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10/05/2016 | FRANCE | N°15/04523

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 10 mai 2016, 15/04523


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 10 Mai 2016



(n° , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/04523 et 15/04529



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mars 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY RG n° 13/00574





APPELANTE

SARL GROUPE GRATUIT PROS

[Adresse 1]

Bat. M/36

[Adresse 1]

N° SIRET : 483 806 717 00029

représentée par Me Aurélie KHAYAT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0714





INTIME

Monsieur [A] [Z]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 1]

représenté...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 10 Mai 2016

(n° , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/04523 et 15/04529

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mars 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY RG n° 13/00574

APPELANTE

SARL GROUPE GRATUIT PROS

[Adresse 1]

Bat. M/36

[Adresse 1]

N° SIRET : 483 806 717 00029

représentée par Me Aurélie KHAYAT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0714

INTIME

Monsieur [A] [Z]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 1]

représenté par Me Jean BARET, avocat au barreau de PARIS, toque : P0458

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mars 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Laurence SINQUIN, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président

Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mademoiselle Marjolaine MAUBERT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, président et par Madame Marjolaine MAUBERT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [Z] , engagé par la SARL GROUPE GRATUIT PROS, à compter du 5 décembre 2007, en qualité de directeur de publicité, au salaire mensuel brut de 16830 euros a été licencié par un courrier du 10 janvier 2013. La lettre de rupture était rédigée dans les termes suivants :

'Par courrier recommandé en date du 28 novembre 2012, nous vous avons convoqué à un entretien préalable en vue d'une éventuelle mesure de licenciement.

Lors de cet entretien qui s'est tenu le 10 décembre 2012 au cours duquel vous n'étiez pas assisté, nous vous avons exposé les motifs justifiant l'engagement de cette procédure à votre égard puis avons recueilli vos observations.

Postérieurement à cet entretien, de nouveaux faits sont intervenus qui nous ont conduits à vous mettre à pied à titre conservatoire et à vous convoquer à un nouvel entretien préalable.

Ce second entretien, auquel vous n'étiez pas non plus assisté, s'est tenu le 10 janvier dernier ; les réponses que vous nous avez apportées à cette occasion ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.

Nous sommes donc au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour les motifs suivants.

Vous avez été embauché par la société GROUPE GRATUIT PROS à compter du 5 juin 2007 et y occupez actuellement le poste de Directeur de publicité.

A ce titre, vous êtes chargé du développement des ventes d'espaces publicitaires auprès d'agences et d'annonceurs, de la prospection et de la négociation des contrats et encadrez les commerciaux des Business Unit dont vous avez la responsabilité (Auto. VUL/PL. Resto. Distri et Hors captif).

A ce titre également, vous êtes responsable de la bonne réalisation des budgets définis en début d'année, de la production du chiffre d'affaires global, du suivi des dépenses de production et donc des coûts des salariés de vos équipes.

Il s'agit là d'un poste clé pour l'entreprise puisque comme vous le savez,100 % des revenus de notre société proviennent de la vente d'espaces, publicitaires dans nos mensuels.

Or, force est de constater que, depuis plusieurs mois, votre activité commerciale est en forte baisse et très en-deçà de celle de vos collègues.

Vos résultats ont en effet plongé sur chacune des activités dont vous êtes en charge.

Pour exemple: sur l'activité Resto: après un chiffre d'affaires de 900000 euros en 2011, l'année 20l2 a été catastrophique. Le chiffre d'affaires facturé en 2012 devait avoisiner près de 625 000 euros (dont 51 000 euros réalisés sur régie pour la société PLS...), ce qui représente une baisse historique de 27%.

Sur l'activité Distri : nous rencontrons le même problème, avec des chiffres plus édifiants encore. Vos résultats avoisineront les 210 000 euros seulement. Il s'agit 1à encore d'un résultat très inférieur aux objectifs fixés par la société (500 000 euros).

La perte générée sur ce secteur devrait être de 350 000 euros, en 2012.

Sur I'activité Auto : nous enregistrons en 20l2, une baisse du chiffre d'affaires de15%, et un réalisé inférieur aux objectifs de 10% alors que ce secteur est généralement prospère.

Votre chiffre d'affaires personnel a baissé de 48%, passant de 706 000 euros à 370 000 euros.

Vos mauvais résultats ne sauraient simplement s'expliquer par une mauvaise conjoncture économique, puisqu'un examen comparatif suffit à démontrer qu'ils sont notablement inférieurs à ceux de vos collègues et collaborateurs.

Lorsque [U] [J] réalise 100% de ses engagements prévisionnels, [H] [R] est à 90% de ses engagements et [S] [C] à 65%, vous-même ne réalisez que l2% de votre engagement sur le dernier quadrimestre.

Comparé à ceux de vos collègues, votre chiffre d'affaires personnel (dont nous vous rappelons qu'il est passé de plus d'un million d'euros en 2011 à 650 000 euros en 2012...) est le plus faible sur l'ensemble de vos pôles d'activité, alors même que vous bénéficiez des plus gros comptes et consacrez 80% de votre activité à la vente d'espaces publicitaires.

Sur I'activité Auto par exemple, vous êtes en 20l2 à moins de 50% de votre réalisé 2011, quand [S] [C] a multiplié par deux son chiffre d'affaires personnel et quand [U] [J] a augmenté le sien de l5%.

Vous n'avez entré qu'un seul nouveau client en 2012, contre une vingtaine en moyenne pour les autres commerciaux.

La faiblesse de votre activité résulte d'une prospection commerciale notoirement insuffisante et d'un manque crucial de présence sur le terrain.

Il nous semblait pourtant avoir, lors de nos réunions, fortement insisté sur la nécessité de prendre des rendez-vous, très peu de ventes se faisant par téléphone.

Or, vous n'avez effectué que très peu de déplacements en clientèle et n'avez quasiment jamais accompagné vos collaborateurs en rendez-vous.

Par ailleurs, aucune action ou presque n'a été mise en place ces derniers mois, qu'il s'agisse de mailings, d'offres spéciales, de partenariats, salons régionaux ou lobbying...

Enfin, la qualité de vos suivis relationnels s'est détériorée.

Certains de vos collaborateurs indiquent aujourd'hui que votre management est devenu inexistant.

Vous n'êtes pas sans savoir que l'ensemble de vos insuffisances ont eu, et ont encore aujourd'hui un impact très important sur la santé économique et financière de I'entreprise. Nous vous avons régulièrement fait part de nos inquiétudes, notamment lors des réunions direction/budget et commerce du 12 mars dernier, puis plus récemment au cours d'échanges par mail et de deux entretiens, les 22 octobre et 19 novembre derniers.

A l'occasion de ces échanges, vous avez prétendu que vos mauvais résultats étaient en partie liés à une surcharge de travail et à des difficultés de gestion de vos équipes.

Si la gestion de vos équipes vous appartient, y compris en termes de recrutement, nous avons toutefois pris note de la surcharge de travail alléguée et avons tenté d'y remédier dans Ie cadre d'une réorganisation de vos priorités.

Vous conserviez naturellement vos fonctions mais deviez désormais orienter votre activité de développement commercial sur le seul pôle Distri.

Tout en vous soulageant d'une partie de 1a surcharge de travail dont vous sembliez vous plaindre, cette stratégie présentait l'avantage de mettre votre expérience professionnelle au service du pôle le plus sensible de l'entreprise pour en assurer le succès en 2013.

Or, vous avez ouvertement refusé cette directive pour des motifs totalement infondés et vous nous avez attribué des intentions qui n'ont pourtant jamais été les nôtres.

Nous avons eu beau entreprendre de vous accompagner, de vous assister pour remédier aux difficultés que vous rencontriez et de vous rassurer sur votre situation au sein de la société, votre absence de volonté de mettre en 'uvre les moyens mis à votre disposition par la société, pour que vous ayez à c'ur d'atteindre les résultats attendus, nous a conduit à nous interroger sur vos réelles motivations.

Depuis la fin du mois de novembre et alors que nous traversons les 4 mois les plus importants de l'année, votre attitude nous laisse perplexe.

Vous avez en effet refusé de participer aux réunions des 27, 28 et 29 novembre dernier.

Vous ne répondez plus à nos demandes, ne fournissez plus aucun compte-rendu hebdomadaire sur le suivi des chiffres d'affaires et entretenez une opacité totale sur votre activité.

Enfin, devant votre manque d'engagement, nous nous sommes penchés sur vos activités et avons réalisé que vous n'aviez eu de cesse de nous annoncer des chiffres que vous êtes incapable de tenir.

Ainsi, le 23 octobre 2012, vous nous annonciez encore un chiffre d'affaires personnel de 900 000 euros, alors que celui-ci n'a pas dépassé les 650 000 euros en fin d'année.

Non seulement vos prévisions de chiffres sont fausses, et de loin, mais elles constituent un mauvais outil de gestion pour la direction.

Nous ne pouvons qu'avoir le sentiment que vous ne souhaitez plus désormais fournir le moindre effort pour cette entreprise.

C'est la raison pour laquelle nous vous avons convoqué en entretien préalable le 28 novembre 2012 et vous avons reçu le 10 décembre suivant.

Depuis lors, de nouveaux faits ont été portés à notre connaissance, faits extrêmement graves qui nous, ont conduit à vous mettre à pied à titre conservatoire et à vous convoquer à nouveau en entretien préalable.

En effet, alors que des discussions avaient été engagées avec Monsieur [I] [A], Gérant, et vous-même concernant les conditions du rachat des parts sociales que vous détenez au sein de la société GROUPE GRATIUT PROS, vous avez manifesté la volonté de valoriser le montant de vos parts à hauteur de 22700 euros la part mais également d'obtenir une indemnité transactionnelle de départ de plus de 200 000 euros.

Monsieur [A] a refusé vos prétentions estimant que celles-ci étaient sans fondement et s'apparentaient à de l'extorsion de fonds au préjudice de la société.

Le 12 décembre 2012, M. [A] a été informé par son Avocat, Maître [B], de la réception d'un projet de plainte pénale visant les infractions d'abus de biens sociaux, blanchiment, abus de confiance, rédigé par votre Avocat Maître [K] [T] en votre nom ainsi qu'aux noms de Messieurs [W] et [M].

M. [A] a, dans le même temps, été informé de ce que votre Avocat avait expressément indiqué par écrit que si aucun accord ne devait intervenir dans les prochains jours concernant le rachat de vos parts et l'indemnisation de votre licenciement, cette plainte pénale serait déposée au Parquet de Bobigny.

Interrogé, M. [M] a confirmé l'ensemble de vos agissements et nous a communiqué une copie du projet de plainte rédigée en votre nom.

Il apparaît donc très clairement que vous avez menacé M. [A] de dénoncer des infractions pénales, et ce afin d'obtenir le règlement de sommes indues d'un montant exorbitant au préjudice de la société GROUPE GRATUIT PROS.

Vos agissements s'apparentent à une tentative de chantage et nous ont conduit à déposer plainte à votre encontre auprès du Procureur de Bobigny.

Par ailleurs, nous avons été extrêmement surpris de constater que, parmi les pièces annexées à votre projet de plainte, figuraient des factures de fournisseurs de la société, mais également des factures personnelles de M. [A] ainsi que des mails concernant des sociétés URSA et TARMAC qui sont vraisemblablement des échanges de correspondance personnelle de M. [A].

Ces documents étaient rangés dans des armoires de la société auxquelles vous n'aviez en principe, pas accès.

Nous avons donc également déposé plainte pour vol et recel de vol, afin de faire la lumière sur les conditions dans lesquelles vous vous êtes trouvé en possession des documents annexés à votre projet de plainte.

En tout état de cause, votre conduite inacceptable témoigne de votre volonté de nuire gravement à l'entreprise, en lui soutirant des sommes importantes qui ne vous sont pas dues. »

Monsieur [Z] a contesté son licenciement et a saisi le conseil de prud'hommes.

Par jugement du 5 mars 2015, le conseil de prud'hommes de Bobigny a reconnu que le licenciement avait bien une cause réelle et sérieuse, a fixé le salaire moyen à 13 922,64 euros brut et a condamné la société à lui verser :

- 6 843,10 euros de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire,

- 684,31 euros de congés payés afférents,

- 41 767,62 euros d'indemnité compensatrice de préavis,

- 4 176,76 euros d'indemnité compensatrice de congés sur préavis,

- 14 734,69 euros d'indemnité légale de licenciement,

- 9 467,33 euros d'indemnité compensatrice de congés payés,

- 2 904 euros de remboursement de notes de frais,

- 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Et a débouté Monsieur [Z] du surplus.

Monsieur [Z] et la SARL GROUPE GRATUIT PROS ont relevé appel de cette décision.

Par conclusions visées au greffe le 7 mars 2016, au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [Z] demande à la cour :

- la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré le licenciement dépourvu d'une faute lourde et qu'il a condamné la société à payer les indemnités compensatrice de préavis, de licenciement, le rappel de salaire sur la mise à pied et les congés payés afférents au préavis et à la mise à pied, les congés payés restant dû et les frais de déplacement impayés et 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- la réformation pour le surplus, le débouté des demandes adverses, la fixation du salaire mensuel brut moyen à la somme de 18083 euros et la condamnation de la société à lui payer :

- 60000 euros de rappel de salaire pour la totalité de l'année 2012 et 6000 euros de congés payés afférents.

-150000 euros à titre de retraite complémentaire,

- 325494 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 6572,90 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 657 euros de congés payés afférents,

- 5879,31 euros d'indemnité légale de licenciement,

- 6481,38 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 648 euros de congés payés afférents,

- 50000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié au harcèlement moral,

- 7835 euros de dommages-intérêts pour non remise des documents sociaux,

- 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Outre la condamnation de la société à rembourser Pôle Emploi, à payer les intérêts légaux, leur capitalisation et les entiers dépens.

Par conclusions visées au greffe le 7 mars 2016, au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne les moyens, la SARL GROUPE GRATUIT PROS sollicite, in limine litis, un sursis à statuer dans l'attente de l'issue des plaintes déposées par la société GROUPE GRATUIT PROS et Monsieur [I] [A] à l'encontre de Monsieur [Z].

Subsidiairement, elle demande le débouté de l'intégralité des demandes adverses, la condamnation de Monsieur [Z] à lui verser :

- 54000 euros à titre de trop perçu d'avances sur commissions ;

- 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Et à titre infiniment subsidiaire, de fixer la moyenne de salaire mensuel de Monsieur [Z] à la somme de 8000 euros brut et de limiter le montant des demandes indemnitaires.

Pour plus ample exposé des faits de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience.

MOTIFS

Sur la jonction des instances ;

La cour est saisie de deux recours formés contre le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY opposant Monsieur [A] [Z] et la SARL GROUPE GRATUIT PROS relatifs à un même contrat de travail.

Il y a lieu de joindre ces deux instances, en raison de l'existence entre les litiges d'un lien tel qu'il est de l'intérêt d'une bonne justice de les faire juger ensemble, et ce par application de l'article 367 du code de procédure civile.

Sur la demande de sursis à statuer

La société fait valoir que dans le cadre de son licenciement, Monsieur [Z], par le biais de son avocat, a tenté de négocier l'indemnisation de son départ et le rachat de ses parts sociales, en menaçant de déposer plainte contre Monsieur [A] pour abus de biens sociaux, blanchiment et abus de confiance. Elle lui reproche, en outre, d'avoir volé ou recelé des documents de la société. Elle justifie des deux plaintes déposées pour tentative de chantage, vol et recel de vol et indique qu'une instruction est ouverte au tribunal de Bobigny.

Faisant valoir que ses moyens de preuve sont constitués par des échanges de communication entre avocats soumis au secret professionnel, elle déclare que seule la procédure pénale permettra de produire les éléments justifiant des griefs. Elle estime que les éléments soumis à la cour suffisent à justifier le sursis à statuer.

Monsieur [Z] s'oppose à la demande de sursis, précise que des demandes identiques ont été formulées précédemment dans une affaire identique, concernant un autre associé, Monsieur [W] et que la demande a été rejetée par la Cour. Il considère que le sursis créerait une attente insupportable de l'indemnisation à laquelle il peut prétendre ; qu'en tout état de cause, l'affaire soumise à la Cour doit être analysée à l'aune du droit du travail et que les prétendues infractions ne sont pas susceptibles d'influencer l'analyse des circonstances du licenciement et des autres demandes formulées par le salarié.

Il convient de constater que s'il existe effectivement un lien entre les procédures pénales engagées et l'affaire pendante devant la cour, il n'est pas établi que ce lien soit suffisamment étroit pour empêcher la cour de statuer en droit. Outre le fait que nombreuses demandes n'ont aucun rapport avec les faits objets de la procédure pénale et sont pour certaines, des demandes salariales à caractère alimentaire, l'analyse des motifs du licenciement n'impose pas la connaissance des suites données aux procédures pénales.

Enfin, il n'est pas établi que la société puisse être autorisée, après le jugement pénal, à transmettre les documents confidentiels couverts par le secret professionnel entre avocats, ni que ces pièces soient indispensables au soutien de ses intérêts.

La demande de sursis sera donc rejetée.

Sur la rupture de contrat de travail

Sur la rupture de fait

Monsieur [Z] invoque l'absence de rémunération au mois de décembre 2012 et une rémunération partielle pour les mois d'octobre et novembre 2012, pour solliciter la rupture de fait de son contrat de travail aux torts de l'employeur. Il n'entend pas voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat mais une violation des obligations de l'employeur, d'une gravité telle qu'elle a rendue impossible la poursuite du contrat de travail.

La société considère que le contrat de travail a été rompu du fait du licenciement et que le salarié n'a transmis aucune manifestation antérieure de volonté, visant à rompre son contrat de travail et par voie de conséquence, la date de rupture doit être fixée au jour du licenciement.

Il convient de relever que si la rupture de fait du contrat de travail peut être invoquée dans un certain nombre de circonstances, notamment en cas de disparition de la société, la violation par une des parties de ses obligations contractuelles n'a pas pour effet de rompre un contrat de travail mais peut simplement constituer le motif d'une demande de rupture.

A la suite de la violation des obligations par l'employeur, le salarié doit manifester sa volonté de rompre la relation de travail du fait des fautes de son employeur.

En l'espèce, Monsieur [Z] était déjà licencié lorsqu'il a manifesté la volonté de rompre son contrat de travail en raison des fautes de l'employeur. La situation s'apparente à celle d'une demande de résiliation postérieure au licenciement, et en conséquence, il convient d'en tirer la même conclusion: le contrat étant déjà rompu par le licenciement, la demande de rupture de fait est sans objet.

Sur la rupture du contrat travail

Monsieur [Z] conteste la réalité des faits relatifs à l'insuffisance professionnelle et estime qu'en réalité, le licenciement ne repose que sur le seul motif tiré de la tentative de chantage. Il considère que par le nouvel entretien préalable et le second motif de licenciement, l'employeur a entendu abandonner le grief tiré de l'insuffisance professionnelle et a retenu la seule faute lourde.

Sur ce point, il convient comme les premiers juges, de considérer que l'employeur est en droit de motiver son licenciement sur plusieurs griefs successifs, dès lors que les dispositions relatives à la procédure ont été respectées ; il suffit de rajouter que l'organisation d'un second entretien préalable et la faculté laissée au salarié de s'expliquer sur les griefs invoqués à l'appui du licenciement pour faute lourde, permettent de constater que la procédure a régulièrement été engagée par l'employeur.

Sur la faute lourde

La faute lourde est constituée lorsqu'elle est exceptionnellement grave et qu'elle est commise avec une intention de nuire à l'employeur.

La preuve des faits constitutifs de faute lourde incombe à l'employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, d'une gravité suffisante pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise et s'il procèdent d'une intention de nuire.

En cas de faute lourde constituée, le salarié doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime ainsi que de ses prétentions relatives aux indemnités de rupture (indemnité compensatrice de préavis et indemnité conventionnelle de licenciement) et à l'indemnité de congés payés.

La société reproche à Monsieur [Z] un vol de documents au sein de la société et un chantage effectué à l'encontre de Monsieur [A], visant à obtenir l'indemnisation et le rachat de ses parts sociales au prix demandé, sous condition en cas de refus, de déposer plainte à son encontre pour abus de biens sociaux, blanchiment et abus de confiance. Elle considère que les faits constituent une faute lourde qui justifie son licenciement.

Le salarié estime que la faute n'est pas établie et qu'il n'y a eu ni vol, ni chantage ; que l'employeur ne prouve pas qu'il y ait eu une tentative de chantage, ni entre avocats, ni personnellement par le salarié ; qu'il n'établit pas non plus la gravité, ni l'intention de nuire du salarié ; que l'existence d'un préjudice n'est pas non plus justifié.

De l'ensemble des éléments produits par les parties, il convient de retenir que le licenciement intervient dans un contexte de conflit entre associés. Outre des difficultés anciennes liées à la propriété des marques de la société, s'ajoutent des problèmes de vente de parts sociales, de valorisation de ce capital et enfin, des contestations sur les modalités de gestion financière de la société. Ces conflit ont conduit, notamment Monsieur [Z] et Monsieur [A], à saisir plusieurs instances judiciaires pénales et civiles pour régler leurs litiges.

Dans ce contexte et plus précisément dans le cadre des discussions relatives à son licenciement, l'intention de nuire reproché au salarié n'est pas établi. Les différentes attestations produites par l'employeur démontrent simplement que Monsieur [Z] a tenté auprès de certains autres associés, de chercher un soutien et à sauvegarder des intérêts financiers personnels qui lui paraissaient légitimes.

Ni les faits de vol, ni les faits de son chantage ne sont, en outre, prouvés.

Au vu de l'ensemble de ces motifs, la faute lourde n'est donc pas établie.

Sur l'insuffisance professionnelle

L'appréciation des aptitudes professionnelles du salarié et de son adaptation à l'emploi relève du pouvoir patronal. Pour constituer une cause légitime de rupture, l'insuffisance professionnelle ou de résultats doit être établie par des éléments objectifs, constatée sur une période suffisamment longue pour ne pas apparaître comme passagère ou purement conjoncturelle, être directement imputable au salarié et non la conséquence d'une conjoncture économique difficile ou du propre comportement de l'employeur.

Au soutien de sa demande de licenciement, la société invoque l'insuffisance professionnelle et de résultats de son salarié. Elle expose que pendant sa période d'arrêt maladie, elle a constaté à la suite du remplacement du salarié et d'un audit que les résultats annoncés par Monsieur [Z] ne correspondaient pas à la réalité. Par comparaison aux chiffres d'affaires réalisés lors des années précédentes et par ses autres collègues, l'employeur dit avoir constaté dans l'activité de son salarié, une diminution manifeste des résultats commerciaux, une insuffisance de prospection commerciale, une absence totale de travail sur les derniers mois générée par un refus de s'adapter à la nouvelle organisation mise en place dans le service.

Monsieur [Z] fait valoir que s'il y a eu une diminution de ses résultats, c'est en raison de ses arrêts maladie. Il estime que les mauvais résultats du groupe sont, en réalité, causés par les ponctions financières effectuées par Monsieur [A] et qu'en qualité d'associé, il avait tout intérêt à développer le chiffre d'affaires de la société. Il précise que les difficultés de l'entreprise résultent de la situation économique conjoncturelle, qui ne lui est pas personnellement imputable.

Il est constant que Monsieur [Z] avait la qualité d'associé et un des postes majeurs dans la société; qu'il ne disposait ni de contrat écrit, ni d'une évaluation annuelle fixant ses objectifs, ni même de documents prévisionnels précisant les résultats à atteindre pour l'année. Comme il l'indique lui-même, en qualité d'associé, il était intéressé aux résultats. Dès lors, en l'absence d'objectifs, la société ne peut fonder son licenciement que si l'insuffisance professionnelle est justifiée par des éléments précis et concrets de nature à perturber la bonne marche de l'entreprise ou le fonctionnement du service.

Après examen de l'ensemble des pièces produites par les parties, la Cour s'en réfère aux motifs des premiers juges pour considérer comme eux que les faits allégués à l'appui de l'insuffisance professionnelle sont matériellement établis par des éléments concrets suffisants.

Il suffira de rajouter à cet égard que le salarié n'a pas contesté les chiffres produits par l'employeur. Ces évaluations chiffrées résultent tout à la fois des données comptables sur l'activité de Monsieur [Z] et de l'analyse qui en est faite par Monsieur [A], notamment dans ces mails des 20 et 23 octobre, 5 et 21 novembre 2012. Ils révèlent bien les difficultés énoncées dans la lettre de licenciement.

L'argument tiré de ce que l'arrêt maladie de Monsieur [Z] l'aurait empêché de réaliser des résultats satisfaisants, n'apparaît pas sérieux, l'absence du salarié n'ayant duré qu'un peu plus d'un mois sur l'ensemble de l'année 2012.

Le moyen tiré de son remplacement pendant son arrêt maladie n'est pas non plus opérant, dès lors que son remplaçant n'est pas à l'origine des déficits et baisses du chiffre d'affaires relevées.

En outre, même s'il apparaît établi qu'un certain nombre de décisions et notamment l'augmentation du salaire du gérant, pouvaient être contestables dans le contexte économique vécu par la société, il n'est pas démontré que cette décision a eu des effets notables sur la gestion des services dont Monsieur [Z] avait la charge et qu'elle soit l'origine de ses difficultés. Les résultats réalisés par les collègues de Monsieur [Z] attestent également de ce que la conjoncture économique ou la situation économique propre à la société ne sont pas à l'origine des défaillances du salarié.

Il convient enfin, d'ajouter que de façon incontestable, du fait de l'importance des difficultés financières dont le salarié est responsable et de l'importance des services dont il avait la charge, les insuffisances constatées ont nécessairement été préjudiciables à société.

Au vu de l'ensemble de ces motifs et dans les circonstances de l'espèce, il convient de constater que cette insuffisance professionnelle n'a pas le caractère d'une faute lourde, ni même d'une faute grave mais constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement. Il conviendra en conséquence, de confirmer la position des premiers juges sur ce point.

La demande indemnitaire pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse devra donc être rejetée.

Sur la part variable de la rémunération du salarié

Monsieur [Z] sollicite le versement sur la période d'octobre et novembre 2012 de la part variable de sa rémunération évaluée à 6000 euros par mois, outre les congés payés afférents. Il estime que ce variable n'était pas affecté à des objectifs et la somme de 6000 euros versées mensuellement n'avait pas la nature d'avance sur commissions. Il soutient que sa rémunération était déterminée par un montant global de 202'000 euros comprenant la part fixe et la part variable outre les frais. Pour atteindre ce plafond annuelle de rémunération, il demande le versement d'une soulte de 37'400 euros pour 2012.

S'agissant du mois de décembre 2012, il fait valoir qu'il n'a pas été rémunéré et sollicite la part fixe et le variable pour le mois (15'400 euros).

La société expose que contrairement aux prétentions adverses, la part variable de la rémunération de Monsieur [Z] était bien adossée sur les résultats des BUM et notamment, un pourcentage du résultat net réalisé sur le BUM Auto et Resto, une prime en cas de limitation des pertes sur le BUM Distri et une prime en cas d'atteinte d'un certain chiffre d'affaires sur le BUM Web.

Elle précise que le chiffre de 202000 euros n'était pas garantie, et que les avances sur commissions faisaient l'objet d'un réajustement en fin d'année. Elle estime que les résultats de 2011 n'ayant pas été atteint par le salarié sur l'ensemble des BUM Auto, Resto, Distri, Web, la part variable n'a pas été versée au mois d'octobre et novembre 2012.

S'agissant de décembre 2012, la société reconnaît ne pas avoir versé la rémunération de décembre, en compensation des sommes trop perçues par le salarié au titre de sa rémunération variable. À titre reconventionnelle, elle sollicite le remboursement de 54'000 euros représentant les avances sur commissions versées de janvier à septembre 2012.

Dans le cadre d'une demande en paiement, il appartient au demandeur d'établir la preuve de son droit sur une créance et au défendeur de faire la preuve qu'il s'est acquitté du règlement des sommes dues.

En l'espèce, il n'est contesté par aucune des parties, qu'il existait une part variable dans la rémunération de Monsieur [Z]. Le message du 14 février 2012, adressé au salarié par M. [A] fixe les modalités de détermination de ce variable et Monsieur [Z] ne peut sérieusement soutenir qu'il ignorait que ce variable reposait sur les résultats réalisés sur les BUM..

Le message indique : ' ... les règles seront donc sur les résultats des BUM.

BUM Auto et Resto consolidées 10% du résultat. Soit au budget tel qu'il est défini: 550000 euros de résultat, 55000 euros de variable brut.

BUM Distri au budget, il y a perte de 234000 euros.

A une perte de200000, tu toucheras 10000 euros bruts, à 150 000, 20000 euros brut, à 100 000, 35000 euros brut. BUM Web, où même si tu ne la pilotes pas tu agis sur le CA. A 150000 euros de CA, 10000 euros bruts.'

Par un mail transmis en octobre 2012, M [A] transmet des chiffres sur les résultats prévisibles en 2012 qui ne sont pas contredit par le salarié et qui démontrent clairement que sur le BUM resto, web et distri les montants fixés en objectifs ne sont pas réalisés. Aucune rémunération ne peut être revendiquée à ce titre.

Par contre, il ressort de ce même document que sur le BUM Auto, la rentabilité a atteint 550000 euros. Donc la part variable de 55 000 euros est due.

Comme le soutient le salarié, la mention portée sur les bulletins de salaire 'commissions sur CA' peut laisser à penser qu'il s'agit de commission non réajustables en fin d'année. Or, il y a lieu de constater qu'en 2011, comme en 2008, des réajustement ont malgré tout été opérés sur le salaire de Monsieur [Z].

En outre, le salarié ne justifie pas que la somme de 202 000 euros, constitue un plafond minimum de sa rémunération annuelle. Au vu des bulletins de salaires de 2011, ce montant n'a d'ailleurs pas été atteint (total annuel 179000 euros frais inclus).

Par conséquent, les commissions versées doivent s'interpréter comme des avances sur commissions. Les avances déjà obtenues pour l'année, soit un total de 54000 euros devront donc se compenser avec le variable du au titre de 2012, soit un solde de 1000 euros au profit du salarié.

De la même manière que le variable, il n'est pas contestable que Monsieur [Z] disposait d'un fixe de 8000 euros et pour le mois de décembre 2012, ce fixe doit être versé.

Il ressort de ces motifs que la société devra être condamnée à payer le salaire fixe de décembre à hauteur de 8000 euros, outre un réajustement du variable de 1000 euros et les congés payés afférents. Il convient par conséquent de débouter la société de sa demande reconventionnelle de remboursement de trop perçu.

Sur la demande de frais

Monsieur [Z] sollicite le remboursement des frais générés par son activité des mois de juillet, septembre et octobre 2012, soit 2904 euros.

La société indique que le salarié ne transmet pas les justificatifs des dits frais, qui pour certains lui ont été demandé par courrier du 12 décembre 2012 (frais de réception) et elle conteste devoir remboursement des frais d'essence, déjà payés forfaitairement sur l'indemnité 'avantage automobile'.

Il convient de retenir, comme les premiers juges, que l'employeur n'établit pas que le salarié devait justifier de toutes ses dépenses et ce d'autant qu'au vu du message du 6 février 2012, il avait même été envisagé un remboursement forfaitaire de ces frais.

Par ailleurs, au vu des différentes notes de frais produites par le salarié, il apparaît que la nature et les montants sollicités par le salarié ne présentent pas un caractère inhabituel ou exorbitant par rapport aux frais déjà remboursés.

Enfin, l'employeur ne rapporte aucun élément sur le contenu de l'indemnité 'avantage automobile'qui puisse permettre d'exclure le paiement des frais d'essence, d'autant que ces frais étaient remboursés dans les notes précédentes.

Le montant des frais sollicités sera donc du par la société.

Sur la demande de retraite complémentaire

Monsieur [Z] fait valoir que Monsieur [A] et Monsieur [W] disposaient du bénéfice d'une retraite surcomplémentaire et sur le principe de l'égalité de traitement et au vu des cotisations versées, demande un rappel sur six ans d'un montant de 150000 euros.

L'employeur précise que seul Monsieur [A] bénéficie d'un contrat fondé sur l'article 82 et 83 du code général des impôts, celui de Monsieur [W] ayant été résilié en 2011 et il demande le rejet de la demande. Subsidiairement, il soutient que le calcul indemnitaire du salarié n'est pas fondé, le titulaire du contrat ne disposant pas des sommes versées à titre de cotisations et en tout état de cause, il soulève la prescription quinquennale.

Il y a lieu de constater que Monsieur [Z] justifie que Monsieur [W] disposait bien des avantages d'une retraite complémentaire dont les cotisations étaient payées par l'entreprise. L'employeur n'établit pas la résiliation de la dite convention. Eu égard au fait que M. [W] en qualité de directeur, associé minoritaire, disposait d'un statut comparable à la catégorie à laquelle appartenait le salarié, l'employeur se devait, pour respecter l'égalité de traitement entre ses salariés, de souscrire au bénéfice de Monsieur [Z] le même type d'avantage social.

Le préjudice du salarié n'est pas constitué par les cotisations impayées mais la perte de chance de bénéficier d'une éventuelle déduction fiscale ou d'une majoration de sa retraite du fait que cette complémentaire n'a pas été souscrite pendant ces six années de présence dans la société. Le salarié ne transmet aucun élément permettant de chiffrer ce préjudice.

Néanmoins, en l'absence de respect de l'égalité de traitement, la faute de l'employeur crée nécessairement un préjudice au salarié qu'il convient de réparer à hauteur de 15000 euros.

Sur le harcèlement moral

Il appartient au salarié qui se prétend victime de harcèlement moral d'établir la matérialité de faits précis et concordants faisant présumer l'existence de ce harcèlement ; celui-ci se définit, selon l'article L 1152-1 du code du travail, par des actes répétés qui ont pour objet ou pour effet, indépendamment de l'intention de leur auteur, une dégradation des conditions de travail du salarié, susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Lorsque les faits sont établis, l'employeur doit démontrer qu'ils s'expliquent par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce Monsieur [Z] transmet un certain nombre de pièces visant à établir que la suppression de sa rémunération et la remise en question de ses notes de frais, les dénigrements avant son licenciement et le recrutement d'une nouvelle directrice commerciale, ont conduit à une dégradation de ses conditions de travail affectant son état de santé mentale.

L'employeur conteste les faits et communique nombreuses attestations qui contredisent l'existence d'un contexte de harcèlement au sein de l'entreprise.

Il ressort de l'ensemble des pièces transmises et des débats, que les difficultés rencontrées par Monsieur [Z] dans la période précédant son licenciement, révèlent l'existence d'un important conflit financier lié à son départ qui n'a rien à voir avec du harcèlement. Les problèmes de rémunérations, de réorganisation et les attestations versées se situent dans les deux mois précédant l'entretien préalable. Le contentieux particulièrement aigu qui oppose Monsieur [Z] et Monsieur [A] relève d'un désaccord entre associés et non de faits de harcèlement moral.

La demande sera rejetée.

Sur les demandes relatives à l'indemnité de licenciement, l'indemnité de préavis et de congés payés y afférents

Il convient en premier lieu de statuer sur le salaire moyen brut mensuel de Monsieur [Z]. Ce dernier retenant un salaire fixe de 202000 euros, outre une somme d'environ 15000 euros représentant ses avantages en nature, demandent que son salaire soit fixé à 18083 euros.

Au regard des motifs précédemment exposés sur la part variable et la part fixe de la rémunération du salarié, et des bulletins de salaire versés pour 2012, il convient de confirmer le salaire mensuel brut retenu par les premiers juges et de le fixer à hauteur de 13922,54 euros.

Dès lors, la Cour constate que les montants alloués par les premiers juges, au titre de l'indemnité de licenciement, le remboursement de salaire sur la période de mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, ainsi que l'indemnisation de la période de préavis et les congés payés afférents, doivent être intégralement confirmés.

Sur le défaut de remise des documents sociaux

Monsieur [Z] sollicite une indemnisation à hauteur de 7835 euros en réparation du préjudice occasionné par la remise tardive des documents sociaux entre eux le 23 janvier 2013 et le 6 février 2013.

Outre le fait que le salarié ne justifie pas du retard dans la remise des documents sociaux, ni du préjudice occasionné, il n'apparaît pas que le délai entre le licenciement et la remise des documents ait un caractère excessif.

PAR CES MOTIFS

Rejette la demande de sursis à statuer ;

Ordonne la jonction des instances inscrites au répertoire général du greffe sous les numéros 15/04523 et 15/04529 ;

Confirme le jugement entrepris ;

Et y ajoutant,

Condamne la SARL GROUPE GRATUITS PROS à payer à Monsieur [Z] les sommes suivantes :

' 8000 euros au titre de son salaire brut du mois de décembre 2012 ;

' 1000 euros au titre de la part variable de sa rémunération restant dûe pour 2012 ;

' 15'000 euros de dommages intérêts pour non-respect de l'égalité de traitement ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL GROUPE GRATUITS PROS à payer à Monsieur [Z] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- Dit que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt ;

- Autorise la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;

- Déboute les parties pour le surplus ;

- Condamne la SARL GROUPE GRATUITS PROS aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 15/04523
Date de la décision : 10/05/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°15/04523 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-10;15.04523 ?
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