Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRET DU 08 SEPTEMBRE 2016
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/02843
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Janvier 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/02658
APPELANTS
SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC ( SNPCA CFE-CGC )
pris en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Représenté par Me Chantal-rodene BODIN CASALIS de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148, avocat postulant
Représenté par Me Zoran ILIC, avocat au barreau de PARIS, toque : K0137, avocat plaidant
SYNDICAT DE LA PRESSE ET DE LA COMMUNICATION CFE-CGC ( SPC CFE-CGC ) pris en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Représenté par Me Emmanuel MAUGER de la SELARL MAUGER MESBAHI ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E0706, avocat postulant et plaidant
INTIMEE
SA FRANCE TELEVISIONS
N° SIRET : 432 766 947
[Adresse 3]
[Adresse 2]
Représentée par Me Nabila EL AOUGRI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0461, avocat postulant et plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 mai 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Catherine MÉTADIEU, Président
Madame Martine CANTAT, Conseiller
Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats
MINISTERE PUBLIC :
Représenté lors des débats par Monsieur Antoine PIETRI, avocat général, qui a fait connaître son avis
ARRET :
- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, Président et par Madame FOULON, Greffier.
**********
Statuant sur l'appel formé par le SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC et le SYNDICAT DE LA PRESSE ET DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC d'un jugement rendu, le 6 janvier 2015, par le tribunal de grande instance de Paris qui a :
- ordonné au SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC de transférer et de fixer son siège social en dehors des locaux de la SA FRANCE TELEVISIONS,
- ordonné au SYNDICAT DE LA PRESSE ET DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC de transférer et de fixer son siège social en dehors des locaux de la SA FRANCE TELEVISIONS,
- dit qu'il y avait lieu d'assortir ces deux décisions d'une astreinte de 150 euros par jour de retard passé un délai de 3 mois courant à compter de la signification de la décision,
- dit que cette astreinte courrait pendant un délai de 3 mois,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné les deux syndicats aux dépens';
Vu les dernières conclusions reçues le 22 janvier 2016, du SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC qui demande à la Cour'de :
- infirmer le jugement,
- débouter la SA FRANCE TELEVISIONS de l'ensemble de ses demandes,
- condamner'la SA FRANCE TELEVISIONS à lui verser la somme de'3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SA FRANCE TELEVISIONS aux dépens, dont distraction au profit de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, qui pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile';
Vu les dernières conclusions reçues le 22 octobre 2015, du SYNDICAT CGC JOURNALISTES, anciennement dénommé le SYNDICAT DE LA PRESSE ET DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC, qui demande à la Cour'de :
- dire que la SA FRANCE TELEVISIONS n'a pas d'intérêt à agir à son encontre aux fins qu'il lui soit ordonné de modifier son siège tel que mentionné dans ses statuts,
- le mettre hors de cause,
- débouter la SA FRANCE TELEVISIONS de l'ensemble de ses demandes,
- condamner'la SA FRANCE TELEVISIONS à lui verser la somme de'3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';
Vu les dernières conclusions reçues le 24 février 2016, de la SA FRANCE TELEVISIONS qui demande à la Cour'de :
- confirmer le jugement,
- ordonner au SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC de ne plus mentionner':
- sur le blog CGC des Médias, de numéro de téléphone de FRANCE TELEVISIONS et d'adresse mail de contact avec un nom du domaine de FRANCE TELEVISIONS, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- sur son papier à lettre et ses courriers, comme contact les coordonnées (adresse postale, numéro de téléphone, numéro de télécopie) de FRANCE TELEVISIONS dès lors que la correspondance n'émane pas de la section syndicale de l'établissement Siège, et ce sous astreinte de 300 euros par lettre mentionnant comme contact les coordonnées de FRANCE TELEVISIONS,
- se réserver la liquidation de l'astreinte,
- condamner le SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC à lui verser les sommes de':
- 30.000 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice moral subi du fait du refus du syndicat de tirer toutes les conséquences de la fixation de son siège en dehors des locaux de FRANCE TELEVISIONS sur le blog des Médias et sur son papier à lettre dès lors que la correspondance n'émane pas de la section syndicale de l'établissement Siège,
- 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';
Vu les observations écrites et orales du Ministère Public';
Vu la possibilité qui a été offerte aux parties de reprendre la parole après le Ministère Public;
SUR CE, LA COUR
FAITS ET PROCEDURE
La SA FRANCE TELEVISIONS a, par courriers datés du 29 octobre 2012, rappelé au SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC, ci-après dénommé le syndicat SNPCA CFE-CGC et au SYNDICAT DE LA PRESSE ET DE LA COMMUNICATION ET DE L'AUDIOVISUEL CFE-CGC, ci-après dénommé le syndicat SPC CFE-CGC, qu'elle avait dénoncé l'usage consistant à permettre aux organisations syndicales de domicilier leurs sièges sociaux dans les locaux de l'entreprise et qu'elle leur laissait un délai supplémentaire de deux mois pour procéder au changement de leur siège dans leurs statuts. Elle a ensuite, par courriers du 19 février 2013, vainement mis en demeure ces deux syndicats de justifier du changement de la domiciliation de leurs sièges sociaux.
Dans ce contexte, elle a introduit une instance devant le tribunal de grande instance de Paris.
Par jugement en date du 6 janvier 2015, le tribunal de grande instance de Paris a ordonné aux deux syndicats de transférer et de fixer leur siège social en dehors des locaux de la SA FRANCE TELEVISIONS, sous astreinte.
Les deux syndicats ont interjeté appel de ce jugement.
Le syndicat SPC CFE-CGC est maintenant dénommé le SYNDICAT CGC JOURNALISTES.
MOTIVATION
Sur le siège social des deux syndicats
Considérant qu'il n'est pas contesté que l'usage consistant à permettre aux organisations syndicales de domicilier leurs sièges sociaux dans les locaux de l'entreprise a été régulièrement dénoncé';
Considérant'qu'aucune disposition légale n'autorise une organisation syndicale à fixer son siège social dans les locaux d'une entreprise';
Que l'article L.2142-8 du code du travail ne prévoit, en effet, que la mise à disposition par l'employeur':
- des sections syndicales, dans les entreprises ou établissements d'au moins deux cents salariés, d'«'un local commun convenant à l'exercice de la mission de leurs délégués'»,
- de chaque section syndicale constituée par une organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement, dans les entreprises ou établissements d'au moins mille salariés, d'«'un local convenable, aménagé et doté du matériel nécessaire à son fonctionnement'»';
Que l'article L.2142-9 du même code précise que les modalités d'aménagement et d'utilisation par «'les sections syndicales des locaux mis à leur disposition'» sont fixées par accord avec l'employeur';
Que les deux organisations syndicales appelantes ne peuvent, en matière de mise à disposition de locaux, se prévaloir de droits qui ne sont ainsi reconnus qu'au profit des seules sections syndicales';
Considérant que si la liberté syndicale a le caractère d'une liberté fondamentale et si elle a pour corollaire la libre constitution des syndicats selon la procédure prévue par la loi, elle n'implique pas pour autant qu'un syndicat puisse fixer son siège dans les locaux d'une entreprise sans l'accord de l'employeur';
Que, comme le prévoit l'article L.2141-4 du code du travail, si «'l'exercice du droit syndical est reconnu dans toutes les entreprises'» il doit cependant respecter les «'droits et libertés garantis par la Constitution de la République'»,'dont le droit de propriété qui a une valeur constitutionnelle, étant observé que l'adresse d'un bien immobilier ne fait pas partie du domaine public comme l'affirme le syndicat SNPCA CFE-CGC ;
Considérant, en l'espèce, qu'aucune des pièces produites ne fait apparaître':
- que la décision de la SA FRANCE TELEVISIONS remettrait en cause d'une manière quelconque l'exercice du droit syndical ou la liberté des syndicats de s'organiser au sein de l'entreprise,
- que la SA FRANCE TELEVISIONS porterait atteinte au droit des syndicats de fixer librement leur siège social en leur demandant uniquement de se domicilier en dehors de ses locaux,
- que la décision de la SA FRANCE TELEVISIONS n'aurait pas concerné la totalité des organisations syndicales qui avaient fixé leur siège social dans l'entreprise,
- que la SA FRANCE TELEVISIONS aurait commis un quelconque abus de son droit de propriété, étant observé qu'elle a laissé un délai plus que raisonnable aux deux syndicats pour organiser le transfert de leur siège social dans un autre lieu, le comité central d'entreprise ayant été informé de la dénonciation de l'usage lors de sa réunion des 11 et 12 septembre 2012 et les deux syndicats ayant été mis en demeure de réaliser le transfert le 19 février 2013';
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer le jugement'en ce qu'il a ordonné aux deux syndicats de transférer et de fixer leur siège social en dehors des locaux de la SA FRANCE TELEVISIONS, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé un délai de 3 mois courant à compter de la signification de la décision et dit que cette astreinte courrait pendant un délai de 3 mois';
Qu'il y a lieu, par ailleurs, de faire droit aux nouvelles demandes de la SA FRANCE TELEVISIONS, qui sont l'accessoire, la conséquence ou le complément de ses demandes initiales, et d'ordonner au syndicat SNPCA CFE-CGC de ne plus mentionner':
- sur le blog CGC des Médias, de numéro de téléphone de FRANCE TELEVISIONS et d'adresse mail de contact avec un nom du domaine de FRANCE TELEVISIONS, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- sur son papier à lettre et ses courriers, comme contact les coordonnées (adresse postale, numéro de téléphone, numéro de télécopie) de FRANCE TELEVISIONS dès lors que la correspondance n'émane pas de la section syndicale de l'établissement Siège, et ce sous astreinte de 50 euros par lettre mentionnant comme contact les coordonnées de FRANCE TELEVISIONS à compter de la signification de la décision à intervenir';
Que, par contre, il y a lieu de débouter la SA FRANCE TELEVISIONS de sa demande tendant à ce que la cour d'appel se réserve la liquidation des astreintes';
Qu'il y a lieu, enfin, de débouter le SYNDICAT CGC JOURNALISTES de sa demande tendant à le mettre hors de cause, la décision de première instance étant confirmée à son encontre'et la SA FRANCE TELEVISIONS ayant un 'intérêt à agir à son encontre aux fins qu'il lui soit ordonné de modifier son siège tel que mentionné dans ses statuts';
Sur les dommages et intérêts pour préjudice moral demandés par la SA FRANCE TELEVISIONS
Considérant que la SA FRANCE TELEVISIONS n'apporte aucun élément démontrant l'existence du préjudice moral qu'elle allègue'; qu'il y a lieu de la débouter de sa demande de dommages et intérêts';
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Considérant qu'il y a lieu de condamner le SNPCA CFE-CGC et le SYNDICAT CGC JOURNALISTES au paiement à la SA FRANCE TELEVISIONS de la somme de 1.000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile';
Considérant qu'il y a également lieu de condamner le SNPCA CFE-CGC et le SYNDICAT CGC JOURNALISTES aux dépens de première instance, en confirmant le jugement, et d'appel';
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute le SYNDICAT CGC JOURNALISTES de sa demande tendant à le mettre hors de cause,
Ordonne au SNPCA CFE-CGC de ne plus mentionner':
- sur le blog CGC des Médias, de numéro de téléphone de FRANCE TELEVISIONS et d'adresse mail de contact avec un nom du domaine de FRANCE TELEVISIONS et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- sur son papier à lettre et ses courriers comme contact les coordonnées (adresse postale, numéro de téléphone, numéro de télécopie) de FRANCE TELEVISIONS dès lors que la correspondance n'émane pas de la section syndicale de l'établissement Siège, et ce sous astreinte de 50 euros par lettre mentionnant comme contact les coordonnées de FRANCE TELEVISIONS à compter de la signification de la décision à intervenir,
Déboute la SA FRANCE TELEVISIONS de sa demande tendant à ce que la cour d'appel se réserve la liquidation des astreintes,
Déboute la SA FRANCE TELEVISIONS de sa demande de dommages et intérêts préjudice moral,
Condamne le SNPCA CFE-CGC au paiement à la SA FRANCE TELEVISIONS' de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne le SYNDICAT CGC JOURNALISTES au paiement à la SA FRANCE TELEVISIONS de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes les autres demandes,
Condamne le SNPCA CFE-CGC et le SYNDICAT CGC JOURNALISTES aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT