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07/04/2016 | FRANCE | N°14/21044

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 07 avril 2016, 14/21044


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 07 AVRIL 2016



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/21044



Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 18 Septembre 2014 - RG n° 12/1802





APPELANT



Monsieur [Y] [V]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 1]



Représenté par Me Frédé

ric LALLEMENT de la SCP SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

ayant pour avocat plaidant Me Mathieu ROGER-CAREL, de la SELARL JTTB Avocats, avocat au barreau de P...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 07 AVRIL 2016

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/21044

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 18 Septembre 2014 - RG n° 12/1802

APPELANT

Monsieur [Y] [V]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté par Me Frédéric LALLEMENT de la SCP SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

ayant pour avocat plaidant Me Mathieu ROGER-CAREL, de la SELARL JTTB Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P254

INTIMÉES

SA SOCIETE GENERALE

immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 552 120 222

[Adresse 2]

ayant son siège social [Localité 2]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

ayant pour avocat plaidant Me Jean-Philippe PONS-HENRY, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

SAS LYXOR ASSET MANAGEMENT

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 418 862 215

ayant son siège social17 [Adresse 3]

[Localité 3]

Représentée par Me Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

ayant pour avocat plaidant Me Jean-Philippe PONS-HENRY, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Février 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Michèle PICARD, Conseillère faisant fonction de président et Madame Christine ROSSI, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Michèle PICARD, Conseillère faisant fonction de président

Madame Christine ROSSI, Conseillère

Monsieur Laurent BEDOUET, Conseiller appelé d'une autre chambre afin de compléter la Cour,

Qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Michèle PICARD dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Monsieur Xavier FLANDIN-BLETY et du prononcé : Mme Pauline ROBERT

MINISTERE PUBLIC : l'affaire a été communiquée au Ministère Public

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Michèle PICARD, Conseillère

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Michèle PICARD, conseiller faisant fonction de président et par Mme Pauline ROBERT, greffier présent lors du prononcé.

*

Monsieur [Y] [V], ex-salarié de la banque Société Générale, y a exercé des responsabilités dans le secteur des «produits dérivés sur devise» tant à [Localité 4] qu'à [Localité 5].

C'est ainsi qu'en 2000, il a rejoint la filiale de la Société Générale, nommée la société Sgam, où il s'est particulièrement occupé des fonds alternatifs dits «'hedge funds'» en qualité de gérant de ces fonds.

En 2004, il a été détaché auprès de la société de gestion, la société Sgam Ai, filiale de la société Sgam.

En 2009, monsieur [V] a été promu «'global head of hedge funds'».

Outre sa rémunération de salarié, monsieur [V] a pu souscrire à des parts B des fonds de gestion à des conditions préférentielles.

Suite à la crise de 2007, la société Sgam Ai a rencontré des difficultés. C'est alors que la Société Générale a décidé que ses salariés ne devaient plus souscrire aux parts B des fonds qu'elle créait. Il s'agissait aussi de faire racheter par anticipation les parts déjà souscrites.

Les difficultés dues à la crise ont conduit la Société Générale à transférer les activités de la société Sgam à la société Amundi, détenue à 30% par la Société Générale et à 70% par le Crédit Agricole.

L'activité de la société Sgam Ai a été transférée à la société Lyxor Asset Management, au sein de laquelle monsieur [V] a été détaché.

Alors que, selon monsieur [V], il avait été prévu avant l'affaire [Q], d'intégrer les gérants de fonds de la société Sgam Ai au capital d'une nouvelle société de gestion en échange des parts B souscrites, il leur a été demandé la restitution de ces parts.

Monsieur [V] a été licencié en mars 2010.

Monsieur [V] considère, d'une part, que la rupture de son contrat de travail est injustifiée et a saisi, à ce titre, le conseil des prud'hommes et, d'autre part, qu'il a été spolié d'un fonds de commerce qu'il a créé et développé en association avec la société Sgam Ai.

C'est dans ces circonstances que monsieur [V] a fait évaluer par le cabinet d'expertise Abergel le préjudice qu'il estime avoir subi du fait des agissements de son ancien employeur.

Par acte en date du 15 décembre 2011, monsieur [V], a alors assigné les sociétés Lyxor Asset Management et Société Générale, devant le tribunal de commerce de Paris, en réparation de son préjudice.

Par jugement en date du 18 septembre 2014, le tribunal de commerce de Paris a dit qu'il n'existait par de société créée de fait entre la société Sgam Ai et monsieur [V] et a renvoyé les parties devant le juge chargé d'instruire l'affaire à son audience du 22 octobre puis du 3 décembre 2014 pour plaidoirie sur le préjudice financier allégué par monsieur [V] au titre des parts B des fonds auxquels il a participé.

Le tribunal a apprécié les éléments de fait qui lui étaient soumis et il a considéré que monsieur [V] apparaissait comme un salarié de la société Sgam et Sgam Ai et que de ce fait aucune société de fait ne pouvait être caractérisée.

Par acte reçu le 20 octobre 2014 et enregistré le 21 octobre 2014, monsieur [V] a interjeté appel de ce jugement.

Par jugement en date du 19 février 2015, le tribunal de commerce de Paris a débouté monsieur [V] de sa demande au titre du préjudice financier prétendument subi du fait qu'il ne pouvait plus souscrire aux parts B, et l'a condamné à verser aux sociétés Lyxor Asset Management et Société Générale, la somme totale de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Le tribunal a relevé qu'il résultait des prospectus produits que depuis l'année 2007 le mécanisme de souscription aux parts B avait été interrompu et que le conseil d'administration de chacun des fonds pouvait à tout moment décider de ne plus émettre ces parts. Le préjudice dont se prévalait monsieur [V] étant postérieur à 2007, sa demande était rejetée.

Par acte reçu le 9 avril 2015 et enregistré le 17 avril 2015, monsieur [V] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance de jonction rendue par la cour d'appel de Paris le 24 septembre 2015, les procédures inscrites au rôle sous les numéros 14'/ 21044 et 15'/ 07844 ont été jointes et ont été poursuivies sous le numéro 14'/ 21044.

***

Dans ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 14 janvier 2016, monsieur [V], demande à la cour :

- d'infirmer les jugements rendus par le tribunal de commerce de Paris les 18 septembre 2014 et 19 février 2015, dans toutes leurs dispositions,

Et statuant de nouveau,

- de constater l'existence d'une société de fait entre monsieur [V] et la société Sgam Ai, filiale de la Société Générale,

- de dire et juger que la société Sgam Ai, a rompu brutalement et unilatéralement le contrat de société existant avec monsieur [V],

- de dire et juger que la société Sgam Ai, a unilatéralement et fautivement empêché monsieur [V], de souscrire aux Parts B inhérentes aux fonds qu'il a continué de gérer jusqu'à son éviction du groupe Société générale en mars 2010,

En conséquence,

- de condamner solidairement les sociétés Lyxor Asset Management et Société Générale, venant aux droits de société Sgam Ai, à payer monsieur [V] les sommes suivantes:

- 10.800.000 euros, en réparation de son préjudice patrimonial, augmentée des intérêts aux taux légal à compter du 15 décembre 2011, date de la délivrance de l'assignation devant le tribunal de commerce de Paris,

- 745.000 euros en réparation du préjudice financier qui en a découlé, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2011 date de la délivrance de l'assignation devant le tribunal de commerce de Paris,

- 100.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

***

Dans leurs dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 8 septembre 2015, les sociétés Lyxor Asset Management et Société Générale, demandent à la cour :

- de débouter monsieur [V] de l'ensemble de ses demandes,

En conséquence,

- de confirmer les jugements rendus par le tribunal de commerce de Paris les 18 septembre 2014 et 19 février 2015, dans toutes leurs dispositions,

Y ajoutant,

- de condamner monsieur [V] à verser aux sociétés Lyxor Asset Management et Société Générale, une somme de 70.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

SUR CE :

Sur la société créée de fait

La cour rappelle que les éléments constitutifs de la société selon l'article 1832 du code civil sont l'intention commune de s'associer ou affectio societatis, l'apport des associés et la vocation à participer aux bénéfices et aux pertes. L'existence d'une telle société peut être prouvée par tous moyens. Il convient donc d'examiner la demande à la lumière de ces critères.

La cour note à titre liminaire que monsieur [V] soutient qu'il était associé d'une société créée de fait avec la société Sgam Ai, filiale de Sgam, elle même filiale de la Société Générale, et au sein de laquelle il avait été détaché par la société Sgam dont il était salarié. Cette société créée de fait avait pour objet la mise en place de nouveaux outils d'investissement, soit la création et la gestion de fonds de fonds alternatifs .

La Société Générale et Lyxor soutiennent que monsieur [V] était cadre salarié de la société Sgam, détaché au sein de la société Sgam Ai et qu'il avait été recruté comme gérant de fonds pour participer à la création d'une gamme de produits spécifiques. Il n'existait selon elles aucune société créée de fait entre Sgam Ai et monsieur [V].

Sur l'affectio societatis

Monsieur [V] fait valoir que :

- plusieurs éléments démontrent indéniablement l'intention des parties de s'associer dans un projet commun consistant à s'implanter sur le marché des fonds d'investissement et de fonds de fonds,

- son rôle était central dans la création et le développement de l'activité de fonds de fonds, de sorte que l'affectio societatis est en l'espèce renforcé par le très fort intuitu personae attaché à sa personne,

- les notices de la société Sgam Ai des fonds de fonds créés mettaient en avant son obligation d'investir personnellement dans lesdits fonds,

- cette obligation d'investissement personnel de monsieur [V], via les parts B, était essentielle pour le développement de l'activité,

- l'analyse des modes de fonctionnement de l'activité de fonds spéculatifs chez les concurrents de la Société Générale, démontre que cet activité ne se développe qu'en associant les managers à la création et à la gestion de l'activité,

- tous les éléments démontrent que monsieur [V] et la société Sgam Ai, se sont comportés l'un envers l'autre comme des associés intéressés au développement d'une entreprise commune, participant aux bénéfices et pertes sur un pied d'égalité,

- l'existence de son contrat de travail le liant à la société Sgam n'est pas du tout incompatible avec son rôle d'associé dans la société de fait créée avec la société Ai,

- suivant le raisonnement des intimées, monsieur [V] n'aurait été que salarié et les sommes perçu dans l'exercice de ses fonctions au sein de la société Sgam Ai relèverait du régime fiscal et social des traitements et salaires. Cependant, la société Sgam Ai n'a jamais payé de cotisations sociales sur les sommes perçues par monsieur [V] au titre de sa détention des Parts B,

- les intimés tentent d'assimiler les parts B aux « carried interests » des gestionnaires de fonds commun de placement, c'est à dire à un mode de rémunération complémentaire. Cependant, en l'espèce, le mécanisme des Parts B ne correspond pas à un «'carried interest'»,

- il exerçait par ailleurs des responsabilités de recherche d'investisseurs qui étaient exclusives de tout lien de subordination avec Sgam Ai de même qu'il prenait des décisions de gestion relevant du Comité d'investissement indépendant et souverain en la matière et qui étaient exclusives de tout lien de subordination avec Sgam Ai, tout comme l'étaient également ses décisions de gestion relevant du Comité d'Investissement, indépendant et souverain en la matière, étant par ailleurs rappelé que Monsieur [V] était lui-même investisseur dans les Fonds et titulaire de Parts B.

Les sociétés Lyxor Asset Management et Société Générale exposent que :

- l'affectio societatis impliquant l'idée d'une collaboration égalitaire entre associés exclut toute subordination des uns aux autres, or le lien qui unissait monsieur [Y] [V] à la société Sgam Ai, était un lien de subordination, exclusif par conséquent de tout affectio societatis,

- la société Sgam Ai et les autres sociétés du groupe Société Générale ayant employé monsieur [V], ont toujours considéré ce dernier comme salarié et n'ont jamais souhaité mettre en 'uvre de collaboration sociétaire avec lui. Pour cette raison essentielle, aucun affectio societatis ne saurait être caractérisé entre eux,

- la possibilité qui était offerte à monsieur [V], de souscrire des parts B au sein des fonds dont il assurait la gestion ne permet en aucun cas de caractériser l'existence d'une volonté de s'associer de la part de la société Sgam Ai. En conséquence, la souscription de parts B n'est pas de nature à faire naître un quelconque affectio societatis entre monsieur [V] et la société de gestion.

La cour rappelle que la notion d'affectio societatis est la volonté de collaborer à une entreprise commune dans des conditions égalitaires.

En l'espèce, monsieur [V] a été recruté par la filiale de la Société Générale, la société Sgam, après avoir élaboré en février 2000 avec monsieur [T], un projet de création de fonds de fonds pour la société Sgam. Il est exposé dans ce projet qu'il est plus intéressant de créer cette activité au sein de Sgam plutôt que l'externaliser. Le principe était, après avoir créé les fonds alternatifs, de regrouper plusieurs fonds alternatifs au sein d'un fonds de fond afin d'optimiser les performances en diversifiant les fonds d'investissement alternatifs. Dans ce cadre monsieur [V] devait sélectionner les fonds alternatifs notamment en évaluant et contrôlant leurs performances et celles de leurs gérants. Le projet présente monsieur [V] comme postulant en qualité de gérant de fonds de fonds tout en soulignant qu'il n'a aucune expérience dans ce domaine.

Aucune mention à une collaboration sociétale ne ressort de ce projet.

Il n'est pas contestable que monsieur [V] est l'un des fondateurs de cette activité au sein de Sgam Ai avec notamment monsieur [T], sous l'autorité duquel il était placé mais cela n'est pas suffisant à lui donner la qualité d'associé de Sgam Ai.

Monsieur [V] avait le statut de salarié de la société Sgam et était détaché par celle-ci au sein de Sgam Ai pour occuper la fonction d'adjoint au directeur de la gestion alternative Fonds alternatifs. Le détachement a fait l'objet d'un contrat signé par les parties duquel il ressort à l'article 2 que monsieur [V] était placé sous l'autorité du directeur général de Sgam Ai et à l'article 5 qu'à la fin de son détachement monsieur [V] serait réintégré au sein de la société Sgam.

Il n'est pas contestable comme l'ont relevé les premiers juges que monsieur [V], qui détenait des Parts B des fonds alternatifs pour les avoir souscrits à titre préférentiel en sa qualité de collaborateur, était associé de chacun des fonds dont il détenait des parts comme tout autre porteur de parts.

Ce n'est cependant pas cette qualité que monsieur [V] revendique puisque selon lui il était associé à Sgam Ai au sein d'une société créée de fait n'ayant aucun capital social.

La cour relève que du coté de la Société Générale et de Sgam il n'existait aucune ambiguïté sur son statut et certainement aucune volonté d'être associé de monsieur [V]. Aucune pièce ne laisse supposer que monsieur [V] pouvait ne pas être salarié de l'entreprise.

La cour note que monsieur [V] et la société Sgam Ai ne collaboraient pas sur un pied d'égalité puisque monsieur [V] avait un lien de subordination avec cette dernière, filiale de Sgam dont il était salarié.

Au delà de ce lien, monsieur [V] avait une obligation, et non une simple faculté, d'investir dans les fonds gérés par la souscription de Parts B, parts réservés aux collaborateurs participant à la gestion des fonds. Certes le défaut de souscription n'était pas sanctionné formellement mais il est clair que, s'agissant d'une pratique commune dans la gestion des fonds alternatifs visant à obtenir la confiance des investisseurs et à inciter les collaborateurs à être performants, le défaut de souscription était inconcevable et ne pouvait qu'amener Sgam Ai à se séparer de son collaborateur, ce qui ici encore montre le lien de subordination entre monsieur [V] et Sgam Ai.

Un refus de souscription était également inconcevable du fait de l'avantage financier considérable que cette souscription procurait aux collaborateurs du fonds, les souscriptions étant réservées en principe aux investisseurs institutionnels. Dans le cas des collaborateurs ils ne payaient pas de frais d'intermédiation, la souscription se faisait à des conditions préférentielles et le régime fiscal appliqué était avantageux..

Il ressort des bulletins de souscription produits concernant monsieur [V] que ce dernier a souscrit aux parts B en qualité soit d'employé du gérant de fonds soit en qualité de membre du Comité d'investissement.

Cependant, comme l'ont justement relevé les premiers juges, si la souscription par monsieur [V] à des parts de fonds montre qu'il existait une relation complexe entre monsieur [V] et la société Sgam, puisque coexistait le lien d'employeur à salarié d'une part et d'autre part l'intention de chacun de participer aux bénéfices dans le cadre d'un projet commun, cette souscription constituait un investissement dans chacun des fonds et non dans la société de gestion de ces fond. Ainsi, si monsieur [V] en qualité d'investisseur avait la qualité d'associé du fonds, cet investissement ne constitue pas un apport dans une société créée de fait, gérant les fonds, distincte du fonds ouvert à la souscription.

Par la suite le fonctionnement de cette activité ne montre pas plus d'indices d'association entre monsieur [V] et la société Sgam Ai.

Il est constant que monsieur [V] était salarié de la société Sgam et mis à la disposition de la société Sgam Ai avec qui il avait un lien de subordination et aucun des éléments avancés par monsieur [V] ne vient contredire ce fait.

La cour considère donc que c'est à juste titre que le tribunal de commerce a rejeté la demande de monsieur [V] visant à faire reconnaître l'existence d'une société créée de fait entre lui et la société Sgam Ai.

En l'absence d'affectio societatis il n'est pas nécessaire d'examiner sir les autres critères caractérisant l'existence d'une société créée de fait existent.

Sur la demande de monsieur [V] au titre du préjudice dit "financier" à hauteur de 745.000 euros

Monsieur [V] fait valoir qu'il a subi un préjudice financier découlant du fait qu'il a été privé de son droit de souscrire aux parts B inhérentes aux fonds qu'il a continué de gérer et de superviser de 2008 (année où il a été privé de ce droit) jusqu'à son départ du groupe Société Générale en mars 2010, évalué à la somme de 745.000 euros,

Les sociétés Lyxor Asset Management et Société Générale exposent que :

- dans l'hypothèse où la demande de monsieur [V] au titre du préjudice financier serait fondée sur la société créée de fait, cette demande devra être rejetée. En effet, l'existence d'une société créée de fait n'est aucunement ni démontrée par monsieur [V] ni caractérisée par l'analyse des faits de l'espèce,

- dans l'hypothèse où la demande de monsieur [V] au titre du préjudice financier serait fondée sur un droit à souscrire des parts B, cette demande devra être rejetée. En effet, monsieur [V] ne disposait pas d'un droit à souscrire des parts B, mais au contraire, la société Sgam Ai avait toute latitude pour l'autoriser ou non à ce faire et pour le contraindre au rachat forcé des parts déjà souscrites,

- monsieur [V] n'apporte aucun commencement de preuve quant aux éléments du préjudice financier qu'il invoque.

La cour relève qu'il est constant que par courrier reçu le 8 avril 2009 le président de la société Sgam demandait à monsieur [V] d'envisager la restitution des Parts B dans les fonds alternatifs de Sgam auxquels il avait souscrit. Le courrier exposait que la possibilité de souscrire aux fonds gérés avait été supprimée dès la fin 2007 et en expliquait les raisons, soit le 'contexte de dégradation brutale des performances'.

Sont produits aux débats les prospectus des fonds Sgam Ai Premium Fund, Sgam Ai Equilibrium Fund, Sgam Ai Optimum Asia Plus Fund et Sgam Alternative Diversified Fund, dans leur version applicable en 2007.

Pour ce qui concerne le premier fonds, dans le chapitre relatif aux souscriptions des parts B réservée aux collaborateurs du fonds il est clairement précisé que le gérant ou le conseil d'administration peut rejeter toute souscription à sa seule discrétion.

Pour ce qui concerne le deuxième fonds il est précisé que la société peut rejeter toute souscription et le bureau des directeurs peut à sa totale discrétion arrêter la vente des parts de toutes les classe.

Pour ce qui concerne le troisième fonds il comporte la même stipulation de même que le quatrième fonds.

Il ressort de ces dispositions claires figurant dans les prospectus des fonds que la souscription pouvait être supprimée discrétionnairement à tout moment.

Ainsi, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que monsieur [V] n'avait aucun droit acquis à souscrire dans ces fonds et que le souscription pouvait être interrompue à tout moment.

Dès lors, en l'absence de faute contractuelle de la part de la Société Générale la demande de dommages et intérêts formée par monsieur [V] sera rejetée et le jugement attaqué confirmé.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

Les sociétés Société Générale et Lyxor Asset Management sollicitent le paiement de la somme de 70.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à leur charges les frais qu'elles ont exosés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Il leur sera donc allouée la somme de 30.000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de paris le 18 septembre 2014 et celui rendu par le tribunal de commerce de Paris le 19 février 2015,

Condamne monsieur [Y] [V] à payer à la Société Générale et à la société Lyxor Asset Management la somme de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne monsieur [Y] [V] aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Pauline ROBERT Michèle PICARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 14/21044
Date de la décision : 07/04/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°14/21044 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-07;14.21044 ?
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