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30/06/2016 | FRANCE | N°15/08540

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 30 juin 2016, 15/08540


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 30 Juin 2016

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/08540



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Juillet 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/07600





APPELANT

Monsieur [D] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 2] (URUGUAY)

comparant en pe

rsonne,

assisté par Me Pascal TELLE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0471





INTIMEE

AGENCE FRANCE PRESSE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Grégory CHASTAGNOL,...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 30 Juin 2016

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/08540

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Juillet 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/07600

APPELANT

Monsieur [D] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 2] (URUGUAY)

comparant en personne,

assisté par Me Pascal TELLE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0471

INTIMEE

AGENCE FRANCE PRESSE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Grégory CHASTAGNOL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0107

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 31 Mai 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère faisant fonction de Présidente

Monsieur Stéphane MEYER, Conseiller

Madame Marie-Liesse GUINAMANT, Vice-Présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Laura CLERC-BRETON, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Madame Laura CLERC-BRETON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur [D] [C] a été engagé par l'AFP (Agence France Presse), pour une durée déterminée à compter du 11 octobre 1982 puis indéterminée, en qualité de rédacteur, avec le statut de journaliste.

Le 28 mai 2013, Monsieur [C] a saisi le conseil de prud'hommes de [Localité 4] et formé des demandes relatives à une discrimination alléguée ainsi que de rappel de congés payés et de RTT. Le syndicat SUD AFP est intervenu volontairement à l'instance.

Par jugement du 22 juillet 2015 notifié le 25 août 2015, le conseil de prud'hommes de [Localité 4] a débouté Monsieur [C] et le syndicat SUD AFP de l'ensemble de leurs demandes.

Monsieur [C] a interjeté appel de cette décision le 28 août 2015.

Lors de l'audience du 31 mai 2016, Monsieur [C] demande à la Cour d'infirmer le jugement et de condamner l'AFP à lui payer les sommes suivantes :

- à titre de rappel d'indemnité de congés payés pour la période du 4 juin 2008 au 31 décembre 2015, 13 099,52 euros incluant le 13 ème mois et les 6 jours de congés d'ancienneté, à titre subsidiaire, 7 716,77 euros excluant le 13 ème mois mais incluant les 6 jours de congés d'ancienneté et à titre plus subsidiaire, 4 650,43 euros bruts incluant le 13ème mois mais excluant les 6 jours de congés d'ancienneté

- en tout état de cause, 21 975,03 euros, à titre de rappel de l'indemnité de RTT (selon la règle du 1/10 ème et incluant le 13ème mois), ou, à titre subsidiaire, de 17 709,08 euros bruts (selon la règle du 1/10 ème mais excluant le 13ème mois) pour la période du 4 juin 2008 au 31 décembre 2015

- 50 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale

- 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive

- 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il demande également qu'il soit ordonné à l'AFP de le reclasser en catégorie Red 7 coefficient 277 à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et ce, sous astreinte de 200,00 euros par jour de retard.

De son côté, le syndicat SUD AFP, intervenant volontaire, demande la condamnation de l'AFP à lui payer 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article L 2132-3 du Code du Travail, et de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, Monsieur [C] expose :

- qu'il a été victime de discrimination syndicale consistant en une entrave dans la progression catégorielle et en termes d'évolution de poste

- qu'il doit percevoir le congé d'ancienneté prévu par la convention collective applicable

- que l'AFP n'a jamais respecté les règles légales pour le calcul de l'indemnité de congés payés et des RTT

- que le syndicat SUD AFP est fondé à demander réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente.

En défense, l'AFP demande la confirmation du jugement et la condamnation de Monsieur [C] et du syndicat SUD AFP à lui verser chacun une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir :

- que Monsieur [C] n'a à aucun moment fait l'objet de la moindre discrimination et qu'il n'a jamais eu d'activité syndicale

- que les demandes de Monsieur [C] relatives aux congés payés et RTT ne sont pas fondées, de même que celles du syndicat SUD AFP.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'allégation de discrimination

Aux termes de l'article L 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

L'article L 1134-1 dispose que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En l'espèce, Monsieur [C] expose avoir été victime de discrimination en raison de ses activités syndicales.

Pour établir la réalité de cette activité, il produit une lettre adressée le 2 août 2007 à la HALDE par le Syndicat SUD relative à l'exclusion des personnes de nationalité étrangère de la désignation en qualité de représentants du personnel au conseil d'administration de l'AFP, une lettre du 10 septembre 2007, aux termes de laquelle il a lui-même saisi la HALDE d'une réclamation relative à son exclusion de cette désignation en raison de sa nationalité, un tract du syndicat SUD protestant contre cette situation, un jugement du conseil de prud'hommes de [Localité 4] du 2 décembre 2009, faisant droit aux demandes de Monsieur [K], délégué syndical SUD à l'AFP relatives à une discrimination syndicale, et faisant état de l'attestation de Monsieur [C], présenté par le jugement comme 'également militant du Syndicat Sud selon l'employeur', attestation qu'il produit également.

Au soutien de la discrimination elle-même, Monsieur [C] expose que, depuis 2004, il se trouve bloqué dans la catégorie Red 6 coefficient 260 et n'a plus bénéficié d'aucune promotion jusqu'à ce jour, qu'entre les mois de septembre 2008 et avril 2014, il a subi le rejet d'une douzaine de candidatures, que des candidates ayant moins d'expérience en Infographie et moins d'ancienneté à l'AFP que lui ont été nommées.

Ces éléments laissent supposer l'existence d'une discrimination.

Cependant, c'est par de justes motifs que la cour adopte que le conseil de prud'hommes a estimé que Monsieur [C] n'a manifesté son intérêt pour un changement de poste qu'en 2004, soit plus de 22 ans après son recrutement, qu'il ne démontre pas avoir cherché à connaître les raisons de refus de ses candidatures, pas plus qu'il n'a eu recours aux délégués du personnel ou au conseil d'administration comportant des représentants syndicaux pour contester ces décisions, que son panel de référence ne comporte que 2 personnes alors que celui de l'AFP fait état de 43 références de salariés d'ancienneté comparable et que les salariés ayant connu une évolution en catégorie supérieure à lui avaient connu un parcours international diversifié comportant plus de responsabilités et maîtrisant plusieurs langues peu courantes, que l'AFP justifie pour chacun des postes auxquels il avait postulé les raisons du choix d'un autre collaborateur et qu'enfin il ne démontre en aucune manière avoir été ou être titulaire d'un mandat de représentation syndicale.

Il résulte de ces éléments que la situation de Monsieur [C] est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Il doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts formée à cet égard.

Sur la demande de rappel de congé d'ancienneté

Cette demande est formée en application des dispositions de la convention collective du personnel d'encadrement des agences de presse.

Cependant, les journalistes professionnels, profession à laquelle Monsieur [C] appartient, relèvent exclusivement des dispositions des articles L 7111-1 et suivants du code du travail ainsi que de la convention collective nationale des journalistes du 1er novembre 1976, à l'exclusion de toute autre convention collective, de telle sorte que la convention collective du personnel d'encadrement des agences de presse, qui ne comporte aucune disposition prévoyant son application aux journalistes, ne peut être invoquée par ces derniers.

Monsieur [C] doit donc être débouté de cette demande.

Sur la demande de rappel d'indemnité de congés payés

Il résulte des dispositions de l'article L 3141-22 du code du travail que l'indemnité de congés est égale au dixième de la rémunération totale perçue au cours de la période de référence mais qu'elle ne peut être inférieure à la rémunération que le salarié aurait perçue pendant son congé s'il avait continué à travailler pendant cette période.

Or, en l'espèce, par lettre du 18 novembre 2011, l'AFP a écrit à l'ensemble de ses salariés que, depuis plusieurs années, elle reconnaissait n'avoir calculé leurs congés qu'en appliquant la méthode du salaire fictif alors que l'application de la règle du un dixième aurait été plus avantageuse et a déclaré régulariser la situation.

Monsieur [C] fait toutefois valoir que cette régularisation est incomplète, le 13ème mois devant nécessairement être intégré dans la base de calcul de l'indemnité de congés payés, au motif que la convention collective des journalistes prévoit « à la fin du mois de décembre, tout journaliste professionnel percevra à titre de salaire, en une seule fois, sauf accord particulier, une somme égale au salaire du mois de décembre », ce dont il résulterait, selon lui, que le 13ème mois ainsi versé est clairement assimilé, non pas à une prime ou une gratification exceptionnelle, mais à un salaire.

Cependant cette prime de 13ème mois, dont le montant n'est pas affecté par la prise du congé annuel puisqu'elle rémunère indifféremment, à la fois les périodes de travail effectif et les périodes de congés payés, doit être exclue de l'assiette de l'indemnité de congés payés, les dispositions de la convention collective applicable ne permettant pas de déroger à cette règle.

Par conséquent, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [C] de cette demande.

Sur la demande de rappel d'indemnité de RTT

Comme pour le calcul de l'indemnité de congés payés, la prime de 13ème mois, dont le montant n'est pas affecté par la prise du congé annuel puisqu'elle rémunère indifféremment, à la fois les périodes de travail effectif et les périodes de congés payés, doit être exclue de l'assiette de l'indemnité de RTT.

Le jugement doit donc également être confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [C] de cette demande.

Sur les autres demandes

Les demandes du syndicat SUD AFP, en ce qu'elle se rattachent au bien fondé de l'action de Monsieur [C] doivent être rejetées.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis à disposition au secrétariat-greffe,

Confirme le jugement.

Déboute l'AFP de sa demande d'indemnité.

Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de Monsieur [C].

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 15/08540
Date de la décision : 30/06/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°15/08540 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-30;15.08540 ?
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