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18/05/2016 | FRANCE | N°13/10562

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 18 mai 2016, 13/10562


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 18 Mai 2016



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/10562



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 21 juin 2013 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 11/16831





APPELANTE

Madame [W] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1968

comparante en personne, assist

ée de Me Pierre SIRGUE, avocat au barreau de BORDEAUX



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2013/050090 du 08/01/2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PA...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 18 Mai 2016

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/10562

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 21 juin 2013 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 11/16831

APPELANTE

Madame [W] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1968

comparante en personne, assistée de Me Pierre SIRGUE, avocat au barreau de BORDEAUX

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2013/050090 du 08/01/2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

SARL YASMIBELLE

[Adresse 2]

[Localité 2]

Siret n° 394 468 714 00032

représentée par Me Hélène WILLIAMS, avocat au barreau de PARIS, R288

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 février 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Christine LETHIEC, conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine SOMMÉ, président

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Madame Christine LETHIEC, conseiller

Greffier : Madame Marion AUGER, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine SOMMÉ, président et par Madame Marion AUGER, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [W] [Z] a été engagée par la SARL Yasmibelle dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 15 avril 2009, pour y exercer les fonctions de coiffeuse, en contrepartie d'une rémunération mensuelle brute de 1 321.05 € pour 151.67 heures.

L'entreprise qui employait, au jour de la rupture une seule salariée est assujettie à la convention collective de la coiffure et des professions annexes.

Suite à une altercation entre la salariée et la gérante, Mme [Z] [I], la société YASMIBELLE a convoqué Mme [W] [Z], par lettre recommandée du 21 juin 2011, à un entretien préalable à un licenciement fixé au 28 juin 2011, en lui notifiant une mise à pied à titre conservatoire.

Mme [W] [Z] s'est trouvée en arrêt de travail à compter du 21 juin jusqu'au 23 octobre 2011.

La société Yasmibelle a convoqué Mme [W] [Z], par lettre recommandée du 24 octobre 2011, à un nouvel entretien préalable à un licenciement fixé au 31 octobre  2011.

Un licenciement pour faute grave a été notifié à l'intéressée par courrier recommandé du 7 novembre 2011, rédigé en ces termes :

«'Madame,

Le 31-10-11, vous avez été entendue, en présence de votre conseil, lors de l'entretien réglementaire préalable de notre décision, suite aux faits qui vous étaient reprochés et qui ont donné lieu à une mise à pied conservatoire.

Vous avez pu exprimé votre point de vue et exposer votre version des faits, puis avez entendu le point de vue de l'employeur, exposé par la gérante. Nous vous informons donc, par la présente, ainsi que l'impose la réglementation en -vigueur, et après le délai de réflexion nécessaire, pour prendre en compte vos arguments, de la décision de la direction de l'entreprise; à savoir:

Compte tenu de la gravité des faits avérés et attestés par les forces de police, ainsi

que de la nature (lesdits faits relevant de l'agression physique sur employeur, nous vous signifions la transformation de votre mise à pied conservatoire sans solde en licenciement sans préavis ni indemnité pour attitude incompatible avec le poste occupé et agression physique caractérisée.'».

Estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme [W] [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris, lequel, par jugement rendu le 21 juin 2013, a dit que le licenciement était fondé sur une faute grave, et débouté la salariée de ses demandes en indemnités de rupture abusive, rappel de salaires, paiement d'heures supplémentaires, indemnité pour travail dissimulé et frais irrépétibles.

Le 6 novembre 2013, Mme [W] [Z] a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions visées par le greffe le 16 février 2016 et soutenues oralement, Mme [W] [Z] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et statuant à nouveau, de condamner la société YASMIBELLE à lui verser les sommes suivantes :

' 9 528.75 € au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents

' 10 316.25 € à titre d' indemnité pour travail dissimulé

' 3 782.62 € à titre d' indemnité compensatrice de préavis

' 859.68 € à titre d' indemnité de licenciement

' 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif

' 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat ( demande nouvelle)

' 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions visées par le greffe le 16 février 2016 et soutenues oralement, la société Yasmibelle sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le licenciement de Mme [W] [Z] était fondé sur une faute grave et l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes en indemnités de rupture abusive et paiement d'heures supplémentaires.

Elle forme une demande reconventionnelle de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées oralement lors de l'audience des débats.

SUR QUOI LA COUR

Sur l'exécution du contrat de travail

Mme [W] [Z] fait valoir qu'elle était contrainte de travailler tous les lundis alors même que le contrat de travail prévoit que c'est son jour de repos et elle réclame le paiement de la somme de 9 528.75 € au titre des heures supplémentaires effectuées.

L'employeur reproche à la salariée de ne pas justifier du bien fondé de sa demande, tout en indiquant que du fait de la baisse constante du chiffre d'affaires du salon de coiffure depuis l'arrivée de la salariée, celle-ci n'a jamais effectué une seule heure supplémentaire.

En application de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

A l'appui de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, Mme [Z] verse aux débats les attestations de Mme [M] [C] et de Mme [S] [R], déclarant être à la fois clientes et amies de la salariée ainsi que celle de Mme [B] [D], qui indiquent que la salariée travaillait au salon de coiffure tous les jours de la semaine. Ces attestations concordantes et circonstanciées sont confirmées par le fait que l'incident qui a opposé la salariée et l'employeur s'est produit un lundi.

La salariée produit ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande.

L'employeur dans ses conclusions admet que Mme [Z] travaillait parfois le lundi en compensation de ses journées écourtées par des rendez-vous médicaux en fin d'après midi mais, se bornant à invoquer la baisse de son chiffre d'affaires sur les deux années d'exécution du contrat de travail, ne justifie pas des horaires réellement effectués par la salariée.

Au vu des éléments produits de part et d'autre, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que Mme [Z] a bien effectué des heures supplémentaires non rémunérées. Compte tenu de ce que la salariée dans son calcul ne tient compte ni des périodes de congés ni de ses absences pour maladie, il y a lieu de lui allouer la somme de 4 331,25 € à titre de rappel de salaire outre les congés payés afférents, soit la somme de 433,12 €.

Sur la rupture du contrat de travail

L'article L 1235-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si un doute persiste, il profite au salarié.

Il résulte des articles L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et il appartient à l'employeur qui invoque la faute grave d' en rapporter la preuve alors même que l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Il convient d'analyser les griefs reprochés à Mme [W] [Z] et exposés dans la lettre de licenciement notifiée le 14 novembre 2011, qui lie les parties et le juge.

La société Yasmibelle reproche à la salariée d'être à l'origine d'une violente altercation survenue le 20 juin 2011 et d'avoir agressé physiquement la gérante, Mme [Z] [I], qui a porté plainte le même jour auprès des services de police.

Sur la prescription

Mme [W] [Z] soulève la prescription des faits fautifs dès lors que l'employeur a choisi de la convoquer à un nouvel entretien préalable, le 24 octobre 2011, plus de deux mois après les faits incriminés.

L'employeur fait valoir que la prescription a été interrompue par la convocation à l'entretien préalable du 21 juin 2011 et la mise à pied à titre conservatoire, caractérisant l'engagement de poursuites disciplinaires.

Selon les dispositions de l'article L 1332-4 du code du travail, «' aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur a en eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.'» Sous cette réserve, le licenciement disciplinaire prononcé à raison de faits connus depuis plus de deux mois par l'employeur est sans cause réelle et sérieuse.

S'il est constant que la maladie du salarié et l'absence qui en résulte ne suspendent pas le délai de deux mois, il est établi que l'employeur, avant de prendre une sanction disciplinaire définitive, a notifié à la salariée, le 21 juin 2011, une mise à pied à titre conservatoire en même temps qu'il la convoquait à un entretien préalable à un éventuel licenciement caractérisant ainsi l'engagement de poursuites disciplinaires qui interrompent la prescription.

Mme [W] [Z] se trouvait en arrêt maladie du 21 juin au 23 octobre 2011 et la société Yasmibelle justifie l'avoir convoquée à un nouvel entretien préalable dès son premier jour de reprise du travail, alors même que la prescription des faits fautifs n'était pas acquise en raison de la mise à pied à titre conservatoire du 21 juin 2011, de sorte que la notification du licenciement du 17 novembre 2011 est régulière.

Sur l'imputabilité de la rupture

Il est constant que le lundi 20 juin 2011, une dispute a éclaté entre Mme [Z] et Mme [I], gérante, en présence de la mère de celle-ci, Mme [K] [V].

La société Yasmibelle souligne la violence du comportement de la salariée qui a brisé un miroir et tenté de balafrer la gérante, Mme [Z] [I], qui s'est défendue.

Les services de police sont intervenus immédiatement et Mme [Z] [I], entendue le jour des faits, indiquait notamment :

«' J'ai eu un différend avec une employée suite à des insultes envers ma mère survenu ce matin.

J'ai décidé de mettre fin à son contrat suite à ça.

Elle s'est énervée, elle nous a insultée en ces termes :

«'pute, teneuse de bordel, ton père n'est qu'un pd il ne me fait pas peur...'»

Je lui ai dit qu'elle pouvait faire ce qu'elle voulait mais qu'elle devait me rendre les clefs du salon.

Elle a refusé en me disant que l'inspection du travail lui avait dit de ne pas me donner les clefs du salon.

Toujours très énervée, elle a pris un miroir posé sur la table, elle a voulu le jeter sur moi, il s'est cassé au sol.

Suite à ça nous nous sommes bagarrées....

Elle m'a griffée le visage et m'a arraché des cheveux et elle a pris un morceau de miroir pour vouloir me balafrer . Suite à ça, je l'ai rattrapée par le cou en la repoussant contre un mur et ma mère s'est interposée....

J'ai juste des griffures au visage et je ne veux pas aller à l'unité médico judiciaire '.'».

A l'appui de ces déclarations, l'intéressée verse aux débats un cliché photographique des griffures portées à son visage.

Mme [K] [V], mère de la gérante, témoin de la scène, indique dans son attestation :

«...Vu l'agressivité violente de Mme [Z]'.étant de santé fragile , atteinte de sarcoïde, à l'âge de 63 ans,... ma fille lui demandait plusieurs fois de me respecter étant donné qu'elle me traitait de prostituée et étant une femme légère vu que je ne respectais pas la religion...., vu les insultes à mon égard, elle s'est mise à hurler et à sauter à la gorge lui enserrant le cou et la faisant tomber par terre. Paniquée de voir ma fille par terre , j'ai essayé de séparer la coiffeuse qui était sur ma fille. Je hurlai au secours , un monsieur qui «passé» sur le trottoir, m'a vu hurler. Il est entré pour les séparer, la coiffeuse lui a sauté dessus et l 'a griffé, le monsieur est parti.

Je confirme n'avoir jamais vu ce monsieur.

La police est arrivée toute de suite, ils ont constaté le visage griffé de ma fille ainsi que la glace qu'elle a brisée pour balafrer ma fille...'».

Mme [W] [Z] conteste avoir eu l'initiative de l'altercation du 20 juin 2011. Elle fait valoir que, rencontrant des problèmes psychologiques personnels du fait de plusieurs fausses couches, elle se trouvait dans un état de santé fragilisé par les conditions de travail. Elle indique que le 20 juin 2011, c'est la mère de la gérante qui l'a insultée en se montrant de plus en plus agressive et qu'elle n'a fait que se protéger face à la brutalité de la gérante et de celle de son ami M. [E] qui est intervenu alors qu'elles en étaient venues aux mains.

Suite à l'altercation du 20 juin 2011, Mme [W] [Z] a été examinée, le lendemain, par le docteur [K] dont les constatations médicales sont les suivantes :

«' Je soussigné ... avoir examiné ce jour Mme [Z] ... Elle me déclare avoir été victime de violences physiques le 20 juin 2011 avec polytraumatismes de l'épaule droit et du bras droit, du rachis lombaire gauche occasionné par une chute.

A l'examen: polyalgies et syndrome post commotionnel avec angoisses, pleurs, insomnies, troubles neuro végétatifs...

Son état de santé justifie une ITT de 5 jours avec arrêt de travail de 5 jours sauf complications.

Traitement ce jour: LEXOMIL. .. ».

La salariée dont l'arrêt de travail a été prolongé jusqu'au 23 octobre 2011, qui justifie rencontrer des problèmes de santé dus à un état d'anorexie et un tabagisme chronique et qui avait, déjà, fait une fausse couche avant d'être engagée par la société Yasmibelle, ne démontre pas que ses difficultés soient imputables aux conditions de travail dans le salon de coiffure.

Elle produit en effet un courrier du médecin du travail daté du 26 avril 2011et à son médecin traitant pour avis sur l'opportunité d'un mi-temps thérapeutique en relevant l'incompatibilité des fonctions de coiffeuse travaillant en station debout prolongée avec un traitement de rééducation alimentaire sans faire de lien entre la dégradation de l'état de santé de la salariée et ses conditions de travail.

Les certificats médicaux des 16 juillet et 10 septembre 2012, du docteur [M], médecin traitant de la salariée, ne font pas davantage état d'un quelconque lien de causalité entre les conditions de travail dans le salon de coiffure et la pathologie qualifiée de lourde de Mme [W] [Z] alors même que celle-ci ne travaille plus pour la société Yasmibelle depuis le 20 juin 2011.

Les autres attestations figurant au dossier émanent de personnes n'ayant pas assisté à l'altercation, seul motif de la rupture, mais l'employeur produit plusieurs attestations de clientes du salon de coiffure qui témoignent que le comportement de Mme [Z] était parfois violent, voire hystérique, et qu'elle insultait la gérante en leur présence.

La cour déduit de l'ensemble de ces éléments que des violences réciproques ont opposé la salariée et la gérante du salon de coiffure, que Mme [W] [Z] a eu un comportement inapproprié de nature à constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement mais que les faits ne présentent pas un caractère de gravité suffisant, en l'absence de tout incident disciplinaire antérieur, pour rendre impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise et la poursuite du contrat de travail.

Il convient d'infirmer le jugement déféré qui a dit que le licenciement de Mme [W] [Z] était fondé sur une faute grave.

Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail

Dès lors que le licenciement de Mme [W] [Z] n'est pas fondé sur une faute grave, mais sur une cause réelle et sérieuse, la salariée qui percevait un salaire brut de 1 365.03 € est en droit d'obtenir une indemnité compensatrice de préavis de 2 730.06 €, en application de l'article L1234-1 du code du travail, outre les congés payés afférents d'un montant de 273 € ainsi qu'une indemnité de licenciement d'un montant de 682.51 € calculée en application de l'article L 1234-9 du code du travail de la façon suivante :(1 365.03 x 2.5) / 5

Sur les dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

Mme [W] [Z] ne démontre pas de quelle manière l'employeur aurait manqué à son obligation de loyauté dans l'exécution du contrat de travail alors même que sept attestations de clients du salon se plaignent du comportement violent et hystérique de la salariée et que quatre d'entre eux déclarent avoir cessé de s'y rendre.

La salariée sera déboutée de ce chef de demande.

Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé

Mme [W] [Z] réclame une indemnité de 10 316.25 € pour travail dissimulé.

L'article'L 8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l'article L 8221-3 du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions de l'article L 8221-5 du même code relatif à la dissimulation d'emploi salarié.

Aux termes de l'article L .8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article'L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article'L. 8221-5 du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

En l'espèce, il ne ressort pas du dossier que l'employeur, en manquant de rigueur dans la comptabilité des heures de travail effectuées par son unique salariée qui de plus était la seule diplômée en coiffure au salon ait eu l'intention de dissimuler son emploi.

Mme [W] [Z] reproche à la société Yasmibelle d'avoir effectué tardivement la déclaration d'embauche et d'avoir omis d'effectuer ses déclarations auprès de l'organisme de retraite complémentaire, ARRCO.

L'employeur produit une déclaration préalable à l'embauche enregistrée le 4 juin 2009. Compte tenu de l'existence du contrat de travail écrit et de l'édition régulière des bulletins de paie, cette régularisation tardive intervenue un mois et demi après la signature du contrat de travail ne suffit pas à démontrer une intention de fraude.

Par ailleurs, l'employeur verse aux débats une attestation de l'organisme de retraite complémentaire REUNICA du 18 mars 2013, justifiant que la salariée a été, régulièrement, affiliée à cet organisme pour la période allant du 15 avril 2009 au 17 novembre 2011.

En l'état des explications et des pièces, Mme [W] [Z] sera déboutée de ce chef de demande.

Le jugement déféré sera confirmé à ce titre.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La société Yasmibelle qui succombe supportera la charge des dépens de première instance et d'appel, en versant à Mme [W] [Z] une indemnité de 1 500 € au titre des frais irrépétibles exposés, en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement en ce qu'il a débouté Mme [W] [Z] de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de sa demande en indemnité pour travail dissimulé.

INFIRME le jugement en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT que le licenciement de Mme [W] [Z] est fondé sur une cause réelle et

sérieuse.

CONDAMNE la SARL Yasmibelle à verser à Mme [W] [Z] les sommes suivantes:

' 4 331,25 € à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentiaires

' 433,12 € de congés payés afférents,

' 2 730.06 € au titre de l' indemnité compensatrice de préavis.

' 273 € au titre des congés payés afférents.

' 682.51 € à titre d'indemnité de licenciement.

RAPPELLE que les créances de nature salariale produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et les créances à caractère indemnitaire produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt.

DEBOUTE Mme [W] [Z] de sa demande en dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

CONDAMNE la SARL Yasmibelle à verser à Mme [W] [Z] une indemnité de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la SARL Yasmibelle aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 13/10562
Date de la décision : 18/05/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°13/10562 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-18;13.10562 ?
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