RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 29 Septembre 2016
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/07294
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Juin 2013 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 12/01209
APPELANTE
Société TUI FRANCE (VENANTAUX DROITS DE LA SOCIETE TOURAVENTURE )
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Virginie DEVOS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0438
INTIMEE
URSSAF PARIS-REGION PARISIENNE
Division des Recours amiables et judiciaires
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par M. [N] en vertu d'un pouvoir général
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 3]
[Adresse 3]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 juin 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Bernadette VAN RUYMBEKE, Présidente de chambre
Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller
Mme Marie-Odile FABRE DEVILLERS, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Madame Laïla NOUBEL, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller, faisant fonction de Président,
et par Madame Anne-Charlotte COS, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Les sociétés Hotels Clubs, Voyage Touraventure, Touraventure Holding France, Holding Nouvelles Frontières, Nouvelles Frontières Distribution et Havas Loisir, ont le même objet social et la même activité : la commercialisation de prestations de voyages, et de vols 'secs' et constituaient en 2006 une unité économique et sociale : Nouvelles Frontières, et relevaient d'un centre unique de paiement des cotisations sociales. Courant 2010, l'ensemble de ces sociétés a fusionné au sein de la société TT Holding devenu TUI France
Suite à de nombreux contrôles de l'URSSAF et des contentieux en cours, l'ensemble des sociétés Nouvelles Frontières avaient décidé de mettre un terme définitif aux litiges en cours pour instaurer un dispositif de comptabilisation de l'avantage en nature représenté par l'attribution de billets d'avions gratuits au personnel.
C'est ainsi que les différentes sociétés se sont engagées par protocole du 11 octobre 2007 à mettre en place à compter du 1er juin 2008 un dispositif de déclaration des avantages en nature sur les bulletins de paie correspondant aux billets d'avion sur les bases suivantes :
- billets d'avions hors Corsair: 70% du prix facturé par les compagnies aériennes à la société du Groupe Nouvelles Frontières
-Billets Corsair membre du groupe Nouvelles Frontières: 70% du prix public le plus bas émis au jour de la réservation du vol.
L'URSSAF dans le même protocole s'engageait à abandonner les majorations, à ne pas contrôler les sociétés jusqu'à mai 2008 'en raison du paiement comptant des redressements opérés pour les années antérieures sans application de la tolérance ministérielle d'un abattement de 30% sur le prix pondéré' et à déclencher un contrôle au début de l'année 2009.
Ce n'est qu'à l'automne 2001 que le services de l'URSSAf ont procédé à un contrôle de l'application de la législation sociale au sein de la société Voyages Touraventure sur la période du 1er octobre 2009 au 31 décembre 2010 à la suite de laquelle une lettre d'observations a été envoyée le 11 octobre 2011 dans la quelle elle indiquait :
1°) envisager un redressement portant sur plusieurs points :
- l'avantage en nature voyage que constituait l'octroi de billets d'avion à des salariés calculés, et dans la mesure où n'étaient pas produits les factures de billet Corsair le calcul était fait sur 70% des sommes enregistrées en comptabilité au compte 641600 intitulé 'billets du personnel
- la prise en charge d'une partie du prix de location de véhicules de véhicules loués à titre personnel et professionnel par deux salariés et les frais d'assurance de véhicules.
2°) faire des observations pour l'avenir en précisant que la société ne pourrait plus bénéficier de l'abattement de 30% résultant de la tolérance administrative lorsque les avantages en nature sont des produits ou commercialisées par l'entreprise en ces termes: 'Eut égard à l'évolution de la jurisprudence et notamment à l'arrêt de la CCass SEB Calor/URSSAF n° 0914364 du 1er juillet 2010, les billets d'avion offerts aux salariés des entreprises de l'UES de Nouvelles Frontières ne peuvent pas bénéficier de la tolérance concernant les biens et services produits par l'entreprise.
Deux autres points de redressement dont l'un en négatif n'ont jamais été contestés.
Après que la société TUI France ait contesté le redressement et l'observation pour l'avenir, l'URSSAF les a maintenus et mis le 27 décembre 2011 la société en demeure de payer la somme de 985496€ de cotisations et 406391€ de majorations provisoires.
La commission de recours amiable saisie d'une contestation maintenait le 13 avril 2012 le redressement et l'observation pour l'avenir.
Le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un jugement du 20 juin 2013 a :
- déclarée bien fondée la décision de la commission de recours amiable du 13 avril 2012
- condamné la société TUI France venant aux droits de la société Voyages Touraventure à payer à l'URSSAF la somme de 666285€ de cotisations et 105391€ de majorations
- débouté la société TUI France venant aux droits de la société Touraventues de toutes ses demandes
La société a fait soutenir par son avocat des conclusions écrites dans lesquelles elle demande à la Cour de joindre les dossiers de toutes les sociétés et d'infirmer le jugement et statuant à nouveau de :
- annuler les décisions de la commission de recours amiable
- annuler les observations pour l'avenir concernant l'avantage en nature billet d'avion
- annuler les redressements opérés
- ordonner le remboursement des cotisations versées
L'URSSAF a fait soutenir par son conseil des conclusions écrites dans lesquelles elle s'oppose à la jonction des dossiers et conclut à la confirmation du jugement et sollicite la condamnation de la société TUI France à lui payer 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la jonction des procédures
Aux termes de l'article 367, le juge peut ordonner la jonction de plusieurs instances s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.
En l'espèce il existe entre les affaires un lien évident puisqu'il s'agit de sociétés devenues la même entité, que les questions de principe posées sont les mêmes : d'une part le redressement sur l'application de cotisations sociales sur des billets stand by accordées au salariés et leur éventuel mode de calcul, et d'autre part la question pour l'avenir de l'abattement de 30% sur les billets gratuits.
Dans la mesure où c'est la même formation de la Cour d'appel qui va statuer le même jour dans toutes les affaires portant sur le contrôle des sociétés du groupe TUI, la bonne administration de la justice n'impose pas qu'il y ait jonction, le risque de décisions contradictoires étant écarté. En revanche, il apparaît que la situation des sociétés au regard du contrôle n'est pas exactement identique : les sommes réclamées sont différentes, la période couverte par le contrôle n'est pas la même, le mode de calcul de l'URSSAF sur la valeur des billets a varié en fonction des éléments produits et il n'est pas opportun de rendre une seule décision.
Il convient donc de débouter la société TUI de sa demande de jonction.
Sur le redressement concernant les billets sans réservation dits 'stand by'
Le billet stand by, ou billet sans réservation, permet au salarié qui en bénéficie de pouvoir prendre place dans un avion, mais seulement s'il reste des places dans celui-ci.
La société TUI France prétend tout d'abord que lors du contrôle de 2006 et de la signature de l'accord ces billets n'auraient pas été inclus dans le protocole et que l'URSSAF aurait donc tacitement admis qu'ils ne fassent pas l'objet de cotisations, que l'existence de ce précédent empêcherait que l'URSSAF puisse redresser la société en appliquant des cotisations sur ces derniers.
La société soutient que ces billets particuliers, sans réservations, ont été récemment inclus dans le même compte dans la comptabilité, mais qu'ils n'ont pas la même nature que les billets gratuits avec réservation, qu'ils ne sont pas réellement un avantage puisque jusqu'au moment du départ le bénéficiaire n'a pas de certitude d'embarquer et que s'il y a une escale sur sa route il n'a pas de certitude de continuer sa route.
Elle rappelle que ne peuvent être considérés comme des avantages en nature, que les billets d'un prix supérieur à leur valeur, c'est à dire le prix le plus bas payé par les autres voyageurs, et que compte tenu des désavantages du billet sans réservation, le Ministère du travail a, dans une lettre ministérielle datée du 28 janvier 2009, fixé le barème applicable à ces billets, revalorisé chaque année et qui doit être applicable aux salarié de Nouvelles Frontières. Elle soutient que les salariés de Nouvelles Frontières s'acquittent des taxes aéroport sur ces billets quand ils embarquent, et que depuis mai 2010 une grille tarifaire fixe le coût supporté par les salariés.
L'URSSAF soutient que l'accord conclu avec les sociétés du groupe Nouvelles Frontières était relatif à l'octroi de tous les billets gratuits aux salariés et n'excluait pas les billets 'stand by', qu'en conséquence la société ne peut invoquer un précédent relatif à ces billets.
Elle estime que ces billets permettent aux salariés du groupe de voyager gratuitement sur toutes les destinations et que dès lors que les passagers peuvent embarquer, ces billets sont incontestablement un avantage en nature qui doit être évalué sur la base du prix le plus bas du marché ou, s'il n'est pas connu, sur le prix où la société du groupe Nouvelles Frontières a acheté son billet à la compagnie aérienne.
L'existence d'un précédent
Pour se prévaloir en application de l'article R243-59 du code de la sécurité sociale d'un accord tacite de l'URSSAF lors d'un contrôle précédent, la société doit établir que l'organisme avait eu connaissance de la pratique lors de ce contrôle et ne pas avoir formulé d'observations ou de redressement, la législation ne doit pas avoir évolué et la pratique ne doit pas avoir été modifiée.
En l'espèce ainsi qu'il ressort de la lettre d'observations du 30 août 2006 qui a fait suite au contrôle de 2006, préalablement au contrôle, le redressement portait très précisément sur l'octroi de billets gratuits, sans qu'il soit précisé que les billets 'standby' n'étaient pas inclus dans le redressement alors qu'incontestablement il s'agit de billets qui permettent au bénéficiaire de voyager en avion, même s'il n'y a pas de réservation et donc de 'billets gratuits'. En outre le groupe TUI qui prétend qu'ils n'apparaissaient pas dans le même compte que les billets avec réservation avant mai 2010, n'en justifie pas alors même qu'elle ne conteste pas payer ces billets aux compagnies aériennes de la même façon que les billets avec réservation et qu'elles n'indique pas dans quelle rubrique de la comptabilité ils auraient du apparaître et être identifiés par l'URSSAF.
C'est donc en vain qu'elle soutient que les inspecteurs auraient pu en 2006 estimer que le salarié qui profite d'une place libre dans un avion, ne bénéficiait par d'un avantage constitué par un voyage gratuit et que ces billets sans réservation n'auraient pas été compris dans la catégorie 'billets gratuits' objet du redressement et du protocole de 2006.
La société qui ne justifie pas d'une prétendue tolérance de l'URSSAF sur ces billets donc mal fondée à se prévaloir d'un accord tacite de l'URSSAF de ne pas appliquer de cotisations sur les billets 'stand by'.
La qualité d'avantage en nature des billets sans réservation et le bien-fondé du principe du redressement
Si la société TUI France soutient que, selon la lettre ministérielle du 28 janvier 2009, les billets sans réservation ne sont pas comparables avec les billets accordés au public en raison des contraintes lourdes qui s'y attachent quant à l'absence de garantie de départ et au risque d'être débarqué en escale, il apparaît que ces risques ne présentent qu'un caractère purement éventuel alors que les réductions tarifaires sont bien réelles et dès lors, la prise en compte de ces contraintes propres aux billets consentis au personnel ne peut avoir pour effet de retirer à la réduction tarifaire consentie aux salariés la quantité d'avantage en nature qui doit être, comme tel, soumis à cotisations sociales. Il convient de relever d'ailleurs que la lettre ministérielle invoquée par la société, tout en reconnaissant une diminution de la valeur de cet avantage et son évaluation dans une grille tarifaire, reconnaît explicitement le caractère d'avantage en nature de ces billets.
Le calcul de l'avantage en nature et le bien-fondé du montant du redressement
Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 10 décembre 2002, le montant des avantages en nature, autre que la nourriture et le logement, est déterminé d'après sa valeur réelle.
L'avantage en nature doit être évalué par rapport à l'économie que réalise le salarié en tenant compte du prix de vente du même produit ou service à un non salarié. Selon la lettre circulaire du 19 août 2005 applicable aux évaluations de l'URSSAF, le prix de référence est celui le plus bas pratiqué dans l'année par l'employeur pour la vente du même produit à la clientèle. C'est bien cette évaluation qui avait été retenue dans le protocole pour les billets Corsair pour lesquels la valeur de l'avantage était calculée sur le prix le plus bas au jour de l'utilisation, et Nouvelles Frontières ne pouvant revendre un billet d'avion acquis auprès d'une compagnie aérienne à un prix inférieur à celui d'acquisition, ce prix peut aussi être considéré comme le prix le plus bas du marché.
Le Ministre du travail a incontestablement reconnu que le caractère aléatoire du billet diminue la valeur de l'avantage pour le salarié et c'est donc une valeur inférieure à celle appliquée pour les vols avec réservation que l'URSSAF nqui ne peut que suivre les interprétations ministérielles, doit appliquer.
La société TUI France demande que lui soit applicable la lettre ministérielle du 1er avril 2010, reprenant les termes de celle du 28 janvier 2009 et qui a établi un barème pour l'évaluation des billets aériens avec réservation et sans réservation, aller-retour et destination par destination. S'il apparaît cependant cette lettre s'applique 'aux salariés du secteur du transport aérien de voyageurs' et que la société TUI France est une société du secteur du voyage, il n'en demeure pas mois que commercialisant des billets d'avions, elle est incontestablement un acteur du secteur du transport aérien et en l'absence d'un autre barème proposé c'est celui-ci qui doit s'appliquer et l'avantage en nature constitué par un billet sans réservation doit donc d'appliquer suivant le barème établi par les lettres ministérielles du 1er avril 2010 et du 28 janvier 2009.
L'appelante a communiqué un listing global de billets sans réservation, précisant le nom du bénéficiaire et la destination, qui ne fait la différence qu'entre 'salarié Nouvelles Frontières' et 'salarié filiale' mais qui ne permet pas d'établir à quelle société du groupe appartenaient les salariés bénéficiaires de ces billets et il est en l'état impossible de comparer le montant du compte 'billets salariés' avec une liste de billets sans réservation offerts aux salariés. Il appartenait à la société qui demande que lui soit applicable le barème du Ministère de fournir un calcul sur cette base ce qu'elle n'a jamais fait.
En outre, la société soutient que les personnes qui ont bénéficié de ces billets ont payé les taxes d'aéroport et se sont acquittées d'un prix réduit fixé suivant un barème, sommes qui devraient selon elle venir lui retirer le caractère d'avantage gratuit. Il apparaît cependant que la société ne justifie pas du moindre paiement d'un billet stand by par un salarié et qu'en toues hypothèses les notes internes prévoyant ces versements sont postérieures au contrôle. Si les salariés ont pu effectivement verser des taxes d'aéroport, celles-ci sont indépendantes du prix du billet et ne peuvent venir en déduction de la valeur du barème.
Dans la mesure où la société n'a pas fourni la liste pour la société Voyages Touraventure de ses salariés ayant bénéficié de billets sans réservation, que les bulletins de salaire contrairement à l'accord passé en 2006 ne mentionnent pas ces billets comme avantage en nature, l'URSSAF a légitimement calculé les cotisations sur la totalité du compte intitulé 'billets du personnel' offerts aux salariés.
Le redressement devra donc être validé dans son montant et la condamnation au paiement confirmée.
Sur les observations pour l'avenir sur le calcul de l'avantage en nature: abattement de 30% sur le prix des billets
La société TUI France conteste le droit pour l'URSSAF de revenir sur son engagement, et soutient que l'abattement de 30 % doit être appliqué non seulement sur les produits fabriqués mais également sur les produits commercialisés par elle-même, et donc, en ce qui concerne les sociétés du groupe, sur les billets d'avion, qu'elle se procure auprès d'autres sociétés du groupe ou de compagnies aériennes aux fins de les commercialiser.
L'URSSAF fait valoir que le protocole d'accord ne comportait pas de durée dans son application, que les deux parties pouvaient donc y mettre fin unilatéralement pour l'avenir, qu'elle estime devoir le faire d'une part en raison du comportement de la société qui n'aurait pas respecté l'accord et d'autre part en raison d'une jurisprudence intervenue depuis celui-ci.
Elle estime que, pour l'avenir, au vu de la jurisprudence de la Cour de Cassation, la tolérance de 30% sur la valeur de l'avantage soumise à cotisations, ne peut s'appliquer qu'aux produits fabriqués par la société et non à ceux acquis auprès des filiales du groupe ou d'autres sociétés, comme en l'espèce les billets d'avion, et invoque notamment un arrêt de la Cour de Cassation relative aux sociétés du groupe Seb-Calor intervenue depuis l'accord et qui remet selon elle en cause le droit accordé à Nouvelles Frontières de pratiquer un abattement de 30% sur la valeur des billets.
La remise en cause du protocole du 11 octobre 2007
Le protocole signé entre les sociétés du groupe TUI France et l'URSSAF avait pour objet de trouver un accord sur les modalités de calcul de l'avantage en nature que constituait l'octroi aux salariés des sociétés du groupe Nouvelles Frontières de billets gratuits à la fois pour l'avenir et pour le passé, la société s'engageant à payer les sommes dues sur le passé sur lesquelles un accord était intervenu, et pour l'avenir en s'engageant à fournir les éléments nécessaires pour que l'URSSAF puisse vérifier ces avantages .Cette dernière dans ses observations pour l'avenir remet en cause le mode d'évaluation de l'avantage en nature des billets gratuits, à savoir 70% du prix public le plus bas au jour de la réservation pour les billets Corsair, et 70% du prix facturé par la compagnie au groupe Nouvelles Frontières pour les billets des autres compagnies aériennes.
Le protocole d'accord avait pour objet de mettre fin à un différend existant entre les sociétés du groupe Nouvelles Frontières et l'URSSAF et de prévoir des modalités pour éviter un nouveau contentieux à l'avenir mais ne prévoyait aucune durée à cet accord. L'URSSAF a estimé que les sociétés n'avaient pas respecté le protocole ou l'avaient interprété différemment de ce qu'elle envisageait et elle pouvait parfaitement à l'occasion d 'un nouveau différend le remettre unilatéralement en cause pour l'avenir.
Les observations pour l'avenir sur l'évaluation de l'avantage en nature des billets avec réservation
La circulaire DSS/SDFSS/5 B n°2003-07 du 7 janvier 2003 dont l'URSSAF ne conteste pas qu'elle est applicable à l'espèce permet aux sociétés de faire un abattement de 30% sur l'évaluation de l'avantage constitué par la 'fourniture gratuite ou à tarif préférentiel dont bénéficient les salariés sur les produits et services réalisés ou vendus par l'entreprise'. Cet avantage de calcul est justifié par le fait que l'entreprise qui accorde à ses salariés un avantage sur des produits qu'elle fabrique ou commercialise abandonne seulement sa marge.
De longue date, des circulaires ministérielles comme des guides émanant de l'ACOSS ont accordé des tolérances pour la fourniture de produits et services vendus ou réalisés par l'entreprise à des conditions préférentielles dès la lettre du ministre de la sécurité sociale du 29 mars 1991 précisant que "les réductions tarifaires consenties par l'employeur sur les produits et services réalisés par l'entreprise ne constituent pas des avantages en nature dès lors qu'elles n'excèdent pas des limites raisonnables. Toute remise qui n'excède pas 30 % du prix de vente normal doit être négligée". Une circulaire interministérielle du 7 janvier 2003 a réitéré la même tolérance dans les mêmes conditions d'exemption.
La lettre ministérielle de 1991 et la circulaire de 2003 créent donc pour les ventes
préférentielles de produits d'entreprise aux salariés, une tolérance d'exemption subordonnée, pour l'essentiel, à deux critères cumulatifs :
- la réduction dont bénéficient les salariés ne doit pas excéder 30 % du prix public
- les biens ou services cédés à prix préférentiel doivent être produits ou commercialisés par l'entreprise.
La circulaire stipule que cette tolérance concerne les biens et services produits par l'entreprise qui emploie le salarié et exclut les produits ou services acquis par l'entreprise auprès d'un fournisseur ou d'une autre entreprise mais dans le but d'en faire profiter ses salariés. Ainsi, par exemple, le rabais obtenu par l'employeur, en raison de l'achat de biens en grosses quantités auprès d'un fournisseur, ou parce qu'il les acquiert auprès d'une autre société du groupe, ne peut entrer dans le champ d'application de cette tolérance, si l'entreprise qui emploie le salarié ne commercialise pas elle-même le produit.
C'est en vain que l'URSSAF, qui ne conteste plus aujourd'hui la valeur normative de cette lettre ministérielle, prétend à une interprétation restrictive de celle-ci en estimant que la tolérance ne peut s'appliquer que sur des produits fabriqués par l'entreprise et non sur ceux achetés à une autre entreprise, alors que la lettre ministérielle vise expressément les produits 'commercialisés'et que la réponse du Ministre du travail le 23 décembre 2008 à la question de Monsieur [D] député, confirme que les avantages en nature liés aux réductions tarifaires sur les produits et services de l'entreprise sont exonérés de charges sociales dans la limite de 30% par rapport au prix public le plus bas.
En l'espèce l'URSSAF ne conteste pas que toutes les sociétés du groupe TUI France visées par le redressement se procurent des billets d'avion auprès de Corsair ou les achètent à des compagnies aériennes et les revendent à leurs clients. Il apparaît par ailleurs clairement au vu de la note interne de la société intitulée 'règles d'acquisition et d'intégration de la valeur des billets d'avion au titre de l'avantage en nature' (pièce 10 de l'appelante) que les billets accordées aux salariés concernent des 'vols affrétés par Nouvelles Frontières'.
Il ya lieu en conséquence de constater que le principe de cette tolérance de 30% doit être retenu sur les billets d'avion commercialisés par la société, dont elle fait profiter ses salariés.
Le jugement déféré devra donc être infirmé en ce qu'il a validé les observations de l'URSSAF pour l'avenir sur la suppression de l'abattement de 30% sur l'évaluation de l'avantage des billets d'avion dont bénéficient les salariés.
Sur les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny du 20 juin 2013 en ce qu'il a confirmé le redressement notifié dans la lettre d'observations du 11 octobre 2001 et a condamné la société TUI France venant aux droits de la société Touraventure au paiement de la somme de666285€ de cotisations et 105391€ de majorations.
Infirme le jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny du 20 juin 2013 en ce qu'il a déclaré bien fondé la décision de la commission de recours amiable du 13 avril 2012 concernant les observations pour l'avenir et statuant à nouveau:
Annule les observations pour l'avenir faites par l'URSSAF dans sa lettre d'observations du 11 octobre 2011 relatives à l'abattement de 30% sur l'évaluation de l'avantage en nature billets gratuits pour les salariés.
Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président