La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/06/2016 | FRANCE | N°14/05824

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 07 juin 2016, 14/05824


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 07 Juin 2016



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/05824



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Avril 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL RG n° 12/01291





APPELANTE

SAS CLAAS FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Bruno D'ASTORG, avocat au barreau de PARIS, toque

: L0022 substitué par Me Karine GARRIDO, avocat au barreau de PARIS, toque : L 0022





INTIME

Monsieur [Z] [K]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

né le [Date naissance 1] ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 07 Juin 2016

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/05824

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Avril 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL RG n° 12/01291

APPELANTE

SAS CLAAS FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Bruno D'ASTORG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0022 substitué par Me Karine GARRIDO, avocat au barreau de PARIS, toque : L 0022

INTIME

Monsieur [Z] [K]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 3]

comparant en personne,

assisté de Me Pierre-olivier VILLAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1917 substitué par Me Clothilde DUCONGÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : E1917

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Avril 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président

Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Claire CHESNEAU, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [Z] [K] a été engagé par la société CLASS FRANCE le 9 mai 2005 en qualité de Chef de Produit Moissonneuses Batteuses, moyennant un salaire fixe de 52.000 Euros outre une prime variable sur objectifs pouvant aller jusqu'à 10.000 Euros.

La convention collective applicable à la relation de travail est celle de l'import export.

Le 30 mars 2010, monsieur [K] a démissionné de ses fonctions, la rupture de son contrat de travail étant effective le 12 mai 2010.

Le 1er juin 2010, il a été embauché par la société CNH (CASE NEW HOLLAND) FRANCE pour exercer des fonctions de Responsable Marketing Ensileuses et Presses.

Le 3 mai 2012, la société CLASS FRANCE a saisi le Conseil de Prud'hommes de Créteil pour obtenir la restitution de la contrepartie financière versée à monsieur [K] au titre de la clause de non concurrence prévue par le contrat de travail et l'application de la clause pénale..

Par jugement du 24 avril 2014, le Conseil de Prud'hommes a débouté la société CLASS FRANCE de l'intégralité de ses demandes et monsieur [K] de sa demande reconventionnelle formée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile.

Le 26 mai 2014, la société CLASS FRANCE a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions visées par le greffe le 4 avril 2016 au soutien de ses observations orales, et auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la société CLASS FRANCE demande la Cour d'infirmer le jugement et de condamner monsieur [K] à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine de Conseil de Prud'hommes :

- 14.374,26 Euros au titre de la contrepartie financière versée et les congés payés afférents ;

- 30.439, 62 Euros à titre de pénalité pour violation de la clause de non concurrence

Elle a également sollicité condamnation de monsieur [K] à lui payer 2.000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile.

Par conclusions visées par le greffe le 4 avril 2016 au soutien de ses observations orales, et auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, monsieur [K] demande à la Cour :

- A titre principal de dire que, au vu des circonstances particulières de l'espèce, la clause de non-concurrence figurant au contrat de travail est nulle et qu'elle lui est inopposable, et qu'en toute hypothèse, il n'y a pas eu violation de la dite clause ;

- A titre subsidiaire de ramener à un Euro symbolique le montant de la condamnation au titre de la clause pénale et de lui accorder des délais maximums pour lui permettre de s'acquitter des éventuelles condamnations mises à sa charge ;

- de débouter la société CLASS FRANCE du surplus de ses demandes ;

- de condamner la société CLASS FRANCE lui payer 1.800 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile.

Interrogés par la Cour sur les conséquences d'une éventuelle nullité de la clause, le Conseil de la société CLASS FRANCE a sollicité le remboursement des sommes payées au titre de la contrepartie financière et le conseil de monsieur [K] des dommages et intérêts correspondant à ce montant ;

MOTIFS

Aux termes de l'article L. 1121-1 du code du travail, nul ne peut apporter au droit des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ;

S'il est loisible aux parties d'insérer dans le contrat de travail une clause de non-concurrence, celle-ci, pour être licite, doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, être limitée dans le temps et dans l'espace, tenir compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporter l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière. Ces conditions sont cumulatives.

En l'espèce, le contrat de travail de monsieur [K] conclu avec la société CLASS FRANCE comportait une clause de non concurrence ainsi rédigée :

'En cas de rupture du contrat pour quelque motif que ce soit, Monsieur [Z] [K] s'engage, compte tenu de la nature de ses fonctions, des informations techniques et confidentielles dont il disposera sur les produits CLAAS, et des contacts que son poste entraînera avec le réseau de concessionnaires CLAAS, à ne pas entrer dans le département marketing d'une société concurrente, ni à s'intéresser directement ou indirectement à toute fabrication, commerce ou autres activités pouvant concurrencer les produits fabriqués ou distribués par CLAAS.

Les activités susmentionnées ne pourront être exercées pendant une durée de un an sur le territoire français.

Cette interdiction de concurrence s'appliquera à compter du jour du départ

effectif de Monsieur [Z] [K] de la société.

En contrepartie de cette obligation de non-concurrence, Monsieur [Z] [K] percevra pendant toute la durée de l'interdiction une indemnité mensuelle égale à un tiers de la rémunération brute moyenne des douze derniers mois (...).

En cas de violation de la clause de non concurrence, Monsieur [Z]

[K] perdra le bénéfice de la contrepartie financière prévue et sera redevable d'une pénalité fixée forfaitairement à 6 mois du salaire calculée sur la base du salaire mensuel moyen de ses 6 derniers mois sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure d'avoir à cesser l'activité concurrentielle. Cette somme devra être versée à la société pour chaque infraction constatée. Le paiement de cette indemnité n'est pas exclusif du droit que la société se réserve de poursuivre Monsieur [Z] [K] en remboursement du préjudice pécuniaire et moral effectivement subi et de faire ordonner sous

astreinte la cessation de l'activité concurrentielle'.

Monsieur [K] est entré le 1er juin 2010 au service marketing de la société CNH dont il est constant qu'il s'agissait d'une société concurrente de la société CLASS FRANCE, si bien que contrairement à ce qu'il prétend, cette activité était bien couverte par la clause de non concurrence prévue par le contrat ;

Cette clause répondait aux intérêts légitimes de l'entreprise, celle-ci justifiant être positionnée sur un marché concurrentiel lui imposant de faire respecter une certaine confidentialité sur la fabrication et la distribution de ses produits et de se prémunir contre un détournement de clientèle ; elle comportait par ailleurs une contre-partie financière ; toutefois, monsieur [K] qui était âgé de 49 ans lors de la rupture du contrat de travail, fait valoir, sans être contredit, qu'il avait effectué tout son parcours professionnel dans le secteur des machines agricoles, après avoir obtenu un BTS Machine agricole en 1980, soit pendant 30 ans ; qu'il était spécialisé dans le secteur de la récolte soit essentiellement les moissonneuses-batteuses et les ensileuses ; aussi les termes de la clause de non concurrence lui interdisant, pendant une durée d'un an et sur tout le territoire national, d'exercer une activité dans n'importe quel secteur relevant de son domaine de compétence constituait une entrave excessive à sa liberté de travail que le montant de la contrepartie financière, soit un tiers de son salaire, ne suffisait pas à compenser ;

Il convient, en conséquence, de faire droit à la demande de nullité ; celle-ci a pour conséquence que l'obligation de non-concurrence n'a jamais existé, en sorte que la société CLASS FRANCE doit être déboutée de sa demande d'application de la clause pénale afférente et monsieur [K] tenu de rembourser les sommes payées à titre de contre-partie financière à compter du mois de juin 2010, date à laquelle il a été embauché par la société CNH, soit la somme de 14.374,26 Euros et les congés payés afférents ; les sommes dues porteront intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2012, date de convocation de monsieur [K] devant le bureau de conciliation du Conseil de Prud'hommes ;

Monsieur [K], dont le contrat de travail avec la société CLASS FRANCE s'était terminé le 12 mai et qui a exercé l'activité, interdite par la clause, de directeur du marketing d'une société concurrente dès le 1er juin suivant, n'a subi aucun préjudice et doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts ;

Monsieur [K] ne donne aucune indication sur sa situation financière qui justifierait que lui soient accordés les délais de paiement prévus par l'article 1244-1 du code civil ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris ce qu'il a dit que la clause de non concurrence prévue par le contrat n'est pas nulle ;

Statuant à nouveau ;

Annule la clause de non concurrence ;

Déboute la société CLASS FRANCE de sa demande de pénalité pour violation de la clause de non concurrence ;

Condamne monsieur [K] à rembourser à la société CLASS FRANCE la somme de 14.374,26 Euros et celle de 1.437,43 Euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2012 ;

Déboute monsieur [K] de sa demande de dommages et intérêts et de délais de paiement;

Condamne la société CLASS FRANCE à payer à monsieur [K] la somme de 1.500 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile

Met les dépens à la charge de la société CLASS FRANCE.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 14/05824
Date de la décision : 07/06/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°14/05824 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-07;14.05824 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award