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14/06/2016 | FRANCE | N°14/00247

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4- chambre 9, 14 juin 2016, 14/00247


République française
Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 9

ARRÊT DU 14 Juin 2016
(no, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/ 00247

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Septembre 2014 par le tribunal d'instance de Bobigny RG no 35-14-000

APPELANTES
Madame Jacqueline X...
...
75005 PARIS
non comparante
représentée et assistée sur l'audience par Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

SARL CABINET EMMANUEL TOUATI prise

en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

19 rue Bernard et Mazoyer
93300 AUBER...

République française
Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 9

ARRÊT DU 14 Juin 2016
(no, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/ 00247

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Septembre 2014 par le tribunal d'instance de Bobigny RG no 35-14-000

APPELANTES
Madame Jacqueline X...
...
75005 PARIS
non comparante
représentée et assistée sur l'audience par Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

SARL CABINET EMMANUEL TOUATI prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

19 rue Bernard et Mazoyer
93300 AUBERVILLIERS
non comparante
représentée et assistée sur l'audience par Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

INTIMÉE
Madame Hasnae Y...
...
Bât 2- 2ème étage Gauche
93000 BOBIGNY
comparante en personne,
assistée sur l'audience de Me Pascal-André GERINIER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0755

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Avril 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Président de chambre
Mme Patricia GRASSO, Conseillère
Madame Françoise JEANJAQUET, Conseillère
qui en ont délibéré

Greffier : M. Thibaut SUHR, lors des débats

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
-signé par Monsieur Jean-Pierre GIMONET, présidente et par M. Christophe DECAIX, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * *

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

La commission de surendettement des particuliers de Seine Saint Denis a déclaré recevable le 19 mai 2014 la demande de Mme Y...de traitement de sa situation de surendettement et le 6 juin 2014, le Président de la commission a saisi le tribunal d'instance de Bobigny aux fins de suspension de la mesure d'expulsion diligentée à l'encontre de Mme Y....

Par jugement du 15 septembre 2014, le tribunal d'instance de Bobigny a, ordonné la suspension de la procédure d'expulsion engagée contre Mme Y...par le bailleur, dit que cette suspension sera valable pour la durée de la procédure de surendettement sans pouvoir excéder deux ans tant que Mme Y...payera les indemnités d'occupation mises à sa charge, dit qu'il sera immédiatement mis fin à la suspension et que Mme Y...et tous occupants de son chef pourront être expulsés en cas de non paiement des indemnités d'occupation, fait interdiction à Mme Y...de faire tout acte qui aggraverait son insolvabilité et tout acte de gestion étranger à la gestion normale de son patrimoine.

Par déclaration du 16 octobre 2014, Mme X..., sa bailleresse, a relevé appel du jugement.

L'affaire a été examinée à l'audience du 12 avril 2016 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 14 juin 2016.

Mme X..., représentée à l'audience par son avocat et développant ses conclusions écrites déposées le 25 janvier 2016, demande à la cour de recevoir l'exception de nullité de l'acte de signification régularisé le 25 septembre 2014du jugement entrepris et le déclarer non avenu, dire qu'elle sera fondée à reprendre les voies d'exécution à l'encontre de Mme Y..., débouter Mme Y...de ses prétentions et la condamner à lui payer la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens qui seront recouvrés directement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que l'acte de signification du jugement faisait état d'un délai d'appel d'un mois et non de 15 jours et que cet acte, entaché d'un vice de forme, lui a causé un grief évident car elle n'a pas régularisé l'appel dans les délais légaux et qu'il est donc nul et qu'à défaut d'avoir été notifié dans les 6 mois de sa date, le jugement est nul et non avenu en application des dispositions de l'article 478 du code de procédure civile ; elle précise qu'elle ne pouvait pas conclure sur la nullité de la signification du jugement tant que l'irrecevabilité de son appel n'avait pas été soulevée.

Sur le fond, elle fait valoir qu'à la suite de l'ordonnance rendue le 31 décembre 2012 par le juge des référés du tribunal d'instance de Bobigny qui a constaté la clause résolutoire du bail et ordonné l'expulsion des locataires, l'expulsion de Mme Y...et de Mr Y...a été régularisée le 24 juillet 2014, soit avant le jugement déféré qui lui est donc totalement inopposable.

Mme Y..., présente et assistée par son avocat à l'audience et se référant à ses écritures du 8 novembre 2015, soulève l'irrecevabilité de l'appel de Mme X...comme étant tardif et demande la condamnation solidaire de Mme X...et du cabinet TOUATI à lui payer 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, outre les entiers dépens. Elle relève que Mme X...n'est pas recevable à soulever la nullité de l'acte de signification du jugement.

Elle fait valoir que l'appel interjeté le 16 octobre 2014 est tardif car interjeté au delà du délai de 15 jours prévus à l'article R331-9-3 du code de la consommation, que le jugement a été notifié par le greffe aux parties le 16 septembre 2014 par lettre recommandée avec accusé de réception puis signifiée à partie par huissier le 25 septembre 2014 de sorte que le délai d'appel courait jusqu'au 1er octobre 2014 et au plus tard jusqu'au 10 octobre 2014.

Sur le fond, elle demande la confirmation du jugement et fait valoir qu'elle élève seule ses trois enfants, qu'elle paye les 400 € du loyer restant à sa charge, qu'elle a été expulsée et s'est retrouvée à la rue pendant un mois avant de pouvoir réintégrer le logement, qu'elle effectue des démarches pour trouver un nouveau logement et a demandé à bénéficier du Droit Au Logement Opposable (DALO).

SUR CE,
LA COUR

Sur la recevabilité de l'appel

Mme X...est recevable à soulever l'irrégularité de la signification du jugement postérieurement à ses conclusions d'appelante au fond, afin de s'opposer à l'irrecevabilité de son appel soulevée par l'intimée in limine litis.

En vertu des dispositions de l'article 528 de code de procédure civile, le délai de recours d'un jugement ne peut courir qu'à compter de la notification ou de la signification régulière du jugement.

En application des articles R 331-9-3, R 331-9-4 du code de la consommation et 932 du code de procédure civile, l'appel, en matière de surendettement, est formé par une déclaration que la partie ou tout mandataire adresse par pli recommandé au greffe de la cour dans les quinze jours de la notification du jugement par lettre recommandée avec accusé de réception par le greffe du tribunal d'instance régulièrement faite à l'adresse préalablement indiquée par le destinataire.

Or en l'espèce, la lettre recommandée avec accusé de réception de notification adressée aux parties le 16 septembre 2014 ne porte pas mention du destinataire de l'acte d'appel, à savoir la cour d'appel de Paris et cette notification n'a pu en conséquence faire courir de délai d'appel à compter de sa réception par les parties.

Le jugement déféré a également été signifié par acte d'huissier délivré à personne morale le 25 septembre 2014, par Mme Y...à la SARL CABINET TOUATI, administrateur de biens, partie à la procédure de première instance mais dont il n'est pas indiqué dans le jugement à quel titre elle intervient à la procédure de surendettement, Mme X...étant, en tant que bailleresse créancière, comparante personnellement à la procédure et en toute hypothèse, la signification faite à la SARL CABINET TOUATI n'est pas opposable à Mme X....

En outre, cette signification comporte la mention erronée d'un délai d'un mois pour interjeter appel, et n'a pu faire courir le délai d'appel à l'égard de la SARL CABINET TOUATI.

En conséquence l'appel de Mme X...et de la SARL TOUATI est recevable.

Sur le caractère non avenu du jugement du 15 septembre 2014

L'exception tendant à faire constater la caducité du jugement par application de l'article 478 du code de procédure civile est irrecevable dès lors que les appelants l'ont fait précéder de conclusions au fond.

En toute hypothèse, Mme X...partie comparante en première instance, ne peut se prévaloir de la caducité du jugement et la partie défaillante, à savoir la SARL CABINET TOUATI qui pourrait seule s'en prévaloir, a toutefois interjeté appel du jugement, manifestant ainsi sa renonciation au bénéfice des dispositions de l'article 478 du code de procédure civile, étant observé au demeurant, qu'elle n'y a aucun intérêt n'ayant pas été condamnée en première instance et ne formulant aucune demande en appel.

Il s'ensuit que la demande de Mme X...et de la SARL CABINET TOUATI tendant à voir déclarer non avenu le jugement entrepris est manifestement irrecevable

Sur la suspension de la mesure d'expulsion

L. 331-3-2 du code de la consommation dispose que " si la commission déclare le dossier du débiteur recevable, elle peut saisir le juge de l'exécution aux fins de suspension des mesures d'expulsion du logement du débiteur. En cas d'urgence, la saisine du juge peut intervenir à l'initiative du président de la commission, du délégué de ce dernier, du représentant local de la Banque de France ou du débiteur. La commission est informée de cette saisine. Si la situation du débiteur l'exige, le juge prononce la suspension provisoire des mesures d'expulsion de son logement, à l'exception de celles fondées sur un jugement d'adjudication rendu en matière de saisie immobilière et de celles ordonnées sur le fondement du troisième alinéa de l'article 2198 du code civil (expulsion pour cause grave, avant toute adjudication, du débiteur objet d'une saisie immobilière). Cette suspension est acquise, pour une période maximale de deux ans et, selon les cas, jusqu'à l'approbation du plan conventionnel de redressement prévu à l'article L. 331-6, jusqu'à la décision imposant les mesures prévues par l'article L. 331-7, jusqu'à l'homologation par le juge des mesures recommandées en application des articles L. 331-7-1, L. 331-7-2 et L. 332-5 ou jusqu'au jugement d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire ».

La suspension de la mesure d'expulsion prévue par ce texte prise pour protéger le logement du débiteur de bonne foi et permettre le prononcé à son profit de mesures propres à remédier à sa situation de surendettement ne peut être paralysée du seul fait que la dette serait ancienne et très importante, ne diminuerait pas voire augmenterait lorsque comme en l'espèce, le non-paiement du loyer n'est que le reflet de la détérioration de sa situation financière.

C'est par des motifs pertinents que la cour ne peut qu'adopter et au vu des justificatifs des versements effectués par la débitrice pour le règlement du loyer résiduel et des démarches accomplies en vue de rechercher un logement social qui témoignent de la volonté et de la détermination de Mme Y...de régler sa situation locative et de sa mobilisation, que le premier juge a ordonné la suspension des mesures d'expulsion diligentées l'encontre de Mme Y....

Un rapport social établi le 2 décembre 2015 par l'UDAF 93 qui suit Mme Y...dans le cadre du maintien dans les lieux et versé aux débats, atteste de la poursuite du paiement de l'indemnité d'occupation résiduelle après déduction des APL de janvier à novembre 2015 et si les APL ont été un moment suspendues, c'est du fait du bailleur qui n'a pas adressé à la CAF l'attestation du paiement du loyer et les versements ont repris à la suite de l'envoi des justificatifs de paiement par l'UDAF.

Il convient par ailleurs de relever que le bailleur n'a pas hésité à faire procéder à l'expulsion de Mme Y...le 24 juillet 2014 après avoir obtenu le concours de la force publique, alors même qu'il était parfaitement informé de la demande de suspension de la mesure d'expulsion puisqu'il avait quelques jours auparavant, par courrier du 8 juillet 2014, adressé ses observations sur cette demande au tribunal.

Il apparaît également que Mme Y...poursuit ses démarches en vue de son relogement et a obtenu devant le tribunal administratif de Montreuil le 29 septembre 2015 l'annulation de la décision lui refusant le bénéfice du DALO.

Force est de constater que Mme Y...maintient ses efforts, malgré une situation de grande précarité, élevant seule ses trois enfants avec des ressources très limitées, afin de régler les indemnités d'occupation mises à sa charge et tenter de se reloger et cette situation justifie la décision de suspension de la mesure d'expulsion ordonnée par le jugement déféré qui sera confirmé dans toutes ses dispositions.

En cette matière où la saisine du tribunal et de la cour et les notifications des décisions se font sans l'intervention d'un huissier et où le ministère d'avocat n'est pas obligatoire, chacune des parties conservera la charge des dépens qu'elle a éventuellement exposés.

Eu égard au circonstance de l'espèce, Mme X...sera condamnée à payer à Maître GERINIER la somme de 1 200 € au titre de ses honoraires et frais non compris dans les dépens en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle dont Mme Y...est bénéficiaire.

PAR CES MOTIFS

Dit que l'appel de Mme X...et de la SARL TOUATI est recevable ;

Déclare irrecevable la demande de Mme X...et de la SARL TOUATI tendant à voir déclarer non avenu le jugement entrepris ;

Confirme le jugement dans toutes ses dispositions ;

Condamne Mme X...à payer à Maître Pascal-André GERINIER la somme de 1 200 € en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens qu'elle a éventuellement exposés ;

Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement de Seine Saint Denis et par lettre recommandée avec avis de réception aux parties.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4- chambre 9
Numéro d'arrêt : 14/00247
Date de la décision : 14/06/2016
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2016-06-14;14.00247 ?
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