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28/10/2016 | FRANCE | N°14/13658

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 11, 28 octobre 2016, 14/13658


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11



ARRET DU 28 OCTOBRE 2016





(n° , 8 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 14/13658



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Mai 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS 04 - RG n° 2012038448







APPELANTE



SA EUROSPORT, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qu

alité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 353.735.657 (Nanterre)



Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Représentée par Me Xavie...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRET DU 28 OCTOBRE 2016

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/13658

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Mai 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS 04 - RG n° 2012038448

APPELANTE

SA EUROSPORT, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 353.735.657 (Nanterre)

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Représentée par Me Xavier HENRY, avocat au barreau de PARIS, toque : P151

INTIME

Monsieur [A] [M]

[Adresse 2]

[Localité 2]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 3]

Représenté par Me Jean-Philippe DESTREMAU de la SELARL DESTREMAU ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0542

Représenté par Me Jérôme PAUVERT de la SELARL DESTREMAU ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0542

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Septembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Patrick BIROLLEAU, Président de la chambre, et Mme Michèle LIS SCHAAL, Présidente de chambre.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Patrick BIROLLEAU, Président de chambre

Mme Michèle LIS SCHAAL, Présidente de la chambre, chargée du rapport

M. Philippe FUSARO, Conseiller, désignée par Ordonnance du Premier Président pour compléter la Cour,

Greffier, lors des débats : Mme Patricia DARDAS

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Patrick BIROLLEAU, président et par Mme Patricia DARDAS, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Monsieur [A] [M], ancien sportif de haut niveau devenu organisateur de manifestations sportives, notamment de combats de boxe « Kickboxing » et d'autres sports de combat, a passé un accord avec la société Eurosport, qui exploite des chaînes de télévision spécialisées dans la retransmission d'événements sportifs, pour qu'elle diffuse les manifestations qu'il organise. Le premier événement diffusé fut une soirée de boxe « pied-poing » organisée au [Établissement 1] de [Localité 4] le 25 septembre 2004.

Le 25 août 2010, Monsieur [M] a réclamé à la société Eurosport la somme de deux millions d'euros au titre des droits de retransmission et de diffusion qu'il estimait lui être dus pour la diffusion de treize de ces événements sportifs. Par lettre du 17 septembre 2011, Eurosport lui a répondu qu'une telle demande était irrecevable en ce qu'elle ne reposait sur « aucune réalité juridique, économique ou factuelle » et a indiqué qu'elle ne souhaitait plus, dans ces conditions, diffuser les soirées de Monsieur [M].

Par assignation délivrée à la société Eurosport le 19 septembre 2011, Monsieur [M] a saisi le tribunal de commerce de Nanterre d'une demande visant à reconnaître qu'il était titulaire des droits d'exploitation sur les manifestations diffusées par la société Eurosport et que cette dernière avait mis fin brutalement à leur relation commerciale.

Par jugement en date du 9 mai 2012, le tribunal de commerce de Nanterre s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris devant lequel Monsieur [M] a demandé de :

- fixer à la somme de 1.560.000 euros HT le montant qui lui était dû par la société Eurosport SA, au titre de l'exploitation par cette dernière des droits qu'il tient de l'article L.333-1 du code du sport, à raison de la diffusion et de rediffusion de ses manifestations ;

- dire que la société Eurosport a brutalement mis fin aux relations commerciales qu'elle entretenait avec lui depuis plusieurs années et condamner à ce titre la société Eurosport à lui payer la somme de 160.000 euros HT sur le fondement de l'article L.442-6, I 5° du code de commerce ;

- condamner la société Eurosport à restituer à M. [M] les masters des manifestations captées par lui, sous astreinte de 15.000 euros par jour de retard passé un délai de six jours à compter de la signification de la décision.

Par jugement en date du 11 juillet 2013, le tribunal de commerce de Paris a nommé Maître [K] [O], huissier audiencier près le tribunal de commerce de Paris, avec la mission de déterminer précisément le nombre de manifestations organisées par Monsieur [M] et diffusées par la société Eurosport. L'huissier de justice n'a cependant pas pu visualiser les archives vidéos que ni Eurosport, ni Monsieur [M] n'ont pu fournir et n'a pas pu vérifier l'existence des 13 manifestations indiquées par ce dernier.

L'instruction de l'affaire ayant révélé l'existence de la société JOALSMA, dont M. [M] est le gérant et qui aurait pris en charge la réalisation des manifestations sportives, la société Eurosport a contesté l'intérêt à agir de Monsieur [M].

Par jugement rendu le 27 mai 2014, le tribunal de commerce de Paris a :

- reconnu à Monsieur [M] la qualité d'organisateur des événements sportifs en la cause ;

- jugé qu'il détenait la propriété du droit d'exploitation de ces manifestations en application de l'article L.333-1 du code des sports ;

- déclaré en conséquence Monsieur [M] bien-fondé à agir pour la défense de ce droit ;

- dit Monsieur [M] bien fondé à demander réparation du préjudice qu'il a subi du fait de l'abus par la société Eurosport de sa position dominante face à la situation de dépendance de Monsieur [M], ce, en maintenant l'ambiguïté sur la rétribution de la cession des droits d'exploitation sans tenter d'obtenir un accord de ce dernier sur les conditions de cette cession ;

- désigné Madame [M] [I] en qualité d'expert judiciaire afin de déterminer avec précision le montant de l'indemnité que devra verser la société Eurosport, indemnité qui repose sur un montant moyen attribué à chacune des manifestations retransmises par la société Eurosport ;

- reconnu bien fondé Monsieur [M] à demander, sur le fondement de l'article L.442-6 du code de commerce, une indemnité pour rupture brutale par la société Eurosport de leur relation commerciale, indemnité qui sera fixée en même temps que les dommages et intérêts ;

- condamné la société Eurosport à payer à Monsieur [M] la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Le 25 septembre 2014, Monsieur [M] a assigné la société Eurosport en référé devant le Président du tribunal de commerce de Nanterre pour obtenir la somme de 40.000 euros à valoir sur les indemnités prononcées par le Tribunal de commerce de Paris et la somme de 20.000 euros pour faire face au frais de la procédure au fond. Par une ordonnance du 30 octobre 2014, le Président du tribunal de commerce de Nanterre s'est déclaré incompétent au profit du conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Paris.

Par une ordonnance du 29 janvier 2015, le conseiller de la mise en l'état de la cour d'appel de Paris a condamné la société Eurosport à verser à M. [M] la somme de 40.000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, la somme de 15.000 euros pour faire face au frais de procédure, la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Eurosport a régulièrement interjeté appel de cette décision le 27 juin 2014.

Prétentions des parties

La société Eurosport, par ses dernières conclusions signifiées le 29 juin 2016, demande à la Cour de :

À titre principal,

- dire, au visa de l'article 122 du code de procédure civile, que M. [M] ne démontre pas sa qualité à agir ;

- débouter M. [M] de toutes ses demandes ;

À titre subsidiaire,

- dire que la société Eurosport n'est redevable d'aucune somme à l'égard de Monsieur [M] au titre de la retransmission des manifestations sportives ;

- dire que la société Eurosport n'a pas rompu brutalement les relations commerciales avec Monsieur [M] ;

À titre très subsidiaire,

- dire que les demandes pécuniaires de Monsieur [M] ne sont pas justifiées et l'en débouter ;

En tout état de cause,

- condamner Monsieur [M] à restituer à la société Eurosport la somme de 57.000 euros perçue en exécution de l'ordonnance du Conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Paris du 29 janvier 2015 ;

- condamner Monsieur [M] à verser à la société Eurosport la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir, à titre principal, que Monsieur [M] n'apporte pas la preuve de sa qualité d'organisateur des événements en cause puisque c'est avec la société JOALSMA que la société Eurosport a conclu les contrats versés au débat. De même, elle rappelle que Monsieur [M] ne fait état d'aucune comptabilité justifiant une quelconque activité d'organisation d'événements sportifs. Elle souligne en outre que la société JOALSMA ne peut être considérée comme un simple prestataire de services auquel Monsieur [M] aurait eu recours, en l'absence d'un tel contrat de prestation de services.

Elle soutient, à titre subsidiaire, que Monsieur [M] ne rapporte pas la preuve que les relations contractuelles qu'il a entretenues avec la société Eurosport devaient faire l'objet d'une rémunération au titre des droits de retransmission. Elle rappelle que ce dernier n'a pu produire aucune facture, mais seulement des attestations non signées de son chauffeur et de son interprète qui, ayant assisté à une réunion, auraient compris que Monsieur [M] était rémunéré. Elle maintient que les diffusions gratuites sont une pratique courante dans le domaine sportif pour donner une visibilité à des sports peu médiatisés.

Elle expose également qu'elle n'a pas rompu brutalement la relation commerciale avec Monsieur [M] au sens de l'article L.442-6 I 5°, dès lors que cette relation était trop précaire et distendue pour être considérée comme établie. Elle rappelle qu'elle ne reconnaît avoir diffusé que quatre manifestations organisées par Monsieur [M]. Elle soutient, en toute état de cause, que c'est Monsieur [M] qui est à l'origine de la rupture puisqu'en réclamant la somme de 2 millions d'euros, il a modifié les obligations essentielles des contrats existant entre les deux parties.

Elle prétend enfin, à titre infiniment subsidiaire, que la somme de 1.560.000 euros HT réclamée par Monsieur [M] au titre des droits d'exploitation est démesurée en raison de la faible notoriété du « kickboxing ».

Monsieur [M], par ses dernières conclusions signifiées le 29 juin 2016, demande à la Cour de :

- confirmer le jugement rendu le 27 mai 2014 par le tribunal de commerce de Paris ;

- débouter la société Eurosport de l'ensemble de ses demandes, fins et moyens ;

- condamner la société Eurosport à lui payer la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Il fait valoir que la société Eurosport l'a, à plusieurs reprises, identifié comme organisateur des événements qu'elle diffusait, dans des courriers et articles de presse. Il soutient également n'avoir fait que déléguer la logistique et la gestion matérielle de ces manifestations à la société JOALSMA tout en en restant l'organisateur officiel. Il rappelle que c'est grâce à son expérience en tant qu'ancien champion de kickboxing qu'il a pu organiser lui-même les manifestations diffusées par la société Eurosport et que la société JOALSMA n'a fait qu'exécuter. Il souligne enfin que le milieu du sport de combat le considère comme le seul organisateur de ces manifestations.

Il soutient également que, même si la société Eurosport ne lui a fait signé aucun contrat, il ne faisait aucun doute que les parties avaient convenu que la retransmission des manifestations donnerait lieu à une rémunération. Il indique ainsi que le prétendu accord « gagnant-gagnant » mis en avant par la société Eurosport n'existait pas car il n'a tiré que de faibles profits de l'organisation de ses événements et a dû prendre à sa charge les frais de captation.

Concernant le montant de cette rémunération, il rappelle qu'elle doit être fixée en tenant compte notamment de l'audience escomptée, et souligne que l'audimat de ces manifestations était élevé. A titre de comparaison, il estime qu'en moyenne la rétribution de la diffusion des combats par les chaînes sportives s'élève à 380.887 euros par combat.

[M] maintient que la société Eurosport a rompu brutalement leur relation qui était parfaitement établie au vu des 11 manifestations diffusées par cette dernière en 6 ans.

SUR CE 

Sur les droits d'exploitation

Sur l'intérêt à agir de Monsieur [M]

Considérant que l'article L.333-1 du code du sport dispose : « les fédérations sportives ainsi que les organisateurs de manifestations sportives mentionnées à l' article L.331- 5 sont propriétaires du droit d'exploitation des manifestations ou compétitions ou compétitions sportives qu'ils organisent » ; que l'article L.331-5 du même code prévoit que 'toute personne physique ou morale de droit privé, autre que les fédérations sportives, qui organise une manifestation ouverte aux licenciés d'une discipline qui a fait l'objet d'une délégation de pouvoir conformément à l'article L.131-14 et donnant lieu à remise de prix en argent ou en nature dont la valeur excède un montant fixé par arrêté du ministre chargé des sports, doit obtenir l'autorisation de la fédération délégataire concernée.' ; que les droits d'exploitation comprennent notamment ceux relatifs à la retransmission audiovisuelle des images et/ou sons captés lors de ces manifestations ;

Considérant qu'Eurosport dénie à Monsieur [M] la qualité d'organisateur de manifestations sportives au motif que c'est la société JOALSMA, dont Monsieur [M] est le gérant, qui a assuré l'organisation et la réalisation de ces manifestations et que c'est avec cette société qu'Eurosport a contracté comme le démontrent les contrats conclus avec d'autres prestataires ;

Considérant qu'il n'est pas contesté par Monsieur [M] qu'il avait confié à la société JOALSMA l'organisation matérielle des manifestations, comprenant la location des salles, la réalisation des captations d'images par des entreprises spécialisées, la présence et la rémunération des boxeurs, les relations avec les entreprises intervenant pour la communication liée aux manifestations et l'ensemble des accords afférents à la réalisation de chaque événement ; que l'article L.333-1 du code du sport n'interdit pas à l'organisateur de sous-traîter à un tiers tout ou partie de l'organisation d'événements sportifs ; que, si Eurosport connaissait l'existence de la société JOALSMA - comme le démontre sa lettre du 23 mai 2006 adressé à « Monsieur [A] [M] JOALSMA-Action Production 2 » - c'est avec Monsieur [M] que la chaine de télévision était en relation régulière, ainsi que cela ressort :

- de l'attestation établie par Eurosport le 28 avril 2010 : 'Eurosport SA reconnaît par la présente avoir déjà collaboré avec M. [A] [U], organisateur et promoteur de soirées de boxe pieds-poings, depuis 2004, pour la diffusion de ses évènements sur les chaînes de notre groupe, Eurosport et Eurosport 2' ;

- du courrier du 7 novembre 2008, signé par Monsieur [C] [B], d'Eurosport, indiquant : « J'ai le plaisir de vous confirmer notre intérêt pour la diffusion de votre soirée intitulée ' The diamond Fight World Tour 1 » organisée le 15 décembre 2008 au World Place » ;

Qu'il s'en déduit qu'Eurosport a reconnu à Monsieur [M] la qualité d'organisateur et de promoteur de soirées de boxe pieds-poings ; que l'ensemble de ces éléments établissent que Monsieur [M] avait bien la qualité d'organisateur de manifestations sportives au sens de l'article L.333-1 du code du sport, qualité lui conférant la propriété du droit d'exploitation de ces manifestations ; que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ;

Sur la cession des droits d'exploitation

Considérant que Monsieur [M] fait valoir qu'il n'a, à aucun moment, été question de mettre en oeuvre une formule d' 'échange marchandise', formule en l'espèce dépourvue de sens compte tenu de l'impact limité des retransmissions sur les recettes générées par les manifestations concernées ;

Qu'Eurosport soutient qu'aucun contrat de rémunération n'a été signé entre les parties, que la relation entre la chaîne de télévision et Monsieur [M] s'est établie sur la base d'une cession gratuite des droits d'exploitation, et que l'équilibre du contrat de fait résultait de l'échange de ces droits en contrepartie de la notoriété et de la visibilité que la retransmission sur la chaîne sportive donnait à ces événements ;

Considérant qu'il appartient à Monsieur [M], demandeur à l'action, de rapporter la preuve du bien fondé de ses prétentions ;

Considérant qu'il est constant qu'aucun contrat n'a été conclu entre les parties ; qu'aucun courrier échangé n'évoque l'existence d'une rémunération, ni un quelconque litige sur cette question, ni une demande de la part de Monsieur [M], qui n'a réclamé que le 25 août 2010, soit après six années de partenariat, le paiement de droits de retransmission et de diffusion des émissions diffusées de 2004 à 2008 ; que les attestations versées aux débats par l'intimé (pièces n° 14 et 15), dépourvues de date précise des faits relatés et interprétés par leurs auteurs, ne présentent pas de caractère probant suffisant d'un quelconque engagement de la chaîne de télévision de payer des droits d'exploitation ; que Monsieur [M] ne démontre pas que les diffusions intervenues avaient nécessairement vocation à donner lieu à rémunération, alors que l'expertise de Madame [I] établit au contraire que certains événements de boxe pieds-poings étaient diffusés par Eurosport à titre gratuit ; que, dès lors, force est de constater que les parties se sont, de fait, durablement inscrites dans une relation à titre gratuit ; qu'en conséquence, la Cour dira que Monsieur [M] ne rapporte pas la preuve de son droit à rémunération au titre de la cession de ses droits d' exploitation, déboutera ce dernier de sa demande de ce chef et infirmera en ce sens le jugement entrepris ;

Sur la rupture brutale de la relation commerciale établie

Considérant que l'article L.442-6 I, 5° du code de commerce dispose qu''engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...)

5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure.' ;

Considérant qu'il est constant que les parties ont collaboré à partir de 2004 ; que les événements sportifs organisés par Monsieur [M] et retransmis par Eurosport ont été au nombre de 8 selon l'expert et de 11 selon Monsieur [M], soit un nombre significatif pour des manifestations sportives de cette nature ; qu' Eurosport a elle-même reconnu l'existence d'une relation suivie :

- dans son courrier émanant de Monsieur [B] [T] en date du 28 avril 2008 : 'Eurosport reconnait par la présente avoir déjà collaboré avec M. [M], organisateur et promoteur de soirées de boxe pieds poings depuis 2004 pour la diffusion de ses événements sur les chaînes de notre groupe Eurosport. Nous souhaitons à M. [M] beaucoup de succès dans ses activités de promoteur et espèrons collaborer de nouveau dans un futur proche sur tout projet digne d' intérêt.' ;

- par lettre du 19 août 2010 à Monsieur [M] : 'Eurosport reconnaît, par la présente, son intention de poursuivre sa collaboration avec votre organisation pour la diffusion d'évènements de boxe pieds-poings.' ;

Qu'il se déduit de ces éléments qu'existait entre les parties une relation continue et établie ;

Considérant que, par lettre du 17 septembre 2010, en réponse à la demande de Monsieur [M] du 25 août 2010 réclamant un montant de deux millions d'euros, Eurosport a indiqué qu'elle 'ne souhaitait plus, dans ces conditions nouvelles, diffuser les soirées de Monsieur [M]' ; que cette lettre constitue une notification de rupture ; que la rupture était dépourvue du moindre préavis ; que Monsieur [M] pouvait néanmoins espérer une poursuite de la relation, ainsi que s'y était engagée Eurosport quelques jours plus tôt par sa lettre du 19 août 2010 ; que la rupture brutale des relations commerciales au sens de l'article L.442-6 du code de commerce est, dans ces conditions, caractérisée ; que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé sur ce point ;

Considérant que, les premiers juges n'ayant pas statué sur le montant de la réparation due à Monsieur [M] de ce chef, il convient de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce ;

Considérant que l'équité impose de condamner dès à présent la société Eurosport à payer à Monsieur [M] la somme de 10.000 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile au titre de la présente instance d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a reconnu à Monsieur [M] un droit à indemnité au titre de la cession de ses droits d'exploitation,

CONDAMNE la société Eurosport à payer à Monsieur [M] la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamne aux dépens dont distraction au profit de la SELARL DESTREMAU ASSOCIES conformément aux dispositions de l' article 699 du code de procédure civile,

ORDONNE le retour du dossier au tribunal de commerce de Paris.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 14/13658
Date de la décision : 28/10/2016

Références :

Cour d'appel de Paris J2, arrêt n°14/13658 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-28;14.13658 ?
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