RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 31 Mars 2016
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/04257
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Décembre 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS RG n° 11-02185
APPELANTE
SARL CLICK ORNA FARHO prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
[Adresse 4]
N° SIRET : 32323438500066
représentée par Me Denis LALOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : P0133 substitué par Me Brigitte AUBRY GLAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0133
INTIME
URSSAF ILE DE FRANCE
[Adresse 3]
[Adresse 6]
représentée par M. [K] en vertu d'un pouvoir général
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 2]
[Adresse 5]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 21 janvier 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Bernadette VAN RUYMBEKE, Président
Madame Marie- Ange SENTUCQ, Conseiller
Mme Marie-Odile FABRE DEVILLERS, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Madame Laïla NOUBEL, lors des débats
ARRÊT : contradictoire
- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Laïla NOUBEL, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la SARL CLICK ORNA FAHRO, à l'encontre du jugement prononcé par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS, le 11 décembre 2012, dans le litige l'opposant à l'URSSAF DE PARIS REGION PARISIENNE, aux droits de laquelle vient l'URSSAF D'ILE DE FRANCE.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES:
La SARL CHANTEX et la SARL JOBALINE ont assuré des prestations en sous-traitance pour le compte de la SARL CLICK ORNA FAHRO du mois de décembre 2005 au mois de février 2007.
Par un arrêt du 10 décembre 2008, la Cour d'Appel de PARIS a confirmé le jugement prononcé le 25 avril 2007 par le tribunal correctionnel de PARIS et retenu la SARL CLICK ORNA FAHRO dans les liens de la prévention de travail dissimulé depuis décembre 2005 au 28 février 2007, pour avoir eu recours sciemment aux services de la SARL CHANTEX, l' employeur ne s'étant pas correctement assuré que son sous-traitant respectait toutes ses obligations légales en matière de déclaration et d'embauche du personnel et de versement des cotisations de sécurité sociale.
Par un second arrêt du 10 décembre 2008 la même Cour a confirmé le jugement prononcé le 9 mai 2007 par le tribunal correctionnel de PARIS et retenu la SARL CLICK ORNA FAHRO dans les liens de la prévention de travail dissimulé depuis le mois de juin 2006 au mois de 27 février 2007, pour avoir eu recours sciemment aux services de la société JOBALINE, employeur dissimulant l'activité de plusieurs salariés.
Par une lettre d'observations du 22 octobre 2010, l'URSSAF notifiait à la SARL CLICK ORNA FAHRO prise en la personne de son représentant légal, la mise en oeuvre de la solidarité financière prévue à l'article L 8222 alinéas 1,2 et 3 du code du travail.
Par une mise en demeure du 26 février 2010, l'URSSAF notifiait à la SARL CLICK ORNA FARHO le recouvrement de la somme de 43 568 euros au titre des cotisations et majorations dus pour la période 2006/2007.
La SARL CLICK ORNA FARHO saisissait la commission de recours amiable laquelle, par une décision prise en sa séance du 28 janvier 2011, rejetait la requête.
Le jugement entrepris a confirmé la décision de la commission de recours amiable, a condamné la SARL CLICK ORNA FAHRO à payer à l'URSSAF la somme de 43 568 euros et l'a déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.
La SARL CLICK ORNA FARHO a développé par l'intermédiaire de son conseil les conclusions visées par le greffe le 21 janvier 2016 tendant à l'infirmation du jugement.
Elle demande à la Cour :
En l'absence de production des procès-verbaux pour travail dissimulé:
Vu la lettre d'observations de l'URSSAF du 22 octobre 2009
Vu la lettre de mise en demeure de l'URSSAF du 26 février 2010
Vu la réponse de l'URSSAF du 12 janvier 2010
Vu la décision de la commission de recours amiable du 28 janvier 2011
D'annuler les opérations de contrôle pour la période du mois de décembre 2005 au mois de février 2007 ainsi que le redressement subséquent
De condamner l'URSSAF à payer à la société CLICK ORNA FAHRO la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SARL CLICK ORNA FAHRO fait valoir en premier lieu que l'URSSAF ne produit pas les procès-verbaux constatant le délit de travail dissimulé à l'encontre du co-contractant qui sont exigés par la jurisprudence.
Elle oppose les incohérences contenues dans la lettre d'observations par rapport aux décisions correctionnelles et l'impossibilité de la société appelante de contrôler le montant redressé en violation du principe du contradictoire.
Elle précise que sur la base de l'arrêt rendu par la 12ème Chambre A Correctionnelle de la Cour d'Appel de PARIS pour la société CHANTEX, seuls les trois premiers trimestres 2006 peuvent faire l'objet de la solidarité financière pour le montant des prestations illicites correspondantes. De même, pour la société JOBALINE, la Cour retient la culpabilité de la société appelante pour la période du mois de juin 2006 eu 27 février 2007 pour un montant non déclaré.
Sur le fondement juridique de la poursuite, elle soutient que l'URSSAF devra soit limiter la solidarité financière au montant de la prestation illicite concernée par la procédure pénale soit justifier, au vu de l'article L 324-14 et L 324-14-1 du code du travail, que la prestation illicite est d'un montant égal ou supérieur à 20 000 Francs ou 3000 euros et de l'information préalable écrite du maître de l'ouvrage de la situation de travail clandestin.
Sur la qualification du donneur d'ordre, elle souligne que l'arrêt correctionnel retient que la société CLICK ORNA FARHO était le «'principal donneur d'ordre'» et non l'unique et enfin que les méthodes de calcul de l'URSSAF sont incompréhensibles ce qui caractérise une violation du principe du contradictoire.
L'URSSAF a développé par la voix de son représentant les conclusions visées par le greffe le 20 janvier 2016, tendant à la confirmation du jugement et à la condamnation de la SARL CLICK ORNA FAHRO au paiement d'une indemnité de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles.
L'URSSAF fait valoir, sur la solidarité financière, que celle-ci est mise en oeuvre sur la base de deux arrêts de la Cour d'Appel de PARIS devenus définitifs, sur le fondement de l'article L 8222-2 du code du travail en vigueur le 22 octobre 2009, date de la lettre d'observations, pour une période comprise dans la période de la prévention, en conséquence de quoi le redressement devra être validé. Sur le nombre de donneurs d'ordre, l'URSSAF précise qu' il résulte de l'arrêt ayant statué sur l'appel du jugement du 25 avril 2007 que la SARL CLICK était l'unique donneur d'ordre.
Sur le respect du contradictoire, l'URSSAF rappelle que les modalités de calcul du montant des cotisations dues par les deux sociétés sous-traitante pour l'emploi du personnel non déclaré mis à la charge de la société CLICK ORNA FAHRO a été communiqué par la lettre d'observation à la société appelante et effectué conformément à l'article
R 242-5 du code de la sécurité sociale.
SUR QUOI,
LA COUR :
SUR LA RÉGULARITÉ DE LA PROCÉDURE:
Considérant les dispositions de l'article R 243-59 dont il résulte qu'à l'issue du contrôle les inspecteurs de recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant, un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifié et la date de la fin du contrôle ;
Que ce document mentionne s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés ;
Considérant qu'en l'espèce l'URSSAF a communiqué à la société appelante, à l'appui de la lettre d'observations envoyée le 22 octobre 2009, le décompte de l'évaluation forfaitaire des bases de l'assiette des cotisations conformément aux dispositions de l'article R 242-5 du code de la sécurité sociale compte tenu de la facturation relevée et des constatations de visu;
Que l'assiette des cotisations a été fixée à 40 % du chiffre d'affaire hors taxe réalisé par la SARL CHANTEX de décembre 2005 à octobre 2006, comprise dans la prévention retenue par l'arrêt du 10 décembre 2008;
Qu'elle a été fixée à 40 % du chiffre d'affaire hors taxe réalisé par la SARL JOBALINE pour la période de «'juillet à octobre'» qui s'entend nécessairement de juillet à octobre 2006 au regard de la prévention retenue par le second arrêt qui s'étend de juin 2006 au 27 février 2007 ;
Qu'il s'en suit que le principe du contradictoire a été respecté, que le moyen tiré de l'annulation du redressement sera rejeté et le jugement confirmé sur ce point ;
SUR LE BIEN FONDE DU REDRESSEMENT:
Considérant les dispositions de l'article L 8222-2 du code du travail dans sa version en vigueur au 1er mai 2008, selon lesquelles toute personne condamnée pour avoir recouru directement ou par personne interposée aux services de celui qui exerce un travail dissimulé est tenu solidairement avec celui qui a fait l'objet d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé au paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires ainsi que des pénalités et majorations de retard dus par celui-ci au Trésor ou aux organismes de protection sociale;
Qu'il résulte de ce texte que la solidarité financière joue entre le donneur d'ordre et celui qui exerce directement ou indirectement un travail dissimulé dès lors qu'une condamnation est intervenue en conséquence de la constatation de l'infraction de travail dissimulé ;
Que cette infraction est en l'espèce établie en vertu du contrôle inopiné de police effectué le 27 février 2007 expressément relevé aux termes de la motivation des deux arrêts prononcés le 10 décembre 2008 devenus définitifs qui reconnaissent la SARL CLICK ORNA FARHO comme l'unique donneur d'ordre des deux sociétés sous-traitantes ;
Que les dispositions de l'article L 8221 et L 8222-2 du code du travail sont expressément visées et explicitées dans la lettre d'observations adressée le 22 octobre 2009 à la société appelante ;
Qu'il s'en suit que le redressement opéré est bien fondé, qu'il y a lieu de confirmer le jugement de ce chef et débouter la SARL CLICK ORNA FARHO de ses demandes
SUR LES FRAIS IRREPETIBLES :
Considérant que la présente instance est la conséquence de l'attitude dilatoire de la SARL CLICK ORNA FARHO qui cherche de manière délibérée à se soustraire à l'exécution de ses obligations légales au mépris des condamnations définitives qui s'imposent à elle ;
Qu'il y a lieu dans ces conditions et en équité de condamner la société appelante à régler à l'URSSAF une indemnité de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles vainement exposés par l'intimée ;
PAR CES MOTIFS:
Déclare la SARL CLICK ORNA FARHO recevable mais mal fondée en son appel ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Condamne la SARL CLICK ORNA FARHO à régler à l'URSSAF DE PARIS REGION PARISIENNE, aux droits de laquelle vient l'URSSAF D'ILE DE FRANCE une indemnité de 5000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Fixe le droit d'appel prévu par l'article R.144-10 alinéa 2 du Code de la sécurité sociale à la charge de l'appelant qui succombe, au 10e du montant mensuel du plafond prévu à l'article L.241-3, et condamne la SARL CLICK ORNA FARHO au paiement de ce droit ainsi fixé à la somme de 321,80 euros ( Trois cent vingt et un euros et quatre vingt centimes).
Le Greffier, Le Président,