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16/06/2016 | FRANCE | N°15/09013

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 16 juin 2016, 15/09013


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 16 Juin 2016

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09013



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Août 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 15/02023





APPELANTE

SA SOCIETE FRANCAISE DE RADIOTELEPHONIE (SFR)

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Mathieu VALLENS, avocat au barr

eau de PARIS, toque : B859





INTIMEE

Madame [D] [T]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Hervé CABELI, avocat au barreau de PARIS, toque : W01





COMPOSITION D...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 16 Juin 2016

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09013

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Août 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 15/02023

APPELANTE

SA SOCIETE FRANCAISE DE RADIOTELEPHONIE (SFR)

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Mathieu VALLENS, avocat au barreau de PARIS, toque : B859

INTIMEE

Madame [D] [T]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Hervé CABELI, avocat au barreau de PARIS, toque : W01

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Mars 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Marie-Liesse GUINAMANT, Vice-Présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Laura CLERC-BRETON, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente et par Madame Laura CLERC-BRETON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Embauchée entre le 1er septembre 2011 et le 21 mai 2014 selon 5 contrats de travail à durée déterminée, [D] [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 18 février 2015 d'une action en requalification de ces contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, réclamant le paiement de diverses sommes tant au titre de l'exécution de ce contrat que de sa rupture.

Vu le jugement rendu le 25 août 2015 par le conseil de prud'hommes de Paris qui a condamné la société SFR à payer à [D] [T] les sommes de :

-15 000, 00 euros avec congés payés y afférents à titre d' indemnité compensatrice de préavis

- 4 000, 00 euros à titre d' indemnité conventionnelle de licenciement

- 5 000, 00 euros à titre d'indemnité de requalification

- 30 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 4 500, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct

- 500, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Vu l'appel formé par la société SFR contre ce jugement.

Vu les conclusions du 22 mars 2016 auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet des prétentions et des moyens, reprises oralement à l'audience, sans ajout ni retrait, par l'appelante qui demande à la cour de débouter [D] [T] de ses demandes et de la condamner à lui payer 3 000, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions du 22 mars 2016 auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet des prétentions et des moyens, reprises oralement à l'audience, sans ajout ni retrait, par [D] [T] qui demande à la cour, confirmant le jugement en ses dispositions relatives à l' indemnité compensatrice de préavis et à l' indemnité conventionnelle de licenciement, de le réformer en portant à 10 000, 00 euros le montant de l'indemnité de requalification, à 45 000, 00 euros le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à 5 000, 00 euros le montant des dommages et intérêts et de condamner la société SFR à lui payer 6 290, 00 euros avec congés payés y afférents à titre de rappel de salaires et 3 000, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI

LA COUR

Sur la qualification de la relation contractuelle,

l'article L. 1242-1 du code du travail énonce que le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir pour objet ni pour effet, quel qu'en soit son motif, de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et l'article L. 1242-2 suivant précise les cas dans lesquels il peut être recouru au contrat de travail à durée déterminé et notamment le remplacement d'un salarié absent et un accroissement temporaire d'activité ; si l'article L. 1243-13 du même code prévoit que le contrat de travail à durée déterminée est renouvelable une fois pour une durée déterminée, ce renouvellement doit limiter la durée globale du contrat de travail à18 mois.

Le contrat de travail à durée déterminée cesse de plein droit à l'échéance du terme et les articles L. 1244-3 et L. 1244-4 du code du travail impose un délai de carence entre l'expiration d'un contrat de travail à durée déterminée et le recours à un contrat de travail à durée déterminée.

[D] [T] a été embauchée par la société SFR le 1er septembre 2011 par contrat de travail à durée déterminée venant à échéance le 31 décembre 2011 en qualité de responsable de projet - développement RH, afin de répondre à un 'accroissement temporaire d'activité lié à l'extension du programme d'immersion expérience clients auprès des 1 600 managers de la société' ; ce contrat de travail à durée déterminée a été renouvelé par avenant du 20 décembre 2011 qui prévoyait qu'il prendrait fin le 31 décembre 2012 ; par convention du 6 décembre 2012 la société SFR et [D] [T] ont signé un contrat de travail à durée déterminée à effet au 21 janvier 2013 devant se terminer le 30 décembre 2013, motivé par un accroissement temporaire d'activité et concernant un poste de responsable d'études - développement RH ; les parties ont ensuite conclu un contrat de travail à durée déterminée le 28 novembre 2013 devant se terminer le 2 avril 2014 sur un poste de responsable d'études - RH motivé par le remplacement d'une salariée absente suivi d'un contrat de travail à durée déterminée signé le 18 mars 2014 sur le même poste pour le même motif à échéance au 14 mai 2014, puis, le 13 mai 2014 un dernier contrat de travail à durée déterminée devant prendre fin le 19 décembre 2014 par lequel [D] [T] était embauchée à compter du 21 mai 2014 en qualité de responsable de projet formation / support à la vente le motif du recours étant un accroissement temporaire d'activité.

Faisant valoir qu'elle a ainsi été embauchée par la société SFR sans interruption au sien de la direction générale des ressources humaines pendant une durée de plus de 3 années, au motif d'un accroissement temporaire d'activité pendant une période de plus de 2 années, [D] [T] expose qu'ont été enfreintes les dispositions du code du travail relatives à la durée globale de l'emploi et au délai de carence et prétend que l'employeur a ainsi pourvu un poste permanent dans l'entreprise.

La société SFR s'en défend en exposant que le premier contrat de travail à durée déterminée renouvelé concernait un besoin précis lié à la mise en place d'une expérience de formation qui n'entrait pas dans le cadre de l'activité habituelle de l'entreprise, enfermée dans un programme précis et ponctuel et que le contrat de travail à durée déterminée du 21 janvier 2013 s'inscrivait dans un accroissement d'activité lié à la mise en oeuvre d'un plan de départ volontaire donnant lieu à une réorganisation qui concernait 1 123 personnes et visait l'accomplissement de tâches très différentes des précédentes qui ne ressortaient pas elles non plus de l'activité normale et permanente de l'entreprise ; elle indique, s'agissant des deux contrats de travail à durée déterminée, signés ensuite, que ceux-ci visaient le remplacement d'une salariée absente pour congé de maternité et s'inscrivaient dans le cadre des cas de recours autorisés par le code du travail et que le dernier contrat de travail à durée déterminée affectait [D] [T] à une autre direction et visait à l'accomplissement de tâches étrangères aux premières puisque liées au lancement d'une plate-forme d'auto formation destinées aux équipes commerciales et vendeurs.

Au delà de l'intitulé des postes confiés à [D] [T] dans le cadre des contrats de travail à durée déterminée litigieux conclus entre le 1er septembre 2011 et le 19 décembre 2014, qui visent successivement un poste de responsable de projets, de responsable d'études puis, à nouveau, de responsable de projets, il doit être relevé que la salariées est employée au sein de la direction générale des ressources humaines, puis de la direction exécutive grand public et professionnels, sur des projet relatifs à la formation des salariés affectés aux activités de développement ou des activités support, tels que managers, vendeurs ou acheteurs , ainsi qu'il ressort de la liste des formations à la mise en oeuvre desquelles elle a contribué , dont le caractère occasionnel et ponctuel, n'est pas démontré, les titulaires de tels postes ayant vocation à se renouveler régulièrement et dont le caractère exceptionnel est démenti par l'énoncé des objectifs qui lui sont assignés, notamment, dans le cadre de l'entretien d'appréciation et développement professionnel pour l'année 2013, qui visent, outre l'accompagnement à la mise en oeuvre du dispositif de réorganisation, l'organisation de la formation VAE, bilans pro et expérience clients, cette dernière tâche se trouvant liée au contrat de travail à durée déterminée du 1er septembre 2011 ; le contrat de travail à durée déterminée conclu le 13 mai 2014, à effet au 21 mai 2014, devant se terminer le 19 décembre 2014, au terme duquel [D] [T] est embauchée en qualité de responsable de projet - formation /support vente, corrobore le fait que les missions de formation ou auto formation, des équipes commerciales et des vendeurs qui sont confiées à la salariée n'ont rien d'exceptionnel et, les projets dans ce domaine correspondant à un besoin d'innovation permanent, l'emploi s'inscrit dans le cadre des tâches habituelles de l'entreprise ; d'où il suit que la succession des contrats de travail à durée déterminée conclus avec [D] [T] caractérise de la part de la société SFR une violation des dispositions de l'article L. 1242-2 du code du travail la tâche visée par le contrat de travail à durée déterminée du 1er septembre n'étant pas temporaire.

Le jugement du conseil de prud'hommes de Paris sera donc confirmé qui a prononcé la requalification du contrat de travail à durée déterminée du 1er septembre 2011 en contrat de travail à durée indéterminée.

Sur les conséquences de la requalification,

la requalification du contrat de travail ouvre droit pour [D] [T] à l'allocation d'une indemnité qui a été justement fixée par les premiers juges à la somme de 5 000, 00 euros, qui tient compte du fait que [D] [T] s'est vu refuser des postes en contrat de travail à durée indéterminée, le fait qu'il ait existé plusieurs contrats de travail à durée déterminée étant sans effet sur le montant de cette indemnité dont le principe naît dès la conclusion du 1er contrat.

L'ancienneté de [D] [T], telle qu'elle est reprise dans les entretiens d'appréciation et de développement professionnel par la société SFR, est de 3 ans et 4 mois, ce qui lui ouvre droit à une indemnité compensatrice de préavis de 3 mois, soit 15 000, 00 euros avec congés payés y afférents et à une indemnité conventionnelle de licenciement de 4 000, 00 euros ; le jugement sera confirmé sur ces deux points ;

[D] [T] a également droit, en réparation du préjudice consécutif à la rupture du contrat de travail, qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et en application de l'article L.1235-3 du code du travail, compte tenu de son ancienneté supérieure à deux ans et de la taille de l'entreprise, à une indemnité qui ne saurait être inférieure à ses six derniers mois de salaire ; compte tenu du préjudice dont elle justifie par son inscription au chômage jusqu'au 4 mars 2016 , il y a lieu de lui allouer à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 35 000, 00 €, portant intérêts au taux légal à compter de ce jour en application de l'article 1153-1 du code civil ;

[D] [T], dont le contrat de travail a été qualifié de contrat de travail à durée indéterminée, ne justifie d'aucun préjudice distinct de celui que répare les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et a été à bon droit déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

s'agissant de la demande en paiement de rappel de salaire, il convient de relever que la durée des périodes interstitielles au cours desquelles [D] [T] n'a pas été embauchées exclue qu'elle ne se soit pas maintenue à la disposition de son employeur qui lui faisait signer son prochain contrat de travail à durée déterminée par anticipation de manière à s'assurer de sa disponibilité à la date prévue ; ces périodes devant recevoir salaire il lui sera alloué la somme de 6 290, 00 euros avec congés payés y afférents.

Sur les demandes accessoires,

la société SFR qui succombe en son recours, en supportera les dépens et devra indemniser [D] [T] des frais de procédure qu'il a engendrés.

PAR CES MOTIFS

statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions sauf à fixer à 35 000, 00 euros le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

y ajoutant :

CONDAMNE la société SFR à payer à [D] [T] les sommes de

- 6 290, 00 euros avec congés payés y afférents à titre de rappel de salaire

- 1 000, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

ORDONNE la capitalisation des sommes dues conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.

CONDAMNE la société SFR aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 15/09013
Date de la décision : 16/06/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°15/09013 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-16;15.09013 ?
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