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31/03/2016 | FRANCE | N°14/11786

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 31 mars 2016, 14/11786


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 31 MARS 2016



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/11786



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Mars 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS 01 - RG n° 12/16671



APPELANTE



SOCIÉTÉ CIVILE IMMOBILIÈRE PROVENCE 76 prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité

audit siège

RCS PARIS 434 601 969

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaida...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 31 MARS 2016

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/11786

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Mars 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS 01 - RG n° 12/16671

APPELANTE

SOCIÉTÉ CIVILE IMMOBILIÈRE PROVENCE 76 prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

RCS PARIS 434 601 969

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Franck ASTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0487

INTIMÉE

LA SOCIÉTÉ EDMOND DE ROTHSCHILD (FRANCE) anciennement dénommée LA COMPAGNIE FINANCIÈRE EDMOND DE ROTHSCHILD BANQUE, S.A. prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

RCS PARIS B 572 037 026

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocate au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocat plaidant Me Bernard GRELON, avocat au barreau de PARIS, toque : E0445, substitué par Me Anne BOUTRON, avocate au barreau de PARIS, toque : P0261

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 janvier 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Dominique LONNÉ, présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, présidente de chambre

Mme Dominique LONNÉ, présidente

Madame Caroline FÈVRE, conseillère

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de Procédure Civile.

GREFFIÈRE, lors des débats : Madame Josélita COQUIN

ARRÊT :

- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, présidente et par Madame Josélita COQUIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 09 août 2006, la société civile immobilière (SCI) PROVENCE 76 a ouvert un compte de titres dans les livres de la Compagnie Financière Edmond de Rothschild Banque et a déposé la somme de 1.500.000 euros investie en monétaire.

Par acte sous seing privé du 04 octobre 2016, la SCI PROVENCE 76 a donné mandat de gestion à la Compagnie Financière Edmond de Rothschild Banque, en cochant une orientation de gestion prudente ainsi que les options 1, 2 et 3 proposées à l'article 3 du mandat de gestion.

Le 19 juillet 2009, la SCI PROVENCE 76 a dénoncé le mandat de gestion.

Exposant que les fonds provenaient d'une indemnité d'assurance versée à la suite de l'incendie de l'hôtel dont elle était propriétaire et qu'elle entendait en disposer si son locataire la mettait dans l'obligation de reconstruire l'immeuble à ses frais, et se prévalant de manquements aux obligations pré-contractuelles ainsi que de fautes dans l'exécution du mandat de gestion, ayant entraîné une perte nette de 87.993 euros, la SCI PROVENCE 76 a assigné le 30 octobre 2012 la société COMPAGNIE FINANCIÈRE EDMOND DE ROTHSCHILD BANQUE devant le tribunal de grande instance de Paris en paiement de dommages-intérêts.

Par déclarations du 02 et 03 juin 2014, jointes par ordonnance du 16 septembre 2014, la société civile immobilière PROVENCE 76 a interjeté appel du jugement rendu le 26 mars 2014 par le tribunal de grande instance de Paris qui l'a déboutée de ses demandes, l'a condamnée à payer à la société Compagnie Financière Edmond de Rothschild Banque la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 31 mars 2015, la SCP PROVENCE 76 demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau, de :

- constater que la banque a manqué à son devoir de conseil et de diligence lors de la signature du mandat et tout au long de l'exécution de celui-ci en ne se conformant pas au profil prudent de la gestion choisie et en ne fournissant pas des informations adaptées au niveau de connaissance de la SCI PROVENCE 76,

en conséquence,

- condamner la Compagnie Financière Edmond de Rothschild Banque à lui verser la somme de 260.944 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi,

- dire que cette somme produira intérêts à compter du 11 mars 2009, date de la mise en demeure adressée par la SCI à la banque, conformément à l'article 1153 du code civil.

A titre subsidiaire

dire en conséquence que le consentement de Mme [H], en qualité de gérante de la SCI PROVENCE 76, a été vicié par une erreur portant sur la substance même du contrat, soit en l'espèce la définition du profil de gestion qu'elle avait adopté.

En conséquence,

- déclarer nul et de nul effet le mandat de gestion signé le 4 octobre 2006,

- ordonner à la Compagnie Financière Edmond de Rothschild Banquee (de rembourser) l'intégralité du capital déposé en ses livres par la SCI PROVENCE 76, soit la somme de 1.504.026 € sous déduction des retraits effectués à la date de l'arrêt à intervenir,

- désigner tel expert -comptable avec mission de faire les comptes entre les parties, et ce, aux frais avancés de la banque,

- condamner la défenderesse à lui payer une somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile devant les premiers juges et devant la cour,

- condamner la défenderesse aux entiers dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 04 mai 2015, la société Edmond de ROTHSCHILD France, anciennement dénommée la Compagnie Financière Edmond de ROTHSCHILD BANQUE demande à la cour de :

confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

En conséquence :

$gt; Sur l'absence de responsabilité de la banque

Dire que la SCI PROVENCE 76 est forclose à rechercher sa responsabilité pour les opérations réalisées sur son compte et qu'elle n'a pas contestées dans les 30 jours suivant l'envoi des relevés du portefeuille,

Dire par conséquent la SCI PROVENCE 76 mal fondée à rechercher sa responsabilité sur le fondement d'un manquement à ses obligations contractuelles,

$gt; Sur le prétendu préjudice

Dire que la SCI PROVENCE 76 n'établit pas le lien de causalité entre les fautes invoquées et les perte alléguées, qui en tout état de cause s'apprécient au jour de la liquidation, et s 'élèvent en l'espèce à la somme de 87.993 €.

Dire que la SCI PROVENCE 76 est mal fondée à demander l'indemnisation du gain escompté, seules les pertes éprouvées causées par une faute de gestion étant indemnisable, ou la perte d'une chance s'agissant d'un manquement à l'obligation précontractuelle d'information et de renseignement.

Dire que cette perte de chance s'évalue au regard de la probabilité que l'investisseur ait choisi des placements moins risqués ; qu'en l'espèce, la SCI PROVENCE 76 ayant notamment recherché un rendement de 6 % de ses avoirs et opté pour le mandat proposé en présence de son conseiller financier Monsieur [J] [I], la probabilité qu'elle ait sélectionné une gestion plus sécurisée est très faible, voire nulle.

Dire irrecevable et en tous cas mal fondée la demande de nullité formée à titre subsidiaire par la SCI PROVENCE 76,

En tout état de cause,

Débouter la SCI PROVENCE 76 de l'ensemble de ses demandes,

La condamner à lui payer la somme de 12.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamner la SCI PROVENCE 76 aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 décembre 2015.

SUR CE

Considérant que dans le dispositif de ses dernières conclusions, la société EDMOND DE ROTHSCHILD FRANCE demande la confirmation du jugement entrepris et 'en conséquence' la 'forclusion' de la SCI PROVENCE 76 à rechercher sa responsabilité pour les opérations réalisées sur son compte dans la mesure où elle ne les a pas contestées dans les 30 jours suivant l'envoi des relevés de portefeuille ;

Mais considérant que ce dispositif n'est pas sans incohérence ; qu'en effet le tribunal n'a retenu aucun moyen de forclusion ; que dans le corps des écritures de la société EDMOND DE ROTHSCHILD FRANCE c'est seulement à titre subsidiaire qu'est invoquée une 'ratification de sa gestion' en l'absence de toute contestation dans le délai de 30 jours suivant l'envoi du portefeuille, la banque intimée ayant à titre principal répondu sur le fond à l'ensemble des griefs qui lui sont reprochés ;

Qu'en tout état de cause, la SCI PROVENCE 76 ne peut pas être considérée comme 'forclose' à engager une action en responsabilité de la banque pour manquements à ses obligations pré-contractuelles et contractuelles ;

Considérant qu'il résulte de la fiche d'entrée en relation signée le 09 août 2006 par la SCI PROVENCE 76 et M. [J] [I], pour le chargé de clientèle, (mentionné également dans la fiche comme 'apporteur d'affaires-DLCM Finances', société dont il est gérant) que l'origine des actifs est indiquée en trésorerie disponible ; que les objectifs d'investissement de la somme de 1.500.000 euros sont une trésorerie à court terme avec un horizon d'investissement n'excédant pas trois ans suivant un profit prudent ; que la société PROVENCE 76 a déclaré n'avoir aucune expérience en matière de services d'investissement ni avoir jamais réalisé aucune transaction sur les marches financiers ;

Que la société Edmond de ROTHSCHIL s'est ainsi renseignée sur la situation financière et sur l'expérience de la SCI PROVENCE 76 en matière d'investissement et de ses objectifs, au regard de la réglementation applicable lors de la souscription du mandat en 2006 avant la transposition de la MIF entrée en vigueur le 1er novembre 2007 ;

Considérant que dans le mandat de gestion qu'elle a donné le 04 octobre 2006 à la compagnie financière Edmond de Rothschild Banque, la SCI PROVENCE 76 a opté pour une gestion prudente, dont l'objectif est la recherche d'une valorisation régulière des actifs avec une faible exposition aux fluctuations des marchés financiers ; que le mandat précise que cette orientation est réservée aux investisseurs qui recherchent, en priorité, une préservation de leur capital avec un portefeuille composé de produits de taux, actifs monétaires et/ou autres produits peu exposés aux fluctuations des marchés financiers et un seuil d'investissements en actions limités à un seuil de l'ordre de 30% et que l'horizon de placement recommandé est un horizon à court terme de l'ordre de deux ans sauf autorisation expresse donnée par le mandant d'investir dans des produits mentionnés à l'article 3 qui sont susceptibles de comporter une échéance à long terme ;

Que l'article 3 du mandant prévoit que le mandant donne pouvoir au mandataire pour exécuter, de sa propre initiative, au mieux des intérêts du mandant mais sans qu'il ait à être consulté au préalable, toutes opérations d'emploi ou de réemploi du dépôt qui lui est fait en valeurs mobilières ou titres de créances négociables, français ou étrangers, au nominatif ou au porteur, négociés sur les divers marchés réglementés ou organisés, au comptant, en fonctionnement régulier et ouverts au public en France ou à l'étranger, ou encore en parts ou actions d'organismes de placement collectif de droit français, d'OPCVM conformes à la directive 85/611/CEE ou d'organismes de placement collectif bénéficiant d'une autorisation de commercialisation sur le territoire français ; que l'article 3 du mandat précise également que le portefeuille pourra notamment être investi dans des OPCVM gérés par le mandataire ou des sociétés liées au sens de l'article 10 du décret n°89-623 du 6 septembre 1989 et qu'il pourra, dans le respect de l'orientation de gestion définie, être investi à 100% en OPCVM ; que le dit article 3 prévoit également d'autres opérations selon trois options facultatives qui ont été cochées par le mandant, la SCI PROVENCE 76 :

' Option 1: le mandant autorise le mandataire à exécuter toutes opérations d'emploi ou de réemploi du dépôt qui lui est fait en obligations et titres assimilés de droit étranger, certificats assortis d'une garantie de capital à l'échéance supérieure ou égale à 80%, pouvant ne pas être admis à la négociation sur un marché réglementé, avec la précision que cette autorisation vise les obligations et titres assimilés de droit étranger, certificats émis en France ou à l'étranger, bénéficiant d'une notation ou non et pouvant présenter des modalités particulières de remboursement ou de calcul d'intérêts et, en particulier, une indexation à des indices financiers, des paniers de valeurs mobilières ou à des parts ou actions d'OPC à l'exclusion des indexations sur risque de crédit ;

L'option 1 stipule que :

' Le mandant est averti sur le fait que ces valeurs mobilières peuvent comporter des risques de liquidité et de volatilité ainsi que des risques en capital.

L'attention du mandant est attirée sur le fait que les produits ci-dessus mentionnés sont susceptibles de comporter une échéance à long terme, soit à plus de cinq ans.

Le mandant autorise expressément le mandataire à réaliser des opérations sur ces catégories d'instruments à hauteur de 30% du portefeuille, quelle que soit l'orientation de gestion retenue' ;

' Option 2 : Le mandant autorise le mandataire à exécuter, de sa propre initiative, toutes opérations d'emploi ou de réemploi du dépôt qui lui est fait en :

- obligations et titres assimilés de droit étranger, certificats, assortis ou non d'une garantie de capital, bons, warrants, émis en France ou à l'étranger, bénéficiant d'une notation ou non, et pouvant présenter des modalités particulières de remboursement ou de calcul d'intérêts, et, en particulier, une indexation à des indices financiers, des paniers de valeurs mobilières ou à des parts ou actions d'OPC à l'exclusion des indexations sur risque de crédit.

Il est à nouveau stipulé à ce stade : ' Le mandant est averti sur le fait que ces valeurs mobilières peuvent comporter des risques de liquidité et de volatilité ainsi que des risques en capital.'

'- parts ou actions d'OPCVM alternatifs de droit français

Cette autorisation vise les OPCVM alternatifs de droit français, pouvant investir dans des organismes de placement collectif de pays membres ou non membres de l'OCDE.

Le mandant reconnaît que la gestion de la partie alternative du portefeuille est diversifiée et discrétionnaire selon les anticipations du gérant.

Le mandant est averti sur les risques de liquidité et de volatilité ainsi que des risques en capital des OPCVM alternatifs, investi dans des parts ou actions d'organismes de placement étrangers qui ne présentent pas le même degré de sécurité, de liquidité ou de transparence que les OPCVM Français ou conformes à la directive européenne 85/611/CEE.

Le mandant peut à tout moment demander la composition détaillée du portefeuille d'un OPCVM par l'intermédiaire du mandataire, de la société de gestion ou du dépositaire.

- parts ou actions d'organismes de placement collectif étrangers (OPC)

Cette autorisation vise les OPC étrangers, de pays membres ou non membres de l'OCDE, admis ou non à la négociation sur un marché réglementé. Le mandant reconnaît que la gestion de la partie alternative du portefeuille est diversifiée et discrétionnaire selon les anticipations du gérant

Le mandant est averti sur les risques de liquidité et de volatilité ainsi que des risques en capital des OPC étrangers qui ne présentent pas le même degré de sécurité, de liquidité ou de transparence que les OPCVM français ou conformes à la directive européenne 85/611/CEE.

Le mandant peut à tout moment demander la composition détaillée du portefeuille d'un OPC étranger par l'intermédiaire du mandataire, de la société de gestion ou du dépositaire.

L'attention du mandant est attirée sur le fait que les produits ci-dessus mentionnés sont susceptibles de comporter une échéance à long terme, soit à plus de cinq ans.

Le mandant autorise expressément le mandataire à réaliser des opérations sur ces catégories d'instruments à hauteur d'un montant total défini par le mandataire qui ne pourra pas toutefois excéder un seuil de l'ordre de 35% du portefeuille, quelle que soit l'orientation de gestion retenue ' ;

' Option 3 : le mandant autorise la mandataire à exécuter des opérations de change, au comptant ou à terme, sur des marchés réglementés ou de gré à gré, à hauteur d'un montant total qui pourra atteindre 100 % du portefeuille ;

Considérant que l'article 5 du mandat stipule que le mandataire agit au mieux des intérêts du mandant aux seuls risques de ce dernier conformément à l'objectif de gestion convenu, que les orientations de gestion comportent des risques de performance négative, qu'il n'y a pas de garantie de performance ou de capital, que le mandataire n'a qu'une obligation de moyens ; que le mandant s'interdit d'intervenir dans la gestion du mandataire et peut émettre par écrit des réserves ou des restrictions ponctuelles et spécifiques ;

Considérant qu'au bas du mandat de gestion signé le 04 octobre 2006, le représentant de la SCI PROVENCE 76 a apposé la mention manuscrite ' Bon pour mandat avec une orientation de gestion prudente. Je déclare avoir retenu les options N°1-2-3 figurant à l'article 3 et j'ai pris connaissance des avertissements spécifiques relatifs à ces options';

Considérant que les clauses du mandat sont rédigées en termes clairs sur les opérations autorisées, la volatilité des produits sur lesquels le mandataire est autorisé à investir et les risques de perte en capital, que les produits spécialement autorisés et qui peuvent être utilisés par le mandataire incluent des produits alternatifs et des produits de la Compagnie Financière Edmond de Rothschild ; que la mention manuscrite sus visée démontre que la société PROVENCE 76 a eu son attention attirée sur les risques encourus en sorte que l'information nécessaire lui a été délivrée ;

Considérant que la SCI PROVENCE 76 conteste avoir exprimé l'objectif d'un rendement compris entre 4 et 6% par an tel que rappelé par la banque, notamment dans son courrier du 30 janvier 2009 ; qu'elle conclut qu'elle entendait préserver son capital et la perception d'intérêts correspondant sensiblement aux loyers qu'elle percevait de son locataire commercial ;

Que cependant la société Edmond de Rothschild justifie que pendant la durée du mandat soit d'octobre 2006 à juillet 2009, elle a retiré la somme totale de 185.000 euros soit 65.300 euros par an soit plus que le montant des loyers ; qu'en effet il résulte d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 06 février 2008, versé aux débats par l'appelante, que par un jugement du 17 novembre 2005 le loyer commercial renouvelé à compter du 25 juillet 1997 avait été fixé à 35.393 euros par an ;

Que sur ce dernier point, l'intimée fait état, sans être démentie, d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 24 janvier 2007 ayant arrêté le loyer commercial annuel à 37.896 euros ;

Qu'en outre, les premiers juges ont relevé que devant eux la SCI PROVENCE 76 a fait valoir, au titre de la réparation de son préjudice, qu'il était légitime d'espérer un rendement de l'ordre de 5 % par an ; que devant la cour, l'indemnisation du gain escompté est calculé sur le fondement d'un rendement ramené à 3,5% l'an ;

Considérant qu'il n'est pas démontré que les opérations autorisées par les options 1, 2 et 3 ne seraient pas conciliables avec l'objectif de gestion dans la mesure où le mandataire respecte la proportion de risque accepté par le mandant selon le profil convenu ;

Considérant qu'aucun manquement pré-contractuel ne peut être établi à l'encontre de la société Edmond ROTHSCHILD FRANCE ainsi que l'a jugé le tribunal ;

Sur les griefs relatifs à l'exécution du mandat de gestion

Considérant qu'il convient de rappeler que le mandataire n'a qu'une obligation de moyens quant à l'efficience de sa gestion ; que dans le cadre du mandat la banque Edmond ROTHSCHILD France n'a garanti ni rendement ni absence de perte en capital et n'est pas responsable des aléas des marchés financiers ; qu'en effet l'article 5 du mandat de gestion précise :' Les orientations de gestion comportent des risques de performance négatives. Par conséquent, aucune des orientations de gestion mentionnées à l'article 2 ne constitue pour le mandataire un engagement de garantir un capital ou une performance. Le mandataire n'est tenu qu'à une obligation de moyens et non de résultat. Il s'ensuit que la responsabilité du mandataire ne pourra en aucune manière être engagée en cas de perte de valeur du portefeuille confié dès lors que le mandataire s'est conformé à l'orientation de gestion retenue par le mandant. Il est rappelé que les négociations sur les marchés boursiers comportent des risques inhérents aux mécanismes économiques et financiers que le mandant, qui déclare avoir une parfaite connaissance, du caractère aléatoire de ces opérations, accepte expressément d'assumer' ;

Considérant que la SCI PROVENCE 76 lui reproche d'avoir souscrit, en violation du mandat , à des organismes de placement collectif de valeurs mobilières alternatifs de droit étranger à savoir le fonds alternatif BOUSSARD GAVAUDAN HOLDING, ayant engendré une perte de 23.678,52 euros, le fonds alternatif BOUSSARD GAVAUDAN C SHS ayant entraîné une perte de 5.750 euros, le fonds alternatif MARS ONE R ayant créé une perte de 45.271,89 euros ; qu'elle déduit de la possibilité de souscrire des parts ou actions d'OPCVM alternatifs de droit français, l'interdiction de souscrire des fonds des OPC alternatifs de droit étranger ;

Considérant que la banque Edmond ROTHSCHILD France réplique que ces fonds sont des organismes de placements collectifs étrangers dont les parts pouvaient être souscrites aux termes de l'option 2 de l'article 3 du mandant ;

Considérant que contrairement à ce que soutient la SCI appelante, l'option 2 inclut dans les opérations autorisées par le mandant, sans faire de distinction, les 'parts ou actions d'organismes de placement collectif étrangers (OPC)' en précisant :

'Cette autorisation vise les OPC étrangers, de pays membres ou non membres de l'OCDE, admis ou non à la négociation sur un marché réglementé . Le mandant reconnaît que la gestion de la partie alternative du portefeuille est diversifiée et discrétionnaire selon les anticipations du gérant

Le mandant est averti sur les risques de liquidité et de volatilité ainsi que des risques en capital des OPC étrangers qui ne présentent pas le même degré de sécurité, de liquidité ou de transparence que les OPCVM français ou conformes à la directive européenne 85/611/CEE.

Le mandant peut à tout moment demander la composition détaillée du portefeuille d'un OPC étranger par l'intermédiaire du mandataire, de la société de gestion ou du dépositaire.

Considérant que la SCI PROVENCE 76 reproche à la société Edmond de ROTHSCHILD France d'avoir souscrit la plupart des fonds obligataires ne disposant d'aucune garantie de capital, contrairement à l'article 3 du mandat de gestion qui stipule 'si l'orientation de gestion retenue est une gestion prudente, les obligations et les titres assimilés de droit étranger et certificats, objet de la présente autorisation, devront obligatoirement être assortis d'une garantie de capital égale à 100%' ; qu'elle vise les fonds OBL Opportunites C, RFS Quad 4 A, RFS Millesima Juin 2012 C, Saint Honoré Convertibles 3 DEC, Saint Honore GLOB Conv E FCP ;

Mais considérant que la société Edmond de ROTHSCHILD France souligne sans être démentie qu'il s'agit de fonds obligataires de droit français ;

Considérant que la stipulation de l'article 3 dont se prévaut la SCI PROVENCE 76 concerne 'les obligations et titres assimilés de droit étranger et certificats', en sorte que la banque intimée est fondée à soutenir qu'il n'y a pas de manquement aux règles d'investissement définies par le mandat ;

Considérant que la SCI PROVENCE 76 reproche à la société Edmond de ROTHSCHILD France de l'avoir surexposée au risque actions alors qu'aux termes du mandat de gestion les investissements en actions et/ou en produits actions sont limités à un seuil de l'ordre de 30 % et qu'au 30 mai 2008 le volume d'actions et produits actions atteignait 36,16 % des fonds sous gestion ; qu'elle reproche également à la banque d'avoir investis dans des fonds trop risqués et de ne pas avoir réagi à l'évolution des marchés financiers afin d'éviter les risques de perte de capital ; que dans ce cadre elle fait valoir que certains placements auraient dû être liquidés plus tôt (FCP Moneta Multicaps, CFP Maison Tricolore Rendement, BG Long Erm Value) dès qu'ils s'effritaient et que 'le monde de la finance s'engageait irrémédiablement dans la crise' ;

Mais considérant qu'il ne peut être reproché à la banque de ne pas avoir anticipé un retournement des marchés ni même de ne pas avoir liquidé des actions en période de baisse des marchés alors même que cela aurait pu être plus préjudiciable au mandant qu'une attente de la remontée des cours ; qu'ainsi que l'ont pertinemment retenu les premiers juges, en considération de l'obligation de moyens du mandataire, n'est pas fondée une critique qui intègre rétrospectivement des éléments d'information que le mandataire n'avait pas au jour de la prise de décision quant à l'investissement réalisé ;

Considérant que la SCI PROVENCE 76 a reçu les relevés de compte mensuels et les relevés mensuels de situation des avoirs qu'elle produit elle-même, les situations mensuelles des avoirs faisant état notamment du pourcentage d'investissements en actions sur les avoirs totaux et lui donnant une information complète sur le portefeuille géré ;

Qu'il résulte de ces relevés que depuis le début du mandat de gestion le pourcentage d'investissements en actions sur les avoirs totaux demeurait en dessous de 30 % ; qu'ainsi en septembre 2007, sur les avoirs totaux le pourcentage des actions est de 28,89 %, en janvier 2008 de 27,22 % , en mars 2008 de 24,51 % ; ce n'est qu'en avril 2008 que le pourcentage des actions passe à 35,99 %, en mai 2008 à 36,16 % et 36,08 % en juin 2008 puis sera de l'ordre de 35 % jusqu'en septembre 2008, mois où le pourcentage des actions revient à 23,38 % ; qu'il est en octobre 2008 de 20,63 % et il demeure ensuite à nouveau largement inférieur à 30 % (21,40 % en décembre 2008 ;11,20 % en janvier 2009, 10,23 % en mars 2009, 11,54 % en mai 2009) ;

Considérant que la SCI PROVENCE 76 n'établit en rien que les pertes qu'elle invoque sont de façon certaine et exclusive imputables à la période de cinq mois où le volume d'actions a dépassé les 30 % ;

Considérant que la SCI PROVENCE 76 reproche à la société Edmond de ROTHSCHILD France un horizon de placement trop long, en faisant valoir que l'horizon d'investissement qui avait été convenu était de deux ans ; qu'elle vise plus spécifiquement les fonds Moneta Micro Entr C FCP 4 DEC, Tricolore Rendement C FCP, Shanti Alphabeta B, BG Long Term Value, Mars One Eur A, Boussard Gavaudan Holding, RFS Quad 4 A, OBL Opportunities; Saint Honore Glob Conv E FCP 3 DEC ;

Que la société Edmond de ROTHSCHILD réplique que la SCI PROVENCE l'a expressément autorisée à sélectionner des investissements pouvant comporter un horizon de placement supérieur à 2 ans ainsi que l'établit les options 1 et 2 de l'article 3 du mandat de gestion ;

Considérant que le mandat de gestion prévoit que l'horizon de placement recommandé est un horizon à court terme de l'ordre de deux ans sauf autorisation expresse donnée par le mandant d'investir dans des produits mentionnés à l'article 3 qui sont susceptibles de comporter une échéance à long terme ;

Considérant qu'il convient de rappeler que les options 1 et 2 de l'article 3 ci-dessus rappelées, retenues par la SCI PROVENCE 76 et dont elle a eu parfaitement connaissance, stipulent toutes deux : 'L'attention du mandant est attirée sur le fait que les produits ci-dessus mentionnés sont susceptibles de comporter une échéance à long terme , soit à plus de cinq ans' ; que ces options ont fait l'objet d'une approbation expresse manuscrite par la SCI PROVENCE 76, laquelle ne peut donc pas valablement soutenir que les fonds souscrits par la banque à un horizon supérieur à 2 ans l'ont été sans son autorisation expresse ;

Considérant que la SCI PROVENCE 76 reproche à la société Edmond de ROTHSCHILD France d'avoir choisi majoritairement des fonds 'maison', 12 sur 19 fonds souscrits étant gérés par cette banque ;

Mais considérant que le mandat de gestion prévoit expressément en son article 3 que le portefeuille pourra notamment être investi dans des OPVCM gérés par le mandataire ou par des sociétés liées, ainsi que le fait valoir l'intimée ;

Que la diversification de la gestion du portefeuille n'exclut pas pour autant tous risques et peut exposer les placements à des rendement négatifs ou à des pertes de capital, ce dont la SCI était parfaitement informée par les termes du mandat de gestion ;

Considérant qu'en conséquence aucune des fautes invoquées dans la gestion du portefeuille ne peut être retenue ;

Sur la nullité du mandat de gestion

Considérant qu'à titre subsidiaire, la SCI PROVENCE 76 soulève la nullité du mandat de gestion en soutenant que son consentement a été vicié dans la mesure où elle a cru à tort signé un mandat de gestion prudente et que l'erreur porte en l'espèce sur la substance même du mandat ; qu'elle invoque également 'le fondement des clauses abusives' ;

Considérant que la société Edmond de ROTHSCHILD France réplique que la SCI PROVENCE 76 n'établit pas l'existence d'une erreur et encore moins d'une erreur sur la substance ; qu'elle avait parfaitement connaissance du caractère optionnel de l'article 3 du mandat de gestion et des avertissements concernant les investissements mentionnés ; qu'elle a fait le choix de ces options en présence de son conseiller financier, M. [I] ;

Considérant que par de justes motifs faisant l'exacte appréciation des éléments de la cause à nouveau débattus devant la cour, les premiers juges ont retenu que le contrat signé le 04 octobre 2006 est clairement défini comme un mandat de gestion, que l'erreur alléguée porterait sur l'acceptation des trois options facultatives proposées ; que la portée de ces trois options, qui est d'ajouter d'autres opérations, est décrite en détail ; que même à admettre que la SCI PROVENCE 76 ait fait une erreur de sélection des dites options, cette erreur ne peut pas s'analyser en une erreur sur la substance du mandat de gestion ;

Considérant que si l'appelante vise 'le fondement des clauses abusives', elle ne développe pas davantage ce moyen auquel le tribunal a exactement répondu en retenant que les options de l'article 3 du mandat de gestion ne créent aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du mandat, dès lors qu'elles sont facultatives pour celui-ci ; qu'elles ne sont donc pas abusives ;

Considérant que dès lors le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du mandat de gestion ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Considérant qu'il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la société Edmond de ROTSCHILD France les frais non compris dans les dépens d'appel ; qu'il y a lieu de lui allouer une somme complémentaire de 3.000 euros, les premiers juges ayant fait l'exacte appréciation des sommes demandées devant eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que la SCI PROVENCE 76 doit supporter les dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la SCI PROVENCE 76 à payer à la société EDMOND DE ROTHSCHILD FRANCE la somme complémentaire de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE la SCI PROVENCE 76 aux dépens d'appel qui seront recouvrés directement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par l'avocat qui peut y prétendre.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 14/11786
Date de la décision : 31/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°14/11786 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-31;14.11786 ?
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