Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 3
ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2016
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/00752
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Décembre 2014 -Tribunal d'Instance de PARIS 13ème arrondissement - RG n° 11-13-000815
APPELANTE
Madame [U] [S]
Née le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 3]
C/o M. [E]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SCP SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480
Ayant pour avocat plaidant : Me Laurent TRICOT, avocat au barreau de PARIS, toque : G0449
INTIME
Monsieur Philippe [O] [Q]
[Adresse 2]
[Localité 1]
DEFAILLANT
Assignation devant la Cour d'Appel de Paris, en date du en date du 02 mars 2015, par procès verbal de recherche infructueuses, conformément aux articles 659 du code de procédure civile
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Avril 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Isabelle BROGLY, Conseillère, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Isabelle VERDEAUX, Présidente de chambre
Madame Isabelle BROGLY, Conseillère
Monsieur Philippe JAVELAS, Conseiller
Qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Viviane REA
ARRÊT : PAR DEFAUT
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle VERDEAUX, présidente et par Mme Viviane REA, greffière présente lors du prononcé.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous-seing privé en date du 18 octobre 1988, Monsieur [G] [Q] a conclu avec Madame [U] [S], un bail d'habitation portant sur une maison individuelle et son jardinet au fond de la cour de la copropriété sise à [Adresse 2] pour une durée de trois ans.
Par ordonnance en date du 30 décembre 2008, le président du Tribunal d'instance du 13ème arrondissement a constaté que Madame [U] [S] ne pouvait plus accéder aux lieux loués depuis le 4 octobre 2008 et a condamné en conséquence Monsieur [G] [Q] à en rétablir l'accès sous astreinte de 200 € par jour de retard tandis que la locataire a été autorisée à séquestrer ses loyers.
Par arrêt tendu le 8 septembre 2009, l'ordonnance a été confirmée sauf à dire que l'astreinte courrait à compter de la signification du jugement, la Cour d'appel portant celle-ci à la somme de 400 €.
Par jugement du 25 août 2009, le Juge de l'exécution a liquidé l'astreinte à 33 000 € pour la période comprise entre le 15 janvier et le 30 juin 2009, et l'a portée à 300 € par jour à compter du 15ème jour de la signification du jugement. Sur appel de Monsieur [G] [Q], la Cour a confirmé ce jugement par arrêt du 20 septembre 2010 et a liquidé l'astreinte postérieure, arrêtée au 22 septembre 2009 à 3 000 €.
Sur requête en référé de Monsieur [G] [Q], le Président du tribunal d'Instance du 13ème arrondissement de Paris a, par ordonnance en date du 4 mai 2010, rejeté la demande tendant à faire constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement des loyers par Madame [U] [S] eu égard à la difficulté sérieuse que constituait l'absence de preuve du rétablissement de l'accès de la locataire aux lieux loués.
Par arrêt en date du 26 mai 2011, la Cour a constaté que Monsieur [G] [Q] a rétabli l'accès au logement par la remise des clés et a liquidé l'astreinte à la somme de 10 000 € pour la période du 23 septembre 2009 au 2 juin 2010, confirmant pour partie la deuxième décision du juge de l'exécution de Paris en date du 23 octobre 2010.
Par décision du 6 septembre 2013, statuant sur opposition, Monsieur [G] [Q] a été condamné par le Tribunal correctionnel de Paris à un an d'emprisonnement et 12 000 € d'amende pour complicité de détérioration de biens d'autrui avec entrée par effraction commise le 24 mai 2008 et complicité de violation de domicile avec l'aide de menace commis du 1er mai au 30 octobre 2008.
Par acte d'huissier du 18 octobre 2013, Madame [U] [S] a fait délivrer assignation à Monsieur [G] [Q] devant le Tribunal d'Instance du 13ème arrondissement de Paris qui, par jugement le 11 décembre 2014, a :
* constaté que la restitution des clés par Monsieur [G] [Q] à Madame [U] [S] le 20 octobre 2010 n'a pas permis la jouissance des lieux loués [Adresse 2].
* ordonné la libération entre les mains de Madame [U] [S] par Monsieur le Bâtonnier de Paris, de la somme de 10 873,35 € séquestrée en exécution de l'ordonnance de référé du Tribunal d'Instance en date du 30 décembre 2008.
* déclaré irrecevables les demandes en paiement formées par Madame [U] [S] contre Monsieur [G] [Q] en indemnisation de son préjudice d'éviction pendant la période d'octobre 2008 à mars 2011 et en indemnisation de son préjudice moral qui sont actuellement soumises au Tribunal correctionnel de Paris précédemment saisi.
* condamné Monsieur [G] [Q] à verser à Madame [U] [S] les sommes de 9 287 € au titre de son préjudice d'éviction pour la période comprise entre avril 2011 et le 14 octobre 2012, ainsi que la somme de 1 342,08 € en remboursement des factures EDF-GDF payées durant la même période.
* condamné Monsieur [G] [Q] à verser à Madame [U] [S] la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens en ce compris le coût des constats d'huissier en date des 12 septembre 2012 et 17 septembre 2013.
Madame [U] [S] a interjeté appel de la décision.
Dans ses dernières conclusions du 11 mars 2015, elle poursuit :
* la confirmation du jugement notamment en ce qu'il a constaté que la restitution des clés par Monsieur [G] [Q] à Madame [U] [S] le 20 octobre 2010 n'a pas permis la jouissance des lieux loués [Adresse 2] ordonné la libération entre les mains de Madame [U] [S] par Monsieur le Bâtonnier de Paris, de la somme de 10 873,35 € séquestrée en exécution de l'ordonnance de référé du Tribunal d'Instance en date du 30 décembre 2008.
Elle poursuit l'infirmation sur le surplus et demande en conséquence à la Cour, statuant à nouveau, de :
* constater que le premier Juge a statué ultra petita en considérant que le bail avait été anéanti au 15 octobre 2012, celui-ci s'étant reconduit tacitement pour un nouveau terme.
* constaté que le logement pris à bail ne correspond plus à celui qui existe sur place, dès lors qu'il a été complètement remanié et découpé par le bailleur.
* constater que ce logement, au dernier état des constatations de l'huissier en 2012, (le bailleur ayant refusé l'accès en 2013), ne dispose plus des éléments légaux nécessaires à sa décence.
en conséquence :
* condamner Monsieur [Q] à réintégrer Madame [S] dans les lieux loués, qui devront être préalablement remis en état suivant la description figurant au bail et en conformité avec les normes de décence, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir.
* dire et juger que Madame [S] sera dégagée du paiement des loyers, rétroactivement depuis le 30 septembre 2008, à défaut du 12 octobre 2008 et ce, jusqu'à ce qu'elle soit réintégrée dans son logement, celui-ci ayant été remis en l'état et en conformité avec les règles de décence et sa destination d'habitation.
* condamner Monsieur [Q] à verser à Madame [S] à titre de dommages-intérêts les sommes suivantes :
° 55 200,00 € au titre des loyers et charges versés à Monsieur [E] d'avril 2011 à avril 2015 inclus, soit 48 mois à 1 150 € charges comprises.
° 4 481,75 € au titre des frais de consommation et d'abonnement EDF de juin 2008 à décembre 2009 et de GDF de janvier 2009 à avril 2012.
° 50 000,00 € à titre d'indemnisation de son préjudice moral au-delà d'avril 2011.
* condamner Monsieur [Q] à verser à Madame [S] la somme de 1 150 € par mois entre le 1er mai 2015 et sa réintégration dans son logement.
* dire et juger que les condamnations pécuniaires frappant Monsieur [Q] porteront intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance sur la somme de 50 000 € (indemnisation du préjudice moral) et de 51 850 € (préjudices financiers et matériels) et à compter du 9 octobre 2014 pour le surplus.
* ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil.
* débouter Monsieur [G] [Q] de l'ensemble de ses demandes.
* condamner Monsieur [G] [Q] à verser à Madame [S] la somme de 5 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant le coût des deux procès-verbaux de constat de la SCP GATIMEL de 2012 et 2013, les dépens d'appel pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Monsieur [G] [Q] n'ayant pas constitué avocat, Madame [U] [S] lui a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions par actes en date respective du 2 mars 2015 et du 25 mars 2015 signifié selon les modalités de l'article 659 du Code de procédure civile s'agissant du premier et remis en l'étude de l'huissier de justice, s'agissant du second.
Il y a lieu de statuer par défaut.
MOTIFS DE LA DECISION.
Sur l'appel de Madame [U] [S].
Sur la demande de confirmation partielle de l'appel.
Ces points n'étant pas contestés, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a constaté que la restitution des clés par Monsieur [G] [Q] à Madame [U] [S] le 20 octobre 2010 n'a pas permis la jouissance des lieux loués [Adresse 2] ordonné la libération entre les mains de Madame [U] [S] par Monsieur le Bâtonnier de Paris, de la somme de 10 873,35 € séquestrée en exécution de l'ordonnance de référé du Tribunal d'Instance en date du 30 décembre 2008.
Sur la demande d'infirmation du jugement en ses autres dispositions et sur les demandes subséquentes de Madame [U] [S].
Il y a tout d'abord lieu d'observer que les demandes de constatation formulées par Madame [U] [S] n'emportent aucun effet juridique, dans la mesure où elles ne constituent pas en soi une demande en justice.
Au surplus et en tout état de cause, le premier Juge n'a pas statué ultra petita en ce qu'il s'est borné à dire et juger que la disparition de la chose louée faisait obstacle aux demandes de réalisation des travaux sous astreinte et de réintégration dans les lieux initialement donnés à bail par Monsieur [G] [Q], formulées par Madame [U] [S].
Le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a débouté Madame [U] [S] de ses demandes de ce chef.
Sur les demandes indemnitaires de Madame [U] [S].
Sur les demandes de dispense du paiement du loyer à compter du 30 septembre 2008 jusqu'à la réintégration dans les lieux loués et de condamnation de Monsieur [Q] à lui verser la somme de 1 150 € entre le 1er mai 2015 et sa réintégration dans son logement..
Pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus exposés, Madame [S] ne peut qu'être déboutée tant de sa demande tendant à être dégagée du paiement des loyers jusqu'à ce qu'elle soit réintégrée dans son logement, ainsi que de sa demande de condamnation de Monsieur [Q] à lui verser la somme de 1 150 € à compter du 1er mai 2015 jusqu'à sa réintégration dans les lieux, étant observé au surplus que faire droit à ses deux demandes cumulatives reviendrait à l'indemniser deux fois du préjudice allégué.
Sur la demande de remboursement des loyers versés à Monsieur [E].
Madame [S] sollicite la condamnation de Monsieur [Q] à lui verser, à titre de dommages-intérêts, la somme de 55 200,00 € au titre des loyers et charges versés à Monsieur [E] d'avril 2011 à avril 2015 inclus, soit 48 mois à 1 150 € charges comprises.
Cependant d'une part, Madame [S] ne justifie pas s'être acquittée d'aucun loyer entre les mains de Monsieur [Q] pendant la période considérée.
D'autre part, elle ne justifie pas suffisamment par la production de seules quittances établies par Monsieur [E] des sommes prétendument versées chaque mois entre ses mains à titre de loyer. A tout le moins aurait-elle pu verser aux débats ses relevés de comptes bancaires permettant d'établir la réalité des paiements.
Par suite, elle ne peut qu'être déboutée de sa demande de ce chef.
Sur la demande de remboursement des frais de consommation et d'abonnement EDF et GDF de janvier 2009 à avril 2012.
Madame [U] [S] sollicite la somme de 4 481,75 € au titre des frais de consommation et d'abonnement EDF de juin 2008 à décembre 2009 et de GDF de janvier 2009 à avril 2012 exposés vainement, sans toutefois joindre de calcul détaillé de sa demande.
Au vu des seules factures EDF-GDF qu'elle produit, Monsieur [Q] doit être condamné à lui rembourser la somme de 3 250,32 € exposée en pure perte.
Sur la demande d'indemnisation de son préjudice moral.
Madame [U] [S] sollicite la condamnation de Monsieur [Q] à lui verser la somme de 50 000,00 € à titre d'indemnisation de son préjudice moral au-delà d'avril 2011.
Même si l'éviction de la locataire par Monsieur [Q] est inadmissible, puisqu'obtenue par des méthodes totalement répréhensibles qui ont conduit le bailleur à comparaître devant le Tribunal Correctionnel par lequel il a été condamné, il n'en demeure pas moins que Madame [U] [S] s'abstient de produire le jugement rendu sur ses intérêts civils. Or, devant le Tribunal correctionnel, Madame [U] [S] avait sollicité l'allocation de la somme de 15 000 € à titre d'indemnisation de son préjudice moral.
Par suite, elle doit être déboutée comme mal fondée en sa demande d'indemnisation de son préjudice moral déjà soumis à l'appréciation du Tribunal correctionnel.
Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Monsieur Philippe [Q] sera condamné aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'il a exposés, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
La somme qui doit être mise à la charge de Monsieur Philippe [Q] au titre des frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel par Madame [U] [S] peut être équitablement fixée à 2 000 €.
PAR CES MOTIFS.
La cour statuant publiquement, par défaut.
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a constaté que la restitution des clés par Monsieur Philippe [Q] à Madame [U] [S] le 20 octobre 2010 n'a pas permis la jouissance des lieux loués [Adresse 2] en ce qu'il a ordonné la libération entre les mains de Madame [U] [S] par Monsieur le Bâtonnier de Paris, de la somme de 10 873,35 € séquestrée en exécution de l'ordonnance de référé du Tribunal d'Instance en date du 30 décembre 2008.
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame [U] [S] de sa demande de réintégration dans les lieux initialement donnés à bail par Monsieur Philippe [Q].
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions, sauf sur le montant de la condamnation au remboursement des frais de consommation et d'abonnement EDF et GDF de janvier 2009 à avril 2012 à hauteur de la somme de 1 342,08 € et statuant à nouveau de ce chef, condamne Monsieur [Q] à lui verser la somme de 3 250,32 € au titre des frais de consommation et d'abonnement EDF de juin 2008 à décembre 2009 et de GDF de janvier 2009 à avril 2012 exposés vainement.
DIT que les sommes allouées à Madame [U] [S] porteront intérêts au taux légal à compter du 9 octobre 2014.
ORDONNE la capitalisation desdits intérêts selon les modalités de l'article 1154 du Code civil.
Y ajoutant
DÉBOUTE Madame [U] [S] de ses autres demandes.
CONDAMNE Monsieur [G] [Q] à verser à Madame [U] [S] la somme de 2 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
CONDAMNE Monsieur [G] [Q] aux dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE