugement ultérieur de décembre 2012.

En tout état de cause, la SA Pub Opéra sera condamnée à communiquer un bulletin de salaire récapitulatif, un certificat de travail et une attestation destinée au pôle emploi conformes aux termes de l'arrêt à intervenir et ce dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Passé ce délai une astreinte provisoire de 100 € par jour et par document pendant un délai de deux mois sera prononcée.

Le juge de l'exécution compétent pourra être, en tant que de besoin saisi pour connaître de sa liquidation.

Sur les demandes d'indemnités en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

L'équité commande tout à la fois de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a accordé à Mme [N] une indemnité de 1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de lui allouer une nouvelle indemnité de 2500 euros sur le même fondement pour les frais exposés par lui en cause d'appel.

La SA Pub Opéra qui succombe dans la présente instance sera déboutée de sa demande à ce titre et condamnée aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par un arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré sauf à dire que les créances reconnues sont fixées au passif de la SA Pub Opéra et sauf en ce qu'il a accordé un rappel de salaire au titre des congés payés pour la période du 1er juin 2010 au 12 octobre 2010,

L'infirme sur ces points,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Rejette des débats des pièces communiquées par la salariée relatives à une procédure pénale pour travail dissimulé,

Dit que toute demande dirigée à l'encontre de M. [O] [B], intervenant forcé, est irrecevable,

Fixe la créance de Mme [N] au passif du redressement judiciaire de la SA Pub Opéra, en sus, aux sommes suivantes :

- 6273,58 euros au titre du rappel de salaire outre les congés payés afférents,

- 303,63 euros au titre de l'indemnité de congés sur la période du 1er juin au 12 octobre 2010,

- 600 euros pour la perte de chance de bénéficier du DIF,

- 2000 euros au titre des dommages et intérêts pour utilisation de son image à des fins publicitaires,

Déboute Mme [N] de sa demande d'indemnité au titre du travail dissimulé,

Ordonne la délivrance par la SA Pub Opéra en présence du commissaire à l'exécution du plan d'un bulletin de salaire récapitulatif, d' un certificat de travail et d'une attestation destinée au pôle emploi conformes aux termes du présent arrêt, sous astreinte de 100 € par jour et par document passé un délai d'un mois à compter la notification du présent arrêt et ce, pendant deux mois,

Renvoie les parties à se pourvoir, en tant que de besoin, devant le juge compétent pour connaître de la liquidation de l'astreinte,

Dit que le présent arrêt sera déclaré opposable au CGEA AGS [Localité 2] qui devra sa garantie à titre subsidiaire, pour les créances reconnues à l'exclusion de celles ayant trait aux dommages et intérêts pour exploitation de l'image, aux astreintes, aux indemnités en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SA Pub Opéra en présence du commissaire à l'exécution du plan à verser à Mme [N] une indemnité de 2500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SA Pub Opéra en présence du commissaire à l'exécution du plan de sa demande d'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SA Pub Opéra en présence du commissaire à l'exécution du plan aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 14/10058
Date de la décision : 02/11/2016

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°14/10058 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-02;14.10058 ?
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