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07/10/2016 | FRANCE | N°14/16061

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 07 octobre 2016, 14/16061


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 07 OCTOBRE 2016



(n°285, 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/16061



Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 10 Juillet 2014 - RG n° 2013032614





APPELANT



Monsieur [P] [X]

né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 1]

demeurant [Adresse 1]>
[Localité 2]



Représenté par Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998

ayant pour avocat plaidant Me Barbara CHICK, avocat au barreau de Paris, toque : E1439





INTI...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 07 OCTOBRE 2016

(n°285, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/16061

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 10 Juillet 2014 - RG n° 2013032614

APPELANT

Monsieur [P] [X]

né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 1]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998

ayant pour avocat plaidant Me Barbara CHICK, avocat au barreau de Paris, toque : E1439

INTIMÉ

Monsieur [Q], [G], [F], [U] [D]

né le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 3]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

ayant pour avocat plaidant Me Daniel PAQUET de l'association VATIER et ASSOCIÉS, avocat au barreau de Paris, toque : P82

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Juin 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Anne-Marie GALLEN, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Chantal BARTHOLIN, Président de Chambre

Mme Anne-Marie GALLEN, Présidente, rédacteur

Mme BrigitteCHOKRON, Conseillère

Qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Anne-Marie GALLEN dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Mme Pauline ROBERT

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Anne-Marie GALLEN, présidente, pour Mme Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre empêchée et par Mme Clémentine GLEMET, greffier à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE

Vu le jugement assorti de l'exécution provisoire rendu le 10 juillet 2014 par tribunal de commerce de Paris qui a :

- condamné M. [X] à payer à M. [D] :

la somme de 78.000 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2011,

la somme de 3.000 €, à titre de dommages-intérêts,

la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné M. [X] aux dépens ;

Vu l'appel relevé par M. [X] et ses dernières conclusions signifiées le 3 mai 2016 par lesquelles il demande à la cour, au visa des articles 1583 du code civil et L 141-1 du code de commerce, d'infirmer le jugement et :

- à titre principal, de :

dire que l'action de M. [D] aux fins de reconnaissance d'une cession d'un fonds de commerce est irrecevable et mal fondée, dire que lui-même n'a pu accepter d'acquérir un fonds de commerce qui ne lui a pas été proposé et condamner M. [D] à lui rembourser les sommes qu'il a payées dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement,

constater que le règlement intérieur du Sénat ne prévoit pas le droit de présenter un successeur et de juger en conséquence qu'aucun droit de présentation du concessionnaire entrant par le concessionnaire sortant ne peut exister,

- à titre subsidiaire, si la cour estimait qu'un fonds de commerce de location de voiliers existe au [Localité 5], de :

dire qu'il est propriétaire du fonds avec toutes les conséquences attachés au droit de propriété et de garantie que lui doit M. [D],

ramener à de plus justes proportions la valeur de la clientèle,

- en tout état de cause, de :

débouter M. [D] de toutes ses demandes, de sa demande de dommages-intérêts et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner M.[D] aux dépens de première instance et d'appel et à lui payer la somme de 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 14 avril 2016 par M. [D] qui demande à la cour de :

- constater la cession à M. [X] de son fonds de commerce d'exploitation de bateaux dans le bassin du Luxembourg à [Localité 6] ou, subsidiairement, du droit de présentation de son successeur moyennant le prix convenu 80.000 €,

- confirmer le jugement sauf à élever à 20.000 € le montant des dommages-intérêts et condamner M. [X] à payer cette somme,

- condamner M. [X] à lui payer la somme de 15.000 € en cause d'appel par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux dépens de première instance et d'appel ;

SUR CE,

Considérant que par arrêté du 7 mars 2002, les questeurs du Sénat ont autorisé M. [D] à exploiter une activité de location de bateaux dans le bassin du [Localité 5], moyennant paiement d'une redevance ;

Que suivant acte sous seing privé du 30 mai 2002, les consorts [Z] ont cédé à M. [D] leur fonds de commerce d'animation de jeux et de location de bateaux sur le bassin du [Localité 5] comprenant, au titre des éléments incorporels : la clientèle et l'achalandage y attachés, le droit de se dire le successeur des cédants et d'être présenté à ce titre auprès de la clientèle du fonds et le modèle des bateaux cédés, au titre des éléments corporels : le matériel, les équipements et le mobilier commercial servant à l'exploitation du fonds; que cette cession était consentie pour le prix de 60.980 €, s'appliquant aux éléments incorporels pour 30.490 €, dont 10 € pour le modèle de bateaux, et aux éléments corporels pour 30.490 € ;

Que des discussions ayant eu lieu en vue de la reprise de l'activité par M. [X], M. [D] a adressé une lettre à la questure du Sénat, le 30 mai 2011, pour l'informer de sa décision de vendre sa flotte de voiliers et de cesser de travailler en qualité de concessionnaire dans le [Localité 5] ;

Que le 20 juin 2011, M. [D] a signé un document manuscrit rédigé comme suit : 'Je soussigné [Q] [D] propriétaire des voiliers du Luxembourg certifie vendre ma concession constituée de 46 voiliers et d'une charrette de transport. S'ajoute à cela mon aval ainsi que l'autorisation du Sénat pour que le repreneur puisse travailler en exclusivité sur le [Localité 5]. Prix de vente de la concession quatre vingt mille euros (80.000 €)' ;

Que le 22 juin 2011, les questeurs du Sénat ont autorisé M. [X] à exploiter une location de bateaux dans le [Localité 5] pour une durée de cinq ans à compter du 1er août 2011, moyennant paiement d'une redevance ;

Qu'aucun acte de cession n'a ensuite été régularisé entre M. [D] et M. [X] qui a poursuivi l'activité de location de bateaux en accord avec M. [D]; que cependant,le 30 août 2011, en présence d'un membre de la direction de la logistique et des moyens généraux du Sénat, M. [D] a récupéré son matériel - dont 22 bateaux-jouets et une charrette de rangement - qui était entreposé dans un local du [Localité 5]; que par lettre recommandée du 16 septembre 2011, M. [D] a mis en demeure M. [X] de formaliser la cession au prix convenu de 100.000 € ;

Que par lettre recommandée du 26 septembre 2011, l'avocat de M. [X] lui a répondu, notamment, qu'il ne pouvait céder une concession dont il n'était pas propriétaire, qu'aucun engagement financier n'avait été pris entre eux, que lui seul était maintenant titulaire de l'autorisation d'exploitation et qu'il l'avait empêché d 'exercer son droit d'exploitation en reprenant les bateaux; que M. [D] n'a pu accuser réception de cette lettre faute d'avoir mentionné sa nouvelle adresse sur son courrier précité ;

Que par la suite, M. [X] a fait fabriquer de nouveaux bateaux et une charrette pour les transporter; que le 24 avril 2013, M. [D] a fait dresser un procès-verbal de saisie-contrefaçon motif pris que les bateaux exploités par M. [X] étaient la copie conforme des siens; que la procédure relative à cette saisie-contrefaçon est pendante devant le tribunal de grande instance de Paris ;

Que le 22 mai 2013, M. [D] a fait assigner M. [X] devant le tribunal de commerce de Paris pour voir constater la cession de son fonds de commerce et condamner M. [X] à en payer le prix; que ce tribunal, par le jugement déféré, a condamné M. [X] au paiement de la somme de 78.000 €, déduction faite de celle de 2.000 € fixée comme étant la valeur du matériel repris par M. [X], outre la somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts ;

Considérant que pour conclure à la confirmation du jugement, M. [D] prétend qu'il convient d'écarter le concept juridique de concession qu'il a utilisé à tort dans ses écrits n'étant pas juriste, alors qu'en l'espèce il ne peut s'agir d'une concession au sens commercial du terme; qu'il expose que le débat porte en réalité sur deux éléments essentiels : l'existence d'une clientèle propre et l'existence d'un accord sur la chose et le prix ;

Que pour démonter le premier de ces éléments, M. [D] fait valoir :

- qu'il convient de ne pas tenir compte de ce que M. [X] rapporte des débats parlementaires préparatoires de la loi Pinel, à savoir que les commerces situés dans l'emprise d'un jardin public et inaccessibles en dehors des heures d'ouverture du jardin n'auraient pas de clientèle propre, alors que c'est au juge judiciaire de décider de l'existence ou non d'une clientèle propre,

- que si la jurisprudence administrative a toujours été réticente et même opposée à la reconnaissance d'une clientèle propre, la jurisprudence judiciaire, confirmée par la loi Pinel, décide qu'un commerce situé sur le domaine public peut bénéficier d'un fonds de commerce à condition de justifier de l'existence d'une clientèle propre,

- que la réglementation ou le cahier des charges du [Localité 5] n'interdisent pas au juge judiciaire de se pencher sur l'existence d'une clientèle propre à l'intérieur du domaine public,

- que ce qui caractérise la clientèle propre ce sont les moyens mis en oeuvre par le commerçant, en l'occurrence des bateaux fabriqués à l'origine par M. [Z] et considérés comme des jouets de collection, son sens commercial qui attire les clients et le fait que les clients, enfants et parents, viennent spécialement et certains de façon habituelle dans le domaine public pour louer ces bateaux,

- qu'il était inscrit pour son activité au registre du commerce et des sociétés, tout comme l'était la famille [Z], et que M. [X] s'y est inscrit sous le nom commercial ' Les voiliers du Luxembourg',

- qu'il a bien acquis des consorts [Z] les éléments incorporels et corporels constituant un fonds de commerce,

- que si par impossible la cour décidait qu'il n'y a pas de fonds de commerce, elle dirait qu'il est titulaire d'un droit de présentation de son successeur auprès du Sénat et que ce droit est monnayable ;

Que M. [D] allègue en second lieu qu'un accord est intervenu sur la chose et le prix de 80.000 €; qu'il en veut pour preuve :

- le fait que M. [X] a pris sa suite immédiate le 1er août 2011, sans qu'il puisse invoquer une donation ou une location gérance,

- que c'est M. [X] qui a versé aux débats son attestation du 20 juin 2011, mentionnant 'une vente', son 'aval'auprès de la questure du Sénat afin que celle-ci agrée son successeur et le prix de 80.000 €,

- qu' en utilisant son attestation pour obtenir son agrément et pour solliciter des prêts bancaires, M. [X] a nécessairement accepté et ratifié le principe même de la cession de l'exploitation et le prix de 80.000 € ;

Qu'il souligne que la preuve est libre en matière commerciale et qu'aucune réduction du prix ne peut être ordonnée, vu l'accord des parties sur le prix de 80.000 € ;

Mais considérant que M. [X] réplique à juste raison que l'autorisation d'exploiter l'activité de location de bateaux est précaire et révocable à tout moment, qu'elle est personnelle et ne peut être cédée; qu'en conséquence, M. [D] ne pouvait céder 'une concession' comme mentionné dans son attestation du 20 juin 2011; qu'il ne pouvait pas plus monnayer un droit de présentation d'un successeur; qu'en effet, l'article 9 du cahier des charges applicable aux autorisations diverses accordées dans le [Localité 5] stipule qu'à l'expiration d'une autorisation ou en cas de cessation du fonctionnement d'une exploitation, un nouvel exploitant est désigné si les questeurs estiment opportun de maintenir l'exploitation, qu'à cet effet une procédure de sélection peut être engagée sous leur autorité et que l'autorisation d'exploiter prend la forme d'un arrêté de questure ;

Qu'il convient d'observer que la seule lettre adressée par M. [D] à la questure du Sénat faisait état de la vente de sa flotte de voiliers et non de la cession d'un fonds de commerce ;

Considérant que l'exploitation d'une activité commerciale sur le domaine public présente toujours un caractère précaire interdisant l'application du statut des baux commerciaux, mais que cette circonstance n'interdit pas l'existence d'un fonds de commerce; que la clientèle représentant un élément essentiel sans lequel le fonds de commerce ne saurait exister, cette clientèle doit être propre au commerçant et ne se confond pas avec l'achalandage induit par la situation des lieux ;

Qu'en l'espèce, M. [D], exploitant de l'activité de location de bateaux sur le bassin du [Localité 5], ne justifie pas d'une clientèle propre alors :

- qu'il était soumis au règlement intérieur du [Localité 5] et ne pouvait exercer son activité que pendant les horaires d'ouverture du jardin et s'en trouvait privé en cas de fermeture temporaire pour cause de travaux d'entretien ou de manifestations particulières comme par exemple les 10 mai 2014 et 8 juillet 2014,

- que sa clientèle ne peut se caractériser par les moyens qu'il mettait en oeuvre, à savoir les bateaux, s'agissant d'éléments corporels,

- que ses clients, loueurs de bateaux, ne constituaient pas une clientèle autonome indépendante de la situation de son exploitation,

- qu'il bénéficiait de l'attractivité exercée par le site du jardin et ne démontre aucune fidélisation de clients qui résulterait de ses qualités de commerçant,

- que de surcroît, c'est la questure du Sénat qui fixe les prix de location des bateaux, privant ainsi l'exploitant de son autonomie sur ce point ;

Qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [D], qui n'était pas titulaire d'un fonds de commerce, ne pouvait le céder; qu'au demeurant aucun accord sur le prix de 80.000 € n'est démontré; que les faits invoqués par M. [D] consécutifs à la délivrance de son attestation du 20 juin 2011 ne démontrent pas l'accord de M. [X] sur ce prix ;

Qu'il était loisible à M. [D] de céder le matériel qui servait à l'exploitation de son activité et qu'il avait laissé à la disposition de M. [X]; que cependant il a repris ce matériel le 30 août 2011 ;

Qu'en conséquence, M. [D] doit être débouté de sa demande en paiement de la somme de 80.000 € ainsi que de sa demande de dommages-intérêts ;

Considérant, vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, qu'il y a lieu d'allouer la somme de 4.000 € à M. [X] et de rejeter la demande de M. [D] de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

La cour,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :

DÉBOUTE M. [D] de toutes ses demandes à l'encontre de M. [X],

EN CONSÉQUENCE, dit que M. [D] devra rembourser à M. [X] les sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire,

CONDAMNE M. [D] à payer à M. [X] la somme de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [D] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LA PRÉSIDENTE EMPÊCHÉE

C. GLEMET Anne-Marie GALLEN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 14/16061
Date de la décision : 07/10/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°14/16061 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-07;14.16061 ?
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