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23/03/2016 | FRANCE | N°13/05938

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 23 mars 2016, 13/05938


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU23 Mars 2016



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/05938



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 28 mai 2013 par le conseil de prud'hommes de MEAUX - section commerce - RG n° 11/00693





APPELANTE

SAS KUEHNE+NAGEL

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 333 583 466

représentée par M

e Alexis GINHOUX, avocat au barreau de PARIS, P0237 substitué par Me Nicolas DEMTCHINSKY, avocat au barreau de PARIS,







INTIME

Monsieur [W] [Q]

[Adresse 2]

[Localité 2]

né le [Date naissance...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU23 Mars 2016

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/05938

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 28 mai 2013 par le conseil de prud'hommes de MEAUX - section commerce - RG n° 11/00693

APPELANTE

SAS KUEHNE+NAGEL

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 333 583 466

représentée par Me Alexis GINHOUX, avocat au barreau de PARIS, P0237 substitué par Me Nicolas DEMTCHINSKY, avocat au barreau de PARIS,

INTIME

Monsieur [W] [Q]

[Adresse 2]

[Localité 2]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 3] (ALGERIE)

comparant en personne, assisté de Me Jérôme BOURICARD, avocat au barreau de MELUN substitué par Me Sara CLAVIER, avocat au barreau de MELUN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/035560 du 18/10/2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 décembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Agnès DENJOY, conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine SOMMÉ, président

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Madame Agnès DENJOY, conseiller

Greffier : Madame Marion AUGER, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine SOMMÉ, président et par Madame Marion AUGER, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par simple lettre, M. [W] [Q] a été engagé par la SAS Hays Logistique France, devenue la SAS Kuehne + Nagel France, à compter du 26 décembre 2000, pour y exercer les fonctions de préparateur de commandes, statut ouvrier groupe 2, coefficient 110, en contrepartie d'une rémunération mensuelle brute de 7 200 Francs pour 35 heures par semaine. Par lettre du 6 juin 2001, l'employeur a confirmé le salarié dans des fonctions d'agent de quai, statut ouvrier groupe 2, coefficient 110, moyennant une rémunération mensuelle brute de 7 575 Francs pour 35 heures par semaine. Par lettre du 26 décembre 2006, la société Kuehne + Nagel France, l'employeur a confirmé le salarié dans des fonctions de cariste, 2 ème degré, statut ouvrier, coefficient 120, moyennant une rémunération mensuelle brute de 1 310.82 € pour 151.37 heures par mois, hors prime d'ancienneté.

L'entreprise qui employait, au jour de la rupture, plus de dix salariés, est assujettie à la convention collective des transports routiers et des activités auxiliaires du transport.

M. [W] [Q] a été victime de trois accidents de travail, les 17 janvier 2003, 9 août 2006 et 26 mars 2008.

La qualité de travailleur handicapé a été reconnue au salarié, le 3 mars 2008.

L'intéressé n'a pas repris son travail depuis le dernier accident de travail survenu le 26 mars 2008.

Lors de la visite médicale obligatoire du 27 janvier 2010, le médecin du travail a émis l'avis suivant :

«Première visite prévue par le code du travail, une inaptitude au poste d'agent de ligne est à envisager. Etude de poste à prévoir. En attendant, monsieur [Q] peut travailler sur un poste administratif ou d'accueil sans manutention, ni geste répétitif et sans conduite».

Lors de la deuxième visite médicale obligatoire du 11 février 2010, le médecin du travail a émis l'avis suivant :

«Deuxième visite prévue par le code du travail.

Confirmation de l'avis d'inaptitude définitive à son poste.

Les capacités restant à monsieur [Q] permettent d'envisager un poste de reclassement sur un poste administratif ou d'accueil adapté'».

Par lettre recommandée du 3 novembre 2010, la société Kuehne + Nagel France a convoqué M. [W] [Q] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 10 novembre 2010.

Un licenciement pour cause réelle et sérieuse a été notifié à l'intéressé par courrier recommandé du 23 novembre 2010 , rédigé en ces termes :

« Par courrier recommandé avec accusé de réception et par courrier simple en date du 3 novembre 2010, nous vous avons convoqué pour un entretien préalable en vue d'une éventuelle procédure de licenciement.

Vous étiez assisté de M. [N] [Y], membre du comité d'établissement du site, lors de l'entretien qui a eu lieu le mercredi 10 novembre 2010 à 10h30, dans le bureau de M. [Q] [U], directeur de sites logistiques, situé dans les locaux Kuehne+ Nagel du site de [Localité 4].Nous vous rappelons les faits que nous avons évoqués ensemble au cours de cet entretien :

Suite à votre arrêt de travail au titre « d'accident du travail » du 27 mars 2008 au 25 janvier 2010, vous avez été reçu pour une première visite médicale de reprise du travail le 27 janvier 2010. Le médecin du travail a déclaré : « 1 ère visite prévue par le code du travail, une inaptitude au poste d'agent de ligne est à envisager. Etude de poste à prévoir. En attendant, Mr [Q] peut travailler sur un poste administratif ou d'accueil sans manutention, ni gestes répétitifs et sans conduite. 2 ème visite le 11/02/10 à 13h30 ».

Puis vous avez été reçu en deuxième visite, le 11 février 2010. Le médecin du travail a confirmé votre inaptitude à votre poste : « 2 ème visite prévue par le code du travail. Confirmation d l'avis d'inaptitude définitive à son poste. Les capacités restantes à Mr [Q] permettent d'envisager un poste de reclassement sur un poste administratif ou d'accueil adapté ».

Le 16 février 2010, une recherche de postes, conformes à l'avis médical délivré par le Médecin du travail, a été lancée au sein du groupe, dans les établissements Kuehne+ Nagel France.

En date du 8 mars 2010, nous vous avons fait parvenir trois propositions de postes disponibles au sein de notre groupe, et pouvant être en adéquation avec les restrictions médicales émises par le médecin du travail.

Ces postes (sous réserves d'un avis médical d'aptitude définitif) étaient les suivants :

1. Employé customer services ' agence de [Localité 5]

2. Employé administratif d'exploitation ' agence de [Localité 6]

3. Assistant commercial ' agence d'[Localité 7]

Vous nous avez donné votre accord sur la proposition n°2 et un entretien a été organisé avec le directeur de site de [Localité 6] le vendredi 16 mars 2010.

Malheureusement, ce reclassement n'a pu aboutir, le poste ayant été pourvu dans l'intervalle.

Conformément à l'article L 1226-4 du code du travail, nous avons repris le versement de votre salaire en date du 12 mars 2010.

Vous avez été reçu le 27 juillet 2010 par Mme [T] [F], responsable de la mission Handicap Kuehne+ Nagel, M. [K] [C], consultant du cabinet Consult Handi, et Monsieur [E] [R], directeur d'exploitation logistique du site de [Localité 4].

Le compte rendu de cet entretien est le suivant :

- Vous avez réalisé deux bilans de compétences ayant conclu à une réorientation administrative, et vous avez bénéficié en janvier 2008 d'un aménagement de poste avec l'aide du SAMETH et d'un ergonome : la société Kuehne+ Nagel a mis à votre disposition du matériel améliorant votre confort visuel : achat d'une video-loupe, d'une loupe à main éclairante (LED) x 5, et d'un monoculaire.

- Un accompagnement au retour à l'emploi avec l'aide du cabinet Consult Handi, vous a été proposé. Cet accompagnement visant à évaluer vos acquis, votre savoir et vos aptitudes, à développer vos compétences, et à identifier de nouvelles orientations professionnelles compatibles à la fois avec vos projets de vie et vos contraintes liés à votre handicap.

Vous avez accepté cet accompagnement et vous avez eu un entretien individuel avec M. [K] [C] dès le 27 juillet 2010. Quatre autres entretiens avec le cabinet Consult Handi ont été programmés en dates des 4, 13 et 31 août, et le 22 septembre 2010.

Le 5 août 2010, lors de la réunion extraordinaire des délégués du personnel du site de [Localité 4], les démarches de reclassement vous concernant leur ont été exposées, et ils ont approuvé les propositions de reclassement interne que nous souhaitions vous adresser, après leur consultation :

Par courrier en date du 6 août 2010, nous vous avons proposé :

4. Un poste d'assistant de site ' agence de [Localité 8]

Poste malheureusement pourvu dans l'intervalle par un salarié également concerné par une procédure de reclassement.

5. Un poste d'attaché commercial ' agence [Localité 9]

6. Un poste d'employé administratif Route Europe ' agence d' [Localité 10])

Par courrier du 24 août 2010

7. Un poste d'assistant service achat/immobilier ' agence d'[Localité 11]

Vous avez refusé ces propositions par courrier en date du 2 septembre 2010.

Le 23 septembre 2010, une nouvelle réunion extraordinaire des délégués du personnel du site a été organisée afin de les tenir informé de votre situation, et d'un nouveau poste disponible au sein du groupe.

Le 1er octobre 2010, nous avons envisagé le poste suivant :

8. Employé administratif d'exploitation ' Agence de [Localité 12]

A cet effet, vous avez été reçu le jeudi 21 octobre 2010 à 10h30 sur le site de [Localité 12], par M. [V] [W], directeur de site logistique et Mme [T] [F], responsable Mission Handicap.

Lors de cet entretien, la partie sur écran pouvait être aménagée, mais lors du test de lecture, vous avez confirmé ne pas pourvoir lire de document en format A3.

M. [V] [W] et Mme [T] [F] vous ont expliqué que tous les postes administratifs disponibles à ce jour, au sein du groupe, vous avaient été proposés.

Parallèlement à nos recherches de reclassement en interne, nous avons initié, avec le cabinet Consult Handi, un accompagnement en vu d'un reclassement externe.

A ce titre, il vous a été proposé un poste d'agent administratif à la Fédération Française d'Athlétisme à [Localité 13] : proposition qui vous a été faites par courrier le 12 août 2010. M. [C] (consultant du cabinet) s'est proposé de vous aider à travailler votre curriculum vitae et votre lettre de motivation, ce poste étant tout à fait compatible avec votre handicap. Vous n'avez pas donné suite à cette proposition.

De plus, vous avez été informé par courrier du 9 septembre 2010 qu'un forum de recrutement pour les personnes en situation de handicap était organisé par le groupe Carrefour à [Localité 4].

Vous nous avez confirmé ne pas y être allé.

Lors de cet entretien du 10 novembre 2010, nous vous avons exposé toutes les démarches et les postes de reclassement qui ont été étudiés et proposées, en tenant compte de votre inaptitude médicale.

Par conséquent, et au vu de ce qui précède, nous sommes donc dans l'impossibilité de vous maintenir dans nos effectifs, et avons le regret de prononcer à votre encontre un licenciement pour cause réelle et sérieuse motivé par votre inaptitude à votre poste de travail et l'impossibilité de reclassement dans un poste compatible avec le certificat dressé par le médecin du travail.

Compte tenu de votre ancienneté et de votre statut, votre préavis contractuel est de 3 mois.

Votre période de prévis ne sera pas effectuée car vous n'êtes pas en mesure de l'exécuter, mais cependant elle vous sera indemnisée.

Cette période débutera à la date de première présentation de ce courrier et la rupture de votre contrat de travail interviendra à l'issue de cette période de préavis.

Nous vous informons une nouvelle fois que vous bénéficiez d'un droit au DIF de 114 heures.

Si vous en faites la demande avant la date d'expiration de votre préavis, vous

pouvez bénéficier d'une action de formation, d'un bilan de compétence ou d'une action de valorisation des acquis de l'expérience.

Les sommes correspondant à votre droit au DIF seront alors affectées au financement de cette action selon les dispositions légales en vigueur et de l'article

L 6323-17.

En l'absence de demande dans le délai imparti, vous pourrez mobiliser vos heures, soit auprès du Pôle Emploi en cas de prise en charge, soit auprès d'un nouvel employeur dans les deux ans suivant votre embauche.

['] ».

Estimant ne pas être rempli de ses droits, M. [W] [Q] a saisi, le 27 juin 2011, le conseil de prud'hommes de Meaux, lequel, par jugement rendu le 28 mai 2013, a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, en condamnant la société Kuehne + Nagel France à verser au salarié les sommes suivantes :

' 19 197,72 € à titre d'indemnité en vertu de l'article L 1226-15 du code du travail,

' 1 599, 81 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,

' 950,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Ces sommes ont été assorties des intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, et la capitalisation des intérêts a été ordonnée.

Il a, également, été ordonné la remise, sous astreinte journalière de 10 €, de l'attestation pôle emploi pour une durée définie de deux mois et le salarié a été débouté, du surplus de ses demandes, les dépens étant à la charge de l'employeur.

Le 19 juin 2013, la société Kuehne + Nagel France a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions visées par le greffe le 1er décembre 2015 et soutenues oralement, la société Kuehne + Nagel France demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter M. [W] [Q] de l'intégralité de ses prétentions, en supportant la charge des dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions visées par le greffe le 1er décembre 2015 et soutenues oralement, M. [W] [Q] sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et que la procédure de licenciement n'avait pas été respectée.

Le salarié demande la condamnation de son employeur au paiement des sommes suivantes.

' 38 395.44 € à titre d'indemnité en vertu de l'article L 1226-15 du code du travail,

' 1 599.81 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,

' 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées oralement lors de l'audience des débats.

SUR QUOI LA COUR

Sur la rupture du contrat de travail

En application de l'article L.1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement doit comporter l'énoncé de faits précis et matériellement vérifiables, à défaut de quoi le licenciement doit être jugé sans cause réelle et sérieuse.

Aux termes de l'article L.1226-10 du code du travail, «Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin de travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise '.'»

M. [W] [Q] reproche à l'employeur de ne pas rapporter la preuve que les délégués du personnel aient été consultés, en application des dispositions susvisées.

La société Kuehne + Nagel France, pour sa part, affirme avoir respecté cette obligation.

La consultation des délégués du personnel constitue une exigence dont l'omission rend le licenciement illicite et entraîne la sanction civile édictée à l'article L.1226-15 du code du travail.

Cet avis doit être recueilli après que l'inaptitude du salarié en conséquence d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle a été constatée, dans les conditions prévues par l'article R. 4624-31 du code du travail, et avant toute proposition d'un poste de reclassement approprié aux capacités du salarié.

En l'espèce, suite au dernier accident de travail survenu le 27 mars 2008, M. [W] [Q] a été déclaré inapte par la médecine du travail, lors de la deuxième visite médicale obligatoire du 11 février 2010, dans les termes suivants :

«Deuxième visite prévue par le code du travail.

Confirmation de l'avis d'inaptitude définitive à son poste.

Les capacités restant à monsieur [Q] permettent d'envisager un poste de reclassement sur un poste administratif ou d'accueil adapté».

Suite à cet avis d'inaptitude, l'employeur a, par courrier du 19 février 2010, soumis au salarié les trois propositions de reclassement suivantes :

- Employé customer services, sur le site de [Localité 5]

- Employé administratif d'exploitation , sur le site de [Localité 6] (91)

- Assistant commercial, sur le site d' [Localité 7] (31)

Le 25 février 2010, M. [W] [Q] a accepté le poste d'employé administratif d'exploitation à [Localité 6], un entretien a été fixé au 12 mars suivant mais, dans le même temps, ce poste s'est trouvé pourvu en raison du plan social en cours sur le site de [Localité 14] (77) entraînant la suppression de 36 postes, et le reclassement des salariés concernés .

Ces postes ont, toutefois, été proposés au salarié avant que l'employeur n'ait sollicité l'avis des délégués du personnel qu'il n'a avisés que les 30 juillet et 13 septembre 2010, en vue des réunions extraordinaires fixées les 5 août et 23 septembre 2010.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société Kuehne + Nagel France n'a pas respecté les obligations lui incombant en matière de consultation des délégués du personnel, prévue à l'article L. 1226-10 du code du travail, que cette omission rend illicite le licenciement pour inaptitude de M. [W] [Q] et entraîne la sanction civile édictée à l'article L. 1226-15 du code du travail.

Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail

1. Sur l'indemnité en application de l'article L 1226-15 du code du travail

L'article L 1226-15 du code du travail prévoit que lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte prévues aux articles L 1226-10 à L 1226-12, en cas de refus de réintégration par l'une ou l'autre des parties, le tribunal octroie une indemnité au salarié, qui ne peut être inférieure à douze mois de salaires. Cette indemnité se cumule avec l'indemnité compensatrice et le cas échéant, l'indemnité spéciale de licenciement prévue à l'article L 1226-14.

Compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [W] [Q], de son ancienneté et des conséquences de la rupture pour l'intéressé, il y a lieu de confirmer le jugement déféré qui a alloué au salarié une somme de 19 197.72 € à titre d'indemnité due en application de l'article L 1226-15 du code du travail.

2. Sur le non respect de la procédure de licenciement

M. [W] [Q] sollicite le paiement d'une somme de 1 599.81 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, en application de l'article L 1235-2 du code du travail dès lors que la convocation à l'entretien préalable lui a été présentée le 6 novembre 2010 pour un entretien préalable fixé au 10 novembre 2010, sans respecter le délai de cinq jours ouvrables stipulé à l'article L 1232-2 du code du travail.

Cependant, la demande en paiement de l'indemnité prévue à l'article L1226-15 du code du travail englobe, nécessairement, la demande en paiement de l'indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement, de sorte que les deux indemnités ne peuvent se cumuler. M. [W] [Q] sera débouté de ce chef de demande.

Le jugement déféré sera infirmé à ce titre.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La société Kuehne + Nagel France qui succombe supportera la charge des dépens d'appel, en versant à l'intimé une indemnité de 2 500 € au titre des frais irrépétibles exposés, en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a alloué à M. [W] [Q] une somme de 1 599.81 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement;

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions;

Y ajoutant,

CONDAMNE la SAS Kuehne + Nagel France à verser à M. [W] [Q] une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE la SAS Kuehne + Nagel France aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 13/05938
Date de la décision : 23/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°13/05938 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-23;13.05938 ?
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