Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 1
ARRET DU 28 JUIN 2016
(n° 336 , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/12596
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Mai 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/01185
APPELANTE
SCI LOUNA, représentée par son gérant en exercice domicilié audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 4]
N° SIRET : 489 715 367
Représentée par Me Laurent SIDOBRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0514
INTIME
Monsieur [T] [W], prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Adresse 3]
Représenté par Me Jean-Pierre LÉON, avocat au barreau de PARIS, toque : C0406
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 06 Avril 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Jacques BICHARD, Président de chambre
Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère
Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Elodie PEREIRA
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier.
Par un jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 6 février 2014, la SCI LOUNA a été condamnée à verser une indemnité d'éviction de 337 884 € à son ancien locataire, la société LE CHALET.
La SCI LOUNA a formé appel de ce jugement et par une ordonnance du 1er juillet 2014, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Versailles a constaté que l'appelante n'avait pas conclu dans le délai imparti et a prononcé la caducité de l'appel.
La SCI LOUNA a fait assigner maître [W] devant le tribunal de grande instance de Paris en responsabilité et indemnisation. Par un jugement du 13 mai 2015, le tribunal a :
- écarté des débats la pièce n°8 de la SCI LOUNA,
- dit que maître [W] a reçu de la SCI LOUNA un mandat de représentation en justice,
- dit que maître [W] a manqué à son devoir d'accomplir au nom du mandant les actes de la procédure et a manqué à son devoir de conseil,
- dit que ces manquements sont à l'origine d'une perte d'opter entre la poursuite de la voie de l'appel du jugement du tribunal de grande instance de Nanterre et l'exercice de son droit de repentir,
- condamné en conséquence maître [W] à payer à la SCI LOUNA la somme de
73 000 € à titre de dommages-intérêts,
- dit maître [W] irrecevable en sa demande en dommages-intérêts en réparation du préjudice moral de sa gérante,
- débouté maître [W] de ses autres demandes en dommages-intérêts,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné maître [W] à payer la SCI LOUNA la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SCI LOUNA a formé appel de cette décision, le 15 juin 2015.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 14 mars 2016, la SCI LOUNA demande à la cour de confirmer le jugement du 13 mai 2015 en ce qu'il a dit que maître [W] a reçu de la SCI LOUNA un mandat de représentation en justice, qu'il a manqué à son devoir d'accomplir au nom du mandant les actes de la procédure et a manqué à son devoir de conseil et que sa responsabilité est engagée; de l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau, de condamner maître [W] à lui payer les sommes de 293 941,18 €, 150 € et 30 000 € avec intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure, ainsi que la somme de 5 000 € pour les frais irrépétibles de 1ère instance et une somme identique pour les frais irrépétibles de l'instance d'appel.
Dans ses dernières conclusions d'appel incident communiquées par voie électronique le 9 novembre 2015, maître [W] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a écarté la pièce 8 de la SCI LOUNA des débats et son infirmation pour le surplus, le débouté de la SCI et sa condamnation à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, et celle de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION :
Il convient tout d'abord de constater à la lecture de la liste des pièces communiquées en fin des dernières conclusions de la SCI LOUNA que celle-ci déclare avoir retiré des débats la pièce 8 mais que figure néanmoins dans le dossier remis à la cour la photocopie dépourvue de tampon d'un mail de maître [W] adressé à maître [N] le 8 avril 2014 à 17H17 et d'un mail de maître [N] adressé à maître [W] le 9 avril 2014 à 9H55 correspondant à ladite pièce 8. Aussi il est nécessaire de confirmer le jugement du 13 mai 2014 sur ce point et de retirer des débats ces mails non officiels échangés entre avocats.
Maître [W] qui déclare avoir été en relation avec la SCI pour d'autres affaires, conteste avoir été chargé d'un mandat par la SCI LOUNA dans la procédure d'appel l'opposant à la société Le chalet et relève que maître [N] était constitué devant la cour pour le compte de cette dernière. Il critique les attestations versées aux débats par la SCI.
La SCI LOUNA maintient que lors d'un rendez vous ayant eu lieu à son cabinet, elle a chargé maître [W] de défendre ses intérêts devant la cour d'appel et elle produit à titre d'éléments de preuve deux attestations ainsi qu'un relevé de ses appels téléphoniques.
Il convient de constater que devant le tribunal de grande instance de Nanterre, la SCI LOUNA était représentée par maître [N], que c'est celui-ci qui a effectué la déclaration d'appel du jugement rendu par cette juridiction et qui s'est constitué pour le compte de la SCI devant la cour d'appel de Versailles. Il convient également de relever que l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er juillet 2014 qui a déclaré l'appel caduc, mentionne également que la SCI LOUNA est représentée par maître [N], qui était ainsi seul habilité à effectuer des actes de procédure pour le compte de l'appelante.
S'agissant de l'obligation de conseil, la SCI LOUNA ne verse aux débats aucune lettre ou mail qu'elle aurait pu échanger avec maître [W] au sujet de son litige avec la société LE CHALET ni avant ni après l'ordonnance de caducité du 1er juillet 2014. Elle produit un relevé de ses appels téléphoniques qui fait apparaître qu'elle a cherché à joindre en vain maître [W] à de nombreuses reprises et a eu une conversation de 10 mn avec lui le 21 mai 2014. Néanmoins, le contenu de cette conversation ne peut être connu alors que le 22 juillet 2014, maître [W] a écrit à Mme [Q] pour lui restituer trois dossiers (dossier escroquerie, dossier SARL RESTO LA BULLE, dossier [L]) ;
La SCI LOUNA produit une attestation de Mme [I] datée du 30 mars 2015 dans laquelle celle-ci déclare avoir assisté à un rendez vous avec maître [W] le 2 avril 2014 au cours duquel celui-ci aurait rassuré Mme [Q] (gérante de la SCI) en lui disant 'qu'il ferait le nécessaire devant la cour'. Néanmoins la SCI LOUNA ne précise pas à quel titre elle a assisté à ce rendez-vous et quels sont ses liens avec la SCI et sa gérante et l'affirmation dans les conclusions de l'appelante de l'absence de lien de parenté avec la famille [Q] ne correspond pas aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile et n'éclaire pas la cour sur les motifs de la présence de cette personne à ce rendez vous.
La SCI LOUNA verse également l'attestation de M [F] architecte qui déclare être entré en contact avec maître [W] le 7 mai 2014 à la demande de M.[Q] afin qu'il lui transmette le dossier et toutes les pièces relatives à l'affaire de l'hôtel du Chalet et que lors de cette conversation, maître [W] lui avait expliqué 'qu'il était en charge de l'affaire'. Il ajoute qu'il n'a reçu aucun dossier de maître [W] et qu'il n'a plus eu de contact avec lui.
Cette attestation qui n'est étayée par aucune autre pièce relative à d'autres échanges entre l'architecte et l'avocat ne suffit pas à établir l'existence d'un mandat confié à maître [W] de représenter la SCI en justice devant la cour d'appel non plus que celui de l'assister dans le litige l'opposant à son ancien locataire à propos de l'indemnité d'éviction.
Aussi la SCI LOUNA n'apporte pas la preuve de l'existence d'un mandat confié à maître [W] dans le cadre du litige ayant donné lieu au jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 6 février 2014.
Le jugement du 13 mai 2015 sera donc infirmé en ce qu'il a retenu que maître [W] était chargé d'un mandat de représentation en justice et il y a lieu de déclarer les demandes de la SCI LOUNA irrecevables à l'encontre de maître [W].
La mauvaise foi ou la légèreté blâmable de la SCI LOUNA n'étant pas caractérisée, il n'y a pas lieu de la condamner au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Il sera alloué à maître [W] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 13 mai 2015 en ce qu'il a retiré des débats la pièce 8 de la SCI LOUNA correspondant à des mails échangés entre avocats
Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 13 mai 2015 pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Déclare les demandes de la SCI LOUNA dirigées contre maître [W] irrecevables,
Déboute maître [W] de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive,
Condamne la SCI LOUNA à payer à maître [W] la somme de 1 500 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SCI LOUNA aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de maître LEON, selon l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT,