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27/10/2016 | FRANCE | N°16/04086

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 27 octobre 2016, 16/04086


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 9



ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2016



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/04086



Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 02 Février 2016 - RG n° 15/14447



APPELANT



Monsieur [Q] [X]

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 1]



Comparant

Représ

enté par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assisté par son avocat plaidant Me Guillaume-Denis FAURE de la selarl W&S, avocat au barreau de PARIS, toque L215



INTIMÉS



1) LE...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2016

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/04086

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 02 Février 2016 - RG n° 15/14447

APPELANT

Monsieur [Q] [X]

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 1]

Comparant

Représenté par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assisté par son avocat plaidant Me Guillaume-Denis FAURE de la selarl W&S, avocat au barreau de PARIS, toque L215

INTIMÉS

1) LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

en ses bureaux [Adresse 2]

[Adresse 2]

2) SCP [Q] - [Q], prise en la personne de Maître [D] [Q], ès-qualités de Mandataire Liquidateur de la société CLINIQUE [Établissement 1],

ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Jean-Paul PETRESCHI de l'AARPI SAINT-LOUIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0079

3) SAS CLINIQUE [Établissement 1]

immatriculée au RCS de PARIS sous le n° [Établissement 1]

ayant son siège social [Adresse 4]

[Adresse 4]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

4) SAS INA

ayant son siège social [Adresse 5]

[Adresse 5]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Septembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Madame Michèle PICARD, Conseillère

Madame Christine ROSSI, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Pauline ROBERT

MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par M. BRISSET-FOUCAULT, Avocat Général, qui a fait connaître son avis.

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François FRANCHI, président et par Mme Pauline ROBERT, greffier présent lors du prononcé.

*

La Clinique [Établissement 1] exploitait une clinique à [Adresse 4]. Monsieur [Q]. [X] a été président de la clinique du 2 juillet 2011 au 2 janvier 2014.

Les actions de la clinique ont été cédées par le groupe Kapa Santé, jusqu'alors actionnaire de la clinique, le 10 avril 2014 avec rétroactivité au 1er janvier 2014.

Le 19 février 2015 la clinique a déposé une déclaration de cessation des paiements aux fins d'ouverture d'une liquidation judiciaire.

Un jugement du 23 février 2015 a ouvert une procédure de liquidation judiciaire et a notamment désigné la Scp [Q], prise en la personne de Maître [D] [Q], administrateur judiciaire. La date de cessation des paiements a été fixée au 23 août 2013.

Par déclaration déposée le 9 mars 2015, monsieur [X] a formé tierce opposition à ce jugement au motif qu'il était président de la clinique à la date à laquelle la cessation des paiements a été fixée.

Par jugement rendu le 2 février 2016 le tribunal de commerce de Paris a déclaré l'action recevable et a débouté monsieur [X] de sa tierce opposition, confirmant ainsi la date de cessation des paiements.

Le tribunal a notamment relevé que le passif exigible fin août 2013 était de 700.000 euros et fin décembre 2013 de 1.200.000 euros, ces sommes représentant les dettes fournisseurs, sociales et fiscales tout en ne prenant pas en compte l'ensemble des dettes échues. Au regard de ce passif le tribunal a constaté que la société n'avait pas de réserve disponible suffisante pour couvrir le passif exigible.

Monsieur [Q] [X] a interjeté appel de cette décision le 15 février 2016.

***

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 20 septembre 2016 il demande à la cour d'appel de :

- Infirmer en toutes ses dispositions le jugement attaqué ;

Statuant à nouveau

- Modifier le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 23 février 2015 en ce qu'il a fixé la date de cessation des paiements de la société Clinique [Établissement 1] au 23 août 2013,

- Juger que la société Clinique [Établissement 1] n'était pas en état de cessation des paiements entre le 30 juin 2013 et le 10 avril 2014,

Par conséquent

- Fixer la date de cessation des paiements de la Société Clinique [Établissement 1] postérieurement au 10 avril 2014,

- Condamner la Société Clinique [Établissement 1] payer à Monsieur [X] la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la Société Clinique [Établissement 1] aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître François Teytaud dans les conditions de l'article 699 du CPC .

***

La Scp [Q] prise en la personne de Maître [Q] a signifié ses conclusions par voie électronique le 7 septembre 2016. Elle demande à la cour d'appel de :

- Constater que la société Clinique [Établissement 1] était bien en état de cessation des paiements dès 2013 et en toute hypothèse, à la date retenue dans le jugement du 23 février 2015, le 23 août 2013,

En conséquence,

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 2 février 2016,

Y ajoutant, condamner Monsieur [X] à verser en cause d'appel la somme de 5.000 euros à la Scp [Q], es qualités, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- Débouter l'appelant de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Le condamner aux entiers dépens du présent incident.

***

Le ministère public présent à l'audience a conclu au rejet de la demande.

SUR CE

Monsieur [X] fait valoir que durant la période pendant laquelle la Clinique était filiale du groupe Kapa Santé elle n'était pas en état de cessation des paiements. Elle disposait en septembre 2013 d'un actif disponible constitué par notamment le poste client, qui constitue un actif disponible en l'occurrence car il est encaissé à bref délai, soit 451.738 euros, les stocks mobilisables soit 155.839 euros et 3.769 euros de disponibilités. Il convient également de prendre en compte selon lui le soutien financier du groupe Kapa Santé ainsi qu'il ressort d'une lettre du 3 mai 2013. Ce soutien financier constitue des réserves de crédit. Le groupe Kapa a ainsi apporté en 2012 et 2013 la somme de 2.705.533 euros.

Pour ce qui concerne le passif exigible seules les dettes fournisseurs échues doivent être prises en compte en raison du moratoire sur les dettes URSSAF et la taxe sur les salaires des années 2012 à 2014. Au 30 septembre 2013 les dettes fournisseurs étaient de 265.078 euros et de 202.173 euros au 31 décembre 2013.

Il ajoute que le cabinet Grant Thornton qui avait initié des procédures d'alerte sur les exercices 2013 et 2014 les a ensuite retirées.

La Scp [Q] fait valoir que la situation financière de la société était gravement compromise avec des dettes de 4.696.7899 euros fin 2013, une situation nette négative de 3.141.942 euros à la même date et une perte comptable de 1.381.264 euros. L'étude comparée des années 2012 et 2013 montre une aggravation importante de la situation. Elle n'a pas été en mesure de reconstituer ses capitaux propres depuis 2011 et n'a donc pas satisfait à l'obligation légale de l'article L 223-42 du code de commerce.

Pour ce qui est du passif exigible la clinique avait une dette fiscale de taxe sur les salaires de 592.995 euros le 6 janvier 2015 que, malgré plusieurs mises en demeure en 2013 et 2014, elle n'a pas payé et il n'est pas établi que des délais aient été accordés. Elle avait également des dettes sociales pour un montant de 1.643.831 euros depuis 2012; une dette de 404.059 euros de cotisations Humanis depuis 2012, et quantité de dettes envers les fournisseurs.

La Scp [Q] ajoute que l'actif disponible tel que calculé par monsieur [X] est à relativiser puisqu'il tient compte d'éléments non constitutifs d'un actif disponible, que les créances CPAM mentionnées par monsieur [X] ne sont pas que des créances CPAM mais également des créances mutuelles et caisses et ne peuvent donc être considérées comme un actif disponible.

Ainsi l'actif disponible au 30 juin 2013 était de 385.876 euros pour un passif exigible de 555.349 euros selon monsieur [X] lui même.

Enfin, selon la Scp [Q] le soutien financier promis par le groupe Kapa Santé ne répond pas aux exigences relatives à la réserve de crédit à prendre en compte pour déterminer la cessation des paiements.

La cour rappelle qu'une société est en état de cessation des paiements lorsqu'elle ne peut plus faire face à son passif exigible avec son actif disponible. L'actif disponible peut notamment être constitué par des réserves de crédits immédiatement mobilisables. Quant au passif exigible il est constitué des dettes exigibles immédiatement, les moratoires de la part des créanciers diminuant le passif exigible.

En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats que la société Clinique [Établissement 1] était redevable de taxe sur les salaires pour un montant 451.643 euros au 16 avril 2013 pour les années 2010, 2011 et 2012 et que le paiement de ces taxes qui aurait, selon monsieur [X], fait l'objet d'un moratoire consenti par l'administration fiscale, n'a pas été régularisé puisque sur les 36 échéances prévues seules 3 ont été honorées en septembre, octobre et novembre 2013. La cour note que l'existence d'un moratoire n'est pas établie et que l'absence de poursuites du Trésor est insuffisant à prouver l'existence de ce moratoire et l'absence d'exigibilité de ces taxes. La cour note également qu'aucune des échéances 2013 de taxe sur les salaires n'a été payée hormis celle de septembre 2013.

Pour ce qui est des dettes sociales la cour constate que l'Urssaf a déclaré une créance de 1.643.831, 39 euros représentant des impayés depuis août 2012 que l'organisme Humanis a déclaré au titre des cotisations Arrco une créance de 404.059, 66 euros au titre des impayés depuis le 2ème trimestre 2012.

Un moratoire a certes été accepté par l'Urssaf contre cautionnement du groupe Kapa Santé mais seulement en mai 2014 et la cour relève que la clinique a été cédée en avril 2014 et que le moratoire n'a pas été tenu.

Pour ce qui est des autres dettes, il existait au jour de la date de cessation des paiements fixée par le tribunal de nombreux impayés qui ressortent des déclarations de créances et qui s'élèvent à 700.000 euros selon les déclarations produites par la Scp [Q]..

La cour peut admettre que certaines de ces créances fournisseurs n'étaient pas exigibles dans la mesure où ces créanciers avaient le groupe Kapa Santé pour client et notamment ses autres établissements cliniques et ne souhaitaient pas le perdre en exigeant un paiement immédiat. Cependant ce ne peut être le cas pour la totalité des créances déclarées et il convient donc d'estimer que la moitié des factures impayées doivent être considérées comme exigibles.

Le total du passif exigible s'élève donc selon les estimations à la somme minimum de 750.000 euros.

Pour ce qui est de l'actif disponible la cour relève que monsieur [X] comptabilise les stocks pharmacie qui seraient selon lui réalisables en moins de 30 jours et à leur entière valeur, soit 185.892 au 30 décembre 2013 et 155.102 euros au 30 juin 2013. La cour relève en premier lieu que cette affirmation ne repose que sur un courriel indiquant à monsieur [X] que les 'dispositifs médicaux' peuvent être rachetés par une pharmacie du groupe Kapa à court délai mais seulement ceux qui ne seraient pas abîmés ou périmés.

La cour ne dispose d'aucune information sur l'état de ces stocks et sur le pourcentage de stocks concernés par ce courriel..

La cour relève également que les produits pharmaceutiques sont soumis à une législation stricte et que la cession des stocks de médicaments par une clinique est subordonnée à la législation qui prévoit que certains produits doivent obligatoirement être détenus par un établissement de santé. La Clinique n'envisageant pas alors d'arrêter son activité elle ne pouvait en tout état de cause céder la totalité de ses stocks.

La cour ne prendra donc pas en compte ces stocks dans l'actif disponible

Sont également inclues dans l'actif disponible par monsieur [X] des créances clients pour un montant de 449.166 euros au 30 septembre 2013 et 416.453 euros au 31 décembre 2013. La cour relève cependant avec l'intimée que ces montants représentent seulement en partie les créances sur les caisses et mutuelles lesquelles sont effectivement recouvrables rapidement. Or ces créances s'élèvent en fait à 260.354 euros au 31 décembre 2013 et 189.087 euros au 30 juin 2013.

Ainsi l'actif disponible s'élève au 31 décembre 2013 à 405.819 euros comme le soutient la Scp [Q] alors que le passif exigible s'élève à plus de 750.000 euros.

L'actif disponible proprement dit étant nettement inférieur au passif exigible, il convient d'examiner si le soutien financier dont se prévaut monsieur [X] de la part du groupe Kapa Santé constitue un actif disponible.

Ce soutien est matérialisé par une lettre de la société Kapa Santé adressée à la Clinique [Établissement 1] qu'elle détient à 100% qui confirme que 'nous lui apporterons le soutien financier nécessaire pour lui permettre de poursuivre normalement son activité sur l'exercice 2013 et jusqu'au 30/06/2014 dans le principe de continuité d'exploitation'.

Il est constant que la société Kapa Santé a apporté à la Clinique [Établissement 1] un soutien financier qui s'est matérialisé par des apports en trésorerie en 2012, 2013 et 2014, sommes inscrites en compte courant au profit de Kapa Santé . Par la suite ces comptes courants ont fait l'objet non d'un abandon mais d'une cession de créance au bénéfice du cessionnaire avec clause de retour à meilleure fortune. La société Kapa santé a également cautionné le plan de remboursement de 24 mois des dettes de l'Urssaf pour un montant de 620.674, 15 euros, et qu'elle s'est portée caution auprès de la BRED pour deux prêts d'un montant total de 900.000 euros, le montant de la caution n'étant pas précisé.

La société Kapa s'est en outre engagé dans l'acte de cession à apporter 300.000 euros dans les douze mois afin de payer la créance de l'Urssaf qui l'avait assignée en redressement judiciaire le 7 janvier 2014.

La cour relève au regard de ce soutien financier que le passif exigible de la Clinique avait continué de croître en 2013 et n'avait pas été résorbé par la maison mère contrairement à ses engagements et malgré ses apports, manifestement insuffisants.

Il convient donc de considérer que la réserve de crédit dont disposait la Clinique de la part de la maison mère était insuffisant à assurer un actif susceptible de résorber le passif exigible.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris.

La Scp [Q] sollicite le paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il convient donc de faire droit à la demande.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement rendu le 2 février 2016 par le tribunal de commerce de Paris,

Condamne monsieur [Q] [X] à payer à la Scp [Q] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Clinique Paris-Montmartre la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamne monsieur [Q] [X] aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Pauline ROBERT François FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 16/04086
Date de la décision : 27/10/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°16/04086 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-27;16.04086 ?
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