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24/05/2016 | FRANCE | N°15/12311

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 24 mai 2016, 15/12311


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRÊT DU 24 MAI 2016



(n°105/2016, 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/12311



sur renvoi après cassation, par arrêt de la chambre commerciale financière et économique de la Cour de Cassation rendu le 8 juillet 2014 (pourvoi N°M 13-16.714), d'un arrêt du pôle 5 chambre 2 de la Cour d'appel de PARIS rendu le 08 février 2013 (R

G n°10/05855) rendu sur appel d'un jugement du 09 Février 2010 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 05/12487





DEMANDERESSE À LA SAISINE



SA...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRÊT DU 24 MAI 2016

(n°105/2016, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/12311

sur renvoi après cassation, par arrêt de la chambre commerciale financière et économique de la Cour de Cassation rendu le 8 juillet 2014 (pourvoi N°M 13-16.714), d'un arrêt du pôle 5 chambre 2 de la Cour d'appel de PARIS rendu le 08 février 2013 (RG n°10/05855) rendu sur appel d'un jugement du 09 Février 2010 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 05/12487

DEMANDERESSE À LA SAISINE

SAS SPORAZUR MORRIS SPORTSWEAR,

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de GRASSE sous le numéro 324 683 614

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

Assistée Me Jacques ZAZZO de la SELASU CABINET JACQUES ZAZZO, avocat au barreau de PARIS, toque : L0222

DÉFENDERESSES À LA SAISINE

Société PUMA SE

société de droit allemand immatriculée au Handelsregister Fürth HBR 13085

Ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 2] (ALLEMAGNE)

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

venant aux droits de la société PUMA AG RUDOLF DASSLER SPORT, immatriculée au Handelsregister Fürth HBR 3175, ayant son siège social [Adresse 3] (ALLEMAGNE)

SAS PUMA FRANCE

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Strasbourg sous le n° B 578 504 102

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentées par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

Assistées de Me Lilyane ANSTETT GARDEA, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 Mars 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Benjamin RAJBAUT, Président de chambre

Mme Nathalie AUROY, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Karine ABELKALON

ARRÊT :

contradictoire

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, président et par Madame Karine ABELKALON, greffier présent lors du prononcé.

***

La société de droit allemand Puma AG Rudolf Dassler sport aux droits de laquelle vient la société Puma SE (la société Puma) est titulaire de trois marques figuratives internationales désignant la France, dénommées 'Form strip', dûment renouvelées et désignant, notamment, les chaussures de sport et de loisirs en classe 25, enregistrées respectivement les 19 novembre 1976, 11 juillet 1978 et 27 mars 1984 sous les numéros 426 712, 439 162 et 484 788.

Ces marques sont exploitées, en France, par la société Puma France. 

La société de droit néerlandais Le Coq sportif international BV (la société Le Coq sportif), titulaire d'une licence portant sur la marque '[O] [N]', a concédé en 2004 un contrat de sous-licence à la société Sporazur Morris Sportswear (la société Sporazur), distributeur.

Estimant que la détention, l'offre à la vente et la vente des chaussures 'colour sky blue/white' et 'couleur : chocolate brown', dénommées 'derbies [O] [N]', fabriqués pour le compte de la société Sporazur et commercialisés en France en 2005 portaient atteinte à leurs droits sur leurs propres chaussures 'Klim' et 'Fass et reproduisaient les marques Form strip qui y sont apposées, les sociétés Puma et Puma France (les sociétés Puma) ont mis en demeure M. [N], la société Le coq sportif et la société Sporazur de les faire retirer du marché, de leur communiquer les pièces leur permettant d'évaluer leur préjudice et de leur verser une somme de 715 920 € à titre d'indemnisation.

Après avoir retiré les modèles litigieux de la vente, la société Sporazur a, par acte du 5 décembre 2005, fait assigner les sociétés Puma en réparation du préjudice causé par ce retrait et appelé en garantie M. [U], qui avait procédé au choix des chaussures incriminées pour son compte, ainsi que son fournisseur la société Silver land international.

Par acte du 11 janvier 2006, les sociétés Puma ont fait assigner M. [N], la société Le Coq sportif, la société Sporazur et la société Auchan en contrefaçon de marques et en concurrence déloyale.

Après jonction des instances, le tribunal de grande instance de Créteil a, par jugement

du 09 février 2010, notamment déclaré la société Puma France recevable à agir, dit que les sociétés Sporazur et Auchan ont, en commercialisant le modèle 'colour sky blue/white', commis des actes de contrefaçon des marques n° 439 162 et 426 712, condamné ces sociétés in solidum à verser à la société Puma la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts, dit qu'elles ont en outre commis des actes de concurrence déloyale des dites marques au préjudice des sociétés Puma, condamné in solidum ces sociétés à verser la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts à chacune des sociétés Puma et Puma France, prononcé des mesures d'interdiction sous astreinte, rejeté la demande en garantie de la société Sporazur à l'encontre de M. [U] et de la société Silver land international, débouté les sociétés Puma de leurs demandes relatives au modèle 'couleur : chocolate brown' de la société Sporazur, condamné en conséquence ces sociétés à payer à la société Sporazur la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la cessation de la commercialisation de ce modèle et débouté les sociétésPuma et Puma France de leurs demandes à l'encontre de M. [N] et de la société Le coq sportif.

Les sociétés Puma ont interjeté appel de cette décision. Elles se sont, en cours de procédure, désistées de leur appel à l'encontre des sociétés Auchan et Silver land international.

Par arrêt partiellement infirmatif du 08 février 2013, la cour d'appel de Paris a, notamment, déclaré la société Sporazur recevable mais mal fondée en sa demande tendant à voir prononcer la déchéance des marques en cause, débouté les sociétés Puma de leurs entières prétentions, tant au titre de la contrefaçon que de la

concurrence déloyale et parasitaire, dit n'y avoir lieu de statuer sur les demandes en

garantie et condamné in solidum les sociétés Puma à verser à la société Sporazur la somme indemnitaire de 40 000 euros en réparation du préjudice commercial subi.

Les sociétés Puma ont formé un pourvoi contre cette décision.

Par arrêt du 8 juillet 2014 (pourvoi n°13-16.714), la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé pour violation de la loi, au visa de l'article 1382 du code civil, l'arrêt du 8 février 2013, mais seulement en ce qu'il a condamné les sociétés Puma à verser la somme de 40 000 € à la société Sporazur, pour n'avoir pas caractérisé l'existence d'une faute commise par les sociétés Puma, faisant dégénérer en abus l'exercice du droit d'agir en justice.

La société Sporazur a saisi la cour d'appel de Paris autrement composée désignée comme cour de renvoi.

Vu ses dernières conclusions numérotées 3 transmises le 22 mars 2016, par lesquelles elle demande à la cour, au visa de l'article 48 al. 1er de l'accord ADPIC, de l'article 565 du code de procédure civile et des articles 1382 et 1383 du code civil, de :

infirmer le jugement du 9 février 2010 en ce qu'il a condamné les sociétés Puma à lui verser seulement la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi à raison de la procédure engagée,

statuant à nouveau :

condamner in solidum les sociétés Puma à lui payer pour perte de chance :

la somme de 327 604,50 € à titre de dommages et intérêts en réparation notamment de ses préjudices commerciaux subis de 2006 à 2015, à parfaire à dire d'expert que la cour viendrait à désigner,

la somme de 80 000 € en réparation de son préjudice moral et de l'atteinte à sa réputation,

la somme de 29 564 € au titre des frais de stockage jusqu'au 29 février 2016,

ordonner la publication de l'arrêt à venir aux frais exclusifs des sociétés Puma dans trois journaux ou revus spécialisés de son choix, sans que le coût total de ces insertions n'excède la somme de 15 000 € hors taxes,

condamner solidairement les sociétés Puma à lui payer la somme de 15 000 € au

titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner les sociétés Puma aux entiers dépens, avec bénéfice des dispositions de l'article 699 du même code ;

Vu les dernières conclusions numérotées 2 transmises le 22 mars 2016 par les sociétés Puma, qui, au-delà de demandes de constatations ou de 'dire et juger' qui ne saisissent pas la cour de prétentions au sens de l'article 6 du code de procédure civile, demandent à la cour de :

déclarer irrecevables en cause d'appel comme nouvelles les prétentions de la société Sporazur tendant à son indemnisation au titre de l'article 48, al. 1er de l'Accord ADPIC et à la publication de l'arrêt à venir,

écarter des débats les pièces n°15 (courriel),16 (attestation), 18 (impressions d'écran), 20 (courriel), 17 et 17 b (attestations) produites par la société Sporazur,

déclarer les demandes de la société Sporazur irrecevables, en tout cas mal fondées,

débouter la société Sporazur de toutes ses demandes,

la condamner à payer à chacune d'elle la somme de 15 000 € au titre de l'aricle 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

la condamner à payer à chacune d'elle la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 22 mars 2016 ;

MOTIFS

Considérant que la demande en indemnisation de la société Sporazur fondée sur l'article 48, al. 1er de l'accord ADPIC tend aux mêmes fins que celle soumise aux premiers juges sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, avec laquelle elle se confond en cause d'appel, ces fondements juridiques étant cumulativement invoqués ; qu'elle est donc recevable en application de l'article 565 du code de procédure civile ;

Que sa demande de publication de l'arrêt intervenir, qui n'est que le complément de la précédente, est également recevable en application de l'article 566 du même code ;

Qu'il convient donc de rejeter les exceptions d'irrecevabilité soulevées par les sociétés Puma ;

Considérant que la cour observe que ce que reproche en réalité la société Sporazur aux sociétés Puma, sous couvert d'abus du droit d'agir en justice, c'est en réalité le caractère comminatoire des correspondances de mise en demeure ayant précédé l'engagement de leur action en justice en contrefaçon de marques et concurrence déloyale, comme étant à l'origine de la cessation quasi-immédiate de la distribution d'article jugés péremptoirement contrefaisants, ce qui était d'ailleurs l'objet de sa propre action en justice à leur encontre, engagée préalablement ;

Considérant que, de façon paradoxale, la société Sporazur présente comme inadmissible le comportement des sociétés Puma 'qui ont considéré comme légitimes leurs protestations et certaine l'issue des procédures dont elles menaçaient leur concurrente', alors qu'à défaut d'intention de nuire ou de légèreté blâmable, un tel comportement est gage de la bonne foi des sociétés Puma ;

Considérant que l'intention de nuire n'est pas invoquée ;

Considérant que le ton comminatoire des correspondances incriminées, soit essentiellement la lettre du 17 octobre 2005 par laquelle le conseil des sociétés Puma a mis directement en demeure [O] [N], au motif d'un prétendue contrefaçon de marques par imitation de deux modèles de chaussures, d'avoir à retirer du marché tous les produits visés et de lui remettre certains documents lui permettant de chiffrer son préjudice, réitérée par lettre du 24 octobre 2005 à la société Le Coq sportif, à la suite desquelles, par lettre du 29 octobre 2005, la société Sporazur dûment informée a demandé à la société Auchan de cesser la commercialisation des dits produits, est usuel pour ce type de lettres, visant précisément à impressionner suffisamment la partie adverse pour qu'elle mette fin d'elle-même à des faits estimés illicites et obtenir d'elle réparation, sans avoir à engager d'action en justice, ce qui engendre des frais supplémentaires ;

Qu'il en est de même de celui utilisé dans la lettre du 10 novembre 2005 par laquelle le conseil des sociétés Puma, après avoir pris connaissance des deux factures de vente des articles litigieux émises par la société Sporazur à l'attention de la société Auchan les 19 et 20 juillet 2005, a mis en demeure M. [N] et la société Sporazur, par l'intermédiaire de leurs conseils, ainsi que la société Le Coq sportif, d'avoir à payer la somme de 715 920 € dans un délai impératif d'une semaine, à défaut de quoi il saisirait les tribunaux, en sollicitant également la publication de la décision à intervenir ;

Qu'elles ne présentent pas le degré de gravité extrême et de violence que lui prête la société Sporazur, qui a choisi librement, par mesure de prudence, de suspendre à titre conservatoire la commercialisation des modèles incriminés par les sociétés Puma ;

Que les sociétés Puma n'y ont aucunement présenté les contrefaçons reprochées comme des faits acquis selon décisions de justice ;

Qu'aucune légèreté blâmable ne saurait être retenue à leur encontre, alors que leur action a été jugée recevable, tant en première instance qu'en cause d'appel, et de surcroît reconnue partiellement bien fondée par le tribunal, qui avait condamné, en raison de la commercialisation du modèle de chaussure 'colour sky blue/white', la société Sporazur des chefs de contrefaçon de deux des marques invoquées par la société Puma et de concurrence déloyale à l'égard des sociétés Puma et Puma France ;

Considérant que la société Sporazur échouant dans la démonstration d'une faute des sociétés Puma à l'origine de son préjudice, il convient, infirmant le jugement de ce chef, de rejeter sa demande en dommages et intérêt et en publication ;

Considérant que le rejet de cette demande rend son objet la demande des sociétés Puma tendant au rejet de certaines pièces produites par la société Sporazur pour caractériser son préjudice ;

Considérant que l'appréciation erronée que la société Sporazur a fait de ses droits n'a pas dégénéré en abus du droit d'agir en justice et la demande de dommages et intérêts formée de ce chef par les sociétés Puma doit donc également être rejetée ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant dans les limites de sa saisine sur renvoi après cassation,

Rejette les exceptions d'irrecevabilité pour nouveauté des demandes présentées par les sociétés Puma,

Infirme le jugement en ce qu'il condamné les sociétés Puma à payer à la société Sporazur la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la cessation de la commercialisation du modèle 'couleur : chocolate brown',

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

Rejette la demande de la société Sporazur en dommages et intérêts et en publication,

Rejette la demande reconventionnelle des sociétés Puma en dommages et intérêts,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes,

Condamne la société Sporazur aux dépens.

LE PRÉSIDENTLE GREFFIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 15/12311
Date de la décision : 24/05/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I1, arrêt n°15/12311 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-24;15.12311 ?
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