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21/06/2016 | FRANCE | N°14/07848

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 21 juin 2016, 14/07848


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 21 Juin 2016



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/07848



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Avril 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/03744







APPELANT

Monsieur [B] [G]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 2]

com

parant en personne,

assisté de Me Nadia TIAR, avocat au barreau de PARIS, toque : G0513







INTIMEE

Association SECOURS POPULAIRE FRANCAIS

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée M. [V] [...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 21 Juin 2016

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/07848

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Avril 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/03744

APPELANT

Monsieur [B] [G]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 2]

comparant en personne,

assisté de Me Nadia TIAR, avocat au barreau de PARIS, toque : G0513

INTIMEE

Association SECOURS POPULAIRE FRANCAIS

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée M. [V] [W] (Directeur des RH)

assisté de Me Thierry PIERRON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0831

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Mai 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Claire CHESNEAU, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige

Monsieur [B] [G], a travaillé pour le compte de l'association SECOURS POPULAIRE FRANCAIS à compter du 14 novembre 2003, en qualité de reporter photographe pour le magazine CONVERGENCE, à la dernière rémunération mensuelle brute de 1551 euros.

Monsieur [G] a assigné l'association SECOURS POPULAIRE afin de voir requalifier sa relation de travail en relation salariale.

Par jugement du 2 avril 2014, le Conseil de prud'hommes de PARIS a débouté Monsieur [G] de l'ensemble de ses demandes. Monsieur [G] en a relevé appel.

Par conclusions visées au greffe le 3 mai 2016 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [G] demande à la cour d'infirmer le jugement et de condamner l'association SECOURS POPULAIRE au versement des sommes suivantes :

-15 652,96 € au titre des primes de congés payés , d'ancienneté et de 13ème mois

et 190,70 € au titre des primes pour 2013 et 2014

- au titre des rappels de salaires :

* à titre principal, 119 985,51 € à titre de rappel de salaire avec incidences des primes d'ancienneté et de 13ème mois pour un total de 139 260,35 €, sur la base du salaire mensualisé

* à titre subsidiaire, 52 271,21 € avec incidences des primes d'ancienneté et de 13ème mois pour un total de 61 233,39 €, sur la base du salaire moyen perçu sur 24 mois précédant la baisse du volume de travail

* en toute hypothèse, 43 654,27 € avec incidences des primes d'ancienneté et de 13ème mois pour un total de 51 570,29 €, sur la base du SMIC depuis la privation totale de travail

- au titre de la demande de résiliation judiciaire

* à titre principal, sur la base d'un salaire mensualisé moyen équivalent à 2112,97 € hors primes de 13ème mois et d'ancienneté, 4225,94 € à titre d'indemnité de préavis de 2 mois, 5493,72 € à titre d'indemnité de licenciement et 25355,64 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

* à titre subsidiaire, sur la base du salaire moyen perçu sur les 24 mois précédant la baisse de salaire soit 1263.36 €, 2526,72 € à titre de l'indemnité de préavis de 2 mois, 3284,74 € au titre de l'indemnité de licenciement et 15160,32 € à titre de d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

Monsieur [G] demande également le versement de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 3 mai 2016 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, l'association SECOURS POPULAIRE sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de Monsieur [G] au paiement d'une somme de 1.500 € au titre de dommages et intérêts, outre une somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

****

MOTIFS

Sur la disjonction du dossier d'appel n°1407836 concernant Messieurs [G], [H], [I] et [V] et la jonction de la partie concernant M. [G] avec le présent appel

En application de l'article 367 du code de procédure civile, il convient, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'ordonner la disjonction du dossier d'appel n°1407836 et la jonction de la partie concernant M. [G] avec le présent appel.

Sur la nature de la relation professionnelle

Le contrat de travail se définit comme une convention par laquelle une personne s'engage à mettre son activité à la disposition d'une autre, sous la subordination de laquelle elle se place moyennant rémunération. Il appartient à celui qui se prévaut de l'existence d'un contrat de travail d'en rapporter la preuve.

Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. L'existence d'un lien de subordination n'est pas incompatible avec une indépendance technique dans l'exécution de la prestation, notamment pour les salariés qui ont un haut niveau de qualification ;

Au titre de l'article L.7112-1, toute convention par laquelle l'entreprise de presse

s'assure, moyennant rémunération, le concours d'un journaliste professionnel, est présumée être un contrat de travail.

L'article L.7111-3 du code du travail énonce qu' est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources.

L'article L.7111-4 du code du travail précise que sont assimilés aux journalistes professionnels les collaborateurs directs de la rédaction, rédacteurs-traducteurs, sténographes-rédacteurs, rédacteurs-réviseurs, reporters-dessinateurs, reporters-photographes, à l'exclusion des agents de publicité et de tous ceux qui n'apportent, à un titre quelconque, qu'une collaboration occasionnelle.

Conformément à l'article L.8221-6 du code du travail, une présomption de non salariat est applicable aux personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés.

En l'espèce, il ressort des pièces versées au débat que Monsieur [G] ne rapporte pas la preuve que l'association SECOURS POPULAIRE FRANCAIS, qui a pour action d'agir contre la pauvreté et l'exclusion, soit une entreprise de presse visée aux articles L.7111-3 du code du travail. Le site internet de l'association SECOURS POPULAIRE FRANCAIS démontre qu'elle n'a ni pour activité principale d'éditer un magazine à portée générale, ni d'indépendance éditoriale. La publication de son magazine de solidarité bimensuel 'CONVERGENCE' est destiné aux donateurs financiers, aux collecteurs, aux animateurs et aux abonnés bénévoles de l'association en tant que simple vecteur de communication à objectif de solidarité, son but étant d'informer sur les activités de l'association et l'utilisation des dons.

Il en résulte que Monsieur [G] n'est pas fondé à bénéficier de la présomption de salariat applicable aux seuls journalistes professionnels qui exercent leur activité dans une entreprise de presse. Au contraire, Monsieur [G] est immatriculé depuis le 1er janvier 2000 sous le n°442.097 de sorte que c'est une présomption de non salariat qui lui est applicable.

Monsieur [G] considère que sa relation de travail avec l'association SECOURS POPULAIRE était de nature salariale, sans pour autant démontrer l'existence des trois critères essentiels du contrat de travail.

Concernant l'activité de photographe et le lien de subordination, Monsieur [G] se contente de verser aux débats des courriels échangés avec l'association SECOURS POPULAIRE ayant trait à des invitations à assister à des réunions formulées dans les termes 'nous vous proposons une réunion', sans qu'aucune ne soit imposée. Il verse également des courriels concernant les modalités de réservation de ses billets de transport nécessaires à ses reportages, qui ne sont pas de nature à remettre en cause la liberté d'organiser son activité professionnelle, ses horaires et lieux de travail. Une note du 20 juin 2008 versée aux débats précise d'ailleurs que les pigistes gèrent librement leurs déplacements, indiquant simplement 'nous vous proposons de les commander [les billets de train ou d'avion]'. En outre, l'attestation de Madame [O], ancienne rédactrice graphiste du bimensuel CONVERGENCE, n'établit pas plus un lien de subordination, se contentant de rapporter que 'les photographes partaient en reportage avec les rédacteurs [...] Ils réalisaient leurs reportages dans le cadre de commandes précises [...] sous le contrôle du rédacteur en chef [...]', ce qui n'exclut pas que les photographes aient toute latitude quant aux méthodes de travail en cohérence avec les objectifs de la prestation qui pouvaient être légitimement attendus.

Monsieur [G] ne démontre pas avoir exercé des responsabilités propres impliquant des initiatives ou une présence au sein de la rédaction alors que l'association SECOURS POPULAIRE verse aux débats les éléments suivants de nature à exclure tout lien de subordination et toute activité constante :

- une présentation du site internet de Monsieur [G] indique qu'il 'réalise de nombreux reportages pour la presse sociale. Il collabore avec l'Association des Paralysés de France, le Secours Populaire Français, Solidarités etc [...] En parallèle, il contribue à divers titres de la presse grand public.'

- la production de diverses notes de piges, dont une pour les mois de novembre et décembre 2008 pour deux journées et un montant de 600 euros visant Monsieur [G] pour une désignation très précise d'une mission de reportage, démontrant que les contributions ponctuelles de Monsieur [G] relevaient de son choix et étaient rémunérées sans critère de régularité

- un tableau récapitulatif d'intervention des photographes, celui pour Monsieur [G] établissant un volume de collaboration de 122 jours de janvier 2008 à décembre 2012, de sorte que la collaboration s'avérait occasionnelle et ponctuelle, en fonction d'un besoin de reportage avec les photographes.

Concernant la rémunération, Monsieur [G] considère que les bulletins de salaire qui lui ont été remis sont de nature à caractériser une relation salariale, de même que les concessions octroyées par l'association SECOURS POPULAIRE aux photographes pigistes relatives au paiement du 13ème mois, des congés payés et d'une prime d'ancienneté, appliquées depuis la fin de l'année 2012. Toutefois, ces éléments ne suffisent pas en soi à démontrer la qualité de salarié, d'autant plus que l'association SECOURS POPULAIRE verse aux débats une lettre du 18 mai 2007 s'adressant aux photographes, qui précise que 'la rémunération s'effectuera à la photo publiée' et qui fixe des forfaits en pige, cette dernière n'étant pas en soi un contrat de travail, mais un mode de paiement à la tâche du travailleur concerné excluant le paiement au temps passé. De plus, l'association SECOURS POPULAIRE verse également aux débats une synthèse sur la rémunération des piges pour l'année 2011 et détaille la liste des intervenants 'payés en salaire' et 'payés en facture', clairement distinguées de la liste des salariés de l'association, de sorte qu'ils n'avaient pas le même statut au sein de l'association.

Il résulte de l'ensemble des éléments qui précèdent que l'appelant ne démontre pas l'existence d'un lien de subordination de nature à caractériser l'existence d'un contrat de travail et n'est pas fondé à solliciter les droits attachés au statut de salarié.

C'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a débouté le salarié de l'intégralité de ses demandes.

Sur l'égalité de traitement

En application du principe "à travail égal, salaire égal", énoncé par les articles L. 2261-22-II-4, L. 2771-1-8 et L. 3221-2 du code du travail, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés pour autant que ceux-ci sont placés dans une situation identique ; Il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs et matériellement vérifiables justifiant cette différence.

Une différence de statut juridique entre les travailleurs effectuant un travail de même valeur au service d'un même employeur ne suffit pas, à elle seule, à caractériser une différence de situation au regard de l'égalité de traitement en matière de rémunération ; le non-salarié qui se prévaut du principe d'égalité de traitement ne peut utilement invoquer la comparaison de sa situation avec des salariés.

En l'espèce, Monsieur [G] soutient qu'il a été privé avant l'année 2013 de certains avantages dont les salariés bénéficiaient, notamment ses collègues appartenant à la rédaction de CONVERGENCE alors que la situation des photographes pigistes, qui ont la qualité de travailleurs indépendants, ne peut être comparée avec celle des salariés de l'association SECOURS POPULAIRE qui sont dans une situation objectivement différente de par leur statut.

En conséquence, Monsieur [G] sera débouté de sa demande de rappel de salaires sur le fondement de l'égalité de traitement.

Sur la demande reconventionnelle

En vertu de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 3 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

En l'espèce, l'association SECOURS POPULAIRE soutient que la procédure engagée est manifestement abusive, sans pour autant démontrer le caractère de l'abus et le préjudice qui en découlerait, de sorte qu'elle sera déboutée de sa demande.

PAR CES MOTIFS

Ordonne la disjonction du dossier d'appel n°1407836 concernant Messieurs [G], [H], [I] et [V] et la jonction de la partie concernant M. [G] de la procédure inscrite au répertoire général de la Cour sous le numéro n°1407836 avec le n° 1407848

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions

Y ajoutant,

DEBOUTE l'association SECOURS POPULAIRE de sa demande reconventionnelle

Vu l'article 700 du code de procédure civile

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

LAISSE les dépens à la charge de Monsieur [B] [G].

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 14/07848
Date de la décision : 21/06/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°14/07848 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-21;14.07848 ?
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