La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/07/2016 | FRANCE | N°15/05394

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 08 juillet 2016, 15/05394


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 08 Juillet 2016

(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/05394



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mai 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY RG n° F14/00904







APPELANTE

SAS PAPREC ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Julien DUFFOUR, avocat au

barreau de PARIS, toque : P0470







INTIMEES

Madame [X] [I]

Le [Adresse 2]

[Localité 2]

née le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 3] ALGERIE

comparante en personne, assistée de Me Sal...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 08 Juillet 2016

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/05394

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mai 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY RG n° F14/00904

APPELANTE

SAS PAPREC ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Julien DUFFOUR, avocat au barreau de PARIS, toque : P0470

INTIMEES

Madame [X] [I]

Le [Adresse 2]

[Localité 2]

née le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 3] ALGERIE

comparante en personne, assistée de Me Salima BOUYAHIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0749

SA SEMARIV

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Isabelle SANTESTEBAN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0874

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Avril 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente de chambre

Mme Jacqueline LESBROS, Conseillère

Madame Valérie AMAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Ulkem YILAR, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et prorogé à ce jour.

- signé par Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente et par Madame Chantal HUTEAU, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [X] [I] a été embauchée par la SA SEMARIV en qualité d'ouvrière qualifiée coefficient 100 le 26 novembre 2010 avec reprise de son ancienneté au 9 août 2010 moyennant une rémunération brute de 2.347,62 €.

La SA SEMARIV applique la convention collective des activités du déchet.

Madame [X] [I] était affectée sur le marché de traitement des collectes sélectives du syndicat mixte de Massy-Antony-Hauts de Bièvre-Chilly Mazarin ci-après SIMACUR.

Depuis juillet 2010, la SA SEMARIV était titulaire du marché de traitement des collectes sélectives du SIMACUR.

En novembre 2013, à la suite d'un nouvel appel d'offre, dont les résultats lui ont été notifiés le 18 février 2014, la SA SEMARIV a perdu notamment le lot n°1 à savoir la réception et le traitement des emballages ménagers recyclables et des papiers au profit de la SAS PAPREC ILE DE FRANCE, ci-après SAS PAPREC IDF.

Le marché a pris effet le 1er juillet 2014 pour une durée de 3 ans renouvelable jusqu'à une durée totale maximale de 4 ans.

L'article 19 du cahier des clauses administratives particulières prévoyait une reprise du personnel en visant expressément l'article L.1224-1 du code du travail.

Par courrier recommandé du 19 juin 2014, la SAS PAPREC IDF a informé la SA SEMARIV de son refus de procéder à la reprise des salariés dont Madame [X] [I] faisait partie.

La SA SEMARIV, n'ayant plus le marché SIMACUR, a établi le solde de tout compte de Madame [X] [I] au 30 juin 2014 au motif " fin de chantier ".

Madame [X] [I], n'étant pas reprise par la SAS PAPREC IDF au 1er juillet 2014, saisissait le conseil de prud'hommes d'Evry le 3 octobre 2014 afin d'obtenir réparation.

Par jugement du 5 mai 2015, le conseil de prud'hommes d'Evry a :

Constaté le transfert du contrat de travail de Madame [X] [I] à la SAS PAPREC FRANCE à la date du 01 juillet 2014

Mis hors de cause la SA SEMARIV

Dit que le licenciement de Madame [X] [I] est sans cause réelle et sérieuse

Condamné la SAS PAPREC FRANCE, en la personne de son représentant légal, à payer à Madame [X] [I] les sommes suivantes :

- 4.234,32 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 423,43 € au titre des congés payés afférents

- 2.436,07 € au titre de l'indemnité de licenciement

avec intérêts au taux légal sur ces sommes à compter de la date de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation, soit le 15 octobre 2014

- 28.172,04 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 2.000 € au titre des dommages intérêts pour non respect de l'ordre des licenciements

-1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

avec intérêts au taux légal sur ces sommes à compter du prononcé du jugement

Ordonné à la SAS PAPREC FRANCE, en la personne de son représentant légal, la remise d'une attestation destinée à l'assurance chômage, d'un certificat de travail et du bulletin de paye conformes sous astreinte de 100 € par jour de retard pour l'ensemble des documents à compter du 15ème jour suivant la notification de la présente décision, et ce, pendant 30 jours

Dit que le conseil connaîtra de la liquidation de l'astreinte ordonnée

Ordonné l'exécution provisoire

Débouté Madame [X] [I] du surplus de ses demandes

Débouté la SA SEMARIV du surplus de ses demandes reconventionnelles

Débouté la SAS PAPREC FRANCE de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles

Mis les entiers dépens à la charge de la SAS PAPREC FRANCE.

Le jugement du conseil de prud'hommes a été notifié le jour où il a été rendu soit le 5 mai 2015 et la SAS PAPREC IDF en a relevé appel le 28 mai 2015.

L'affaire a été appelée à l'audience du 7 avril 2016, date à laquelle les conseils des parties ont soutenu leurs conclusions visées à l'audience par le greffier, auxquelles il est renvoyé, par application de l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

La SAS PAPREC IDF demande à la cour de :

Infirmer la décision du conseil de prud'hommes d'Evry du 5 mai 2015 ;

Statuant à nouveau,

Mettre hors de cause la société PAPREC ILE DE FRANCE ;

En conséquence,

Ordonner à Madame [I] de restituer les sommes versées par la société PAPREC ILE DE FRANCE en application de l'exécution provisoire ;

Condamner la société SEMARIV à verser à la société PAPREC ILE DE FRANCE la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SA SEMARIV demande à la cour de :

Confirmer le jugement rendu le 5 mai 2015 par le conseil de prud'hommes d'Evry,

Par conséquent,

Constater le transfert du contrat de travail de Madame [I] à la société PAPREC le 1er juillet 2014,

Ordonner la mise hors de cause de la société SEMARIV et rejeter les demandes présentées par Madame [I] à son égard,

Rejeter les demandes présentées par la société PAPREC, notamment sa demande d'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société PAPREC à payer à la société SEMARIV la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner Madame [I] à lui régler 1 € symbolique au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [X] [I] demande à la cour de :

A titre principal,

Fixer le salaire mensuel brut de Madame [X] [I] à la somme de 2.347,62 €

Dire et juger que le contrat de travail de Madame [I] a été transféré à compter du 1er juillet 2014 au sein de la société PAPREC ILE DE FRANCE

Constater que le contrat de travail de Madame [I] aurait dû être poursuivi à compter du 1er juillet 2014

Constater que la société PAPREC ILE DE FRANCE, en refusant la poursuite du contrat de travail de Madame [I], a procédé à la rupture des relations contractuelles pour motif économique

Constater que la société PAPREC ILE DE FRANCE n'a respecté aucune procédure de licenciement pour motif économique, ni notifié de lettre de licenciement motivée pour motif économique

Constater que la société PAPREC ILE DE FRANCE n'a pas respecté l'obligation de reclassement

Constater que la société PAPREC ILE DE FRANCE n'a pas appliqué les critères relatifs à l'ordre du licenciement

Constater que la société PAPREC ILE DE FRANCE n'a pas respecté les dispositions relatives au contrat de sécurisation professionnelle, au droit individuel à la formation, à la priorité de réembauchage, au maintien de la garantie prévoyance et au plan social

Constater que la société PAPREC ILE DE FRANCE n'a pas remis les documents de fin de contrat conformes (certificat de travail, attestation pôle emploi et reçu pour solde de tout compte) lors de la rupture du contrat de travail de Madame [I]

Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Evry du 5 mai 2015 en ce qu'il a :

- condamné la société PAPREC ILE DE FRANCE à verser à Madame [X] [I] les sommes suivantes :

- 4.234,32 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 423,43 € au titre des congés payés afférents

- 2.436,07 € au titre de l'indemnité de licenciement

avec intérêts au taux légal sur ces sommes à compter de la date de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation soit le 15 octobre 2014

- 28.172,04 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de l'ordre des licenciements

- 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

avec intérêts au taux légal sur ces sommes à compter du prononcé du jugement

- Et ordonné à la SAS PAPREC ILE DE FRANCE de remettre à Madame [I] une attestation destinée à l'assurance chômage, d'un certificat de travail et du bulletin de paie conformes sous astreinte de 100 € par jour de retard pour l'ensemble des documents à compter du 15ème jour suivant la notification de la décision et ce pendant 30 jours

Y ajoutant,

Condamner la société PAPREC FRANCE à verser à Madame [I] les sommes suivantes :

- 12.000 € à titre d'indemnité complémentaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 40.000 € à titre d'indemnité pour non respect des critères relatifs à l'ordre des licenciements

- 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct en raison de la remise tardive de l'attestation Pôle Emploi conforme

- 13.000 € à titre de dommages et intérêts pour perte de chance du droit de bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle, du DIF, de la priorité de réembauchage et de la garantie prévoyance et à l'absence de plan social

- 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens

aux intérêts légaux

Débouter la société PAPREC ILE DE FRANCE de toutes ses demandes fins et conclusions

A titre subsidiaire,

Fixer le salaire mensuel brut de Madame [X] [I] à la somme de 2.347,62 €

Dire et juger que le contrat de travail de Madame [I] a été rompu le 30 juin 2014 par la société SEMARIV

Constater que la société SEMARIV a rompu pour motif économique le contrat de travail de Madame [I] le 30 juin 2014 sans avoir respecté la procédure de licenciement pour motif économique, ni notifié de lettre de licenciement motivée pour motif économique

Constater que la société SEMARIV n'a pas respecté l'obligation de reclassement

Constater que la société SEMARIV n'a pas respecté les critères relatifs à l'ordre du licenciement

Constater que la société SEMARIV n'a pas respecté les dispositions relatives au contrat de sécurisation professionnel, au droit individuel à la formation, à la priorité de réembauchage et au maintien de la garantie prévoyance et au plan social

Constater que les sociétés défenderesses n'ont pas remis les documents de fin de contrat conformes (certificat de travail, attestation pôle emploi et reçu pour solde de tout compte)

En conséquence,

Condamner la société SEMARIV à verser à Madame [I] les sommes suivantes :

- 40.000 € à titre d'indemnité pour cause réelle et sérieuse

- 40.000 € à titre d'indemnité pour non respect des critères relatifs à l'ordre des licenciements

- 4.234,32 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 423,43 € à titre de congés payés afférents

- 2.436,07 € à titre d'indemnité de licenciement

- 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct en raison de la remise tardive de l'attestation Pôle Emploi conforme

- 13.000 € à titre de dommages et intérêts pour perte de chance du droit de bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle, du DIF, de la priorité de réembauchage et de la garantie prévoyance et absence de plan social

- 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens

Prononcer les intérêts légaux

Ordonner à la société SEMARIV de remettre à Madame [I] les documents sociaux suivants sous astreinte de 100 € par jour de retard et par document et ce à compter de la notification du jugement à intervenir : attestation Pôle Emploi, certificat de travail et bulletin de paie conformes à la décision à intervenir

Se réserver la possibilité de liquider les astreintes

A titre infiniment subsidiaire,

Condamner solidairement la société PAPREC ILE DE FRANCE et la SEMARIV à l'ensemble des demandes de condamnations de Madame [I] susmentionnées.

SUR CE, LA COUR :

Sur le transfert du contrat de travail :

En application de l'article L.1224-1 du code du travail qui est d'ordre public, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.

En l'espèce, l'article 1er du règlement de consultation du marché de traitement des déchets ménagers et assimilés stipule " Reprise du personnel : Conformément à l'article L.1224-1 et suivants du Code du travail, le titulaire devra assurer le cas échéant, la continuité des contrats de travail des personnels actuellement au sein de la société sortante " et l'article 19 intitulé " REPRISE DU PERSONNEL " du cahier des clauses administratives particulières prévoit que " conformément à l'article L.1224-1 et suivants du Code du travail, le titulaire devra assurer le cas échéant la continuité des contrats de travail des personnels actuellement au sein de la société sortante. La liste des éléments nécessaires (nombre de salariés, nature des contrats, ancienneté, qualification, salaire mensuel...) est fournie par la société sortante. A ce titre, le pouvoir adjudicateur informe les candidats qu'il n'est pas à l'origine des données transmises; dès lors les informations transmises ne sauraient engager sa responsabilité ".

La SAS PAPREC IDF soulève l'inapplicabilité de l'article L.1224-1 du code du travail au motif que les conditions s'y attachant relatives à l'existence d'une entité économique autonome et le maintien de l'identité et la poursuite de l'activité de l'entité économique ne sont pas remplies.

Sur l'existence d'une entité économique autonome

Conformément à l'article 1er (b) de la directive du Conseil de l'Union Européenne 2001/23 du 12 mars 2001, l'entité économique doit être entendue " comme un ensemble organisé de moyens, en vue de la poursuite d'une activité économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire ".

La SAS PAPREC IDF estime qu'en l'absence de transfert d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels, l'article L.1224-1 du code du travail ne trouve pas à s'appliquer.

Elle ajoute que la reprise par un autre employeur d'une partie des activités d'une entreprise n'entraine le maintien avec lui des contrats de travail que si cette activité est exercée par une entité économique autonome.

La SAS PAPREC IDF énumère les prestations reprises (réception et pesée des matériaux issus des collectes sélectives, tri des emballages ménagers recyclables, tri des papiers, conditionnement des produits triés...) en rappelant que celles-ci s'effectuent sur le site proposé par le candidat et avec son propre matériel.

Cette dernière en conclut qu'aucun des éléments corporels et incorporels utilisés par la SA SEMARIV pour l'exploitation de ce marché n'a été repris par la SAS PAPREC IDF qui exploite le marché sur un site différent dans une zone géographique éloignée et avec son propre matériel.

La SA SEMARIV rappelle que les parties se sont positionnées sur un transfert des contrats de travail constituant une des conditions du contrat de marché public, que les marchés publics sont des contrats consacrant l'accord de volonté entre deux personnes dotées de la personnalité juridique excluant toute décision unilatérale, que la SAS PAPREC IDF en répondant à cet appel d'offre a accepté les conditions du marché public et se devait de les respecter en reprenant les salariés affectés au SIMACUR.

La SA SEMARIV répond que le transfert du marché doit être considéré comme celui d'une entité économique autonome au sens de l'article L.1224-1 du code du travail puisqu'un lot précis et entier a été transféré à la SAS PAPREC IDF, que l'activité transférée de la société sortante était exécutée par des salariés qui y étaient spécialement affectés et que les moyens propres corporels et incorporels permettaient la poursuite de l'activité transférée.

L'entreprise sortante considère ainsi que les conditions de fait dans lesquelles s'exerce l'activité de réception et de traitement des emballages ménagers recyclables prouvent l'existence d'une entité économique autonome qui a été transférée de l'entreprise sortante à la SAS PAPREC IDF.

La SA SEMARIV produit un courriel du 25 avril 2014 de la responsable d'agence de la SAS PAPREC IDF manifestant sa volonté de respecter l'obligation de reprise en ces termes : " Dans le cadre du marché de traitement des collectes sélectives du SIMACUR qui prévoit une reprise du personnel, je vous sollicite en tant que futur prestataire (notification en PJ). A ce titre je vous remercie par avance de bien vouloir me transmettre au plus vite : la liste du personnel concerné par cette reprise (...) ".

Or, la cour constate que l'ensemble organisé de salariés spécialement affectés au traitement du SIMACUR constitue une entité économique autonome qui poursuit un objectif propre maintenu dans les conditions identiques à la suite du transfert d'activité dans une société nouvelle sans qu'il soit nécessaire qu'elles aient entre elles des liens de droit.

Sur le maintien de l'identité et la poursuite de l'activité de l'entité économique

La SAS PAPREC IDF ne conteste pas accomplir une activité similaire à celle de la SA SEMARIV mais indique que les conditions d'exploitation ne sont pas les mêmes et qu'aucun élément d'exploitation n'a été transféré de la SA SEMARIV vers la SAS PAPREC IDF.

La seule circonstance que le service effectué par l'ancien et le nouvel attributaire d'un marché est similaire ne saurait automatiquement caractériser le transfert d'une entité économique ; l'identité de l'activité économique peut aussi découler d'autres éléments tels que l'identité du personnel qui la compose, de l'encadrement, de l'organisation de son travail, des méthodes d'exploitation ou encore, le cas échéant, des moyens d'exploitation à sa disposition.

En l'espèce, les éléments de fait produits montrent que le changement de l'attributaire du marché n'a eu aucune incidence sur les déchets traités pour le SIMACUR ; un lot précis et entier a été transféré à Paprec (pièce 11 de Semariv) ; les déchets sont demeurés de même nature et qui sont traités selon le même process et dans les mêmes installations : pesée, alvéoles de déchargement et reconditionnement pour la sortie des produits traités.

La cour constate que l'entité économique autonome identifiée chez la SA SEMARIV a été transférée à l'identique pour poursuivre la même activité chez la SAS PAPREC IDF, le traitement des mêmes déchets, avec une organisation fonctionnelle subissant les mêmes contraintes.

En outre, il ressort des éléments versés au débat que la SAS PAPREC IDF avait admis l'obligation de reprise du personnel en sollicitant la liste des salariés à reprendre.

Enfin et surtout la cour relève que la reprise du personnel était une condition impérative du marché, dès lors la SAS PAPREC IDF ne saurait être reçue dans son argumentation tendant à ne pas respecter son engagement qui résulte de la soumission au marché.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a constaté le transfert du contrat de travail de Madame [X] [I] à la SAS PAPREC IDF à la date du 30 juin 2014.

Sur la mise hors de cause de la SA SEMARIV :

La SA SEMARIV formule une demande de mise hors de cause au motif qu'elle s'est acquittée de ses obligations et qu'il appartenait à la SAS PAPREC IDF de reprendre ou de licencier les salariés concernés.

Dès lors que la cour a constaté le transfert du contrat de travail de Madame [X] [I] à la SAS PAPREC IDF à la date du 30 juin 2014, la SA SEMARIV doit être mise hors de cause.

En conséquence, le jugement du conseil de prud'hommes est confirmé en ce qu'il a mis hors de cause la SA SEMARIV.

Sur la cause du licenciement :

La SA SEMARIV a mis un terme aux contrats de travail des 22 salariés affectés à l'activité de traitement des déchets du SIMACUR le 30 juin 2014 en leur délivrant un certificat de travail, une attestation Pôle Emploi portant la mention de transfert, en soldant les congés payés mais sans envoi de lettre de licenciement.

Madame [X] [I] fait valoir que la rupture de son contrat de travail constitue un licenciement pour motif non inhérent à sa personne et qui doit s'analyser comme un licenciement pour motif économique infondé.

La SA SEMARIV considère qu'elle a rompu les contrats de travail au motif qu'ils ont été transférés à la SAS PAPREC IDF et que cette dernière est responsable de leur rupture.

La SAS PAPREC IDF estime quant à elle que le contrat de travail n'a pas été transféré en son sein et que c'est la SA SEMARIV qui est dès lors responsable de la rupture du contrat de la salariée.

La cour ayant constaté le transfert du contrat de travail de Madame [X] [I] à la SAS PAPREC IDF à la date du 30 juin 2014, dès lors la SAS PAPREC IDF était l'employeur de la salariée à cette date et il lui revenait de procéder à son licenciement.

Madame [X] [I] considère qu'il n'a pas été satisfait à l'obligation de reclassement puisqu'aucune recherche n'a été entreprise et sollicite dès lors que son licenciement soit jugé sans cause réelle ni sérieuse.

La cour relève que la SAS PAPREC IDF, en sa qualité de nouvel employeur, n'a respecté aucune procédure relative au licenciement, n'a adressé aucun courrier à la salarié et n'a pas respecté son obligation de reclassement.

Or, en l'absence de lettre de licenciement et du respect par l'employeur de son obligation de reclassement, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse.

Par conséquent, la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement de Madame [X] [I] sans cause réelle ni sérieuse.

Sur les conséquences financières du licenciement :

Sur l'indemnité de licenciement et l'indemnité compensatrice de préavis :

Madame [X] [I] demande la condamnation de la SAS PAPREC IDF au paiement de la somme de 2.436,07 € à titre d'indemnité de licenciement égale à 1/5 de mois par année d'ancienneté, celle de 4.234,32 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis augmentée de la somme de 423,43 € au titre des congés payés afférents,

Ces sommes ne sont pas discutées dans leurs montants par la SAS PAPREC IDF.

Le jugement du conseil de prud'hommes qui a fait droit à ces demandes doit donc être confirmé.

Sur l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Madame [X] [I] sollicite la condamnation de la SAS PAPREC IDF au paiement de la somme de 40.000 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La salariée considère que son préjudice est particulièrement grave du fait de son ancienneté de près de 4 ans et de la non prise en charge par le Pôle Emploi pendant un an.

Au vu de ces éléments la cour confirme le jugement prud'homal en ce qu'il a condamné la SAS PAPREC IDF à verser à Madame [X] [I] 28.172,04 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

Sur le non-respect des dispositions relatives aux critères déterminant l'ordre des licenciements :

Madame [X] [I] fait valoir qu'elle n'a pas bénéficié des dispositions de l'article L.1233-5 du code du travail énonçant les critères devant être mis en 'uvre pour déterminer l'ordre des licenciements au sein d'une même catégorie professionnelle et sollicite à ce titre le versement de la somme de 40.000 €.

La SAS PAPREC IDF est taisante s'agissant de cette demande mais Madame [X] [I] ne justifie pas avoir sollicité par écrit les critères retenus pour décider des licenciements.

Or, la cour relève d'abord que la SAS PAPREC IDF n'a repris aucun des personnels affecté au traitement des déchets du SIMACUR de sorte qu'en fait elle n'a appliqué aucun critère à aucun salarié et n'a fait aucun choix entre les salariés ; il en résulte que Madame [X] [I] ne démontre pas avoir subi de préjudice particulier du fait de la non définition par l'employeur de critères d'ordre de licenciement.

En conséquence, la demande de Madame [X] [I] est rejetée et le jugement prudhomal infirmé en ce qu'il a condamné la SAS PAPREC IDF à verser à Madame [X] [I] la somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements.

Sur la demande de dommages et intérêts au titre du contrat de sécurisation professionnelle, du droit individuel à la formation, de la priorité de réembauchage et du droit au maintien de la prévoyance:

Madame [X] [I] sollicite la somme de 13.000 € à titre de dommages et intérêts au motif de ne pas avoir bénéficié du contrat de sécurisation professionnelle, du droit individuel à la formation, de la priorité de réembauchage et du droit au maintien de la prévoyance.

La cour relève qu'en l'absence de lettre de licenciement informant la salariée de ses droits en matière de droit individuel à la formation, de droit au maintien de la prévoyance, de la priorité de réembauchage et du contrat de sécurisation professionnelle, la salariée a effectivement perdu des chances de faire valoir ses droits, la demande de Madame [X] [I] est fondée en son principe.

En conséquence, la cour condamne la SAS PAPREC IDF à verser à Madame [X] [I] des dommages et intérêts à hauteur de 2.000 € au titre du contrat de sécurisation professionnelle, du droit individuel à la formation, de la priorité de réembauchage et du droit au maintien de la prévoyance.

Sur la demande de dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation Pôle Emploi :

Madame [X] [I] demande la condamnation de la SAS PAPREC IDF au versement de la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation Pôle Emploi.

Elle explique que du fait de la remise tardive desdits documents soit près d'un an après la rupture du contrat de travail en exécution du jugement du conseil de prud'hommes ne lui a pas permis de bénéficier d'aucun revenu de remplacement depuis la rupture de son contrat de travail.

La cour constate que la SAS PAPREC IDF en ne reprenant pas la salariée et en ne lui délivrant aucun document pour s'inscrire au chômage a de fait contribué à retarder l'indemnisation de cette dernière au titre du chômage et lui a causé un dommage distinct de celui de la perte d'emploi ; un tel préjudice qui s'est prolongé sur une année sera intégralement réparé par la somme de 3.000 € que la SAS PAPREC IDF est condamnée à verser à Madame [X] [I].

Sur la remise des documents de fin de rupture :

Madame [X] [I] sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a ordonné la remise d'un certificat de travail, d'une attestation Pôle Emploi portant la mention de licenciement pour motif économique, d'un bulletin de paie conformes et assortie d'une astreinte de 100 € par jour de retard pour l'ensemble des documents à compter du 15ème jour suivant la notification de la décision et ce pendant 30 jours.

Au vu des motifs retenus par la cour ces dispositions doivent être confirmées sauf en ce qui concerne le prononcé de l'astreinte dont la nécessité n'est pas démontrée.

Sur le remboursement par l'employeur des indemnités versées au salarié par Pôle Emploi :

En application de l'article L.1235-4 du code du travail, dans les cas prévus aux articles L.1235-3 et L.1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé ; ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

En l'espèce, le licenciement ayant été déclaré sans cause réelle et sérieuse par application de l'article L.1235-3 du code du travail, il y a lieu à application de l'article L.1235-4 et il convient d'ordonner à la SAS PAPREC IDF de rembourser les éventuelles indemnités de chômage qui ont été versées au salarié dans la limite de six mois.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

La SAS PAPREC IDF succombant en appel, ses demandes relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont rejetées et il convient faire droit à la demande de Madame [X] [I] à hauteur de 1.500€.

Au vu des circonstances, il convient de faire droit à la demande de la SA SEMARIV dirigée à l'encontre de la SAS PAPREC IDF à hauteur de 400 € et de rejeter sa demande formée à l'encontre de la salariée.

La SAS PAPREC IDF succombant en appel, elle doit être condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes d'EVRY du 5 mai 2015 en toutes ses dispositions, sauf celles sur le prononcé d'une astreinte et les dommages et intérêts pour non respect des critères d'ordre des licenciements ;

L'infirme sur ces deux derniers chefs ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SAS PAPREC IDF à verser à Madame [X] [I] les sommes suivantes :

- 2.000 € de dommages et intérêts au titre du contrat de sécurisation professionnelle, du droit individuel à la formation, de la priorité de réembauchage et du droit au maintien de la prévoyance,

- 3.000 € de dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation Pôle Emploi,

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt,

Ordonne le remboursement par la SAS PAPREC IDF des indemnités de chômage versées à Madame [X] [I] dans la limite de 6 mois,

Déboute la SAS PAPREC IDF de toutes ses demandes,

Condamne la SAS PAPREC IDF à verser à Madame [X] [I] 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS PAPREC IDF à verser à la SA SEMARIV 400 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt,

Déboute la SA SEMARIV du surplus de ses demandes,

Déboute Madame [X] [I] du surplus de ses demandes,

Condamne la SAS PAPREC IDF aux entiers dépens et aux frais éventuels d'exécution de l'arrêt par voie d'huissier de justice.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 15/05394
Date de la décision : 08/07/2016

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°15/05394 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-07-08;15.05394 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award