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13/05/2016 | FRANCE | N°12/21260

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 11, 13 mai 2016, 12/21260


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 11



ARRET DU 13 MAI 2016



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/21260





Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Novembre 2012 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 201018843







APPELANTE



SA EDF - ELECTRICITE DE FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants l

égaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 552 081 317 (Paris)



Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Représen...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRET DU 13 MAI 2016

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/21260

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Novembre 2012 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 201018843

APPELANTE

SA EDF - ELECTRICITE DE FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 552 081 317 (Paris)

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Représentée par Me Emmanuel GUILLAUME de la SCP BAKER & MC KENZIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0445

INTIMEES

SASU IBERBOLA RENOVABLES FRANCE, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 479 341 307 (Paris)

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Représentée par Me Fabrice FAGES et par Me Olivier PARLEANI de l'AARPI LATHAM & WATKINS, avocats au barreau de PARIS, toque : T09

SASU PERFECT WIND, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 449 790 732 (Paris)

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Représentée par Me Fabrice FAGES et par Me Olivier PARLEANI de l'AARPI LATHAM & WATKINS, avocats au barreau de PARIS, toque : T09

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Décembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Patrick BIROLLEAU, Président de chambre, chargé du rapport

Monsieur Paul André RICHARD, Conseiller hors classe

Madame Marie-Annick PRIGENT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Patricia DARDAS

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Patrick BIROLLEAU, président et par Mme Patricia DARDAS, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Les sociétés IBERDROLA RENOVABLES FRANCE (IBERDROLA) et PERFET WIND, spécialisées dans les énergies renouvelables, ont investi en France pour construire et exploiter des installations de production d'électricité éolienne en considération du dispositif de l'obligation d'achat de la production d'énergie éolienne par EDF.

Un litige est apparu entre les parties sur les conditions d'achat d'électricité imposées par EDF aux sociétés IBERDROLA et PERFET WIND pour ses installations éoliennes.

Par arrêt en date du 6 août 2008, le Conseil d'État a annulé l'arrêté tarifaire E06 pris par le ministre chargé de l'energie le 10 juillet 2006 pour la fixation des prix de rachat par EDF de l'électricité produite par les producteurs d'électricié d'origine éolienne.

Le 17 octobre 2008, EDF a refusé de signer et d'exécuter les contrats d'achat, se prévalant de l'empêchement tiré de l'annulation de l'arrêté E06 prononcée par le Conseil d'État.

Par une assignation délivrée à EDF le 10 mars 2010, les sociétés IBERDROLA et PERFECT WIND ont saisi le tribunal de commerce de Paris d'une demande tendant à constater les manquements fautifs, les procédés déloyaux ainsi que les pratiques anticoncurrentielles d'EDF tenant au refus d'appliquer les tarifs E06 ou E08 avant la date du 29 décembre 2008 et à voir condamner EDF au paiement de leur manque à gagner, soit les sommes de 1.700.650,24 euros pour la société IBERDROLA et de 578.636,44 euros pour la société PERFECT WIND.

Par jugement rendu le 9 novembre 2012, le tribunal de commerce de Paris a :

- constaté que les contrats d'achat ont été formés à la date des demandes de contrat E06 ;

- constaté que les agissements de la SA Electricité de France dénoncés sont constitutifs, s'agissant des contrats d'achat E06, de manquements fautifs à ses fonctions et devoirs au titre des contrats d'achat conclus pour les installations éoliennes de « [Localité 1]e », de « [Localité 2] [Localité 3] I - [Localité 4], de « [Localité 5] », de « [Localité 6] », de « [Localité 7] et de « [Localité 8] », exploitées par les sociétés demanderesses ;

- condamné EDF à réparer ces dommages en payant la somme de 1.700.650,24 euros à la IBERDROLA et la somme de 578.636,44 euros à la PERFECT WIND, sommes auxquelles s'ajoutent les intérêts légaux à compter du 29 décembre 2008, en application de l'article 1153-1 du code civil et avec capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- condamné EDF à payer la somme de 120.000 euros respectivement à la société IBERDROLA RENOVABLES FRANCE et à la société PERFECT WIND au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société EDF a régulièrement interjeté appel le 23 novembre 2012.

Prétentions des parties

La société EDF , par ses dernières conclusions signifiées le 11 novembre 2015, demande à la Cour de :

- révoquer l'ordonnance de clôture d'instruction du 15 janvier 2015 ;

- juger recevable et bien fondé l'appel qu'elle a formé ;

- infirmer le jugement rendu le 9 novembre 2012 ;

Et statuant à nouveau,

- rejeter les demandes des sociétés EGM WIND et PERFECT WIND comme non fondées ; - condamner les sociétés EGM WIND et PERFECT WIND ensemble au paiement d'une somme de 100.000 euros à EDF au titre de l'article 700 du code de procédure civile et non compris dans les dépens et aux dépens.

Elle fait valoir que le jugement commet une erreur en datant la conclusion du contrat d'achat à la date de la demande de ce contrat par le producteur, dès lors que :

- cette position est contraire au régime réglementaire de l'obligation d'achat, tel qu'il a été interprété par la jurisprudence judiciaire et administrative ;

- la réglementation, notamment les arrêtés fixant les tarifs E06 et E08, distinguent clairement la demande de contrat d'achat et la conclusion de celui-ci,

- les dispositions de l'article 88-III-3°) de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 dite Grenelle 2 prévoient que le contrat est formé à la date de leur signature par EDF.

Elle soutient n'avoir commis aucun manquement car le refus de signer les contrats d'achat est justifié par l'annulation des conditions tarifaires par le Conseil d'Etat. Elle conteste toute possibilité pour les intimées de bénéficier d'un droit réglementaire ou contractuel aux conditions tarifaires E06.

Sur les man'uvres dilatoires, EDF rappelle que l'instruction par ses services doit précéder toute signature, afin notamment de garantir que la demande ne porte pas atteinte au « bon fonctionnement des réseaux ».

Elle soutient que les intimés ont eux-mêmes retardé l'instruction des demandes de contrat d'achat, qu'elle n'avait elle-même aucun intérêt à retarder la signature des contrats d'achat et que sa bonne foi ne peut être remise en cause car sur les 43 installations concernées par l'annulation de l'arrêté tarifaire E06, seuls les contrats commerciaux transitoires portant sur quatre installations de l'intimé n'ont pas été conclus.

Concernant les installations de [Localité 1] ' [Localité 1] et [Localité 5] et celles d'[Localité 8], d'[Localité 7], [Localité 2] [Localité 3] I-[Localité 4] et [Localité 6], elle rappelle que sa responsabilité ne peut être engagée dans la mesure où elle s'est bornée à appliquer tant l'arrêt du Conseil d'Etat, qui a annulé les tarifs d'achat E06, que la réglementation en vigueur et n'a employé aucune man'uvre dilatoire.

Les sociétés EGM WIND et PERFECT WIND, par leurs dernières conclusions signifiées le 8 janvier 2015, demandent à la Cour de :

- constater que les contrats d'achat ont été formés à la date des demandes de contrat E06 ;

- constater que les agissements de la société EDF dénoncés sont constitutifs :

A titre principal, s'agissant des contrats d'achat E06 :

de manquements fautifs à ses fonctions et devoirs au titre de l'obligation d'achat relatives aux installations éoliennes de « [Localité 1] », de « [Localité 2] [Localité 3] I - [Localité 4] », de « [Localité 5] », de « [Localité 6] », de « [Localité 7] » et de « [Localité 9] - [Localité 10] » exploitées par les demanderesses ;

de procédés déloyaux et discriminatoires à l'encontre des demanderesses ;

de pratiques anticoncurrentielles à l'encontre des demanderesses sur le segment de la production d'électricité éolienne par abus sur ce segment de sa position dominante sur le marché du transport et de la distribution d'électricité, de sa fonction d'acheteur et de l'état de dépendance économique des demanderesses ;

A titre subsidiaire, s'agissant des contrats d'achat E08 :

de manquements fautifs à ses fonctions et devoirs au titre de l'obligation et des conditions d'achat de l'électricité produite par les installations éoliennes de « [Localité 1] », de « [Localité 2] [Localité 3] I - [Localité 4] », de « [Localité 5] », de « [Localité 6] », de « [Localité 7] » et de « [Localité 9] - [Localité 10] » exploitées par les demanderesses ;

de procédés déloyaux et discriminatoires à l'encontre des demanderesses ;

de pratiques anticoncurrentielles à l'encontre des demanderesses sur le segment de la production d'électricité éolienne par abus sur ce segment de sa position dominante sur le marché du transport et de la distribution d'électricité, de sa fonction d'acheteur et de l'état de dépendance économique des demanderesses ;

dans tous les cas, constater que les agissements fautifs et les manquements contractuels de EDF ont causé un dommage par manque à gagner au titre de l'achat et de la rémunération de l'électricité produite par ces installations :

de 1.700.650,24 euros à la société EGM WIND, au titre de l'exploitation de ses installations de « H[Localité 1]», de « [Localité 2] [Localité 3] I - [Localité 4] » et de « [Localité 5] » ;

de 578.636,44 euros à la société PERFECT WIND, au titre de l'exploitation de ses installations de « [Localité 6] », de « [Localité 7] » et de « [Localité 9] - [Localité 10] » ;

confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 9 novembre 2012 en toutes ses dispositions ;

rejeter l'intégralité des demandes de EDF ;

condamner EDF à payer la somme de 40.000 euros respectivement à la société EGM WIND et à la société PERFECT WIND au titre des frais d'appel et conformément à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Ils soutiennent que le régime légal et réglementaire mis en place les fait bénéficier d'une obligation d'achat après obtention du certificat du préfet ouvrant droit à l'obligation d'achat. Les intimés soutiennent que la mise en 'uvre de cette obligation d'achat par EDF fait peser sur celle-ci de strictes obligations contractuelles telles que le raccordement, l'essai et la mise en service industrielle ainsi que la signature du contrat d'achat.

Elles soulignent que EDF a refusé abusivement de signer et d'exécuter les contrats alors que les dossiers étaient complets, a manifestement manqué aux exigences légales et réglementaires de sa fonction d'acheteur et de son obligation d'achat en s'abstenant de considérer comme conclu, d'exécuter et de dûment signer avec chacune des installations en cause un contrat d'achat E06 aux conditions en vigueur à la date des demandes adressées, à savoir le 7 mars 2007 pour [Localité 1], le 6 avril 2007 pour [Localité 9], le 27 avril 2007 pour [Localité 6], le 23 novembre 2007 pour [Localité 5], le 20 décembre 2007 pour [Localité 7], le 8 janvier 2008 pour [Localité 4].

Elle font également valoir que EDF a également manqué à ses obligations en s'abstenant d'appliquer les conditions d'achat E06 aux installations de [Localité 1] et de [Localité 5] à compter de leur date de MSI du 10 juillet 2008 et en apportant un retard abusif à la signature des contrats d'achat.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus amples exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Considérant que le présent litige porte sur les conditions d'achat imposées à la société Iberdrola Renovables France, devenue EGM Wind, et Perfect Wind (IBRF) par EDF, en sa qualité de titulaire légal de l'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations éoliennes ; que les sociétés Iberdrola Renovables France et Perfect Wind, au vu du dispositif légal en vigueur et des conditions d'achat établies par le ministre chargé de l'énergie dans son arrêté du 10 juillet 2006 (arrêté et tarif d'achat dits « E06 ») ont entrepris la construction de six parcs de production éolienne (les installations concernées dans le présent litige), avec des demandes complètes de contrat d'achat à EDF s'échelonnant de mars 2007 à janvier 2008 et des mises en service en juillet 2008 (pour les deux premières) et en décembre 2008 (pour les quatre autres), ainsi pour les sites de :

- [Localité 1] ' [Localité 1](50) : la dernière demande de contrat d'achat a été déposée le 7 mars 2007 et la mise en service industrielle (MSI) est intervenue le 10 juillet 2008 ;

- [Localité 9] ' [Localité 10] (55) : la dernière demande de contrat d'achat a été déposée le 6 avril 2007 et la MSI est intervenue le 16 décembre 2008 ;

- [Localité 6] ' [Localité 6] (85) : la dernière demande de contrat d'achat en date a été déposée le 27 avril 2007 et la MSI est intervenue le 16 décembre 2008 ;

- [Localité 5] ' [Localité 5] (55) : la dernière demande de contrat d'achat en date a été déposée le 23 novembre 2007 et la MSI est intervenue le 10 juillet 2008 ;

- [Localité 7] (57) : la dernière demande de contrat d'achat en date a été déposée le 20 décembre 2007 et la MSI est intervenue le 16 décembre 2008 ;

- [Localité 11] (15) : la demande de contrat d'achat a été déposée le 8 janvier 2008 et la MSI est intervenue le 16 décembre 2008 ;

Considérant que les six contrats relatifs aux installations exploitées par IBRF ont été signés selon les conditions d'achat E08 :

- le 31 mars 2009, pour les installations d'[Localité 8], d'[Localité 7] et [Localité 2] [Localité 3] I-[Localité 4] ;

- le 2 avril 2009, pour l'installation de [Localité 6] ;

- le 9 avril 2009, pour l'installation du [Localité 1] au [Localité 12] ;

- le 20 avril 2009, pour l'installation du [Localité 5] ;

Sur la date de formation des contrats d'achat d'électricité

Considérant que les intimées soutiennent que les contrats d'achat d'électricité ont été formés à la date de leurs demandes d'achat en application de l'article 1583 du code civil, soit entre mars 2007 à janvier 2008, et que ces contrats sont soumis au prix d'achat fixé par le tarif E06 ; que la société EDF prétend que les contrats n'ont pas été formés à la date de dépôt des demandes de contrat, mais à celle de leur signature, postérieure à l'annulation par le Conseil d'Etat du tarif E06 qui ne pouvait dès lors trouver à s'appliquer ;

Considérant que la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité met à la charge d'EDF une obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant des énergies renouvelables, l'article 10 de ce texte disposant qu'EDF, débiteur de l'obligation d'achat, est « tenu de conclure » le contrat d'achat avec le producteur pour son installation lorsque le producteur lui en fait la « demande écrite » ; qu'il prévoit que les conditions d'achat de l'électricité produite sont définies par voie réglementaire ; que le décret n° 2001-410 du 10 mai 2001 relatif aux conditions d'achat de l'électricité produite par des producteurs bénéficiant de l'obligation d'achat précise :

- en son article 5, que « les relations entre le producteur et l'acheteur font l'objet d'un contrat d'électricité établi conformément au présent décret et à l'arrêté correspondant à la filière concernée, pris en application de l'article 8 du présent décret. La prise d'effet du contrat d'achat est subordonnée au raccordement de l'installation au réseau » ;

- en son article 8, que « des arrêtés des ministres chargés de l'économie et de l'énergie (...) fixent les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations bénéficiant de l'obligation d'achat prévue par l'article 10 de la loi du 10 février 2000 susvisée. Ces conditions d'achat précisent notamment : 1° En tant que de besoin, les conditions relatives à la fourniture de l'électricité par le Producteur ; 2° Les tarifs d'achat de l'électricité ; 3° La durée du contrat » ;

Que les conditions d'achat de l'électricité produite à partir d'installations éoliennes ont fait l'objet d'arrêtés ministériels pris successivement les :

- 8 juin 2001, arrêté fixant les conditions d'achat dites « E01 » ;

- 10 juillet 2006, arrêté fixant les conditions d'achat dites « E06 » ;

- 17 novembre 2008, arrêté fixant les conditions d'achat dites « E08 » ;

- 13 décembre 2008, arrêté complété le 23 décembre 2008 publié le 28 décembre 2008, rectifié le 30 décembre 2008 et réputé entré en vigueur le 29 décembre 2008 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1583 du code civil, invoqué par les étés EGM WIND et PERFECT WIND, la vente 'est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé' ;

Mais considérant que l'article 10 de la loi du 10 février 2000 prévoit que les conditions d'achat de l'électricté produite par les producteurs autonomes sont définies par voie réglementaire ; que le pouvoir réglementaire était, dans ce cadre, habilité à définir, par le décret du 10 mai 2001 et par les arrêtés ministériels précités, les modalités de conclusion des contrats d'achat; que l'ensemble de ces dispositions constituent des règles spécifiques pour l'organisation du marché réglementé de l'électricité ; qu'elles prévalent sur le régime supplétif de l'article 1583 du code civil, qui n'est pas d'ordre public ;qu'il s'en déduit que les intimées ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'article 1583 ;

Considérant en premier lieu que, si la loi du 10 février 2000 prévoit une obligation de principe de rachat de l'électricité, elle n'institue nullement une présomption de consentement de EDF à l'offre présentée par le producteur ;

Qu'en second lieu, la seule publication, par voie règlementaire, du tarif applicable ne saurait valoir accord des parties sur le prix de l'énergie, ce prix étant soumis à un calcul d'actualisation conformément aux articles VII des conditions générales « E06-V00 » et VIII des conditions générales « E08-V01 », et ne pouvant donc résulter de la seule demande de contrat ;

Qu'en troisième lieu, il résulte des textes régissant le contrat d'achat que la formation de ce contrat demeure subordonnée à une procédure d'instruction complexe, aux termes de laquelle EDF doit :

- s'assurer que la demande ne porte pas atteinte au « bon fonctionnement des réseaux », ainsi que le prévoit l'article 10 de la loi du 10 février 2000 ;

- vérifier, en application du préambule et de l'article II des conditions générales du contrat d'achat E06 (pièce n° 7 communiquée par EDF), que les sociétés productrices sont titulaires des autorisations ou documents requis et qu'elles ont effectué les démarches nécessaires portant sur :

l'obtention d'une autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité délivrée par le ministre chargé de l'énergie, conformément au décret n° 2000-877 du 7 septembre 2000 relatif à l'autorisation d'exploiter les installations de production d'électricité ;

l'obtention d'un certificat ouvrant droit à l'obligation d'achat d'électricité, délivré par le préfet compétent, prévu par l'article 1er du décret du 10 mai 2001 précité ;

la signature d'un accord de rattachement au périmètre d'équilibre d'EDF, dans le cadre du dispositif de responsable d'équilibre mis en place par le gestionnaire du réseau public de transport en application de l'article 15-IV de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;

la remise d'une attestation sur l'honneur par le producteur certifiant que les organes fondamentaux de l'installation (pales, multiplicateur, générateur électrique') sont neufs ;

le raccordement de l'installation au réseau public de distribution ou de transport par le gestionnaire de réseau (ERDF), conformément à l'article 10, alinéa 1er, de la loi du 10 février 2000, raccordement dont la possibilité et les conditions techniques et financières ne sont nullement assurées lors de la présentation de la demande de contrat d'achat et dont les conditions ne sont décrites que dans la convention de raccordement, ainsi que le prévoient les articles II des conditions générales « E06-V00 » et VIII des conditions générales « E08-V01 » - convention nécessairement signée après le dépôt de la demande de contrat d'achat ;

- constater la MSI, qui marque la date de conclusion du contrat aux termes des arrêtés fixant les conditions d'achat E01, E06 et E08 - ainsi que cela résulte de leur article 4 qui précise que 'le contrat d'achat est conclu pour une durée de quinze ans à compter de la mise en service industrielle de l'installation' (article 4 des arrêtés fixant les conditions d'achat E01, E06 et E08) - ce dont il se déduit que la convention d'achat d'électricité ne peut, en tout état de cause, être formée par la seule demande de contrat ;

Que les étapes postérieures au dépôt de la demande (autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité, état de l'équipement, raccordement au réseau, mise en service de l'installation) ne sont pas des conditions suspensives dès lors qu'il s'agit des modalités techniques de l'achat, arrêtées dans le cadre de la procédure d'instruction, et qu'elles portent donc sur la substance même de l'objet du contrat ;

Considérant qu'aucun contrat ne peut être formé avant le terme de l'instruction du dossier, dont rien ne permet de préjuger de l'issue ; que EDF est donc fondée à soutenir que la demande de contrat ne vaut pas contrat ; que, sans qu'il y ait lieu d'examiner le moyen surabondant soulevé par EDF tiré de l'application de l'article 88 III-3° de la loi Grenelle II du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement dite loi Grenelle II, modifiant l'article 10 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 (qui a inséré l'alinéa suivant : 'Les contrats régis par le présent article sont des contrats administratifs qui ne sont conclus et qui n'engagent les parties qu'à compter de leur signature. Le présent alinéa a un caractère interprétatif'), la Cour dira que les contrats d'achat d'électricité relatifs aux sites d'[Localité 8], d'[Localité 7], de [Localité 2] [Localité 3] I-[Localité 4],de [Localité 6], du [Localité 13] et du [Localité 5] ont été formés à la date de leur signature ;

Sur les manquements reprochés à EDF

Considérant qu'aucun contrat n'ayant été formé aux dates des demandes des contrats d'achat, les intimées ne sauraient reprocher à EDF de s'être abstenue de considérer comme conclus, d'exécuter et de signer les contrats d'achat E06 demandés par IBRF; que, de même, en l'absence de formation de contrat avant l'annulation, par arrêt du Conseil d'Etat du 6 août 2008, de l'arrêté tarifaire E06 du 10 juillet 2006, elles ne sont fondées ni à invoquer un droit acquis de IBRF au contrat d'achat E06 - les conditions tarifaires fixées par cet arrêté n'ayant pu être contractualisées - ni à faire grief à EDF d'avoir tiré les conséquences de cette annulation et d'avoir proposé à IBRF de conclure des contrats d'achat selon les tarifs E01 redevenus applicables par suite de l'annulation des conditions d'achat E06 ; que le reproche fait à EDF d'avoir retardé la signature des contrats d'achat sollicités par IBRF pour profiter de l'annulation des tarifs E06 à venir n'est pas davantage fondé, aucun retard abusif de EDF dans le traitement des demandes de contrats - procédure longue et complexe - n'étant démontré et les sociétés productrices ayant en revanche, à l'évidence, une part de responsabilité dans la durée de l'instruction préalable des dossiers, en particulier, dans le délai de mise en service industrielle intervenue, pour les installations de [Localité 9] ' [Localité 11], soit postérieurement à l'arrêt du Conseil d'Etat du 6 août 2008 ; qu'aucun manquement n'est en conséquence établi à l'encontre de EDF ; que la Cour déboutera EGM WIND et PERFECT WIND de leurs demandes et infirmera le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Considérant que l'équité commande de condamner in solidum EGM WIND et PERFECT WIND à payer à EDF la somme de 50.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement,

INFIRME le jugement entrepris,

STATUANT A NOUVEAU,

DIT que les contrats d'achat d'électricité relatifs aux sites d'[Localité 8], d'[Localité 7], de [Localité 2] [Localité 3] I-[Localité 4], de [Localité 6], du [Localité 13] et du [Localité 5] ont été formés à la date de leur signature,

DÉBOUTE la SAS EGM WIND et la SAS PERFECT WIND de leurs demandes,

CONDAMNE in solidum la SAS WIND et la SAS PERFECT WIND à payer à la SA EDF' ELECTRICITE DE FRANCE la somme de 50.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum la SAS EGM WIND et la SAS PERFECT WIND aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 12/21260
Date de la décision : 13/05/2016

Références :

Cour d'appel de Paris J2, arrêt n°12/21260 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-13;12.21260 ?
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