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29/03/2016 | FRANCE | N°15/07000

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 29 mars 2016, 15/07000


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 29 Mars 2016



(n° , 05 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/07000



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Mai 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F13/18558





APPELANT

Monsieur [V] [J]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 2]

comparant en person

ne,

assisté de Me Virginie LANGLET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0207





INTIMÉE

SA ORANGE

[Adresse 2]

[Localité 1]

N° SIRET : 380 129 866 46850

représentée par Me Stépha...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 29 Mars 2016

(n° , 05 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/07000

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Mai 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F13/18558

APPELANT

Monsieur [V] [J]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 2]

comparant en personne,

assisté de Me Virginie LANGLET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0207

INTIMÉE

SA ORANGE

[Adresse 2]

[Localité 1]

N° SIRET : 380 129 866 46850

représentée par Me Stéphanie GUEDES DA COSTA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0461

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Février 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mademoiselle Marjolaine MAUBERT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Marjolaine MAUBERT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [V] [J], engagé par la société ORANGE à compter du 1er septembre 1992, en qualité d'ingénieur responsable d'études technico-économiques, au dernier salaire mensuel brut de 7170 euros, a été licencié pour motif personnel par lettre du 16 août 2013 énonçant le motif suivant :

' [...] Le maintien de notre relation contractuelle étant devenu impossible de par la position que vous avez délibérément adoptée malgré tous nos efforts, nous sommes au regret de vous notifier par la présente lettre, votre licenciement pour les motifs suivants :

- votre refus persistant d'occuper vos fonctions depuis le 15 octobre 2012 et de considérer votre manager comme votre responsable hiérarchique,

- vos absences injustifiées...'.

Monsieur [J] estime que son licenciement est nul pour avoir été prononcé durant une période de suspension du contrat de travail en raison d'un accident du travail.

Par jugement du 29 mars 2015, le Conseil de prud'hommes de PARIS a jugé que le licenciement de Monsieur [J] était justifié et l'a débouté de l'ensemble de ses demandes. Il a débouté la société ORANGE de ses demandes reconventionnelles.

Monsieur [J] en a relevé appel.

Par conclusions visées au greffe le 8 février 2015 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [J] demande à la cour d'infirmer le jugement et de constater que son licenciement est nul. En conséquence, à défaut de réintégration demandée, il sollicite la condamnation de la société ORANGE au versement de 360.000 euros bruts à titre de dommages et intérêts. A titre subsidiaire, il demande de constater que son licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse et de condamner en conséquence la société à lui payer 360.000 euros bruts à titre de dommages et intérêts. Enfin, il sollicite 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 8 février 2015 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, la société ORANGE sollicite la confirmation du jugement, sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande reconventionnelle. Ainsi, elle demande à la cour de juger que Monsieur [J] n'a pas respecté les engagements prévus dans le protocole transactionnel signé entre les parties le 31 octobre 2011 et de prononcer la résolution de la transaction pour inexécution. Elle demande ainsi à la cour d'ordonner le remboursement par Monsieur [J] de l'indemnité transactionnelle de l82.714,26 euros nets et, à tout le moins, d'ordonner la compensation avec d'éventuelles sommes qui seraient mises à la charge de la société ORANGE. Elle sollicite en outre 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS

Sur la demande tendant à faire constater la nullité du licenciement

Selon l'article L. 1226-7 du Code du travail, le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, autre qu'un accident de trajet, ou d'une maladie professionnelle est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie.

Pendant cette suspension, l'article L.1226-9 du code du travail précise que le contrat de travail ne peut être rompu que pour faute grave ou impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie. A défaut, le licenciement est nul.

Néanmoins, un employeur qui, au moment du licenciement, ignore que la suspension du contrat de travail du salarié est due à un accident du travail ou à une maladie professionnelle ne peut se voir reprocher d'avoir méconnu les dispositions de l'article L.1226-9 du code du travail.

En l'espèce, Monsieur [J] a été victime d'un accident de trajet en date du 3 juillet 2012, qui a donné lieu à plusieurs arrêts de travail prolongés du 1er juillet 2013 au 18 septembre 2013.

Monsieur [J] a assisté à l'entretien préalable au licenciement en date du 12 juillet 2013 pendant ses heures de sortie autorisées. Le 24 juillet 2013, il a été convoqué devant la commission paritaire et a été licencié par lettre du 16 août 2013.

Monsieur [J] considère que son licenciement est nul en ce qu'il a été licencié alors qu'il était en arrêt de travail du fait d'un accident du travail survenu le 12 juillet 2013 au cours de l'entretien préalable.

Cependant, il résulte des pièces versées au débat que le contrat de travail de Monsieur [J] était suspendu dans le cadre d'une prolongation d'un arrêt lié à un accident de trajet, qui ne relève pas du régime des accidents du travail. Aucun élément ne permet d'établir que le salarié a fourni à son employeur un arrêt de travail faisant état d'un accident du travail avant l'envoi de la lettre de licenciement. Les seules démarches du salarié en date du 29 juillet 2013 consistaient à demander à l'employeur de procéder à une déclaration d'accident du travail sur ses propres affirmations, et à l'aviser de sa demande auprès de la CPAM, de surcroît rejetée par courrier du 28 octobre 2013. Le salarié ne démontre pas avoir transmis à la société ORANGE son arrêt de travail initial pour accident du travail, peu important que la société ait adressé une déclaration d'accident du travail avec réserves à la CPAM par courrier du 2 août 2013, conformément à la demande du salarié. Elle a en effet précisé dans ce courrier que 'nous n'avons eu à aucun moment confirmation d'une quelconque constatation médicale de la prétendue lésion psychologique qui aurait été provoquée par cet entretien'.

En conséquence, Monsieur [J] sera débouté de sa demande de nullité du licenciement et le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

En outre, aux termes de l'article L. 3111-2 du code du travail, seuls sont concernés les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement. Ces critères cumulatifs impliquent que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l'entreprise.

En l'espèce, Monsieur [J] expose que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse. La lettre de licenciement comporte deux griefs. En premier lieu, elle se fonde d'une part, sur son'refus persistant' d'occuper ses fonctions de responsable des opérations depuis le 15 octobre 2012, et, d'autre part, sur son attitude consistant à considérer son manager comme son responsable hiérarchique. En deuxième lieu, la lettre mentionne ses absences injustifiées.

L'avenant au contrat de travail conclu le 31 octobre 2011 stipule qu''à compter du 5 septembre 2011, Monsieur [V] [J] est affecté au Centre de Recherches et Développement RESA, afin de s'assurer les fonctions de Responsable des Opérations (...) Les fonctions assurées dans le cadre de son poste sont de niveau G.'

La fiche poste produite par la société précise que le responsable des opérations a la charge des missions suivantes :

- piloter la programmation ;

- suivre, d'un point de vue qualitatif et quantitatif, la production pour le Centre de Recherche et de Développement (CRD), devenu OLN ;

- animer les différents métiers et process liés à la programmation et à la production du CRD devenu OLN ;

- assurer un suivi de transformation du CRD et de mettre en valeur les résultats du CRD devenu OLN.

Ce poste était de classification G, soit le plus haut niveau de la classification conventionnelle, et l'article 5 de l'avenant lui conférait le statut de cadre dirigeant.

Monsieur [J] estime qu'il était en droit de ne pas venir travailler au motif que l'employeur aurait vidé son poste de sa substance en l'affectant à un poste de responsable de l'animation technico-économique.

Suite à la nouvelle organisation Orange Labs Networks (OLN) au 15 octobre 2012, Monsieur [J] était en effet affecté au poste de responsable de l'animation technico-économique dont la fiche de poste démontre néanmoins que les activités étaient en continuité avec celles qu'il réalisait jusqu'alors.

De même, la lettre de mission dont se prévaut Monsieur [J] indique qu'il est chargé de 'la mise en oeuvre de la fonction pilotage technico-économique' tout en précisant par la suite que ces missions 'viennent en complément de [ses] activités actuelles.'.

Par ailleurs, son statut de cadre dirigeant de niveau G était maintenu, tout comme sa rémunération, qui restait en adéquation avec ses responsabilités.

De plus, Monsieur [J] estime qu'en vertu de son statut de cadre dirigeant, il n'était pas soumis à un contrôle, ni de la durée, ni de l'organisation de son travail. Cependant, il ressort des pièces versées au débat que Monsieur [J] n'occupait pas dans les faits la position de cadre dirigeant, qui suppose l'établissement d'un lien avec les organes de direction de la société. Il ne démontre pas par exemple détenir une fraction du capital de la société ou bénéficier d'une délégation de pouvoir permettant d'engager la société. Dès lors, Monsieur [J] occupait en réalité uniquement un poste de cadre autonome, peu important à cet égard les stipulations de l'avenant au contrat de travail et de la fiche de poste.

Monsieur [J] restait donc subordonné à son employeur, et celui-ci était en droit de lui demander de prendre contact avec Monsieur [D] [Q], son supérieur hiérarchique, afin de déterminer les objectifs pour 2013.

La société ORANGE ayant constaté à partir du 20 mai 2013 plusieurs absences de Monsieur [J] restées sans aucune justification à caractère professionnel, et ayant simultanément relevé son absence de volonté de poursuivre son travail, d'une part, et l'absence de justification de la fourniture de travail, d'autre part, elle était en droit de procéder au licenciement après plusieurs mises en demeure.

Il résulte de ce qui précède que le licenciement de Monsieur [J] est justifié et le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé.

Sur la demande reconventionnelle de la société

Aux termes de l'article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

En l'espèce, l'article 1er du protocole transactionnel signé par les parties'Monsieur [J] est affecté au CRD Resa en qualité de Responsable des Opérations suivant avenant régularisé. La bonne exécution de cet avenant par Monsieur [J] constitue un élément essentiel de cette transaction.'

La société ORANGE fait état du fait que le comportement de Monsieur [J] consistant à refuser d'occuper un poste qu'il a accepté d'occuper aux termes de la transaction constitue une violation de ladite transaction signée entre les parties.

C'est cependant à bon droit que le conseil de prud'hommes a jugé que le refus de Monsieur [J] d'occuper le poste qu'il avait accepté aux termes de la transaction ne peut lui être totalement opposé dans la mesure où la société ORANGE a par la suite subi une réorganisation et modifié le poste qui est devenu un poste responsable de l'animation technico-économique qui, certes, se situe, dans la continuité des activités initialement exercées mais néanmoins ne correspond pas poste visé dans la transaction.

La société ORANGE sera donc débouté de sa demande reconventionnelle.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

LAISSE les dépens à la charge de Monsieur [V] [J].

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 15/07000
Date de la décision : 29/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°15/07000 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-29;15.07000 ?
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