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22/06/2016 | FRANCE | N°14/10970

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 22 juin 2016, 14/10970


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 22 Juin 2016



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/10970



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 mai 2014 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 13/03986





APPELANTE

AGS CGEA ILE DE FRANCE OUEST

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de

PARIS, T10 substitué par Me Charlotte CASTETS, avocat au barreau de PARIS,







INTIMES

Me [J] [M] (SCP BTSG) - Mandataire liquidateur de la SARL CONSORTIUM DE REALISATION DE LA SOCIE...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 22 Juin 2016

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/10970

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 mai 2014 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 13/03986

APPELANTE

AGS CGEA ILE DE FRANCE OUEST

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, T10 substitué par Me Charlotte CASTETS, avocat au barreau de PARIS,

INTIMES

Me [J] [M] (SCP BTSG) - Mandataire liquidateur de la SARL CONSORTIUM DE REALISATION DE LA SOCIETE CHRISTIAN MODE

[Adresse 2]

[Localité 2]

Siret n° 434 122 511 00059

non comparant

Monsieur [Y] [M]

[Adresse 3]

[Localité 3]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 4] (REPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE )

comparant en personne, assisté de Me Bertrand LAMPIDES, avocat au barreau de PARIS, E0164

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/050650 du 01/12/2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 mars 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Christine LETHIEC, conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine SOMMÉ, président

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Madame Christine LETHIEC, conseiller

Greffier : Madame Marion AUGER, lors des débats

ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine SOMMÉ, président et par Madame Marion AUGER, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [Y] [M] a été engagé par la SARL Christian Mode, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 8 février 1999, en qualité de «'toutes mains'», moyennant un salaire mensuel brut de 6 707.18 frs.

Il percevait, en dernier lieu, une rémunération mensuelle brute de 1 343.80 €.

L'entreprise qui a changé de forme sociale pour devenir une SAS à compter du mois de décembre 2008, employait moins de onze salariés, et faisait application de la convention collective de l'industrie de l'habillement.

Dans la nuit du 23 au 24 novembre 2010, un incendie a eu lieu dans les locaux de l'entreprise situés à [Adresse 4].

Le 16 janvier 2011, la SAS Christian Mode a été dissoute et son patrimoine a fait l'objet d'une transmission universelle à son unique associé, la SARL Consortium de Réalisation de la Société Christian Mode, créée le 10 janvier 2011, en tant que structure de cantonnement et de défaisance ayant repris les actifs de la SAS Christian Mode .

Par lettre recommandée du 30 janvier 2011, la SAS Christian Mode a convoqué M. [Y] [M] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 14 février 2011 en lui notifiant, également, une mise à pied à titre conservatoire.

La SAS Christian Mode a fait l'objet d'une radiation, le 9 mars 2011, au terme du délai d'opposition de 30 jours, courant à compter de la publication régulière de la transmission universelle de patrimoine dans un journal d'annonces légales.

En l'absence de manifestation ultérieure de son employeur, M. [Y] [M] a saisi en référé, le 23 mars 2011, le conseil de prud'hommes de Paris et l'instance a été radiée le 27 juin 2011, suite à l'absence du salarié qui n'était pas représenté.

Le 9 mai 2012, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL Consortium de Réalisation de la Société Christian Mode, en désignant la société BTSG, prise en la personne de Me [M] [J], en qualité de liquidateur judiciaire.

Par courrier recommandé adressé le 26 juillet 2012, M. [Y] [M] a déclaré sa créance.

Estimant ne pas être rempli de ses droits, M. [Y] [M] a saisi, le 29 mars 2013, le conseil de prud'hommes de Paris, lequel, par jugement rendu le 12 mai 2014 a fixé la créance du salarié au passif de la SARL Consortium de Réalisation de la Société Christian Mode aux sommes suivantes :

' 23 797.85 € à titre de rappel de salaires du 1er décembre 2010 au 9 mai 2012,

' 2 379.78 € à titre de congés payés,

' 3 583.46 € à titre d'indemnité de licenciement légale,

' 1 € symbolique au titre de dommage et intérêts pour préjudice moral,

' 8 062,80 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Le jugement a été déclaré opposable à l'AGS CGEA IDF OUEST dans la limite de ses obligations légales et réglementaires.

Le 9 octobre 2014, l'AGS CGEA IDF OUEST a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions visées par le greffe le 14 mars 2016 et soutenues oralement, l'AGS CGEA IDF OUEST demande à la cour':

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé la date de la rupture du contrat de travail à la date de la liquidation judiciaire et de:

- constater l'absence de rupture du contrat de travail de M. [M]

- dire qu'en application de l'article L. 3253-8 2°, la garantie de l'AGS ne couvre que les créances résultant de la rupture des contrats de travail que dans l'hypothèse où cette rupture est intervenue dans les 15 jours de la liquidation judiciaire ou dans le mois arrêtant le plan de cession

- constater que la rupture du contrat de travail n'est pas intervenue dans les limites ci-dessus rappelées et en conséquence prononcer la mise hors de cause de l'AGS pour toute fixation d'indemnités de rupture reconnues à M. [M]

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a fait droit à la demande de rappel de salaire de M. [M]

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a a accordé au salarié la somme d'1 € à titre de préjudice moral

- ordonner le remboursement des sommes nettes versées à l'AGS

- dire et juger qu'en application de l'article L. 3253-8 5° et lorsque le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société débitrice, la garantie de l'AGS ne couvre les créances de nature salariales éventuellement dues que dans la limite de 15 jours à compter du 9 mai 2012

- en conséquence prononcer la mise hors de cause de l'AGS pour toutes autres créances de nature salariale dues au-delà de cette limite

- dire et juger que la garantie des sommes et créances mentionnées aux 1°, 2° et 5° inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale ou d'origine conventionnelle imposées par la loi

- dire et juger que s'il y a lieu à fixation elle ne pourra intervenir que dans les limites légales

- dire qu'en tout état de cause la garantie prévue par les dispositions de l'article L. 3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes «'dues en exécution du contrat de travail'» au sens dudit article, les astreintes, dommages et intérêts mettant en oeuvre la responsabilité de droit commun de l'employeur et l'article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garanties

- dire et juger qu'en tout état de cause la garantie de l'AGS ne pourra excéder, toutes créance confondues, avancée pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis par les dispositions des articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du travail

- statuer ce que de droit sur les dépens de l'instance sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'UNEDIC AGS.

Par conclusions visées par le greffe le 14 mars 2016 et soutenues oralement, M. [Y] [M] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter Me [J] ès qualités de toutes ses demandes et de fixer les dépens au passif de la SARL Consortium de Réalisation de la Société Christian Mode.

Bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée dont l'accusé de réception a été signé le 4 juin 2015, la société BTSG, prise en la personne de Me [M] [J], en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Consortium de Réalisation de la Société Christian Mode, n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.

Pour un plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées oralement lors de l'audience des débats.

SUR QUOI LA COUR

Sur la garantie de l'AGS au titre des indemnités allouées au titre de la rupture du contrat de travail

L'AGS soutient que M. [M] n'a pas fait l'objet d'un licenciement, que la liquidation judiciaire n'entraîne pas en soi la rupture du contrat de travail et qu'en matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d'effet ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire la prononçant dès lors qu'à cette date le salarié est toujours au service de son employeur, qu'or en l'espèce M. [M] indique que son dernier jour travaillé était le 24 novembre 2010. L'AGS en conclut que le contrat de travail n'ayant été ni rompu par la société, ni par le mandataire liquidateur, le jugement déféré doit être infirmé en ce qu'il a d'une part fixé la rupture au jour de la liquidation, d'autre part dit que l'AGS devait garantir les indemnités de rupture.

M. [M] soutient que la société Christian Mode avait décidé d'engager une procédure de licenciement pour faute grave à son encontre, qu'en réalité il s'agissait d'une procédure de licenciement collectif concernant l'ensemble des salariés de l'entreprise, qu'il est bien fondé en ses demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité pour licenciement comme l'a jugé à bon droit le conseil de prud'hommes.

*

Il n'est pas contesté que M. [Y] [M] n'a été licencié ni par la SARL Consortium de Réalisation de la Société Christian Mode, ni par le mandataire liquidateur, Me [M] [J], dans le délai de quinze jours du jugement de liquidation intervenu le 9 mai 2012.

Dès lors que ni la cessation d'activité d'une société ni l'ouverture ou le prononcé de la liquidation judiciaire de l'employeur n'entraîne, en soi, la rupture du contrat de travail au sens de l'article L. 3253-8 du code du travail, la garantie de l'AGS CGEA IDF OUEST n'est pas due pour les indemnités de rupture allouées au salarié.

Le jugement déféré sera infirmé à ce titre.

L'AGS CGEA IDF OUEST sollicite le remboursement des sommes nettes qu'elle a versées dans le cadre de sa garantie indue. Toutefois l'infirmation du jugement entrepris constitue le titre ouvrant droit à restitution des sommes versées dans le cadre de son exécution.

Sur les rappels de salaires et le préjudice moral

L'AGS demande l'infirmation du jugement ayant alloué au salarié un rappel de salaire en faisant valoir que dans la nuit du 23 au 24 novembre 2010, un incendie a détruit les locaux de la société, qu'à la suite de cet incendie la société a été contrainte de fermer ses locaux, qu'en l'absence de reprise du travail, M. [M] ne peut solliciter un rappel de salaire jusqu'au mois de mai 2012, qu'au surplus il ne justifie pas s'être tenu à la disposition de son employeur postérieurement au 1er décembre 2010, date à laquelle la société a cessé de lui fournir du travail. L'AGS sollicite par ailleurs confirmation du jugement ayant alloué un euro de dommages et intérêts au salarié en réparation de son préjudice moral et soutient que sa garantie ne peut porter sur cette somme laquelle n'est pas due en exécution du contrat de travail.

M. [M] soutient que les salaires des mois de décembre 2010 au 9 mai 2012, date du jugement de liquidation judiciaire de la société, lui sont dus ainsi que l'a retenu le conseil de prud'hommes, que contrairement à ce que soutient l'AGS il est resté pendant toute cette période disponible pour son employeur. Il demande la confirmation du jugement s'agissant de la somme allouée au titre de son préjudice moral.

M. [Y] [M] qui justifie s'être rendu à l'entretien préalable au licenciement fixé au 14 février 2011, ne produit aucune pièce démontrant qu'il est resté à la disposition de son employeur pour la période postérieure à cette date.

En l'état des explications et des pièces fournies, le salarié est fondé en sa demande en rappel de salaires à hauteur de la somme de 4 031.40 € correspondant à la période du mois de décembre 2010 au mois de février 2011 inclus, outre les congés payés afférents à hauteur de 403.14 €. Le jugement déféré qui a alloué au salarié un rappel de salaires de 23 797.85 € et des congés payés afférents d'un montant de 2 379.78 € sera infirmé à ce titre.

En vertu de l' article L. 3253-8 du code du travail, il appartient à l'AGS CGEA IDF OUEST de garantir la créance salariale de M. [Y] [M] s'élevant à la somme de 4 031.40 €, outre les congés payés afférents.

Le salarié qui justifie avoir subi un préjudice spécifique du fait de l'exécution déloyale du contrat de travail par son employeur est fondé en sa demande en indemnisation du préjudice moral subi à hauteur d'un euro et cette indemnisation qui entre dans le champ d'application de l' article L. 3253-8 du code du travail, sera garantie par l'AGS CGEA IDF OUEST .

Le jugement déféré sera confirmé à ce titre.

La société BTSG, prise en la personne de Me [M] [J], ès qualités, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

INFIRME partiellement le jugement déféré en ce qu'il a'fixé la créance de M. [Y] [M] au passif de la liquidation de la SARL Consortium de Réalisation de la Société Christian Mode à titre de rappel de salaires pour la période du 1er décembre 2010 au 9 mai 2012 à la somme de 23 797.85 €, outre les congés payés afférents et en ce qu'il a dit que l'AGS CGEA IDF OUEST est tenue à garantir le paiement du rappel de salaires, des congés payés et des indemnités de rupture pour les montants fixés au dispositif du jugement déféré;

Statuant à nouveau,

FIXE la créance de'M. [Y] [M] au passif de la liquidation de la SARL Consortium de Réalisation de la Société Christian Mode à titre de rappel de salaires pour la période du 1er décembre 2010 au mois de février 2011 inclus à la somme de 4 031.40 €, outre les congés payés afférents à hauteur de 403.14 €;

DIT que l'AGS CGEA IDF OUEST est tenue de garantir les créances de M. [Y] [M] à hauteur de la somme de 4 031.40 €, outre celle de 403.14 € au titre des congés payés afférents, et celle de 1 € à titre de préjudice moral, et ce dans les limites prévues aux articles L 3253-6 à L 3253-8, D 3253-2 et D3253-5 du code du travail;

RAPPELLE que le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous intérêts de retard et majorations;

CONDAMNE la société BTSG, prise en la personne de Me [M] [J], en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Consortium de Réalisation de la Société Christian Mode aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 14/10970
Date de la décision : 22/06/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°14/10970 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-22;14.10970 ?
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