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25/10/2016 | FRANCE | N°15/05697

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 25 octobre 2016, 15/05697


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 25 Octobre 2016



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/05697



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 4 mai 2015 par le conseil de prud'hommes de PARIS -section commerce- RG n° 12/07806



APPELANTS



Monsieur [Y] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 2]

comparant en personne

, assisté de Me Olivier VILLEVIEILLE, avocat au barreau de PARIS, P0423



Syndicat UNSA RATP

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Olivier VILLEVIEILLE, avocat au barreau de PAR...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 25 Octobre 2016

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/05697

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 4 mai 2015 par le conseil de prud'hommes de PARIS -section commerce- RG n° 12/07806

APPELANTS

Monsieur [Y] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Olivier VILLEVIEILLE, avocat au barreau de PARIS, P0423

Syndicat UNSA RATP

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Olivier VILLEVIEILLE, avocat au barreau de PARIS, P0423

INTIMÉE

RATP REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par Me Sophie MALTET, avocat au barreau de PARIS, R062

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 septembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Soleine HUNTER FALCK, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Bruno BLANC, Président

Madame Soleine HUNTER FALCK, Conseillère

Madame Anne PUIG-COURAGE, Conseillère

Greffier : Madame Marine POLLET, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Bruno BLANC, président, et par Madame Marine POLLET, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La RATP (REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS) a une activité d'opérateur de transports publics ; elle comprend plus de 11 salariés.

[Y] [Y], né en 1978, a été engagé par la RATP, en qualité d'agent stagiaire machiniste-receveur le 15.01.2001 échelle 3 échelon 1, puis par contrat à durée indéterminée, en qualité d'opérateur de contrôle qualifié service bus à temps complet au sein de l'unité CSB (contrôle service bus) du service SAV (Service après verbalisation).

[Y] [Y] a été affecté au service Accueil SCC (Service contrôle client) du département CML (commercial) le 01.07.2009 comme agent commercial et d'information multimodale BUS.

[Y] [Y] a été élu délégué du personnel titulaire le 30.11.2010, désigné délégué syndical d'établissement le 11.08.2011, puis délégué syndical conventionnel le 12.01.2012.

Un avertissement lui a été notifié le 26.11.2010 en raison d'une attitude outrancière, agressive et véhémente adoptée vis à vis de son responsable hiérarchique lors de son entretien annuel professionnel s'étant tenu les 27, 28 et 29.09.2010. Le salarié a contesté cette sanction le 28.11.2010, qui est néanmoins confirmée le 07.12.2010.

Un incident survenu le 26.05.2011 à 13h30 au sein du pôle clientèle [Localité 5] a été signalé à l'employeur en juin 2011.

A cette date [Y] [Y] a été victime, comme 5 autres de ses collègues du service SAV [Localité 5], d'un accident qu'il a déclaré comme accident du travail le 07.06.2011 mais qui n'a pas été reconnu comme tel par la Caisse de coordination aux assurances sociales de la RATP le 21.06.2011 sauf en ce qui concerne sa collègue G. [Z] ; il a été placé en arrêt maladie renouvelé jusqu'au 17.08.11.

Un nouvel incident a été enregistré le 07.06.2011 concernant à nouveau les 6 agents ; l'accident déclaré comme accident du travail n'a pas non plus été retenu comme tel par la CCAS de la RATP le 01.08.11.

A la suite de l'enquête menée par le CHSCT SEM/CML en raison des 6 déclarations d'accident du traval des agents du service à deux reprises, l'inspection générale des recettes (IGR) a été saisie le 16.06.2011 par la direction de l'unité SCC pour déterminer les causes générant la mauvaise ambiance au CRI sur le site [Localité 5] et entraînant des "accidents de travail psychologiques d'opérateurs et d'encadrants".

Le 17.08.2011 le syndicat UNSA RATP a déclenché une alarme sociale à la suite des préconisations émanant du CHSCT SEM CML en vue d'obtenir la mise en place d'une enquête administrative relative aux accidents du travail concernant le personnel du pôle clientèle unité SAV[Localité 6] ; le syndicat a contesté les préconisations du CHSCT relatives au déplacement de [Y] [Y] de ce site par mesure conservatoire et à l'aide et au soutien devant être apportés aux agents de maîtrise [T] et [U] par la direction de l'unité SCC dans le cadre de leur activité ; le syndicat a jugé discriminatoires ces préconisations, les 4 agents ne faisant pas l'objet d'un soutien équivalent dans l'exercice de leurs fonctions.

Le 05.09.2011 [Y] [Y] a été entendu dans le cadre d'un ré-accueil après agression ; il a été affecté provisoirement comme télé-acteur au plateau téléphonique du site [Localité 7] comme mesure d'accompagnement dans l'attente d'un rendez vous avec le médecin du travail et d'une formation "gestion du stress".

Le 09.09.2011 le médecin du travail a déclaré le salarié apte lors d'un examen de reprise.

Le 09.09.2011 le syndicat UNSA RATP a à nouveau déclenché une procédure d'alarme sociale en raison du projet de fermeture du SAV pôle clientèle du [Adresse 4], à la suite de l'arrêt de travail des 4 agents concernés et de leurs déclaration d'accidents du travail, le CHSCT s'étant saisi pour enquête.

Le 02.11.2011, l'employeur a été saisi d'un avis de danger grave et imminent concernant les salariés du service de [Y] [Y]. Le 04.11.11 le syndicat UNSA RATP a saisi le secrétaire du CHSCT en vue du déclenchement d'une enquête sur site devant être menée par cette institution, à la suite de la tentative de suicide sur le lieu de travail le 28.10.2011 d'une salariée appartenant au SAV [Localité 5].

Le 08.11.2011 [Y] [Y] a été déclaré apte lors de la visite périodique organisée devant le médecin du travail.

L'IGR a rendu son rapport le 17.11.2011.

Une sanction disciplinaire sous forme d'un jour de mise en disponibilité d'office sans traitement a été notifiée à [Y] [Y] le 25.01.2012 à la suite du rapport d'enquête rédigé par l'Inspection générale des recettes (IGR) concernant le CRI du site [Localité 5] pour le motif suivant : "Vous avez tenu des propos à connotation sexuelle, sur votre lieu de travail, à l'égard d'agents féminins de votre unité".

Dans un courrier du 12.02.2013, la RATP a proposé au salarié une mutation sur le site [Localité 8] à partir du 20 suivant, dans le cadre du protocole "Adaptation des activités fonctionnelles et transversales" du 24.12.2012 au sein du pôle Recouvrement, et, à défaut, une mobilité interne sur deux postes d'opérateur contrôle qualifié sur les sites[Localité 5] et [Localité 9] ; [Y] [Y] a refusé ces propositions et 4 autres mutations lui ont été proposées le 07.03.2013.

Il a également été proposé au salarié une affectation sur le site[Localité 5]comme agent taxateur le 25.07.2012 ; le 30.07.2012 par LRAR [Y] [Y] a contesté la décision de mutation qui avait été prise et s'est prévalu des difficultés qu'il rencontrait dans sa vie professionnelle depuis qu'il exerçait des mandats syndicaux ; le 21.08.2012, [Y] [Y] a été affecté sur le site [Localité 5] sur l'activité d'agent taxateur sous réserve de son accord écrit.

Dans un courriel du 14.01.2014, [Y] [Y] s'est plaint de harcèlement depuis plusieurs mois auprès du responsable du pôle Recouvrement ; celui ci lui a répondu le 29.01.2014 en contestant ces allégations.

Le 27.05.2014, le médecin du travail a reconnu le salarié apte avec aménagement du poste en précisant : pas de poste au pôle Recouvrement, mobilité demandée, avis d'aptitude pour le poste de recrutement des CAE.

Le CPH de Paris a été saisi par [Y] [Y] le 09.07.2012 en annulation des sanctions disciplinaires, et indemnisation des préjudices subis pour harcèlement moral et discrimination.

La cour est saisie de l'appel interjeté le 05.06.2015 par [Y] [Y] du jugement rendu le 04.05.2015 par le Conseil de Prud'hommes de Paris section Commerce chambre 2 en formation de départage, qui a annulé l'avertissement notifié au salarié le 26.11.2011, débouté [Y] [Y] de ses demandes au titre de la mise à pied du 25.01.2012, du harcèlement moral et de la discrimination, débouté le syndicat UNSA RATP de ses prétentions, et condamné l'employeur au paiement de 200 € en vertu de l'article 700 CPC.

[Y] [Y] demande à la cour de :

- INFIRMER le jugement rendu le 4 mai 2015 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS, sauf en ce qu'il a annulé l'avertissement du 26 novembre 2010 ;

Et statuant à nouveau,

- DIRE ET JUGER que l'avertissement notifié le 26 novembre 2010 est injustifié ;

En consequence,

- ANNULER 1'avertissement notifié le 26 novembre 2010 ;

- DIRE ET JUGER que la mise à pied notifiée le 25 janvier 2012 est injusfiée ;

En conséquence,

- ANNULER la mise à pied notifiée le 25 janvier 2012 et CONDAMNER, par voie de conséquence, la RATP a payer la somme de "xxx" Euros, outre "xxx" Euros au titre des congés afférents à [Y] [Y],

- DIRE ET JUGER que les agissements dont a été victime [Y] [Y] sont constitutifs de harcèlement moral ;

En conséquence,

- CONDAMNER la RATP à payer à [Y] [Y] la somme de 25 000 Euros à titre de dornmages et intérêts pour harcèlement moral ;

- DIRE ET JUGER que les agissements dont a été victime [Y] [Y] sont constitutifs de discrimination syndicale ;

En conséquence,

CONDAMNER la RATP à payer à [Y] [Y] la somme de 25 000 Euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination ;

CONDAMNER la RATP a payer à [Y] [Y] la somme de 4 000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens.

Le syndicat UNSA RATP sollicite l'infirmation du jugement rendu sauf en ce qu'il a annulé l'avertissement du 26.11.2011, recevoir son intervention volontaire et condamner l'employeur à lui verser 1.500 € à titre de dommages intérêts te 1.500 € en application de l'article 700 CPC.

De son côté, la RATP demande de réformer le jugement en ce qu'il a annulé l'avertissement du 26.11.2010 et de le confirmer pour le surplus, de condamner [Y] [Y] à payer la somme de 1.500 € pour frais irrépétibles.

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience.

Sur l'exécution du contrat de travail

1) l'avertissement du 26.11.2010

Le conseil de prud'hommes, juge du contrat de travail, saisi de la contestation sur le bien-fondé d'une sanction disciplinaire peut l'annuler si elle apparaît irrégulière dans la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise (C. trav., art. L.'1333-1).

Le contrôle judiciaire porte sur'la réalité des faits'; la légitimité de la sanction'; la disproportion de la sanction à la gravité de la faute'; éventuellement, la régularité de la procédure suivie.

L'employeur doit fournir au conseil de prud'hommes les éléments qu'il a retenus pour prendre la sanction'; le salarié fournit également les éléments qui viennent à l'appui de ses allégations. Le conseil de prud'hommes peut, pour former sa conviction, ordonner toute mesure d'instruction utile. Si un doute subsiste, il profite au salarié (C. trav., art. L.'1333-1).

Aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction (L 1332-5).

Sur les faits survenus les 27, 28 et 29.09.2010, la RATP affirme dans le courrier du 26.11.2010 que le salarié avait adopté une attitude outrancière, agressive et véhémente vis à vis de son responsable hiérarchique lors de son entretien d'appréciation et de progrès.

La réalité de ces faits, matériellement vérifiables, est établie par les éléments versés qui sont convergents : le rapport établi par le supérieur hiérarchique, M. [U], qui a reçu le salarié à trois reprises, la main courante déposée par ce supérieur au commissariat le 07.10.2010 pour injures et menaces en dénommant précisément son collaborateur, la déclaration d'un agent en date du 07.07.2011 dans le cadre de l'enquête menée par l'Inspection générale, dont le nom a certes été biffé, et enfin la déclaration de F. [T], autre supérieure hiérarchique de [Y] [Y], lors de l'enquête ayant suivi l'accident du travail du 08.06.2011, relatives aux menaces de [Y] [Y] lui ayant conseillé de "ne pas se trouver sur la trajectoire de la balle qu'il réservait à M. [U]".

Les propos rapportés par son supérieur, confirmés par les autres éléments fournis, ont bien un caractère aggressif et véhément.

La sanction était donc légitime.

En ce qui concerne son caractère proportionné, il s'agit selon le règlement intérieur d'une sanction du 1er degré. Le salarié fait valoir des appréciations favorables en 2007, 2008 et 2009. Il n'en reste pas moins que son comportement était inapproprié et qu'il lui revenait de contester son évaluation selon la procédure prévue s'il l'estimait inadaptée. La sanction a un caractère proportionné eu égard aux propos tenus ; elle doit être maintenue.

Le jugement objet du présent appel sera infirmé.

2) la sanction disciplinaire du 25.01.2012

La forme de la convocation du 02.12.2011était régulière dès lors qu'il était mentionné le type de sanction envisagée et qu'il était précisé qu'il s'agissait de faits portés à la connaissance de l'employeur le 17.11. 2011 par le rapport d'enquête de l'IGR ayant porté sur le Centre de recouvrement des infractions du site [Localité 5].

L'employeur n'était pas tenu de communiquer au salarié ce rapport au regard des droits de la défense dès lors que le salarié a été en mesure de discuter du bien fondé de la sanction envisagée lors de l'entretien après que l'employeur lui ait donné connaissance de ce rapport, ainsi que cela est prévu dans le règlement intérieur de l'établissement SEM / CML (article 40 C).

En sa qualité d'agent statutaire, [Y] [Y] se voit appliquer, en cas de procédure disciplinaire, le statut du personnel RATP, ainsi que le revendique la RATP dans ses conclusions, et notamment les dispositions de l'article 149, qui est un texte de nature réglementaire dont l'appréciation échappe au juge judiciaire.

Cependant ce statut prévoit que la révocation constitue une mesure disciplinaire du second degré ; son article 152 indique que les mesures disciplinaires du 2nd degré sont prononcées après avis du conseil de discipline par le Directeur général.

Il s'agit d'une procédure conventionnelle constituant une garantie de fond pour le salarié, qui ne saurait être méconnue. Or la convocation de l'agent mentionnait que la sanction disciplinaire envisagée pouvait aller jusqu'à la révocation.

Ainsi même, si la sanction prononcée n'a été en définitive qu'une mise en disponibilité d'office sans traitement d'une journée, la procédure conventionnelle prévue n'a pas été respectée. La sanction pour ce seul motif doit être annulée.

Le jugement critiqué sera infirmé.

3) le harcèlement moral

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (article L 1152-1 C.Trav) et ce indépendamment de l'intention de son auteur.

De même, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir les agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés (art L 1152-2).

En cas de litige relatif à l'application de ces dispositions, dès lors que le salarié concerné apporte un commencement de preuve de faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; la charge de la preuve repose sur l'employeur.

[Y] [Y] fait valoir : la notification de deux sanctions disciplinaires injustifiées ; une évaluation professionnelle mensongère en date du 27.09.2010 alors que le salarié conteste l'appréciation qui a été faite de ses capacités relationnelles dans le service et vis à vis du client dès lors que son supérieur n'était pas été présent à l'accueil ; des menaces lors de la reprise d'activité après l'accident du 07.06.2011 ; l'emploi et l'utilisation de faux témoignages et de fausses pièces : "cf rapport [D]" ; le déplacement arbitraire par changement de lieu de travail, des horaires, des tâches à effectuer le tout étant contraire à la fiche de poste ; la tentative de diminution de ses responsabilités ; la sollicitation pour rédiger un faux témoignage ; la sollicitation auprès d'un responsable syndical M. [X].

L'une des deux sanctions disciplinaires a été annulée, sur la forme, par la présente décision, cependant l'autre a été confirmée.

L'évaluation du 27.09.2010 a été réalisée par M. [U] dans des circonstances houleuses et a donné lieu à la sanction du 26.11.2010 ; il est constant que l'évaluateur n'ayant pas pu de lui même apprécier la qualité du travail du salarié s'est fondé sur les dires de ses collègues OCD, C. [E] et M.[W], qui tous deux ont constaté que les termes de l'évaluation ne reprenaient pas leurs déclarations. Un doute existe donc sur ce point, d'autant que les qualités de contact de [Y] [Y] avaient été relevées dans les précédentes évaluations et que l'on ne sait pas quels avaient été les OCD sollicités pour donner leur avis.

Les menaces subies lors de la reprise d'activité ne sont pas démontrées par les documents produits, la fiche de ré-accueil mentionnant que le salarié acceptait les mesures proposées le 05.09.2011 qui comprenaient le changement temporaire de lieu de travail ; le document (P 75) qui n'est pas daté relate des faits non circonstanciés en ce qui concerne les menaces alléguées.

[Y] [Y] n'apporte pas la preuve de l'emploi de faux témoignages ou fausses pièces, et le conseil relève à juste titre que le courrier émanant de G. [G], un usager, n'a pas été utilisé à son encontre même s'il le vise nommément.

Il est justifié de ce que le site sur lequel travaillait [Y] [Y] a été fermé pendant l'été 2011à la suite de l'arrêt de travail conjugué de 4 agents de l'accueil SAV [Localité 5], et du déplacement des salariés, le tout temporairement ; cette décision a été prise alors que le CHSCT était saisi des incidents survenus et diligentait une enquête, que l'Inspection générale était elle même saisie, que le syndicat UNSA RATP avait procédé à deux alarmes sociales dans le courant de l'été ; le salarié n'a pas accepté de donner un accord écrit sur cette mesure temporaire qui était prise objectivement pour préserver sa santé et celle de ses collègues de travail. Le retour sur le site [Localité 5] par la suite n'a pas été possible sur son poste en raison du transfert de l'accueil des voyageurs sur le site [Localité 7] sur lequel se trouvait [Y] [Y] et d'une réorganisation du pôle SCC ; il est néanmoins justifié de ce qu'il a été proposé au salarié le 21.08.2012 un retour sur son site d'origine mais en qualité d'agent taxateur conformément à ses souhaits.

Les mesures prises ont dès lors été prises à l'égard de [Y] [Y] pour respecter l'obligation de sécurité de résultat de l'employeur, indépendamment de son statut de salarié protégé.

La sollicitation alléguée d'un responsable syndical n'est pas prouvée par les pièces transmises.

Il n'en reste pas moins que les conditions de travail des salariés placés à l'origine sur le site de Béliard au sein du service SAV se sont dégradées à partir de mai 2011 à la suite de plusieurs incidents ayant impliqué des clients mais également le personnel du service, les relations professionnelles dans ce service étant déjà affecté depuis fin 2010 depuis la première sanction infligée à [Y] [Y].

Plusieurs enquêtes ont été menées et des mesures ont été prises par l'employeur, dans le but de protéger la santé et la sécurité des salariés.

Le harcèlement moral n'est pas démontré.

Le jugement rendu sera confirmé.

4) la discrimination syndicale

Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte telle que définie à l'article 1er de la Loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou son handicap.

[Y] [Y] invoque les sanctions disciplinaires dont il a été l'objet, des mesures vexatoires et d'écrits "qui ne peuvent qu'être en lien avec son activité syndicale", le fait que les 4 personnes déplacées appartenaient au syndicat UNSA RATP, l'établissement d'évaluations professionnelles défavorables, ce depuis 2010 date de son engagement syndical.

La RATP réplique que le salarié reprend la même argumentation que celle développée sur le fondement du harcèlement moral au soutien de ses nouvelles prétentions ; elle relève que lors de la première sanction, [Y] [Y] ne disposait d'aucun mandat syndical ; les 4 agents concernés par la situation du service SAV ont subi le même traitement par mesure conservatoire ; l'enquête administrative diligentée par M. [D] n'a pas été menée à charge.

Il est exact que la première sanction infligée au salarié l'a été alors que ce dernier ne bénéficiait d'aucun mandat syndical, et la seconde l'a été pour des propos tenus dans un cadre professionnel mais elle est annulée pour des raisons procédurales.

L'employeur a, à juste titre, déplacé l'ensemble du personnel du service à la suite de deux incidents ayant perturbé son fonctionnement ainsi que les agents qui étaient en arrêt de travail ; par la suite, dans le cadre de l'adaptation des activités fonctionnelles et transversales du département commercial, il est justifié qu'une nouvelle organisation a été mise en place selon laquelle les agents du pôle Recouvrement ont été rassemblés sur le seul lieu [Localité 7] ce qui a impliqué que les agents déplacés temporairement soient restés sur ce site, étant précisé que néanmoins [Y] [Y] a obtenu de retourner sur le site [Localité 5] en exerçant de nouvelles fonctions.

Le formulaire d'évaluation critiqué par le salarié au titre de l'année 2010 faisait certes état d'un moindre investissement vis à vis de la clientèle sans pour autant lui être globalement défavorable ; [Y] [Y] n'a pas entendu la contester selon la procédure en vigueur.

La seule concomittance des difficultés professionnelles connues par le salarié depuis son investissement syndical n'est pas suffisante pour caractériser la discrimination syndicale.

En conséquence le jugement rendu sera confirmé.

Sur l'intervention du syndicat UNSA RATP

Le syndicat UNSA RATP qui a accompagné la salariée dans sa démarche, est recevable à exercer une action en son nom propre et invoquer le préjudice directe et indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente ; cependant la faute commise par l'employeur en matière de harcèlement moral et de discrimination syndicale n'est pas caractérisée au vu de la solution rendue ; le syndicat doit être débouté de ses prétentions.

Il serait inéquitable que [Y] [Y] supporte l'intégralité des frais non compris dans les dépens tandis que la RATP qui succombe doit en être déboutée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DÉCLARE l'appel recevable tant en ce qui concerne [Y] [Y] que le syndicat UNSA RATP ;

CONFIRME le jugement rendu le 04.05.2015 par le Conseil de Prud'hommes de Paris section Commerce chambre 2 en formation de départage, en ce qu'il a débouté [Y] [Y] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination syndicale, et l'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

ANNULE la sanction disciplinaire prononcée à l'encontre de [Y] [Y] le 25.01.2012 et confirme celle prononcée le 26.11.2010 ;

REJETTE les autres demandes ;

CONDAMNE la RATP aux entiers dépens de première instance et d'appel, et à payer à [Y] [Y] la somme de 2.000 € en vertu de l'article 700 CPC au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 15/05697
Date de la décision : 25/10/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°15/05697 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-25;15.05697 ?
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