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04/10/2016 | FRANCE | N°12/09503

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 04 octobre 2016, 12/09503


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 04 OCTOBRE 2016



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/09503



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 25 Mai 2012 par le conseil de prud'hommes de SENS -section encadrement- RG n° 12/00006







APPELANTE



Madame [Q] [V]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Cécile BONNET ROUME

NS, avocat au barreau de PARIS, D0706







INTIMÉE



SA MONDIAL AUDIT-CAF

[Adresse 2]

[Adresse 2]

en présence de Monsieur [E] [N], Expert comptable, représentée par Me David BEILLAN, av...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 04 OCTOBRE 2016

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/09503

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 25 Mai 2012 par le conseil de prud'hommes de SENS -section encadrement- RG n° 12/00006

APPELANTE

Madame [Q] [V]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Cécile BONNET ROUMENS, avocat au barreau de PARIS, D0706

INTIMÉE

SA MONDIAL AUDIT-CAF

[Adresse 2]

[Adresse 2]

en présence de Monsieur [E] [N], Expert comptable, représentée par Me David BEILLAN, avocat au barreau de PARIS, C0190

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 mai 2016, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Bruno BLANC, Président

Madame Roselyne GAUTIER, Conseillère

Madame Anne PUIG-COURAGE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Chantal HUTEAU, lors des débats

ARRÊT :

- Contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et prorogé à ce jour.

- signé par Monsieur Bruno BLANC, Président et par Madame Chantal HUTEAU, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

La cour est régulièrement saisie de l'appel interjeté le 5 octobre 2012, par Madame [Q] [V], à l'encontre du jugement du Conseil de Prud'hommes de Sens, en date du 25 mai 2012 qui a :

- Requalifié le licenciement pour faute lourde en un licenciement pour faute grave ;

-Condamné la SA MONDIAL AUDIT-CAF à payer à Madame [Q] [V] les sommes suivantes :

* 2 316,17 6 € au titre des congés payés;

*1000,00 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure ;

* 1 384,20 € à titre de dommages et intérêts pour le DIF ;

* 1124,16 € à titre de dommages et intérêts pour le maintien de la prévoyance ;

*1 000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

-Débouté les parties du surplus des demandes ;

-Fixé la moyenne des salaires à la somme de 3 621,25 € ;

-Ordonné l'exécution provisoire ;

-Mis les dépens à la charge des 2 parties.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

Madame [Q] [V] a été embauchée par contrat à durée déterminée et à temps partiel le 6 Janvier 1988 par la SARL COMPTABILITE ET ASSISTANCE FISCALE ,Société d'expertise comptable implantée à [Localité 1] pour exercer les fonctions d'assistante, niveau 5, échelon B, coefficient 160.

Par avenant du 1er juillet 1989, le contrat de travail de Madame [V] est transformé en contrat à durée indéterminée à temps plein.

Le 1er Janvier 1998, elle est nommée responsable du bureau de SENS, établissement secondaire ouvert en septembre 1997.

Le 20 Février 2006 la SARL COMPTABILITE ET ASSISTANCE FISCALE cède ses deux fonds de commerce à la SA MONDIAL AUDIT-CAF avec reprise des contrats de travail, dont celui de Madame [V].

Suite à une plainte d'une personne non cliente de l'entreprise pour laquelle Madame [V] n'aurait pas exécuté un travail pour lequel elle aurait été rémunérée , et à des investigations internes dans la base informatique, la SA MONDIAL AUDIT-CAF considérant que Madame [V] avait détourné à son profit de la clientèle la convoque pour le 14 Décembre 2011 à un entretien préalable par un courrier remis en mains propres avec mise à pied conservatoire.

Le 19 Décembre 2011, Madame [V] est licenciée pour faute lourde.

Le 9 janvier 2012, Madame [V] saisit le Conseil de Prud'hommes pour contester son licenciement.

Le 19 Janvier 2012, la SA MONDIAL AUDIT-CAF déposait une plainte auprès du Procureur de la République pour travail dissimulé, complicité d'escroquerie, faux et usage en écriture privée.

Madame [V] demande à la Cour de :

-infirmer le jugement entrepris ;

-juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

-condamner la Société MONDIAL AUDIT-CAF à payer à Madame [V] :

*10.863,75 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

*1.086,37 € au titre des congés payés afférents ;

*2.316,17€ au titre des congés payés pour la période du 1er juin au 20 décembre 2011 ;

*1.453,81 € au titre du salaire pour la période de mise à pied conservatoire ;

et 143,38 € au titre des congés payés afférents ;

*28.766,83 €au titre de l' indemnité de licenciement ;

*134.224,00 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 21.726,00 € au titre de l'indemnité pour non respect de la procédure ;

*8.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour procédure vexatoire ;

*5.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour non respect des règles relatives au DIF ;

*3.500,00 €à titre de dommages et intérêts pour non respect des règles relatives au maintien de la prévoyance ;

*3.500,00 € au titre de l'indemnité au titre de l'Article 700 du CPC :

*les Intérêts légaux à compter de la convocation de la partie défenderesse devant le bureau de conciliation

-Condamner la Société MONDIAL AUDIT-CAF aux entiers dépens.

La SA MONDIAL AUDIT-CAF demande à la Cour de :

A titre principal,

-infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 25 mai 2012 rendu par le Conseil de Prud'hommes de Sens en ce qu'il a requalifié le licenciement pour faute lourde de Madame [V] en licenciement pour faute grave, et condamné la société MONDIAL AUDIT au paiement de diverses sommes ;

-juger la procédure de licenciement pour faute lourde de Madame [V] régulière;

- juger le licenciement de Madame [V] pour faute lourde, réel et sérieux ;

- juger que la société MONDIAL AUDIT n'était pas tenue d'informer Madame [V] du maintien du régime de prévoyance dans la lettre de licenciement ;

-débouter Madame [V] de l'ensemble de ses demandes ;

-condamner Madame [V] au remboursement des sommes suivantes, déjà réglées en exécution du jugement ;

-A titre subsidiaire,

-confirmer le jugement en ce qu'il a requalifié le licenciement de Madame [V] en faute grave ;

-confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société MONDIAL AUDIT au paiement de :

*2.316,17 € au titre des congés payés sur la période du 1er juin au 20 décembre 2011;

* 1.384,20 € à titre de dommages-intérêts au titre du DIF ;

- réformer, pour le surplus, le jugement en ce qu'il a condamné la société MONDIAL AUDIT au paiement des sommes suivantes :

*1.000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure ;

*1.124,16 € de dommages-intérêts au titre de la prévoyance ;

-condamner Madame [V] au remboursement des sommes déjà réglées en exécution du jugement ;

-condamner Madame [V] au paiement de la somme de 5000 0 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats

SUR CE

Sur la qualification du licenciement

Lorsque le licenciement est motivé par une faute lourde, le salarié est privé non seulement du droit au préavis et à l'indemnité de licenciement, mais également, en application de l'article L.3141-26 du code du travail, de l'indemnité compensatrice de congés payés prévue à l'article L.3141-21 du même code.

La faute lourde est celle qui, comme la faute grave, résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié ,et constituant une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle, qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis.

Elle suppose, en outre, l'intention de nuire du salarié.

L'employeur qui invoque la faute lourde pour licencier doit en rapporter la preuve.

Aux termes de la lettre de licenciement du 19 décembre 2011 qui fixe les limites du litige, il est reproché à Madame [V] une faute lourde caractérisée pour l'employeur par les griefs suivants :

" (...)Vous avez été reçue le mercredi 14 décembre 2011 à 10 h 30 afin d'être entendue en vos explications sur les griefs portés à votre encontre, conformément aux dispositions de l'article L 1232-2 du Code du Travail.

Ces agissements, constitutifs d'une faute lourde, portent atteinte volontaire et intentionnelle aux intérêts et à la notoriété de notre société, par :

Un comportement déloyal

Le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi, conformément aux articles 1134 du Code Civil et L 1222-1 du Code du Travail.

Or, vous avez sciemment violé cette obligation en vous livrant à des actions portant atteinte aux intérêts immédiats et futurs de la société, en apposant sur des documents fiscaux de personnes ou d'entreprises, les coordonnées et l'en-tête de notre cabinet d'expertise comptable, ou en éditant des documents sur le papier à

en- tête de notre cabinet, pour des entités privées ou morales non clientes.

Ces faits, outre qu'ils caractérisent la déloyauté, excipent de la réalité d'une activité occulte de votre part.

Les faits :

.Vous avez tenu, sur nos matériels informatiques, la comptabilité de Madame [G] [K], moyennant une rétribution aux dires de cette personne et comme en atteste les déclarations en notre possession de 1 200 €.

. Vous avez assuré, toujours contre ...émolument en espèces, la rédaction des déclarations des consorts [J] ;

.Vous avez établi une étude pour la SAS RACING AUTO 89 sans que le temps consacré n'apparaisse sur vos états d'interventions quotidiens, ce qui confirme le caractère déloyal de ces prestations personnelles ;

- Vous avez réalisé l'immatriculation de la société LES DELICES DE RHANIA sans que cette entreprise soit cliente de notre cabinet.

Cette citation déroge à deux principes fondamentaux : le premier, celui de l'obligation de loyauté telle que la tête de chapitre l'exprime ; le second, inhérent aux prescriptions régissant notre profession, à savoir que les actes juridiques ne doivent être que l' accessoire de notre profession.

Or, au cas d'espèce, nous n'avons jamais, ni au préalable, ni après, été en charge de la comptabilité de cette société.

Tout ceci effectué sous en-tête du cabinet CAF.

.EURL CCP : le même constat a été effectué que pour le dossier précédent, toujours sous en-tête du cabinet CAF.

. Dossier 4 PATTES TENDRESSE : vous avez établi et effectué le suivi social de cette association sans qu'elle soit cliente du cabinet ; des fiches de paie et des bordereaux de charges matérialisent votre intervention.

. Dossier SAS ADN :

Cette société n'est pas inscrite dans notre portefeuille client, alors que sur nos fichiers informatiques, nous avons retrouvé une balance générale pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 ; ce dossier avait été détruit par vos soins et régénéré grâce à nos sauvegardes.

Un comportement concurrentiel

Les relations contractuelles régies par le Code du Travail et le droit positif obligent le salarié à ne pas se livrer à une activité concurrente de celle de son employeur.

Les informations, déclarations et documents en notre possession confirment que vous vous êtes livrée à de tels agissements, en tenant la comptabilité et, en émettant des documents sociaux ,fiscaux et juridique contre rémunération.

Affaires [K], [J], RACING AUTO 89, LES DELICES DE RHANIA, EURL CCP ; 4 PATTES TENDRESSE, SAS ADN et autres.

L'exercice illégal de la profession de comptable

Vous semblez demeurer dans l'ignorance du caractère réglementé de la profession de comptable.

L'exercice de cette discipline à titre libéral impose d'être titulaire d'un diplôme spécifique.

Pour couvrir vos agissements frauduleux, vous vous êtes servis de notre société pour accomplir votre forfait.

L'utilisation frauduleuse du papier en-tête et de la raison sociale du cabinet à des fins personnelles .

Selon les propos de Madame [K], ainsi que des différents documents entre nos mains, vous avez édité des documents pour vos" proprés intérêts et ceux dè" vos" clients occultes sur notre papier à en-tête :

. Compte prévisionnel RACING AUTO 89,

. Immatriculation EURL CCP,

. Immatriculation LES DELICES DE RHANIA,

. Dossier comptable et fiscal de Madame [K].

L'utilisation frauduleuse des moyens techniques du cabinet à des fins personnelles

Au vu des documents retrouvés sur votre poste de travail et dans les fichiers de sauvegarde informatique, il s'avère que le dossier [K]. a été intégralement saisi sur le logiciel dont la licence appartient à notre société.

. Pour le dossier 4 PATTES TENDRESSE, vous avez émis et édité des documents sociaux au profit du salarié [X].

. Pour le dossier RACING AUTO 89, vous avez émis et édité les documents suivants :

. Rédaction d'un contrat de travail,

. Due, Urssaf de 1'[Localité 2],

. Tableau de remboursement d'un emprunt,

. Compte de résultat prévisionnel,

. Prévisionnel de trésorerie.

. Dossier Sas ADN :

Cette société n'est pas inscrite dans notre portefeuille client, alors que sur nos fichiers informatiques, nous avons retrouvé une balance générale pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 ; ce dossier avait été détruit par vos soins et régénéré grâce à nos sauvegardes.

Le détournement de clientèle

Le fait que les personnes pour lesquelles vous intervenez à titre personnel appellent le cabinet ou qu'ils, soient, pour certains déjà clients pour une autre entité, caractérisent la Constitution du délit de détournement de clientèle.

Vous les avez détournées de notre société en violation de toutes les clauses de votre contrat de travail et avez porté ainsi délibérément atteinte aux intérêts financiers et économiques de notre société.

. La société CCP a comme dirigeant Mr [T], qui est client au titre de son entreprise individuelle.

. L'association 4 PATTES TENDRESSE :

Madame [N] [C], Présidente de l'association LE CLOS DE GANOU, semble, selon les documents en notre possession, être en relation avec Madame [S] [W], elle-même Directrice de l'association 4 PATTES TENDRESSE.

Comment expliquer que la première citée soit cliente et pas la deuxième, alors que vous avez effectué une mission sociale à son profit sans qu'elle soit dans notre portefeuille de clientèle.

. Dossier Sas ADN :

Cette société n'est pas inscrite dans notre portefeuille client, alors que sur nos fichiers informatiques, nous avons retrouvé une balance générale pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 ; ce dossier avait été détruit par vos soins et

régénéré grâce à nos sauvegardes.

Le fait de ne pas être inscrite auprès du Registre du Commerce et à l'Ordre des experts-comptable s interdit factuellement tout contact vers des entreprises.

Ce qui est flagrant dans cette affaire, c'est que vous avez, lors d'appels reçus au cabinet par des clients prospects, incité par des moyens fallacieux et corrupteurs à ce qu'ils vous confient leur comptabilité, privant par ces menées votre employeur de

l'apport potentiel d'activité dont il est en droit de prétendre.

L'abus de confiance

Votre position hiérarchique au sein de la structure du cabinet CAF, l'utilisation de l'en-tête de notre société à des fins personnelles et à notre insu, confèrent à vos agissements un abus de confiance caractérisé marquant l'intention de porter atteinte et de nuire aux intérêts de notre société.

Au surplus, vous avez volontairement effacé un certain nombre de fichiers informatiques, qui s'avèrent être, après édition des sauvegardes journalières, des documents de complaisance au profit de tiers.

Les faits :

. Le fichier social de la société SEF CONSTRUCTIONS, répertorié ordinairement sous le numéro 381505, libelle des salaires pour Monsieur [O] [A] demeurant [Adresse 3], pour les périodes de juillet, août et septembre 2011 d'un montant brut de 1 365.03 € avec des déductions pour convenances personnelles.

Dans un fichier isolé, dont vous avez pris soin de distraire la trace informatique, mais qui, pour des raisons de sécurité interne, demeurait sur nos sauvegardes journalières, nous avons.retrouvé, pour la même période et pour la même personne, des feuilles de paie pour des montants de 2 500 € brut plus 171.40 € d'indemnités,

sans absence.

Pour ce même dossier, vous avez établi des fiches de paie pour Monsieur [O] [U], demeurant [Adresse 3].

Mis à part ces documents réalisés sous la référence SEF, depuis effacés, il n'apparaît pas, dans la société SEF CONSTRUCTION de salarié à ce nom, malgré des salaires de juillet, août et septembre 2011 pour un montant brut mensuel de 2500 €.

Nous laisserons aux instances compétentes le soin de statuer sur la finalité de ces documents.

A quelle fin étaient destinés ces documents, et pourquoi avoir tenté de les effacer, si ce n'est pour masquer vos agissements contraires à la loi.

. Dossier Sas ADN :

Cette société n'est pas inscrite dans notre portefeuille client, alors que sur nos fichiers informatiques, nous avons retrouvé une balance générale pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 ; ce dossier avait été détruit par vos soins et régénéré grâce à nos sauvegardes.

Nous ne pouvons que constater, au vu des nombreuses pièces en notre possession, de votre attitude au moment où il y a eu révélation de tout ce qui précède, en voulant effacer toute trace de vos faits illicites auxquels vous vous étiez livrés, que votre intention était bien la mise en place d'une activité parallèle et dissimulée, en utilisant tous les moyens que vous pouviez soustraire à votre employeur, à savoir :

. Son nom,

. Sa capacité technique,

. Ses moyens techniques,

. Sa renommée,

. Ses clients potentiels,

. Son papier à en-tête,

Ceci à des fins purement personnelles et pécuniaires.

Par ces motifs, nous vous informons de votre licenciement pour faute lourde, à effet immédiat dès réception de la présente ou de sa première présentation, sans indemnités de préavis, ni de licenciement.

2 500 €.

En outre, votre comportement constituant une faute lourde et inexcusable, vous n'aurez pas droit à l'indemnité de congés payés sur la période en cours.

Nous vous rappelons que vous faites l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire  ; la période du 8 décembre au 19 décembre nécessaire pour effectuer la procédure de licenciement ne sera pas rémunérée

Nous vous précisons que vous ne bénéficiez d'aucune portabilité tant en matière de DIF que de prévoyance mutuelle frais de santé. (...)".

La Société MONDIAL AUDIT-CAF reproche donc à Madame [V] 7 types de griefs et pour chacun d'entre eux cite divers dossiers pris parmi les 8 visés par la lettre de licenciement.

Les autres dossiers visés dans les conclusions mais ne figurant pas dans la lettre de licenciement ne seront pas pris en considération

La Cour constate :

- pour le dossier [J]

Les affirmations de l'employeur ne reposent que sur l'attestation de Monsieur [I] le supérieur hiérarchique de la salariée qui affirme que lors de l'entretien celle ci a reconnu les faits.

Cette attestation qui émane de celui qui conduisait l'entretien préalable n'est corroborée par aucun autre élément et est mise en cause par les dénégations de la salariée et contredite par les attestations précises et concordantes de la gérante de l'entreprise concernée et d'une employée de ladite entreprise.

- pour le dossier Société CCP ([T])

Au vu des explications de la salariée et de l'attestation de Monsieur [T] qui était déjà client de la Société MONDIAL AUDIF CAF, les griefs reprochés ne sont pas établis.

- pour le dossier Association 4 PATTES TENDRESSE et l'Association CLOS DU GANOU

Au vu de l'attestation et du courrier de la gérante de l'Association CLOS DU GANOU le montage reproché n'est pas imputable à Madame [V] mais le serait à l'expert comptable, et Madame [V] n'a jamais été rémunérée à titre personnel.

Les griefs reprochés ne sont donc pas établis.

- pour le dossier de la Société ADN

Les allégations de l'employeur sont contredites par l'attestation de l'épouse du gérant de ladite Société qui confirme les explications données par Madame [V] sur l'établissement depuis 2003 à titre gracieux de la déclaration fiscale en raison des liens d'amitié existant avec le fondateur de la Société CAF.

Par ailleurs aucun élément ne permet de dire que la salariée aurait supprimer toute trace informatique.

- pour le dossier de la Société RACING AUTO 89

Au vu de l'attestation de la gérante de la société , les pièces produites ar l'employeur ne sont pas suffisantes pour établir les griefs reprochés.

- pour le dossier de la Société DELICES DE RHANIA

L'employeur ne justifie pas du fait que ladite société n'était pas cliente . Par ailleurs il résulte de l'attestation du gérant de cette société qu'un devis et une mission avait été signés et que Madame [V] n'a pas été rémunérée à titre personnel.

Les pièces du dossier ne sont pas suffisantes pour établir les fautes imputées à la salariée, celle ci ayant notamment la charge de la réception des nouveaux clients

- pour le dossier de la Société SEF CONSTRUCTION

Au vu de l'attestation du gérant de la Société les griefs invoqués ne sont pas établis . De même aucun élément ne permet de vérifier que la salariée aurait tenter d'effacer le dossier informatique.

- pour le dossier [K]

Madame [V] reconnaît avoir réalisé une déclaration 2035 qui correspond à la déclaration des bénéfices non commerciaux pour le compte de Madame [K], et précise que cette personne lui a été envoyée par un client du Cabinet , ami du fondateur de la Société ;

Au vu des pièces produites(relevé bancaire de la salariée et l' attestation de Madame [K] ce travail a été rémunéré 200 € par chèque et non 2000 € en espèces tel qu'affirmé dans la lettre de licenciement ;

Par ailleurs la déclaration effectuée au nom de Madame [K], si elle ne mentionne pas la Société MONDIAL AUDIT-CAF comme déclarant , mais Madame [V], indique cependant le numéro de SIRET de la Société MONDIAL AUDIT-CAF.

C'est donc à juste titre que l'employeur lui reproche dans ce dossier d'avoir exercé illégalement la profession d'expert comptable, d'avoir utilisé à des fins personnelles la raison sociale de la Société , et ses moyens techniques , et d'avoir détourné à son profit une cliente.

La Cour au vu des constatations ci dessus considère que:

- si seuls les faits concernant le dossier [K] sont établis pour partie , ils constituent eu égard à la fonction exercée et malgré le faible gain financier, un manquement de Madame [V] suffisamment grave à ses obligations d'exécuter de façon loyale son contrat de travail pour rompre la confiance de son employeur et rendre impossible son maintien dans l'entreprise même pendant la durée du préavis,

- il n'est versé par contre aux débats aucune pièce permettant d'établir l'intention de nuire de la salariée.

La Cour confirme donc le jugement qui a requalifié le licenciement pour faute lourde en licenciement pour faute grave et alloué à Madame [V] la somme de 2316,17 € au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés.

Sur la régularité de la procédure

C'est à juste titre qu'au vu du certificat médical produit, de la surcharge de la date , le jugement a relevé l'existence d'un doute sur la date de remise en main propre de la lettre de licenciement.

La Cour considère donc que la date de remise à retenir est celle de du 8 décembre 2011et non celle du 7 décembre 2011 et que de ce fait le délai de 5 jours entre la convocation et l'entretien préalable n'a pas été respecté.

La Cour confirme donc le jugement qui a alloué à Madame [V] la somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts en application de l'article 1235-2 du code du travail.

Sur les dommages et intérêts pour non respect des règles relatives au DIF et au maintien de la prévoyance

*le DIF

L'employeur reconnaît ne pas avoir respecté ses obligations en matière de DIF dans la mesure où le licenciement prononcé pour faute lourde serait requalifié en faute grave , mais ne verse aux débats aucun élément permettant à la Cour d'évaluer financièrement les droits à formation e la salariée .

Dès lors compte tenu de son ancienneté et de la nature de ses fonctions , la Cour infirmant le jugement alloue à Madame [V] la somme de 3500 € à titre de dommages et intérêts pour non respect des règles relatives au DIF.

*la prévoyance

A l'époque de la rupture du contrat (décembre 2011), seul l'article 14 de l'ANI du 11 janvier 2008 prévoyait cette obligation, la loi de sécurisation professionnelle de 2013 n'étant pas encore applicable .

Cet article 14 modifié de l'ANI, du 11 janvier 2008 , étendu le 1er juillet 2009 n'était applicable qu'aux entreprises membres d'une organisation patronale affiliée au Medef, à la CGPME et à l'UPA et aux autres entreprises relevant d'une branche professionnelle, représentée par ces 3 organisations d'employeurs et n'était pas opposable, aux autres secteurs professionnels, notamment les professions libérales, et donc les experts-comptables, affiliés à L'ANPL.

La société MONDIAL AUDIT CAF n'étant pas soumise à l'obligation de maintien du régime de prévoyance, la Cour infirme le jugement et déboute Madame [V] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef.

La SA MONDIAL AUDIT-CAF demande que soit ordonnée la restitution des sommes versées à ce titre en vertu du jugement assorti de l'exécution provisoire.

La Cour rappelle que :

- le présent arrêt, infirmatif sur ce point constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement et que les sommes devant être restituées porteront intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision ouvrant droit à restitution, valant mise en demeure ;

- en application des articles 1289 et suivants du code civil les deux parties étant débitrices l'une envers l'autre, leurs dettes respectives se compensent.

Sur les intérêts

Les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2012, date de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation pour les créances à caractère salarial, et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Compte tenu de la nature de la décision et de la disparité économique des parties ,la Cour laisse à la charge de chacune d'entre elles ses frais irrépétibles.

Par contre Madame [V] est condamnée à supporter les entiers dépens de l'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DÉCLARE l'appel recevable,

CONFIRME le jugement, en ce qu'il a :

- Requalifié le licenciement pour faute lourde en un licenciement pour faute grave ;

- Condamné la SA MONDIAL AUDIT-CAF à payer à Madame [Q] [V] les sommes suivantes :

* 2 316,17 6 € au titre des congés payés ;

*1000,00 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure ;

*1 000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

-Débouté les parties du surplus des demandes ;

-Fixé la moyenne des salaires à la somme de 3 621,25 € ;

-Mis les dépens à la charge des 2 parties.

INFIRME le jugement pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la SA MONDIAL AUDIT-CAF à payer à Madame [Q] [V] la somme de 3500 €à titre de dommages et intérêts pour non respect des règles relatives au DIF ;

REJETTE la demande de dommages et intérêts au titre de la prévoyance ;

REJETTE le surplus des demandes ,y compris celles au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2012, date de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation pour les créances à caractère salarial, et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

DIT que les dettes respectives des parties l'une envers l'autre se compensent ;

REJETTE le surplus des demandes ;

CONDAMNE Madame [V] aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 12/09503
Date de la décision : 04/10/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°12/09503 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-04;12.09503 ?
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