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26/10/2016 | FRANCE | N°15/10673

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 26 octobre 2016, 15/10673


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 26 Octobre 2016

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/10673 CH



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY RG n° 15/00142





APPELANT

Monsieur [F] [A]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1]
r>représenté par Me Nathalie CLAIR, avocat au barreau de TOULOUSE





INTIMEE

SAS CARREFOUR HYPERMARCHES

[Adresse 4]

[Adresse 5]

[Adresse 6]

N° RCS : 451 321 335

représentée par Me Céci...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 26 Octobre 2016

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/10673 CH

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY RG n° 15/00142

APPELANT

Monsieur [F] [A]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1]

représenté par Me Nathalie CLAIR, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

SAS CARREFOUR HYPERMARCHES

[Adresse 4]

[Adresse 5]

[Adresse 6]

N° RCS : 451 321 335

représentée par Me Cécile CURT, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Septembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Céline HILDENBRANDT, Vice-présidente placée, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Benoît DE CHARRY, Président de chambre

Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente à la chambre

Madame Céline HILDENBRANDT, Vice-présidente placée

Greffier : Mme Eva TACNET, greffière lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Benoît DE CHARRY, président et par Madame Eva TACNET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Monsieur [F] [A] a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée en date du 1er octobre 1987 par la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS, pour des fonctions non précisées par les parties.

À compter du 8 octobre 2012, Monsieur [A] est muté au magasin CARREFOUR MARSEILLE GRAND LITTORAL en qualité de directeur.

La société CARREFOUR HYPERMARCHES occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Par courrier recommandé en date du 16 juin 2014, Monsieur [A] a été licencié pour faute grave.

Contestant son licenciement, Monsieur [A] a saisi le 27 janvier 2015 le conseil de prud'hommes d'Evry qui, par jugement du 20 octobre 2015, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.

Monsieur [A] a régulièrement relevé appel de ce jugement et, à l'audience du 19 septembre 2016, reprenant oralement ses conclusions visées par le greffier, demande à la cour d'infirmer le jugement et de condamner la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS à lui payer les sommes suivantes :

- 43 872,49 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 4387,24 euros à titre de congés payés afférents,

-263 234,93 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 6 091,07 euros au titre de la mise à pied à titre conservatoire outre 609,10 euros à titre de congés payés afférents,

- 430 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société CARREFOUR HYPERMARCHÉS a repris oralement à l'audience ses conclusions visées par le greffier et demande à la cour de confirmer le jugement déféré, de débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à lui payer :

- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour action dolosive,

- 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, développées oralement lors de l'audience.

MOTIFS

Sur le licenciement

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée :

' Nous sommes donc amenés à vous notifier votre licenciement pour faute grave, compte tenu des éléments qui vous sont reprochés et que nous vous rappelons ci après.

En votre qualité de directeur d'hypermarché, vous disposez des pouvoirs les plus étendus pour assurer la direction administrative, économique, financière du magasin dont vous avez la charge.

Or nous avons découvert, très récemment, vos agissements particulièrement graves et frauduleux concrétisés par le fait d'avoir abusé de vos fonctions et de votre autorité en donnant des instructions illicites au personnel en charge des paie de votre magasin de [Adresse 7] en vue d'échapper à la quotité saisissable de votre salaire et opérer ainsi une fraude aux droits de vos créanciers.

En effet, fin avril 2014, vous nous avez informé que votre magasin [Adresse 7] avait reçu une notification d'ordonnance de contrainte rendue par le Tribunal d'Instance d'Aix en Provence le 14 avril 2014, à propos de la saisie de vos rémunérations .

Le juge d'instance a ainsi déclaré notre société personnellement débitrice des retenues qui auraient dû être opérées et en conséquence, a décidé de nous condamner à verser au Régisseur du Tribunal d'Instance d'Aix en Provence la somme de 270 125,34 euros et ce, au motif qu'en notre qualité d'employeur et de tiers saisi, il avait été adressé au greffe des sommes très inférieures à celles qui devaient être retenues au titre des actes de saisie rémunérations établis le 17 novembre 2011, à votre encontre.

Vous nous avez alors assuré que vous disposiez de tous les éléments justificatifs nous permettant de former valablement une opposition à cette ordonnance de contrainte, ce qui a pu être fait in extremis dans le délai requis, compte tenu de votre information tardive sur l'existence de cette procédure.

Or par la suite, face au constat de votre incapacité à nous faire parvenir de tels éléments, d'une part et à la totale opacité de votre dossier faisant l'objet de la procédure pendante devant le Tribunal d'Instance d'Aix en Provence, d'autre part, nous avons dû nous résoudre à diligenter une enquête.

C'est alors que nous avons découvert que vous aviez totalement instrumentalisé, à votre profit, le personnel du service paie du magasin [Adresse 7] en lui ordonnant des montants de prélèvements à réaliser sur vos paies en totale incohérence avec les éléments des avis à tiers détenteurs notifiés et ce, en marge totale des procédures.

Votre objectif était manifestement d'échapper à la quotité saisissable de votre salaire en abusant pour cela, de vos fonctions et de votre position dans l'entreprise.

Ainsi nous avons découvert que chaque mois, vous donniez des consignes très précises au personnel de paie de [Adresse 7] placés sous votre autorité pour que des prélèvements soient opérés sur la base de vos indications, avec des montants totalement aléatoires dictés par vous, sans aucun respect des procédures.

..... De telles manoeuvres frauduleuses ont été réalisées de manière répétée sur plusieurs mois, en abusant de vos fonctions et de la confiance indispensable que nous vous donnions compte tenu de vos missions impliquant le pouvoir de direction du personnel du service paie de votre magasin.

Votre manquement de probité est intolérable car vous avez non seulement fait courir des risques totalement inconsidérés à notre société mais également pour parvenir à vos fins, vous avez volontairement mis le personnel de la paie en situation de fragilité en lui dictant des instructions illicites.....

Notre entreprise ne peut tolérer une telle conduite contraire à nos valeurs et notre éthique professionnelle sachant qu'à l'évidence, seule la notification de l'ordonnance de contrainte par le tribunal d'Aix en Provence qui a conduit nos services à la découverte de vos agissements, aura permis d'y mettre un terme.

Votre déloyauté manifeste et vos agissements frauduleux totalement inacceptables sont de nature à perturber gravement le bon fonctionnement de l'entreprise et sont totalement incompatibles avec votre statut de cadre de direction de haut niveau avec toute poursuite de nos relations contractuelles...'

* sur la prescription des faits fautifs

Monsieur [A] soutient que les faits reprochés sont prescrits, la société ayant eu connaissance des difficultés liées aux saisies-rémunérations dès le 14 janvier 2013, date à laquelle le service des impôts a adressé au siège social, service des ressources humaines, un courrier alertant l'employeur de certains dysfonctionnements. Du fait de ce courrier, la société avait connaissance de la situation et s'est pourtant abstenue de réagir.

En réponse, la société indique qu'elle a eu connaissance des faits fautifs imputables à Monsieur [A] le 30 avril 2014 lorsque ce dernier a informé Monsieur [J], directeur région PACA Grands Hypers de l'existence d'une ordonnance de contrainte datée du 14 avril 2014. Elle précise que suite à cette information, elle a diligenté une enquête au sein du service paie et que compte tenu de la découverte des agissements du salarié, elle a convoqué ce dernier le 28 mai 2014 à un entretien préalable de sorte que les faits reprochés ne sont pas prescrits. Concernant le courrier émanant du service des impôts et daté du 14 janvier 2013, la société soutient qu'elle n'en a eu connaissance qu'au cours de l'instance prud'homale. Elle explique que les courriers relatifs aux avis à tiers détenteur ne font pas l'objet d'une analyse par le siège sis à Evry mais sont directement renvoyés au magasin d'affectation du salarié concerné, ces magasins gérant en interne le traitement de la paie. Au surplus, la société soutient que la lecture du document litigieux ne permet pas de démontrer que dès le 14 janvier 2013, elle était informée des faits reprochés au salarié.

Aux termes de l'article L1332-4 du code du travail , aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà d'un délai de 2 mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance.

Monsieur [A] soutient que la société avait connaissance des dysfonctionnements du service paie concernant la gestion des saisies rémunération depuis le 14 janvier 2013. A cet égard, il verse aux débats le courrier adressé au 'siège social CARREFOUR, SERVICE RH' à EVRY par la direction générale des finances publiques et ayant pour objet 'avis à tiers détenteur employeur'. Après avoir rappelé que le service recouvrement du SIP AIX SUD pratique depuis 3 années des poursuites à l'encontre d'un de ses cadres dirigeants, Monsieur [F] [A], cadre à l'hypermarché CARREFOUR [Adresse 8], il est précisé que :

' Des avis à tiers détenteurs sont adressés au service paie de celui-ci qui tarde à nous répondre et pratique des versements d'un montant inférieur au barême légal.

Le bulletin de recoupement annuel envoyé par vos soins indique un montant annuel de rémunérations de 133 524 euros. En application du barême légal des saisies des rémunérations, le service comptabilité paye de CARREFOUR devrait nous verser mensuellement un montant de 10 000 à 11 000 euros. Or jusqu'à présent, les versements mensuels effectués étaient de 1750 euros. Je vous joins copies de l'ATD, du barême légal et du bulletins de recoupement. Je vous demanderai d'appliquer le barême légal sous peine de mise en cause de la société pour manquement à ses obligations de tiers détenteur employeur.'

Au regard du document précité, la cour constate qu'à compter du 14 janvier 2013, la société CARREFOUR était informée de l'existence de défaillances au sein du service paye en charge de la gestion des saisies rémunérations de Monsieur [A] et ce même si la société s'en défend, l'explication de cette dernière sur la transmission sans analyse du courrier litigieux au magasin du salarié étant peu crédible.

Cependant, la connaissance de ces défaillances ne permet pas de déduire d'une part que ces défaillances étaient fautives et d'autre part qu'elles étaient imputables à Monsieur [A].

En outre, le contenu du courrier litigieux ne mettait pas l'employeur en mesure d'avoir une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés.

En revanche, c'est bien l'information donnée par le salarié à Monsieur [J] le 30 avril 2014, date non contestée par Monsieur [A], qu'une ordonnance de contrainte avait été notifiée à la société qui a permis à cette dernière de prendre la mesure des dysfonctionnements et de diligenter une enquête auprès du service paie du magasin [Adresse 7] puis d'engager une procédure disciplinaire à l'encontre du salarié.

Par conséquent, les faits reprochés à Monsieur [A] ne sont pas prescrits.

* sur la faute grave

Monsieur [A] conteste les faits, soutient qu'ils ne lui sont pas imputables et que la gestion de la paie et des saisies rémunérations est assuré par le service paie du siège social sis à Evry, service sur lequel il n'a aucun pouvoir de direction.

La société CARREFOUR HYPERMARCHÉS fait valoir que le salarié, directeur d'un magasin hypermarché avait autorité sur le service paie de son magasin , service en charge de la gestion des avis à tiers détenteurs le concernant Monsieur [A] et qu'abusant de son pouvoir de direction, il a donné au personnel de ce service des instructions illicites afin d'échapper à la quotité saisissable de son salaire et ainsi opérer une fraude aux droits de ses créanciers..

Monsieur [A] a été licencié pour faute grave.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l'espèce, la société verse aux débats un organigramme du magasin [Adresse 7], les subdélégations de pouvoirs confiées à Monsieur [A], les attestations de Madame [R], manager RH paye du magasin et de Madame [U], animatrice paye ainsi que les courriers judiciaires ou fiscaux relatifs aux saisies sur salaire de Monsieur [A].

Il ressort de ces documents que d'une part, le magasin dirigé par Monsieur [A] était doté d'un service paie qui, contrairement à ce que soutient le salarié, avait à gérer les avis à tiers détenteur qui leur était directement envoyés. Sur ce point, la cour s'appuie sur l'attestation de Madame [U] ('nous avons reçu en magasin deux avis à tiers détenteur pour Monsieur [A]: SIP AIX EN PROVENCE et Tribunal d'Instance D'AIX EN PROVENCE. Je me suis rendue à son bureau pour lui en parler') ainsi que sur les courriers des administrations fiscales et du Tribunal d'Instance d'Aix en Provence qui sont tous adressés au magasin du salarié, soit celui de [Adresse 8] quand Monsieur [A] en était le directeur, soit celui de [Adresse 7], et ce en leur qualité de tiers détenteur.

Dès lors, c'est bien le service paie du magasin du salarié concerné par une saisie rémunération qui gère ladite mesure de saisie et est donc comptable des sommes versées à ce titre au Trésor Public ou au tribunal d'Instance.

D'autre part, si le Monsieur [A] conteste toute autorité sur les salariés du service paye de son magasin, la cour relève que dans le document daté du 22 avril 2013 et relatif aux subdélégations de pouvoirs consenties par Monsieur [J], directeur régional PACA Grands Hypers à Monsieur [A], ce dernier, en sa qualité de directeur de magasin, avait ' à veiller au bon respect des règles à appliquer et à faire appliquer pour l'ensemble du personnel du magasin en matière d'exécution des contrats de travail et notamment en matière de rémunération.' (Pièce 6 pages 2-3).

Il est donc établi que le service paie du magasin [Adresse 7], en sa qualité de tiers détenteur avait en charge la gestion des saisies sur salaire de Monsieur [A], ce dernier, compte tenu de la subdélégation précitée, ayant pour obligation de veiller au respect des régles applicables en matière de rémunération.

La société soutient que le salarié a usé de sa fonction et de son autorité pour donner des ordres illicites au service paie afin que les droits de ses créanciers soient diminués.

A cet égard, la société verse aux débats un tableau comparatif des saisies pratiquées sur les rémunérations de Monsieur [A] pour la période de 2014. Il en résulte que sur la période de janvier à mai 2014 et compte tenu du montant perçu par le salarié pour cette période (71 591 euros), la somme de 52 093,72 euros aurait du être saisie en application des barèmes applicables pour les saisies rémunérations. Or les retenues opérées pour cette même période se sont élevées à la somme de 6410 euros.

Il est donc établi, et d'ailleurs non contesté par l'appelant, que des défaillances particulièrement importantes et réitérées se sont produites dans la gestion des saisies sur salaire de Monsieur [A].

Pour imputer la responsabilité de ces défaillances à Monsieur [A], la société s'appuie sur deux attestations émanant des salariés du service paye du magasin [Adresse 7] et rédigées en ces termes :

'Nous avons reçu en magasin deux avis à tiers détenteur pour Monsieur [A].... Je me suis rendue à son bureau pour lui en parler, Madame [R] étant en maternité. Je lui ai expliqué la procédure et les montants qui seraient prélevés, c'est à dire des montants aléatoires et suivant ses revenus. Nous avons mis en place une procédure qui ne s'applique que pour Monsieur [A] : un prélèvement en 'pension alimentaire' et un prélèvement en 'opposition fixe'. Je précise que les montants saisis sur fiche de paie m'étaient donnés oralement par Monsieur [A] à chaque arrêté de paie, ces montants étaient variables.' (attestation de Madame [U] ).

'Lorsque j'ai repris mon poste de manager RH paye à la suite de mon congé maternité durant lequel Monsieur [A] avait pris la direction du magasin, ma collaboratrice, [W] [U] m'a informée que Monsieur [A] avait d'importants montants de saisie sur salaire. Elle m'a indiqué que je ne verrai pas sur ses fiches de paie ses oppositions saisies comme nous le faisions habituellement mais saisies en opposition fixe à sa demande. [W] m'a informée qu'à l'arrivée de Monsieur [A] sur le magasin, il lui avait demandé de faire ses saisies de cette façon car il le faisait déjà sur son ancien magasin ([Adresse 8]) et lui a précisé qu'il s'était arrangé avec les impôts et le tribunal pour ces montanst fixes. Tous les mois, à chaque arrêté de paye, [W] ou moi allions donc voir directement Monsieur [A] afin qu'il nous communique les montants à saisir sur sa paye.' (Attestation de Madame [R], manager RH du service paye).

Si Monsieur [A] soulève l'irrecevabilité des attestations produites en ce qu'elles proviennent de salariées sous la responsabilité de la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS, la cour rappelle qu'il ne peut être fait grief à l'employeur de produire des attestations de personnes placées sous son autorité dès lors que les faits ayant été commis dans le cadre du travail, les autres salariés en sont nécessairement témoins privilégiés et que les faits qu'ils rapportent ne sont pas nécessairement contradictoires entre eux.

Sur ce point, la cour relève que les attestations de Mesdames [R] et [U] sont précises, étayées et non contradictoires et qu'elles établissent que Monsieur [A] leur a donné chaque mois des instructions pour qu'elles agissent en méconnaissance des actes d'exécution émanant des services fiscaux et de la juridiction d'instance.

En agissant de la sorte, Monsieur [A] a abusé de son pouvoir et de son autorité sur le personnel du service paie de son magasin pour satisfaire des intérêts personnels et ce au mépris des procédures dont il était le garant en sa qualité de directeur de magasin, son attitude réitéré ayant en outre été parerticluièrement préjudiciable pour son employeur désormais redevable de la somme de 270 125,34 euros.

Les faits reprochés à Monsieur [A] sont donc établis. Ils caractérisent une faute grave qui rendaient dès lors impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Par conséquent, Monsieur [A] sera débouté de ses demandes indemnitaires relatives à l'indemnité de licenciement, de préavis et congés payés afférents, de rappels de salaire lié à sa mise à pied à titre conservatoire et de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour action abusive

A titre reconventionnel, la société sollicite l'octroi de dommages et intérêts pour action abusive de la part du salarié, qui alors qu'il a eu un comportement déloyal et fautif à l'égard des salariés du service paie mais également de la société condamnée à payer ses dettes personnelles pour un montant de 270 125,34 euros, n'a pas hésité à saisir le conseil de prud'hommes puis la cour d'appel pour obtenir le versement de sommes conséquentes.

Si les demandes de Monsieur [A] ne sont pas accueillies, il n'est pas établi que son action en justice a été introduite dans une intention de nuire ou avec une légèreté blâmable.

Par conséquent, la société sera déboutée de sa demande reconventionnelle.

Sur les autres demandes

Au regard des faits et de la confirmation du jugement prud'homal en toutes ses dispositions, Monsieur [A], partie appelante, sera condamné à payer à la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera également condamné au paiement des dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y AJOUTANT,

DEBOUTE la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

CONDAMNE Monsieur [A] à payer à la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [A] au paiement des dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 15/10673
Date de la décision : 26/10/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°15/10673 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-26;15.10673 ?
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