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14/04/2016 | FRANCE | N°14/24538

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 14 avril 2016, 14/24538


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 14 AVRIL 2016



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/24538



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Novembre 2014 - Tribunal de Commerce de PARIS - 15ème chambre - RG n° 2013045910







APPELANTE



SA ALLIANZ IARD

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adres

se 1]

N° SIRET : 542 110 291

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Maître Stéphane BOUILLOT de la SCP HB & ASSOCIES-HITTINGER-ROUX B...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 14 AVRIL 2016

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/24538

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Novembre 2014 - Tribunal de Commerce de PARIS - 15ème chambre - RG n° 2013045910

APPELANTE

SA ALLIANZ IARD

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 542 110 291

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Stéphane BOUILLOT de la SCP HB & ASSOCIES-HITTINGER-ROUX BOUILLOT & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0497

INTIME

Monsieur [I] [E]

né le [Date naissance 1] 1956, de nationalité française, agent général d'assurances

demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Maître Elise ORTOLLAND de la SEP ORTOLLAND, avocat au barreau de PARIS, toque : R231

Ayant pour avocat plaidant Maître Thomas PERRET, avocat au barreau de MULHOUSE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Février 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre

Monsieur Edouard LOOS, Conseiller

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère, rédacteur

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Fabienne SCHALLER dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de Procédure Civile,

Greffier, lors des débats : M. Vincent BRÉANT

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Louis DABOSVILLE, Président, et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

Faits et procédure

Monsieur [I] [E] est, depuis 1982, agent général d'assurance de la compagnie AGF devenue ALLIANZ (ci-après « Allianz »). Il s'est vu confier la gestion d'un portefeuille de clientèle d'assurés situé à Mulhouse-République.

Par un avenant en date du 22 novembre 1998, il a été autorisé à exercer parallèlement à ses fonctions d'agent un autre métier, précisant qu'il s'agissait de l'activité de "courtage d'assurances".

En avril 2004, Monsieur [E] a racheté une partie du portefeuille de courtage du cabinet Verlingue consistant en l'activité de courtage dédiée aux syndics de copropriétés (propriétaires non occupants dits « PNO ») avec effet rétroactif au 1 janvier 2004.

Madame [M], directrice régionale d'Allianz, lui a indiqué qu'il pourrait disposer d'un taux de commissions de 22% pour les PNO de moins de 20 000m² et de 20% pour les PNO dépassant ce seuil.

Fin 2008, à l'occasion du transfert par Allianz du portefeuille "courtage" vers le portefeuille "agence", un différend est né entre les parties sur le taux de commissionnement et sur le montant des commissions relatifs au portefeuille "courtage" versées par Allianz à Monsieur [E] pour les années 2004 à 2008.

En reconstituant le calcul de commissions, Monsieur [E] estimait qu'il existait une différence de taux entre les commissions versées antérieurement à l'achat du portefeuille Verlingue et celles qu'il avait perçues.

De très nombreux échanges entre janvier 2009 et fin 2012 par courriels et courriers n'ont pas permis de résoudre ce différend, ni une mise en demeure en date du 23 janvier 2013.

Par actes en date des 12 juin 2013 et 12 juillet 2013 Monsieur [E] a assigné la SA ALLIANZ devant le Tribunal de commerce de Paris, réclamant un rappel de commission à hauteur de 76 674,89€.

Par jugement en date du 24 novembre 2014, le Tribunal de commerce de Paris a :

- condamné la SA ALLIANZ à verser à Monsieur [E] la somme de 39.000€ avec intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2013.

- condamné la SA ALLIANZ à verser à Monsieur [E] la somme de 15.000€ à titre de dommages intérêts pour procédure abusive.

- ordonné la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil.

- condamné la SA ALLIANZ à verser à Monsieur [E] la somme de 8.000€ au titre de l'article 700 CPC.

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires.

- condamné la SA ALLIANZ aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44€ dont 13,52€ de TVA.

Vu l'appel interjeté par la SA ALLIANZ contre cette décision,

Vu les dernières conclusions signifiées par la SA ALLIANZ le 13 janvier 2016, par lesquelles il est demandé à la Cour de:

- Dire et juger ALLIANZ IARD recevable et bien fondée en son appel,

- Dire et juger nulle, pour nullité de forme, l'assignation délivrée par Monsieur [I] [E] le 12 juin 2013 à l'encontre d'ALLIANZ IARD,

- Dire et juger que ladite assignation n'a pu, en application de l'article 2247 du Code Civil, être interruptive d'une quelconque prescription,

- Dire et juger prescrite l'action entreprise par Monsieur [E], pour les commissions dues pour la période antérieure du 11 juillet 2008,

- Dire et juger que seules les demandes formulées pour la période du 12 juillet 2008 au 30 octobre 2008 ne sont pas frappées de prescription et sont recevables,

- Dire et juger, cependant, que ces demandes sont intégralement infondées,

En conséquence,

- Débouter Monsieur [I] [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions d'appel incident,

- Condamner Monsieur [I] [E] à payer à ALLIANZ IARD une indemnité de procédure d'un montant de 6.500 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Condamner Monsieur [I] [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers dont distraction au profit de la SCP HB ET ASSOCIES, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Vu les dernières conclusions signifiées par M. [E] le 7 janvier 2016, par lesquelles il est demandé à la Cour de :

- Dire et juger mal fondé l'appel de la société ALLIANZ IARD à l'encontre du jugement entrepris.

- En conséquence, Débouter la Société ALLIANZ IARD de toutes ses fins et conclusions.

- Recevoir Monsieur [I] [E] en son appel incident et le déclarer bien fondé.

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a attribué la somme de 39.000 € à Monsieur [E] au titre du différentiel de commissions.

Et statuant à nouveau,

- Condamner la société ALLIANZ IARD à verser à Monsieur [I] [E] la somme de 76.674,89 € avec intérêts au taux légal à compter du 23 janvier 2013, date de la mise en demeure.

- Dire et juger que les intérêts dus pour une année entière, seront eux-mêmes productifs d'intérêts au taux légal par application des dispositions de l'article 1154 du Code Civil.

- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions.

- Condamner la société ALLIANZ IARD à verser à Monsieur [I] [E] la somme de 16.000 € au titre de l'article 700 du CPC.

- Condamner la défenderesse aux entiers frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel, ces derniers dont distraction au profit de Maître ORTOLLAND, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

* * *

Allianz soulève tout d'abord la nullité de la première assignation en date du 12 juin 2013, et la prescription de l'action introduite le 12 juillet 2013 pour les périodes antérieures au 11 juillet 2008.

Monsieur [E] s'oppose à ce moyen et soutient que si la première assignation est effectivement irrégulière, elle n'est toutefois pas frappée de nullité et a été enrôlée le 18 juin 2013, que c'est à tort que le greffe la lui a retournée, qu'elle a été régularisée par la signification d'une seconde assignation délivrée le 12 juillet 2008, qu'elle est dès lors susceptible d'interrompre la prescription, qu'en tout état de cause la prescription quinquennale n'est pas applicable, la créance étant indéterminée, les parties n'étant pas d'accord sur l'assiette et sur le taux des commissions.

Les parties développent ensuite leurs moyens au fond.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Sur ce, la Cour,

Sur la nullité de la première assignation

Considérant que l'assignation du 12 juin 2013 ne comportait aucune date d'audience contrairement aux dispositions de l'article 855 du code de procédure civile et qu'une deuxième assignation a été délivrée un mois plus tard ;

Que la première assignation qui n'a de fait pas été enrôlée puisqu'elle ne comportait aucune date est dès lors nulle et de nul effet ;

Sur la prescription

Considérant qu'aux termes de l'article 2241 du code civil, en sa rédaction applicable issue de la loi du 17 juin 2008, « la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure » ;

Considérant qu'il en résulte désormais que le vice de procédure n'empêche pas l'interruption de la prescription même s'il s'agit d'un grief de pure forme ;

Qu'en l'espèce, la nullité de la première assignation en date du 12 juin 2013 résulte d'un vice de pure forme ;

Qu'il y a lieu de lui accorder l'effet interruptif de prescription en application du texte susvisé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2277 du code civil, en sa rédaction avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, « se prescrivent par 5 ans, les actions en paiement (...de) tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts » ;

Qu'aux termes du nouvel article 2224 du code civil, en vigueur depuis le 17 juin 2008, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ;

Qu'il résulte de ces textes que la prescription de droit commun est désormais de cinq ans, y compris pour les demandes en paiement de sommes dues à échéances successives;

Que les commissions dont l'agent général demande le paiement, qui sont payables à échéances périodiques au fur et à mesure de l'encaissement des cotisations par l'assureur, relèvent de ces dispositions ;

Considérant qu'en l'espèce, indépendamment du caractère échelonné des paiements réclamés, l'action introduite par Monsieur [E] le 12 juin 2013 porte sur des sommes qui lui seraient dues à titre de rappel de commissions, sur la base d'un taux de commissionnement de 20 ou 22 % selon la surface de copropriété concernée ;

Qu'au demeurant, par courrier du 18 janvier 2012, Monsieur [E] a transmis à Allianz deux tableaux de commissionnements pour soutenir sa demande, l'un sur une base de 82.047,99 €, l'autre sur une base de 39.384,66€, somme alternative qui pourrait être retenue selon lui si l'on faisait application du taux minoré, ce que Allianz a toujours refusé de payer ;

Qu'il est dès lors établi que les bases de calcul étaient déterminables, même si un désaccord persistait sur le bien fondé de la demande ;

Qu'une telle demande, parfaitement déterminable, relève pour la période du 12 juin 2008 au 17 juin 2008 de l'ancien article 2277, puis, à compter de cette date, du régime des actions mobilières soumises à la prescription de droit commun de cinq ans ;

Que dans les deux cas c'est la prescription quinquennale qui est applicable au litige ;

Qu'en conséquence est couverte par la prescription quinquennale la partie de la demande portant sur commissions antérieures au 12 juin 2008;

Qu'il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris sur ce point.

Sur la demande en paiement

Considérant qu'en l'espèce, la demande en paiement formée par Monsieur [E] porte sur les années 2004 à 2008;

Que la prescription étant acquise pour toutes les sommes antérieures au 12 juin 2008, seule reste en débat la demande portant sur les sommes portant sur la période du 12 juin au 1er novembre 2008 ;

Qu'au-delà de cette date, un accord a été signé entre les parties pour prévoir le calcul d'une indemnité compensatrice sur les contrats transférés le 17 septembre 2009 (prévoyant un commissionnement de 25%), à effet au 1er novembre 2008 ;

Que Monsieur [E] ne sollicite aucune différence de taux de commissionnement pour la période postérieure au 1er novembre 2008, les tableaux versés aux débats s'arrêtant à octobre 2008 inclus ;

Considérant, que pour la partie antérieure au 1er novembre 2008 et non prescrite des demandes, il appartient à Monsieur [E] de rapporter la preuve du non paiement allégué et de son quantum, et non à Allianz de démontrer que les sommes demandées ne sont pas dues ;

Que les bordereaux comptables qui avaient servi de base à sa rémunération pendant quatre ans n'ont jamais suscité aucune contestation de la part de Monsieur [E] ;

Que le tableau versé aux débats daté du 9 septembre 2009, même s'il a été validé par un expert comptable, a été établi par Monsieur [E] seul et n'est corroboré par aucun autre élément probant ;

Qu'en outre, Monsieur [E] forme devant la cour une demande globale de 76.674,89 Euros, sur le fondement de son tableau n°1 qui fait ressortir une somme due qui serait de 82.047,99€ qu'il était prêt à transiger sur la base d'une compensation à hauteur de 39.384 Euros, démontrant ainsi le caractère fluctuant de ses demandes ;

Qu'aucune certitude ne peut dès lors être tirée des tableaux fournis établis par Monsieur [E] et qui ont toujours été contestés par Allianz ;

Qu'en l'absence de preuve du bien fondé de sa réclamation, il y a lieu de débouter Monsieur [E] de sa demande d'un rappel de commissionnement pour la période non prescrite ;

Que le jugement devra également être réformé sur ce point.

Sur les autres demandes

Considérant que Monsieur [E] succombant en ses demandes en paiement, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de dommages-intérêts pour résistance et procédure abusive et qu'il n'y a lieu de lui allouer d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que pour l'ensemble de ces motifs, le jugement entrepris devra être réformé en toutes ses dispositions ;

Qu'il y a lieu de faire droit à la demande d'Allianz d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans les limites fixées au dispositif ci-après ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant a nouveau :

Dit nulle et de nul effet l'assignation en date du 12 juin 2013 ;

Dit toutefois que la prescription a été interrompue par cette assignation, annulée pour vice de procédure ;

Dit que l'action de Monsieur [E] est prescrite pour toutes les demandes de commissions antérieures au 12 juin 2008 ;

Déboute Monsieur [E] de toutes ses demandes  ;

Condamne Monsieur [E] à payer à Allianz la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [E] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierLe Président

B.REITZERL. DABOSVILLE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 14/24538
Date de la décision : 14/04/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°14/24538 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-14;14.24538 ?
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