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14/09/2016 | FRANCE | N°12/03418

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 14 septembre 2016, 12/03418


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 2



ARRET DU 14 SEPTEMBRE 2016



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/03418



Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Janvier 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/02362





APPELANT



[N] [P] ADMINSTRATEUR DE BIENS, SA inscrite au RCS de PARIS, SIRET n° 572 006 344 00038, agissa

nt poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat a...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRET DU 14 SEPTEMBRE 2016

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/03418

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Janvier 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/02362

APPELANT

[N] [P] ADMINSTRATEUR DE BIENS, SA inscrite au RCS de PARIS, SIRET n° 572 006 344 00038, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de Me Pascal POYLO de l'AARPI OPERALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0091

INTIME

Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier du [Adresse 3], représenté par son syndic, [W] [X] SARL, exerçant sous le nom commercial '[W] [X]', SARL inscrite au RCS de PARIS, SIRET n° 401 718 242 00035,

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté et assisté à l'audience par Me Jérôme BERTIN de la SELARL BERTIN & BERTIN - AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : J126

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Avril 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :Madame Dominique DOS REIS, Présidente de chambre,

Madame Claudine ROYER, Conseillère,

Madame Agnès DENJOY, Conseillère,

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Stéphanie JACQUET

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claudine ROYER, faisant fonction de président pour le président empêché en vertu de l'article R 312-3 du code de l'organisation judiciaire, et par Madame Stéphanie JACQUET, greffier présent lors du prononcé.

***

Les immeubles de la copropriété des [Adresse 6]), construits en 1932, comportent sept étages.

Les étages supérieurs sont en retrait par rapport à la façade de l'immeuble : le 6 ème étage est en retrait de 1,50 m, le 5ème, encore en retrait de 60 cm.

Au 5 ème étage, un balcon coursive de 0,60 m en avancée de la façade dessert les appartements, et au 6 ème, en retrait du précédent, et dans la ligne de la façade, une coursive partiellement protégée par l'avancée du toit, dessert les divers lots.

La SA [N] [P] a administré la copropriété depuis le début des années 1970, jusqu'en 2004.

Le 5 avril 2002, le plancher haut de l'appartement situé au 5ème étage, appartenant à Mme [S], s'est effondré, cette situation obligeant la copropriétaire à quitter son appartement.

Mme [S] a obtenu par ordonnance de référé du 23 avril 2002, l'instauration d'une mesure d'expertise au contradictoire du syndicat des copropriétaires et des assureurs des parties, confiée à M. [I]. La mission a été progressivement étendue à l'ensemble des copropriétaires et des parties communes et aux parties privatives des chambres de bonnes du 6ème étage ainsi qu'à la SA Cabinet [N] [P].

L'expert a déposé son rapport le 5 juin 2007.

Par acte d'huissier du 8 février 2010, le syndicat des copropriétaires a fait assigner la S.A. Cabinet [N] [P] devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir condamner cette dernière à lui payer :

- la somme de 633'178,03 € TTC à titre de dommages-intérêts, représentant le coût total des travaux exécutés dans les appartements des copropriétaires à la suite des désordres, avec actualisation selon l'indice BT 01 à compter du 14 février 2007,

- la somme de 30'824,79 € au titre des honoraires afférents aux travaux,

- la somme de 15'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 31 janvier 2012, le tribunal de grande instance de Paris a :

- dit que la société [N] [P] n'avait pas rempli son devoir d'information et de conseil de la copropriété ni d'administration des parties communes et avait failli à son devoir de faire respecter le règlement de copropriété, commettant ainsi des fautes personnelles engageant sa responsabilité vis à vis du syndicat des copropriétaires pour inexécution de son mandat sur le fondement de l'article 1792 du code civil,

- avant dire droit sur la liquidation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires, ordonné une expertise, confiée à M. [D] [I].

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 31 janvier 2012, la SA [N] [P] a interjeté appel de cette décision.

Suivant ordonnance du 2 avril 2012, M. [I] a été remplacé par M. [R] [Z].

Par ordonnance du 15 octobre 2013, la mission de l'expert a été étendue à l'appartement d'une autre copropriétaire, Mme [T], situé au sixième étage de l'immeuble, sinistré en 1990 alors qu'il appartenait à un sieur [B].

M. [Z] a déposé son rapport le 27 janvier 2014.

Aux termes de ses dernières conclusions, signifiées le 5 avril 2016, la SA [N] [P] demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de :

- dire que quitus lui a été donné en toute connaissance de cause par l'assemblée générale des copropriétaires et ce, depuis 1988,

- dire qu'elle n'a pas commis de faute dans l'exercice de son mandat en ne faisant pas réaliser de diagnostic complémentaire ou d'étude générale au vu des investigations et hypothèses retenues par l'ensemble des professionnels consultés,

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5]) de ses demandes,

- à titre subsidiaire, pour le cas où la Cour retiendrait sa responsabilité, dire que sa responsabilité dans la survenance des désordres est partagée par moitié avec les copropriétaires des chambres et studios du 6 ème étage,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5]) à lui payer la somme de 20 000 € pour procédure abusive et la somme de 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le syndicat des copropriétaires aux dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions, signifiées le syndicat des copropriétaires des [Adresse 6]) demande à la Cour de :

- à titre principal :

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 31 janvier 2012,

- subsidiairement, réformer le jugement sur le seul fondement de la condamnation de la SA Cabinet [N] [P], et retenir la responsabilité du Cabinet [N] [P] pour inexécution de son obligation légale d'exécuter les travaux urgents et nécessaires à la sauvegarde et à la conservation de l'immeuble,

- en tout état de cause condamner le Cabinet [N] [P] à lui payer la somme de 15 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant les frais d'expertise.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, le syndic est notamment chargé « d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien' ».

Sur la valeur exonératoire du quitus

La SA Cabinet [N] [P] invoque le fait que quitus lui a été donné, exercice après exercice, par le syndicat des copropriétaires et ce, depuis 1988, ce qui l'exonérait a priori de toute responsabilité.

Le syndicat des copropriétaires qui ne conteste pas que quitus a été donné à son syndic, exercice après exercice, depuis l'année 1988 est fondé à répliquer comme il le fait que le quitus donné par un syndicat de copropriétaires à son syndic n'est libératoire qu'en ce qui concerne les actes de gestion dont l'assemblée générale a eu connaissance et qu'elle a été à même d'apprécier.

Le syndicat qui reproche à son ancien syndic son inaction estime qu'en l'espèce, il n'a pas été complètement informé par son syndic des risques encourus du fait des défauts d'étanchéité constatés à l'occasion de divers sinistres et en particulier au 6ème étage de l'immeuble et que le quitus donné n'a pas de valeur exonératoire pour la SA [N] [P].

Sur le fond, le cabinet [N] [P] conteste le jugement en ce que celui-ci aurait retenu des analyses de la situation faites a posteriori, voire "des problèmes" n'ayant concouru en aucune façon aux sinistres, telles l'absence ou l'insuffisance d'étanchéité des cours.

En cours d'expertise, le syndicat a fait état et justifié envers l'expert judiciaire, M. [I], de 12 déclarations de sinistres ainsi que de factures de plomberie et d'étanchéité concernant des reprises dans les étages supérieurs de la copropriété ; l'expert judiciaire a ainsi recensé de très nombreuses interventions d'entreprises de plomberie, au sixième étage, sur des installations privées et communes ; l'expert judiciaire a rappelé dans son rapport que Mme [S], victime de l'effondrement du plancher haut de son appartement en 2002, avait été victime de 9 dégâts des eaux entre 1987 et 2006 ; l'expert a dénombré, en définitive, un sinistre par an au sein de la copropriété à partir de 1993, en provenance des parties communes, ayant pour cause un défaut d'étanchéité.

Or, en son principe, il est constant que les factures des entreprises ayant procédé au fil du temps à ces réparations ponctuelles au sein de l'immeuble à la suite principalement de dégâts des eaux figuraient dans les comptes de la copropriété, et que le syndicat des copropriétaires était, dès lors, nécessairement informé de l'état de la construction.

La conception même de l'immeuble : la présence de coursives et balcons insuffisamment protégés contre les effets des intempéries est en cause et le syndicat doit en supporter les conséquences.

Le syndicat était dès lors en mesure de prendre des initiatives et de décider de travaux ayant pour objet l'étanchéité des étages supérieurs de l'immeuble.

Inversement, confrontée à ces sinistres, la SA [N] [P] a fait procéder au coup par coup à des réparations ponctuelles, ne permettant pas de mettre un terme durable aux désordres.

Par ailleurs, la SA Cabinet [N] [P] n'a jamais cru devoir attirer l'attention des copropriétaires sur les conclusions du rapport de M. [Q], architecte même si elle justifie leur avoir diffusé le rapport de ce professionnel du 4 septembre 1990, lequel avait été consulté après le sinistre affectant l' appartement appartenant à M. [B], conclusions selon lesquelles ce professionnel estimait nécessaire de reprendre l'étanchéité complète du balcon - partie commune - et précisait : « Dans le cas de la réalisation d'une étanchéité, il faudra qu'elle soit complète par rapport aux surfaces envisagées, c'est-à-dire depuis le pignon du 41 jusqu'à la séparation du 45 ».

Dans un avis contemporain, daté du 29 octobre 1990, l'agence Socotec consultée confirmait : « Il est donc souhaitable de créer sur l'existant un complexe d'étanchéité afin d'éviter de nouveaux désordres de ce type ».

Or, il est établi que le syndicat des copropriétaires n'a jamais été tenu informé de l'avis de la Socotec ni à plus forte raison invité à décider - ou non - des travaux préconisés par ces professionnels.

La responsabilité de la SA [N] [P] envers le syndicat des copropriétaires est dès lors pour partie engagée, du fait d'une information incomplète du syndicat et de son absence de diligence s'agissant de la mise à l'ordre du jour de travaux d'ampleur.

La Cour estime à 40 % la part de responsabilité devant être supportée par la SA [N] [P], en relation avec les préjudices donnant lieu à la mesure d'expertise, le surplus de la dépense devant rester à la charge du syndicat des copropriétaires.

Sur la demande de dommages et intérêts de la SA [N] [P] pour procédure abusive

Il résulte de ce qui précède que cette demande n'est pas justifiée ; son rejet est confirmé.

Sur les dépens

Le syndicat des copropriétaires demande à ce que les frais d'expertise soient compris dans les dépens.

Au regard des dispositions de l'article 695 du code de procédure civile, les dépens afférents aux instances comprennent la rémunération des techniciens et, par conséquent, comprennent la rémunération de l'expert judiciaire dont la mission a été ordonnée par le tribunal.

Les considérations d'équité justifient que le syndicat des copropriétaires des [Adresse 4] soit condamnée à payer à la SA [N] [P] la somme de 5'000 € en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a retenu le principe de la responsabilité de la SA [N] [P] envers le syndicat des copropriétaires des [Adresse 4],

L'infirme sur le quantum et ramène la part de responsabilité de la SA [N] [P] à 40 % du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires,

Rappelle que les dépens afférent à la procédure de première instance comprennent les frais de l'expertise judiciaire,

Y ajoutant,

Condamne le syndicat des copropriétaires des [Adresse 4] à payer à la SA cabinet [N] [P] la somme de 5'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Le condamne aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Pour le Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 12/03418
Date de la décision : 14/09/2016

Références :

Cour d'appel de Paris G2, arrêt n°12/03418 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-09-14;12.03418 ?
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