RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRÊT DU 06 Septembre 2016
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/03471 et 13/04102
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Janvier 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 10/10074
APPELANTE et intimée
SAS SERVICES MAINTENANCE PROPRETE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 1]
N° SIRET : 428 900 021
représentée par Me Pascal ADDE SOUBRA, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me François BERNON, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIME et appelant
Monsieur [A] [K]
[Adresse 2]
[Localité 2]
né le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 3]
comparant en personne,
assisté de Me Julien COLAS, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 252 substitué par Me Loïc LE QUELLEC, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Mai 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Daniel FONTANAUD, Président
Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère
Madame Laurence SINQUIN, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Madame Claire CHESNEAU, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur [A] [K] a été embauché en qualité d'agent de propreté par la société SUD SERVICES le 16 juillet 1999, par contrats à durée déterminée successifs puis par contrat à durée indéterminée le 30 avril 2000. En 2003, son contrat de travail a été transféré à la société SAFEN, puis en octobre 2009, à la société SERVICES MAINTENANCE PROPRETÉ (SMP) laquelle avait repris le marché de nettoyage sur le site de la gare de [Localité 4].
Le 9 juin 2010, monsieur [K] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 17 juin, auquel il ne s'est pas présenté. Il a été licencié pour faute grave par lettre du 25 juin, pour retards et absences injustifiés réitérés, en dépit de sanctions disciplinaires préalables.
Le 30 juillet 2010, monsieur [K] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris pour contester son licenciement et en paiement de diverses sommes.
La convention collective applicable à la relation de travail est celle des entreprises de propreté. La société SMP occupait habituellement plus de 10 salariés et le salaire brut moyen de monsieur [K] lors de son licenciement était de 1.389,50 Euros.
Par jugement du 15 janvier 2013, le Conseil de Prud'hommes a requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société SMP à payer à monsieur [K] les sommes suivantes :
- 2.778,60 Euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents ;
- 4.260,52 Euros à titre d'indemnité de licenciement ;
- 8.335,80 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 700 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile ;
Cette décision a été notifiée à la société SMP le 2 avril 2013, laquelle en a interjeté appel le 8 avril. Monsieur [K] a également interjeté appel le 24 avril. Il convient, pour une bonne administration de la justice, d'ordonner la jonction des procédures.
Par conclusions visées par le greffe le 25 mai 2016 au soutien de ses observations orales, et auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la société SERVICES MAINTENANCE PROPRETÉ (SMP) demande à la Cour de réformer le jugement, de constater l'existence d'une faute grave, de débouter monsieur [K] de ses demandes, d'ordonner le remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire, sous astreinte, et de le condamner à lui payer 2.000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile.
Par conclusions visées par le greffe le 25 mai 2016 au soutien de ses observations orales, et auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, monsieur [K] demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, sur l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité légale, de l'infirmer sur le montant des dommages et intérêts et de lui allouer les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal et capitalisation ;
- 27.913 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 16.672,20 Euros en vertu de sa qualité de salarié protégé ; à la demande de la Cour son conseil précise, lors de l'audience, que la nullité du licenciement est sollicitée à titre principal, subsidiairement le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 2.778,60 Euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur ;
Il a demandé la remise d'une attestation Pole Emploi modifiée et le bulletin de paie du mois de juillet sous astreinte et condamnation de la société SMP à lui payer 1.500 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile.
MOTIFS
Sur la nullité du licenciement
Il convient d'écarter en premier lieu l'argumentation de monsieur [K] selon laquelle il aurait été candidat aux élections qui se sont déroulées le 6 janvier 2010 au sein de la société SMP, laquelle fait observer, à juste titre, que cette candidature concerne un autre salarié ([M] [K]) ;
Pour revendiquer la qualité de salarié protégé à la date du licenciement, monsieur [K] fait également valoir qu'il avait été élu délégué du personnel suppléant le 16 février 2006, lors des élections au sein de la société SAFEN, mandat qui aurait subsisté au sein de la société SMP dès lors que son contrat de travail avait été transféré de plein droit ;
Toutefois, il est constant que monsieur [K] n'avait jamais fait état de sa qualité de salarié protégé lors de son licenciement, ni même devant le Conseil de Prud'hommes, l'ayant invoquée pour la première fois 5 ans après, en cause d'appel ;
Or il ressort des pièces produites que lors du transfert des salariés de la société SAFEN à la société SMP, l'autorisation de l'inspecteur du travail avait été requise pour ceux qui étaient titulaires d'un mandat ; que le nom de monsieur [K] ne figurait ni sur la liste des autorisations délivrées par l'inspectrice du travail ni sur la liste des refus d'autorisation ; qu'il n'était pas non plus mentionné comme salarié protégé dans les listes données par l'entreprise sortante ;
En conséquence, à supposer même que le mandat de délégué suppléant de monsieur [K] était encore valide au moment du transfert, et que celui entrait dans le cadre des dispositions de l'article 1244-1 du code du travail comme le prétend l'intéressé, il n'est pas établi que la société SMP avait connaissance de ce mandat lorsqu'elle a repris le contrat de travail ; aussi, faute pour monsieur [K] de l'avoir informée, lors de son licenciement, de l'existence de ce mandat, celui-ci lui était inopposable.
La demande de nullité du licenciement pour défaut d'autorisation de l'inspecteur du travail doit donc être rejetée ainsi que les demandes subséquentes en dommages et intérêts et pour violation du statut protecteur ;
Sur la faute grave
La faute grave est celle qui résulte de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations du contrat ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et justifie son départ immédiat. Le licenciement doit être fondé sur des éléments objectifs, vérifiables et imputables au salarié ;
Il appartient à l'employeur seul, lorsqu'il invoque la faute grave, d'en apporter la preuve et lorsqu'un doute subsiste, il profite au salarié ;
Pour justifier des absences et retards reprochés, la société verse aux débats des feuilles de pointage et les attestations des supérieurs hiérarchiques de monsieur [K] dont il n'existe aucun motif de remettre en cause la sincérité, étant précisé qu'elles sont parfaitement concordantes ; elles font apparaître des retards d'une, voire parfois deux heures par jour, pendant la période de 6 mois ayant précédé le licenciement de monsieur [K] et ce, à de nombreuses reprises ; ces retards ont été sanctionnés par des avertissements et mise à pied que l'intéressé n'a jamais contestés ; l'existence de ces multiples retards est donc parfaitement établie et elle ne peut utilement être démentie par des attestations de salariés qui se bornent à indiquer que monsieur [K] était régulièrement présent à son poste de travail, ou encore par une pétition sans aucun rapport avec sa situation personnelle ; elle présente incontestablement un caractère fautif si bien que le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit le licenciement de monsieur [K] sans cause réelle et sérieuse et lui a alloué des dommages et intérêts ;
Néanmoins, l'étude attentive des pièces fait apparaître quelques discordances entre les feuilles de pointages et les mentions des avertissements et mises en demeure, qui font état, par exemple, de retards importants (deux et trois heures) et même d'absence au cours du mois d'avril alors qu'au cours de ce mois, les feuilles de pointage ne révèlent ni retard ni absence, erreurs reprises dans la lettre de licenciement (par exemple absences et retards les, 2, 5 et 6 avril) ;
En outre, monsieur [K] qui avait 20 ans d'ancienneté à la date de son licenciement, n'avait jamais été sanctionné avant décembre 2009 ; aussi les retards répétés, tels qu'ils sont avérés, s'ils constituaient bien une cause réelle et séreuse du licenciement n'imposaient pas son départ immédiat de l'entreprise ; le jugement sera donc confirmé sur les sommes allouées à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de licenciement, qui sont contestées dans leur principe mais pas dans leur montant ;
La société SMP devra remettre à monsieur [K] une attestation POLE EMPLOI et un bulletin de paie conformes à la décision, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une astreinte ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Ordonne la jonction des procédures 13/03471 et 13/04102 ;
Déboute monsieur [A] [K] de sa demande, formée en appel, de nullité de son licenciement et de toutes ses demandes subséquentes ;
Confirme le jugement du Conseil de Prud'hommes sur les sommes alloués à titre d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, l'indemnité de licenciement et au titre de l'article 700 ;
L'infirme sur le surplus et statuant à nouveau ;
Dit le licenciement de monsieur [K] fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
En conséquence déboute monsieur [K] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Ajoutant au jugement ;
Dit que la société SMP devra remettre à monsieur [K] une attestation POLE EMPLOI et un bulletin de paie conformes à la décision, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une astreinte;
Ordonne capitalisation des intérêts dans les conditions prescrites par l'article 1154 du code civil;
Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles engagés à hauteur d'appel ;
Déboute les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires ;
Met les dépens à la charge de monsieur [K].
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT