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17/03/2016 | FRANCE | N°14/21200

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 17 mars 2016, 14/21200


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 2



ARRET DU 17 MARS 2016



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/21200



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2014 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/08331





APPELANTES



FEDERATION NATIONALE DU PERSONNEL DE L'ENCADREMENT DE L'INFOR MATIQUE DES ETUDES DU CONSEIL ET DE L'INGENIERIE
>prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 1]



FEDERATION NATIONALE DES PERSONNELS DES SOCIETES D'ETUDES DE CONSEIL ET DE PREVENTION CGT

pri...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRET DU 17 MARS 2016

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/21200

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2014 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/08331

APPELANTES

FEDERATION NATIONALE DU PERSONNEL DE L'ENCADREMENT DE L'INFOR MATIQUE DES ETUDES DU CONSEIL ET DE L'INGENIERIE

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 1]

FEDERATION NATIONALE DES PERSONNELS DES SOCIETES D'ETUDES DE CONSEIL ET DE PREVENTION CGT

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentées par Me Aurélie LAMY, avocat au barreau de PARIS, toque : G0456, avocat postulant

Représentées par Me Philippe BRUN, avocat au barreau de REIMS, avocat plaidant

INTIMEE

SAS VIVEO FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125, avocat postulant

Représentée par Me Jean MARTINEZ, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 janvier 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine MÉTADIEU, Président

Madame Isabelle SHOONWATER, Conseiller appelé à compléter la chambre par ordonnance de roulement en date du 15 décembre 2015

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, Président et par Madame FOULON, Greffier.

**********

Statuant sur l'appel interjeté par la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt à l'encontre d'un jugement rendu le 20 mai 2014 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :

- rejeté la fin de non recevoir soulevée par la Sas Viveo France

- débouté la fédération nationale du personnel de l'encadrement, de l'informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie et la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt de l'ensemble de leurs demandes ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné les fédérations Fiefci-Cfe-Cgc et Fnpsecp-Cgt aux dépens ;

Vu les conclusions en date du 21 janvier 2015 de la fédération nationale du personnel de l'encadrement, de l'informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie et de la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt qui demandent à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 mai 2014 par la tribunal de grande instance de Paris,

et de :

Statuant à nouveau,

- juger qu'il n'existe aucune cause économique permettant l'engagement d'une procédure de licenciement économique collectif

- constater l'inexistence de la procédure de licenciement économique collectif litigieuse ou/et son caractère frauduleux et en prononcer l'annulation

En tout état de cause,

- condamner la Sas Viveo France à verser à la fédération nationale du personnel de l'encadrement, de l'informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie et à la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt chacune la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions en date du 17 mars 2015 par la Sas Viveo France qui demande à la cour

de :

A titre principal,

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions autres que celles ayant rejeté la fin de non recevoir qu'elle a soulevée

- juger prescrite l'action par application de l'article L.1235-7 du code du travail

A défaut,

- juger l'action des syndicats irrecevable par l'effet du jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 11 janvier 2011

Subsidiairement,

- juger que la procédure de licenciement ne saurait encourir l'annulation à raison de la cause économique

En conséquence,

- débouter les syndicats appelants de l'intégralité de leurs demandes

En tout état de cause,

- juger abusive l'action des syndicats appelants et les condamner in solidum à lui verser la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts

- condamner les syndicats appelants in solidum au paiement de la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE, LA COUR

FAITS ET PROCÉDURE

La Sas Viveo France a pour activité la vente, l'installation et la maintenance de logiciels bancaires.

Le 23 décembre 2009, elle a été rachetée par le groupe Temenos.

Le 5 février 2010, la Sas Viveo France a présenté à son comité d'entreprise un projet de licenciement économique pour sauvegarder sa compétitivité et celle du groupe.

Ce projet qui prévoyait la suppression de 64 postes, a fait l'objet d'une note économique et d'un plan de sauvegarde de l'emploi incluant un plan de volontariat, un plan de reclassement interne et un plan de reclassement externe.

La procédure d'information-consultation du comité d'entreprise a commencé le 10 février 2010 pour s'achever le 13 octobre 2010.

Par assignation du 3 novembre 2010, le comité d'entreprise a saisi, selon la procédure à jour fixe, le tribunal de grande instance de Paris pour qu'il soit notamment jugé qu'aucune cause économique ne justifiait l'engagement d'une procédure de licenciement et pour obtenir l'annulation de celle-ci.

Par jugement en date du 11 janvier 2011, le tribunal a débouté le comité d'entreprise de l'ensemble de ses demandes.

Ce jugement a été infirmé par cette cour.

Sur pourvoi formé par la Sas Viveo France, la chambre sociale de la cour de cassation, par arrêt rendu le 3 mai 2012, a cassé et annulé en toutes ses dispositions cette dernière décision.

Le comité d'entreprise n'a pas saisi la cour de renvoi.

Par une nouvelle assignation en date du 10 juin 2013, la fédération nationale du personnel de l'encadrement, de l'informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie ainsi que la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt ont fait assigner la Sas Viveo France devant le tribunal de grande instance et sollicité, au visa des articles L.1233-2, L. 1233-3, L. 1233-8 et suivants, L. 1233-30 et L.1235-10 du code du travail, de la théorie de l'inexistence, de l'adage «la fraude corrompt tout», ce avec exécution provisoire, l'annulation de la procédure de licenciement économique mise en oeuvre et la condamnation de la Sas Viveo France au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La fédération nationale du personnel de l'encadrement, de l'informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie et la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt ont relevé appel de ce jugement.

MOTIVATION

Sur la forclusion :

Selon l'article L. 1235.7 du code du travail, toute contestation portant sur la régularité ou la validité du licenciement se prescrit par douze mois à compter de la dernière réunion du comité d'entreprise ou, dans le cadre de l'exercice par le salarié de son droit individuel à contester la régularité ou la nullité du licenciement, à compter de la notification de celui-ci. Ce délai n'est opposable au salarié que s'il en a été fait mention dans la lettre de licenciement.

La Sas Viveo France fait valoir que les syndicats appelants sollicitent la nullité de la procédure de licenciement et que, en application des dispositions ci-dessus rappelées, leur action est irrecevable dès lors que :

- il est acquis que, à la suite du jugement du tribunal de grande instance du 11 janvier 2011, devenu définitif, la procédure de consultation du comité d'entreprise s'est terminée le 13 octobre 2010, date de la dernière réunion tenue par cette instance,

- cette réunion constitue le point de départ du délai de 12 mois applicable à l'action en annulation de la procédure,

- la présente action a été engagée le 10 juin 2013 alors que le délai de forclusion était expiré.

Elle soutient que la circonstance selon laquelle le grief de nullité ne vise pas la validité du plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas de nature à soustraire l'action des syndicats à la forclusion.

C'est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a jugé que l'article L.1235-7 du code du travail n'est applicable qu'aux seules contestations susceptibles d'entraîner la nullité de la procédure de licenciement collectif pour motif économique en raison de l'absence ou de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, que la contestation ne portant pas sur la validité du plan, l'action était recevable.

Sur l'autorité de la chose jugée :

La Sas Viveo France expose que l'action des syndicats se heurte à une décision définitive relative à la même cause, qu'en effet elle a pour objet de détourner l'arrêt de la cour de cassation en date du 3 mai 2012 à la suite duquel le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 11 janvier 2011 est devenu définitif, que les syndicats présentent la même argumentation que le comité d'entreprise dans la première affaire, que cette demande a été définitivement tranchée.

Selon la Sas Viveo France ce jugement a créé une situation de droit et de fait qui doit être respectée par tous, le jugement du 11 janvier 2011 étant opposable aux tiers, et donc aux syndicats appelants, quand bien même ils n'étaient pas parties à l'instance.

Le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 11 janvier 2011 en ce qu'il a définitivement jugé qu'il n'appartient pas au juge, saisi par le comité d'entreprise, d'une demande d'annulation du plan de sauvegarde de l'emploi en raison de l'absence de cause économique l'article L.1235-10 du code du travail, de l'insuffisance de ce plan, et du caractère irrégulier de la procédure de licenciement, 'd'apprécier les motifs économiques invoqués par l'employeur', est désormais opposable de ce chef aux syndicats appelants, qui ne peuvent ignorer ni ce jugement ni l'arrêt du 3 mai 2012 de la cour de cassation, tous deux entrés dans l'ordonnancement juridique.

Toutefois, force est de constater que leur argumentation diffère de celle présentée par le comité d'entreprise, en ce qu'ils invoquent en outre la fraude et l'inexistence du motif économique.

Si la demande de la fédération nationale du personnel de l'encadrement, de l'informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie et de la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt est irrecevable comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée s'agissant de l'annulation de la procédure de licenciement sur le fondement de l'article L.1235-10 du code du travail, en revanche, il y a lieu de dire leur action fondée sur la fraude et l'inexistence du motif économique recevable.

Sur la fraude et l'inexistence du motif économique :

Les syndicats appelants font valoir que le litige collectif relève du juge du droit commun auquel il incombe de vérifier l'existence d'une cause économique, laquelle en l'espèce n'existe pas compte tenu la vigueur du secteur bancaire au moment où a été engagée la procédure de licenciement collectif et des résultats de Temenos, Viveo Group Sa et Viveo France, nullement fragilisés.

La théorie de l'inexistence, applicable en droit de la familles comme au droit des contrats et à la procédure civile essentiellement, permet de résoudre une difficulté à laquelle la théorie des nullités ne permet pas de répondre.

Elle peut être retenue lorsque le vice est si grave que l'acte n'est non plus entaché de nullité mais purement et simplement inexistant.

Or ainsi que le relève à juste titre les premiers juges, retenir en l'espèce la théorie de l'inexistence comme le sollicitent les appelants, conduit nécessairement à procéder à l'examen du motif économique alors même que la procédure de licenciement, ainsi que cela a été rappelé précédemment, ne peut être annulée en considération de la cause économique du licenciement sur le fondement de l'article L.1235-10 du code du travail, la validité du plan de sauvegarde de l'emploi étant indépendante de la cause du licenciement.

Les syndicats appelants exposent enfin que les mesures envisagées n'avaient pour seul but que de renforcer la position de la société Temenos, acquéreur de la société Viveo France le 23 décembre 2009, sur le marché mondial et en aucun cas de sauvegarder de la compétitivité de cette dernière, amenée selon eux à disparaître lorsque l'ensemble des contrats de maintenance en cours que la société Temenos est obligée d'honorer concernant le progiciel Vbank, produit concurrent créé et mis en place par Viveo.

La seule absence de motif économique ne peut suffire à caractériser la fraude à la loi, laquelle, comme le rappelle à juste titre, le tribunal, suppose la réunion d'un élément matériel mais également d'un élément intentionnel.

Cet élément intentionnel ne peut se déduire du seul fait que les difficultés économiques alléguées par l'employeur ou la menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise ne seraient pas avérées.

La fraude de la part de la Sas Viveo France n'est pas caractérisée.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la fédération nationale du personnel de l'encadrement, de l'informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie et la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt de l'ensemble de leurs demandes.

Sur la demande reconventionnelle de la Sas Viveo France :

Il n'est pas démontré que les appelants ont fait un usage abusif de leur droit d'agir et d'interjeter appel, alors même qu'il s'agit de la seule instance initiée par la fédération nationale du personnel de l'encadrement, de l'informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie et la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt.

Il convient donc de débouter la Sas Viveo France de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Sur l'article de l'article 700 du code de procédure civile :

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la Sas Viveo France les frais non compris dans les dépens qu'il a exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions

Déboute la Sas Viveo France de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la fédération nationale du personnel de l'encadrement, de l'informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie et la fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention Cgt aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 14/21200
Date de la décision : 17/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°14/21200 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-17;14.21200 ?
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