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15/04/2016 | FRANCE | N°13/12764

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 11, 15 avril 2016, 13/12764


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 11



ARRÊT DU 15 AVRIL 2016



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12764



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juin 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2011025868





APPELANTES



Société COVIDIEN GROUP SARL société de droit luxembourgeois,

ayant son siège [Adresse 1]



[Adresse 1]

[Adresse 1]



Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRÊT DU 15 AVRIL 2016

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12764

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juin 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2011025868

APPELANTES

Société COVIDIEN GROUP SARL société de droit luxembourgeois,

ayant son siège [Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

Représentée par Me Bruno SCHRIMPF de l'ASSOCIATION POIRIER SCHRIMPF, avocat au barreau de PARIS, toque : R228

SAS COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE,

ayant son siège [Adresse 2]

[Adresse 2]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

Représentée par Me Bruno SCHRIMPF de l'ASSOCIATION POIRIER SCHRIMPF, avocat au barreau de PARIS, toque : R228

INTIMÉES

Société CALA CAPITAL SPRL société de droit Belge

ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090

Représentée par Me Caroline BOUVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0057

SAS ONTEX SANTE anciennement dénommée LILLE HEALTHCARE

ayant son siège social [Adresse 4]

[Adresse 4]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090

Représentée par Me Caroline BOUVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0057

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Décembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre

Monsieur Paul André RICHARD, Conseiller hors classe

Madame Isabelle SCHOONWATER, Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Patricia DARDAS

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, président et par Monsieur Vincent BRÉANT, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE, relevant de la division Santé ' anciennement dénommée Tyco Healthcare - du groupe américain COVIDIEN, ont cédé leur branche « incontinence » à Messieurs [Z] et [M].

Par contrat du 7 février 2008, Messieurs [Z] et [M] ont apporté cette activité à la société ONTEX SANTE FRANCE (ONTEX), créée à cet effet, anciennement dénommée LILLE HEALTHCARE et GEM, contrat contenant une clause de garantie de passif.

Le 6 mai 2008, l'intégralité des actions de la société GEM a été cédée à la société CALA CAPITAL (CALA). Au titre des actifs cédés, figuraient plusieurs marques, dont la marque «LILLE » valorisée dans la cession à plus de 3.100.000 euros.

En avril 2009, la société LILLE HEALTHCARE a déposé la marque « LIL HEALTHCARE ».

Le 2 décembre 2009, le conseil de la société de droit anglais Lil-Lets UK Limited a saisi la société LILLE HEALTHCARE, la menaçant d'agir en opposition au dépôt de la marque « LIL HEALTHCARE » pour cause de confusion avec la marque « LIL-LETS » détenue par sa cliente et faisait état d'un engagement pris le 22 avril 2005 par la société TYCO HEALTHCARE RETAIL SERVICE AG (« TAG ») à l'égard de la société ACCANTIA PERSONAL HYGIENE LIMITED (aux droits de laquelle se trouve la société LIL-LETS UK LIMITED) prévoyant des restrictions à l'utilisation de la marque LILLE.

Invoquant que ces restrictions limitaient la valeur de la marque transmise et que la non-divulgation de l'engagement du 22 avril 2005 pris par COVIDIEN à l'égard de la société Lil-Lets UK Limited constituait une réticence dolosive engageant la responsabilité des sociétés COVIDIEN, les sociétés CALA et LILLE HEALTHCARE ont assigné devant le tribunal de commerce de Paris le 20 février 2011 la société COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE et le 8 mars 2011 la société de droit luxembourgeois COVIDIEN GROUP aux fins notamment d'obtenir la réparation du préjudice subi par CALA et LILLE HEALTHCARE et de condamner solidairement COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE au paiement de la somme de 10.045.000 euros.

Par jugement rendu le 12 juin 2013, le tribunal de commerce de Paris a :

- condamné in solidum les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE à verser aux sociétés CALA et LILLE HEALTHCARE la somme de 1.878.630 euros ;

- condamné in solidum les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE à verser aux sociétés CALA et LILLE HEALTHCARE la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE ont interjeté appel de ce jugement le 25 juin 2013.

Par leurs dernières conclusions signifiées le 1er décembre 2015, elles demandent à la Cour de :

- infirmer la décision entreprise dans toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau :

- dire les sociétés CALA et ONTEX, anciennement dénommée LILLE HEALTHCARE, irrecevables, et à défaut, mal fondées en toutes leurs demandes et les en débouter ;

- condamner solidairement, et à défaut in solidum les sociétés CALA et ONTEX à payer aux sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE :

- à chacune la somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

- à chacune la somme de 25.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement, et à défaut in solidum les sociétés CALA et ONTEX, aux dépens de première instance et d'appel.

Elles soutiennent qu'elles n'ont commis aucune réticence dolosive, dans la mesure :

- d'une part, où les intimés avaient connaissance du contenu de l'engagement du 22 avril 2005 lors de l'acquisition de la marque « Lille » ;

- d'autre part, où l'engagement du 22 avril 2005, engagement personnel, n'est pas opposable à la société CALA, tiers à l'engagement, et où les sociétés COVIDIEN n'avaient en tout état de cause aucune obligation d'en faire état.

Elles prétendent, par ailleurs, que les intimées, qui sollicitent l'attribution d'une somme de 10.045.000 euros, se bornent à verser aux débats des échanges de courriels datant de l'année 2011 en lien avec l'utilisation de la marque « LIL HEALTHCARE », mais ne produisent aucune pièce prouvant l'existence d'un préjudice qui aurait été subi au titre de la marque « Lille » et dont la faute reprochée aux appelantes serait la cause.

La société de droit belge CALA CAPITAL et la société ONTEX SANTE FRANCE, anciennement Lille Healthcare, par leurs dernières conclusions signifiées le 18 novembre 2015, demandent à la Cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la responsabilité de sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE en ne révélant pas l'engagement du 22 avril 2005 aux sociétés CALA et ONTEX ;

- condamner solidairement les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE à régler la somme 10.045.000 euros aux sociétés CALA et ONTEX ;

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour considérerait qu'il n'y pas eu réticence dolosive :

- constater qu'en vertu des stipulations du contrat, et notamment celles relatives à la garantie de passif, les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE sont tenues d'indemniser les sociétés CALA et ONTEX à hauteur de la totalité du préjudice subi par elles et ce, sans que puisse leur être opposée la limitation contractuelle de 3.000.000 euros visée à l'article 9.2.3 du contrat en raison de la nullité de cette limitation résultant de la mauvaise foi des sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING et de leurs manoeuvres dolosives ;

' condamner solidairement les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE à régler la somme de 10.045.000 euros aux sociétés CALA et ONTEX en vertu des dispositions du contrat, notamment de celles relatives à la garantie de passif ;

A titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour considèrerait qu'il n'y pas lieu d'annuler la limitation contractuelle de 3.000.000 euros visée à l'article 9.2.3 du contrat :

- constater qu'en vertu des dispositions du contrat, notamment celles relatives à la garantie de passif, les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE sont tenues d"indemniser les sociétés CALA et ONTEX à hauteur de la limitation contractuelle de 3.000.000 euros visée à l'article 9.2.3 du contrat ;

- ordonner en conséquence aux sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE de régler la somme de 3.000.000 euros aux sociétés CALA et ONTEX en vertu des dispositions du contrat et notamment celles relatives à la garantie de passif ;

Plus subsidiairement, ne pas condamner COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE à une somme inférieure à celle à laquelle elles ont été condamnées par le tribunal de commerce de Paris ;

En toute hypothèse :

- rejeter l'intégralité des demandes des sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE, notamment la demande de paiement de dommages et intérêts d'un montant de 100.000 euros à chacune des deux sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE ;

- condamner les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE solidairement à verser à chacune des sociétés CALA et ONTEX la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elles soutiennent que les cessionnaires ignoraient les limites d'utilisation de la marque « Lille » dont elles n'ont appris l'existence que par la lettre du conseil de la société de droit anglais Lil-Lets UK Limited du 2 décembre 2009, que les documents et informations accessibles au public ne faisaient pas état de l'existence de l'engagement de 2005, que l'enregistrement, en avril 2009, de la marque « Lil Healthcare » sous la restriction « à l'exclusion des produits d'hygiène féminine », ne prouve pas que Cala / Healthcare avaient connaissance de l'étendue des renonciations acceptées par COVIDIEN en 2005, qu'en effet, la marque « Lil Healthcare » ayant été créée pour compléter la marque « Lille », il était logique pour CALA de reprendre les mêmes descriptifs de produits.

Elles font valoir que l'engagement du 22 avril 2005 aurait dû être transmis à CALA, dès lors que :

' cet engagement doit être qualifié de transaction ;

' si, par principe, la transaction a un effet relatif entre les parties, tel n'est pas le cas des obligations « propter rem », comme en l'espèce, qui sont intimement liées à la chose cédée et suivent, non la personne de celui qui a signé la transaction, mais le bien concerné en passant de propriétaire en propriétaire ;

de sorte que les obligations que contient l'engagement du 22 avril 2005 s'imposaient au cessionnaire de la marque « Lille ».

Elles en infèrent que la non-divulgation de l'engagement du 22 avril 2005 pris par COVIDIEN à l'égard de la société Lil-Lets UK Limited constitue une réticence dolosive engageant la responsabilité des appelantes, que cette dissimulation a nécessairement été volontaire, puisque COVIDIEN a informé CALA d'un autre accord, celui la liant à la société Lilly, et qu'elle a été déterminante du consentement de CALA puisqu'elle a induit en erreur la cessionnaire sur la valeur et le champ d'utilisation de la marque « Lille ».

Elles ajoutent qu'elles sont fondées à demander que soit compensée l'intégralité du préjudice qu'elles ont subi, que la dissimulation a pour effet une sur-valorisation de la marque « Lille » à 3.100.000 euros, alors que le marché exclu pour l'exploitation de la marque en raison de l'engagement est de 66,66 % et que la non-divulgation impacte donc la valeur de la marque à hauteur de 3.100.000 euros x 67,66 %, soit 2.066.000 euros.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus amples exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.

MOTIFS

Considérant que les sociétés CALA CAPITAL et ONTEX fondent leur action sur l'article 1116 du code civil en faisant valoir que l'engagement du 22 avril 2005, qui limitait l'utilisation de la marque « Lille » et dont CALA n'a eu connaissance que par la lettre du 2 décembre 2009 de la société Lil-Lets UK Limited, a été dissimulé à la cessionnaire de cette marque lors de la conclusion de l'acte de cession ;

Considérant que l'article 1116 du code civil dispose que « le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé. » ;

Considérant que, par contrat en date du 7 février 2008, les sociétés du groupe COVIDIEN se sont engagées à transférer plusieurs marques, dont la marque « Lille », libres de toutes charges à l'exception des limitations visées à l'article 7.2.4, le terme « charges » étant défini, par l'article 1er, comme 'Charges s'entend de tout nantissement, droit réel, privilège, charges, sûreté de toute nature (dont toute sureté réelle, privilège et servitude) et également tout droit des tiers dont sans limitation la réserve de propriété » ; que, par acte du 16 mai 2008, GEM a cédé à CALA CAPITAL ses actifs, dont la marque « Lille » ;

Considérant que, le 22 avril 2005, la société TYCO HEALTHCARE RETAIL SERVICE AG, ancienne dénomination de la division Santé de COVIDIEN, s'est, sur l'usage de la marque « LILLE», engagée à l'égard de la société ACCANTIA PERSONAL HYGIENE LIMITED, aux droits de laquelle vient la société LIL-LETS UK LIMITED, en contrepartie du retrait de l'opposition formée par ACCANTIA à l'encontre de la demande de marque communautaire « Lille », à :

' ne pas utiliser cette marque pour les produits hygiéniques féminins en Europe ;

' utiliser la marque « Lille » en un seul mot pour les produits d'incontinence et les autres produits pour les personnes âgées vendus aux hôpitaux, maisons de soins et autres institutions de soins similaires en Europe ;

' utiliser la marque « Lille » uniquement associée à un autre mot ou groupes de mots (non susceptibles d'être identiques ou confusément similaires avec le terme LETS) pour les produits destinés à la vente directe aux personnes âgées ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que l'engagement du 22 avril 2005 n'a pas été communiqué à CALA lors de la conclusion de l'acte de cession du 7 février 2008 ;

Considérant que cet engagement limite l'usage de la marque « Lille » à deux titres : d'une part, par une interdiction d'utilisation de la marque pour les produits hygiéniques féminins en Europe, d'autre part, par des prescriptions d'association du terme « Lille » à un autre mot selon les destinataires des produits ;

Sur l'interdiction d'utilisation de la marque pour les produits d'hygiène féminins

Considérant que la marque « LILLE » était, à la date de la cession du 7 février 2008, enregistrée en classe 5 sous la dénomination « vêtements pour personnes incontinentes, à savoir culottes pour personnes incontinentes, à l'exclusion expresse des produits d'hygiène féminine », la mention « à l'exclusion expresse des produits d'hygiène féminine », visée au point 1 de l'engagement du 22 avril 2005, ayant été rajoutée le 7 octobre 2005 (pièce n°17) ; que l'extrait du site de l'Office de l'Harmonisation sur le Marché Intérieur (OHMI) fait état de l'identité des sociétés ayant formulé des oppositions : ELI LILLY et LIL LETS UK LIMITED, l'opposition de cette dernière, exercée sur le fondement de l'identité des marques et du risque de confusion, étant datée du 20 juin 2003 (pièce n° 44) ; que ces documents étaient accessibles au public, et partant à la cessionnaire, à la date du contrat de cession du 7 février 2008 ; qu'aucune dissimulation fautive par les cédants n'est, dans ces conditions, caractérisée sur ce point ;

Sur les prescriptions d'emploi du terme « Lille »

Considérant qu'il n'est pas contesté que les prescriptions d'emploi du terme « Lille » n'ont pas davantage été communiquées à Cala et n'ont fait l'objet d'aucune mesure d'enregistrement, ni de diffusion publique ;

Considérant que les intimées soutiennent que les obligations contenues dans l'engagement du 22 avril 2005 s'imposent aux cessionnaires en ce que cet engagement constitue une transaction et que les obligations relatives à la marque qu'il contient s'imposent à tout titulaire de cette marque ; que les appelantes répliquent que l'accord du 22 avril 2005 constitue un engagement personnel de Lil-Lets UK Limited à l'égard de Covidien non transmissible aux tiers et qu'il ne liait donc pas les cessionnaires de la marque ;

Considérant qu'aux termes de son engagement du 22 avril 2005, COVIDIEN (Tyco) a accepté de limiter l'utilisation de sa marque pour mettre un terme au litige l'opposant à la société ACCANTIA ; que cet engagement constitue un accord ayant pour objet de mettre fin à un différend qui s'est élevé entre ces parties et comportant des concessions réciproques, et a, dès lors, le caractère d'une transaction conformément à l'article 2044 du code civil ;

Mais considérant qu'une transaction ne s'impose à un tiers que si celui-ci l'a ratifiée ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, aucun élément n'établissant une telle ratification et Lille Healthcare ayant elle-même reconnu que l'engagement ne lui était pas opposable (pièces n° 3 et 3 bis communiquées par COVIDIEN) ; que l'engagement du 22 avril 2005 ne prévoit, en aucune de ses stipulations, qu'il lie, non seulement les parties, mais aussi leurs successeurs et cessionnaires ; que les intimées ne sont pas davantage fondées à invoquer l'existence d'un engagement « propter rem » qui serait transmis avec la marque, dès lors qu'elles ne justifient pas du caractère accessoire du droit par rapport à la marque en cause ' un simple lien de l'obligation avec le bien cédé étant insuffisant à établir l'existence d'une obligation réelle - et que les termes de l'engagement, pris par Tyco à titre personnel, tendent au contraire à démontrer son caractère essentiellement personnel ;

Considérant, par ailleurs, que l'enregistrement effectué le 2 avril 2009 par la société LILLE HEALTHCARE à l'INPI de Lille de la marque « Healthcare » (pièce n° 22 communiquée par COVIDIEN) est conforme aux termes de l'engagement du 22 avril 2005, dès lors qu'il reprend la formule « à l'exclusion des produits d'hygiène féminine » mentionnée au point 1 de l'engagement du 22 avril 2005 et ajoute au mot «  » celui de « LIL », conformément au point 3 du même engagement ; qu'au surplus, par courrier en date du 13 janvier 2010 (pièce n°3), le conseil de LILLE HEALTHCAIRE a indiqué à celui de la société LIL LETS que la société LILLE HEALTHCAIRE « a toujours (') respecté les trois engagements » contenus dans la lettre du 22 avril 2005 ; qu'il s'en déduit que la été CALA avait manifestement connaissance, antérieurement à la réception de la lettre du 2 décembre 2009de la société Lil-Lets UK Limited, de l'engagement du 22 avril 2005 ; que les intimées ne sauraient donc invoquer une quelconque dissimulation dolosive sur ce point ;

Considérant que sociétés CALA CAPITAL et ONTEX SANTE FRANCE seront en conséquence déboutées de leurs demandes ; que le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant, sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts des sociétés COVIDIEN pour procédure abusive, que si CALA et ONTEX se sont méprises sur leur droit, COVIDIEN ne rapporte pour autant la preuve ni du caractère abusif de leur action, ni de la réalité d'un préjudice occasionné par cette action que celui indemnisable au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que l'équité commande de condamner in solidum les sociétés CALA CAPITAL et ONTEX SANTE FRANCEà payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à la société COVIDIEN GROUP la somme de 10.000,00 euros et à la société COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE de 10.000,00 euros;

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement entrepris,

STATUANT A NOUVEAU,

DEBOUTE les sociétés CALA CAPITAL et ONTEX SANTE FRANCE de leurs demandes,

DEBOUTE les sociétés COVIDIEN GROUP et COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

CONDAMNE in solidum les sociétés CALA CAPITAL et ONTEX SANTE FRANCE, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à la société COVIDIEN GROUP somme de 10.000 euros à la société COVIDIEN MANUFACTURING GRENOBLE de 10.000,00 euros,

CONDAMNE in solidum les sociétés CALA CAPITAL et ONTEX SANTE FRANCE aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierLe Président

Vincent BRÉANTPatrick BIROLLEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 13/12764
Date de la décision : 15/04/2016

Références :

Cour d'appel de Paris J2, arrêt n°13/12764 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-15;13.12764 ?
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