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03/06/2016 | FRANCE | N°14/09166

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 03 juin 2016, 14/09166


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 03 JUIN 2016



(n° , 06 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/09166



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Avril 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/13224





APPELANTE



SAS ARCHIMINI prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le num

éro 332 836 220

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241, avocat postulant

Assistée de Me Philippe CAVARROC,...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 03 JUIN 2016

(n° , 06 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/09166

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Avril 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/13224

APPELANTE

SAS ARCHIMINI prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 332 836 220

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241, avocat postulant

Assistée de Me Philippe CAVARROC, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298, avocat plaidant

INTIMÉE

SAS SOCIÉTÉ DE L'HÔTEL EDOUARD VII prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Nantes sous le numéro 562 135 889

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Cécile ROUQUETTE TEROUANNE de la SELARL C.V.S., avocat au barreau de PARIS, toque : P0098

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Mars 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre

Madame Anne-Marie GALLEN, présidente

Madame Brigitte CHOKRON, conseillère

Greffier : lors des débats : Madame Anaïs CRUZ

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre et par Madame Anaïs CRUZ, greffier présent lors du prononcé.

**********

Faits et procédure :

Suivant acte authentique en date du 25 février 1992, la société de l'Hôtel Edouard VII a consenti à la société Architecture Miniature, devenue Archimini, un bail commercial portant sur des locaux d'une surface d'environ 30m² à usage de vente d'articles en céramique, de décoration et de souvenirs de Paris, de bijouterie et de cristallerie, situés [Adresse 1], pour une durée de neuf années à compter rétroactivement du 1er octobre 1991 et moyennant un loyer annuel en principal de 180.000 francs. Le bail a été tacitement reconduit au 1er octobre 2000.

Par lettre recommandée avec avis de réception daté du 22 décembre 2008, la société Archimini a sollicité le renouvellement du bail.

Aux termes d'un acte d'huissier du 20 janvier 2009, la société bailleresse a signifié à la société Archimini un « refus de renouvellement » pour le 30 septembre 2009 portant offre d'une indemnité d'éviction.

C'est dans ces circonstances que par acte d'huissier du 13 septembre 2013, la société Archimini a fait assigner la société de l'Hôtel Edouard VII devant le tribunal de grande instance de Paris en fixation de l'indemnité d'éviction à la somme de 700.000 euros, sauf à parfaire, et en paiement de cette somme.

Par jugement du 6 juin 2013, le tribunal a notamment ordonné la réouverture des débats sur la validité de la demande de renouvellement de la société locataire et sur la validité du refus de renouvellement émis par la bailleresse.

La société Archimini a soutenu que la demande de renouvellement du 22 décembre 2008 était inexistante, que l'acte signifié par la bailleresse le 20 janvier 2009 devait être requalifié de congé portant offre d'indemnité d'éviction, que sa demande en fixation n'était pas prescrite et a conclu aux mêmes fins.

La société de L'Hôtel Edouard VII s'est quant à elle opposée à la requalification de l'acte du 20 janvier 2009 et a soutenu que l'action en fixation d'une indemnité d'éviction était prescrite, sollicitant en conséquence l'expulsion de la société locataire et sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation.

Par jugement en date du 3 avril 2014, le tribunal de grande instance de Paris a :

- dit que la demande en paiement d'une indemnité d'éviction formée par la société Archimini est prescrite,

- dit que la société Archimini est occupante sans droit ni titre des locaux et ordonné son expulsion ainsi que de tous occupants de son chef des locaux,

- condamné la société Archimini au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du dernier loyer contractuel, hors taxes et charges à compter du 1er janvier 2009 et jusqu'à restitution des locaux,

- débouté la société Archimini de l'ensemble de ses demandes,

- ordonné l'exécution provisoire,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la société Archimini aux dépens.

La société Archimini a relevé appel de ce jugement le 25 avril 2014. Par ses dernières conclusions signifiées le 25 janvier 2016 au visa des articles L. 145-9, L. 145-10, L. 145-14, L. 145-28 et L. 145-60 du code de commerce, 1134 et 1147 du code civil, 114 du code de procédure civile, elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* dit que sa demande en paiement d'une indemnité d'éviction était prescrite,

* dit qu'elle était occupante sans droit ni titre depuis le 1er janvier 2009 et a ordonné son expulsion et celle de tous occupants de son chef,

* l'a condamnée au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle à compter du 1er janvier 2009,

* l'a déboutée de sa demande en fixation d'une indemnité d'éviction,

- dire que l'acte signifié le 20 janvier 2009 à la requête de la société de l'Hôtel Edouard VII doit être requalifié de congé avec refus de renouvellement et offre de paiement d'une indemnité d'éviction,

- constater qu'elle est recevable et bien fondée à bénéficier d'une indemnité d'éviction conformément aux dispositions de l'article L 145-14 du code de commerce,

- fixer l'indemnité d'éviction due à la somme de 700.000 euros au titre de l'indemnité principale, augmentée de celles accessoires, savoir les frais de remploi (70.000 euros), le trouble commercial (40.000 euros), les frais de déménagement et de licenciement sur justificatifs,

- condamner la société de l'Hôtel Edouard VII au paiement des sommes précitées,

- subsidiairement, si la Cour n'estimait pas disposer de toutes les informations pour statuer de plano, désigner tel expert qu'il lui plaira avec mission de lui fournir tous éléments utiles à l'estimation de l'indemnité compensatrice du préjudice subi par le preneur évincé au titre de la valeur marchande du fonds déterminée selon les usages de la profession, augmentée des frais normaux de déménagement et de réinstallation, des frais et droits de mutation afférents à l'acquisition d'un fonds de même importance, du montant du préjudice correspondant au trouble commercial, ainsi que toutes indemnités accessoires dues en conformité avec les textes applicables, la jurisprudence qui en découle et les usages.

À titre subsidiaire :

- condamner la société de l'Hôtel Edouard VII à lui verser une somme strictement équivalente à celle qu'elle aurait dû lui verser au titre de son indemnité d'éviction, en réparation de sa faute contractuelle,

En tout état de cause :

- débouter la société de l'Hôtel Edouard VII de l'intégralité de ses demandes formées à titre principal ou en tout état de cause,

- lui donner acte, qu'à titre également subsidiaire, elle s'associe à la demande d'expertise sollicitée,

- condamner la société de l'Hôtel Edouard VII à lui payer une somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont le recouvrement sera poursuivi conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

Par ses dernières conclusions signifiées le 23 septembre 2014 au visa des articles L. 145-10, L. 145-60, L. 145-14 et L. 145-28 du code de commerce, la société De L'Hôtel Edouard VII demande à la cour de :

- confirmer le jugement en date du 3 avril 2014,

- débouter la société Archimini de sa demande de requalification du refus de renouvellement signifié le 20 janvier 2009 en congé avec refus de renouvellement,

- dire que la demande de la société Archimini visant à obtenir le paiement d'une indemnité d'éviction est prescrite, n'ayant pas été engagée dans le délai de deux ans à compter de la signification de la réponse du bailleur portant refus de renouvellement,

- dire que la société Archimini se maintient sans droit ni titre dans les lieux loués depuis le 1er janvier 2009,

- ordonner l'expulsion de la société Archimini et de tous occupants de son chef, et ce si nécessaire avec l'assistance d'un serrurier et de la force publique,

- dire que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneront lieu à l'application des articles 65 de la loi du 9 juillet 1991 et 201 du décret du 31 juillet 1992,

- condamner la société Archimini au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du dernier loyer contractuel, hors charges et hors taxes, payable d'avance le 1er de chaque mois, à compter du 1er janvier 2009 et jusqu'à parfaite restitutions des locaux qu'elle occupe,

À titre subsidiaire :

- désigner tel expert qu'il plaira à la cour, aux frais avancés de la société Archimini, avec pour mission de :

* déterminer le montant de l'indemnité d'éviction à laquelle la société Archimini pourrait prétendre, conformément aux dispositions de l'article L. 145-14 du code de commerce,

* déterminer le montant de l'indemnité d'occupation due par la société Archimini en application de l'article L. 145-28 du code de commerce,

En tout état de cause :

- condamner la société Archimini à lui payer la somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la SELARL d'Avocats Interbarreaux C.V.S. dans les conditions de l'article 699 du même code.

SUR CE :

Sur la prescription de l'action en fixation de l'indemnité d'éviction :

La société Archimini fait valoir :

- que l'acte du 20 janvier 2009 délivré par la bailleresse et qualifié de « refus de renouvellement », qui comporte dans le même temps des mentions afférentes à un congé, ne peut s'analyser que comme un congé refus de renouvellement et non comme un refus consécutif à la demande de renouvellement du 22 décembre 2008 qu'elle n'a pas formée régulièrement ;

- qu'en période de tacite prolongation, la demande de renouvellement formée par le locataire met fin au bail le dernier jour du trimestre au cours duquel elle a été signifiée au bailleur, le bailleur ne pouvant lui-même, en application de l'article L. 145-9 premier alinéa, donner congé avec un préavis de six mois que pour le dernier jour d'un trimestre civil,

- qu'au cas présent elle a sollicité le renouvellement du bail en cours de tacite prolongation le 22 décembre 2008, que le bail aurait dû prendre fin le 1er janvier 2009 si la demande de renouvellement avait été régulière,

- que l'acte du 20 janvier 2009 portant demande de libération des lieux au 30 septembre 2009, signifié par la bailleresse, doit donc s'interpréter comme un congé,

- qu'en toute hypothèse, à considérer qu'il ne s'agirait que d'une erreur de rédaction de la bailleresse, la mention du 30 septembre 2009 était de nature à créer une confusion dans l'esprit de la locataire qui ne saurait en souffrir,

- que la reproduction des dispositions de l'article L.145-10 du code de commerce dans l'acte du 20 janvier 2009 est présentée de telle manière que l'attention de la locataire n'a pu être attirée et a entretenu la confusion alléguée.

Elle soutient que c'est en conséquence la date du 30 septembre 2009 indiquée dans l'acte comme étant celle de la fin du bail à laquelle le locataire devait restituer les locaux, qui marque le point de départ du délai de prescription de l'action en fixation de l'indemnité d'éviction, que le délai prévu à l'article L.145-60 du code de commerce expirait au 30 septembre 2011 et que sa demande en fixation d'une indemnité d'éviction, formée le 13 septembre 2011 n'est pas prescrite.

Or, la lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 décembre 2008 intitulée 'demande de renouvellement du bail' émanant de la société Archimini constituait bien dans l'intention du preneur une demande de renouvellement de son bail dont elle situait par erreur la date d'échéance du 30 septembre 2009, par référence probable à la date d'expiration du bail d'origine, alors que le bail était prolongé ; elle comportait au surplus le visa des dispositions de l'article L.145-10 du code de commerce relatif au renouvellement ;

Ainsi que l'a rappelé à juste titre le premier juge, la locataire est elle-même sans qualité pour demander la nullité de la demande de renouvellement qu'elle a formée par lettre recommandée avec accusé de réception et non par acte d'huissier comme prévu par les dispositions de l'article L. 145-10 du code de commerce.

La société de l'Hôtel Edouard VII n'a pas elle-même soulevé la nullité de l'acte mais a délivré le 20 janvier suivant un acte intitulé 'refus de renouvellement en réponse' qui rappelle la situation locative et indique clairement :

'Vous avez notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 /12/2008 une demande de renouvellement du bail ;

Celui-ci vous fait connaître par le présent acte qu'il entend refuser le renouvellement sollicité et offrir le paiement d'une indemnité d'éviction en application de l'article L 145-14 du code de commerce '.

Il s'ensuit que l'acte en question ne peut s'analyser, contrairement à ce que soutient la société Archimini, que comme la réponse de la bailleresse à la demande de renouvellement du bail présentée par la locataire quoique irrégulière ;

La circonstance que la bailleresse ait néanmoins invité en conséquence la société Archimini à restituer les lieux pour le 30 septembre 2009 procède de la même erreur que la locataire sur la date de la fin du bail alors que le refus de renouvellement met fin au bail à la date du dernier jour du trimestre civil au cours duquel la demande de renouvellement est formée et que la locataire bénéficiait d'un droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de l'indemnité qui était offerte ;

Cette erreur est cependant sans portée pour apprécier l'application de la prescription à la demande d'indemnité d'éviction dès lors que l'acte fait mention de façon apparente et en caractère gras des dispositions de l'article L.145-10 du code de commerce et de la nécessité pour le preneur de saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date à laquelle est signifié 'le présent refus de renouvellement'.

L'erreur sur la date de la fin du bail ne constitue que la répétition de l'erreur commise par la locataire elle-même et le fait de demander la restitution des locaux à cette date, en dépit de l'indemnité offerte, ne saurait être considéré comme fautif de la part du bailleur et ne peut en tout cas avoir créé la confusion invoquée par le preneur quant à son droit à l'indemnité d'éviction qui lui était offerte, en présence du rappel clair des termes de l'article L.145-10 du code de commerce relatif à la prescription de l'action en contestation du refus opposé à la demande de renouvellement.

La société Archimini sera en conséquence déboutée de sa demande en dommages-intérêts.

Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions, y compris celles relatives à l'expulsion de la société Archimini et en paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer contractuel, outre les charges jusqu'à parfaite restitution des locaux.

La société Archimini supportera les dépens d'appel et paiera à la société Hôtel Edouard VII une somme de 3.000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré,

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Condamne la société Archimini aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et à payer à la société Hôtel Edouard VII une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du même code.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 14/09166
Date de la décision : 03/06/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°14/09166 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-03;14.09166 ?
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